I can't believe this is happening ✗ Dacre

Tom n’en revenait toujours pas. Il fallait dire qu’il ne s’était pas passé énormément de temps depuis la fameuse nuit. Il avait rompu avec Jessica le premier Janvier au matin quand elle était passée par l’appartement pour dormir quelques heures. Autant dire que ça ne s’était pas passé aussi bien qu’il l’aurait voulu, surtout que s’il avait pu choisir, il aurait voulu éviter d’avoir Mark et Dacre dans la pièce d’à côté.

S’il était honnête avec lui-même, il savait que sa rupture avec Jessica n’était probablement la pire chose qui lui soit jamais arrivé, mais ce n’était pas le fait d’être à nouveau célibataire qui le gênait, non, c’était la raison qui l’avait poussé à l’être à nouveau.

Il aimerait bien qu’on lui explique encore une fois comment il s’était retrouvé pris au piège comme ça, parce que les souvenirs que sa mémoire lui fournissait ne lui plaisaient pas le moins du monde. Il était sur que même bourré – même au point de ne plus réussir à marcher et d’être obligé de ramper pour avancer – il n’aurait jamais apprécié la compagnie de Dacre. Alors l’apprécier au point de lui faire promettre de ne plus jamais le quitter ? Non. Impossible.

Et pourtant, ils en étaient bien là. Tom, la victime d’un serment inviolable qui l’empêchait – physiquement – de s’éloigner de plus de dix mètres d’un gars qu’il avait traumatisé à Poudlard. Même dans ses pires cauchemars il n’aurait jamais pu imaginer un tel scénario. Le pire dans tout ça, c’était que même s’il espérait toujours trouver une solution pour lever le sortilège, il était quasiment certain que c’était impossible, ou en tout cas que ça n’avait jamais été réussi avant.

« C’est vraiment là que tu vis ? »

Croyez-le ou non, Tom n’avait pas dit ça sur un ton irrespectueux. Au contraire, Dacre vivait dans un quartier plutôt sympa. Bon, bien sur, ce n’était rien en comparaison de l’appartement que Tom venait de quitter, mais il avait imaginé pire.

Ils avaient passé quelques heures à discuter – Tom avait hurlé, Dacre avait essayé de le calmer et ils avaient fini par prendre une décision à peu près constructive – et avaient décidé que Tom allait emménager chez Dacre. Ce n’était vraiment pas la situation idéale, clairement, mais c’était l’option la moins catastrophique à laquelle Tom pouvait penser. Ils ne pouvaient pas s’éloigner de plus de dix mètres l’un de l’autre, ils avaient quoi comme choix ? Tom avait strictement refusé que Dacre vienne habiter chez lui parce qu’il avait énormément de potes qui passaient souvent à l’improviste chez lui et il ne se voyait pas leur expliquer pourquoi Dacre avait soudainement remplacé Jessica. Il ne voulait même pas penser à l’éventualité. En plus de ça il considérait ça assez pénible comme ça de devoir supporter Dacre, il n’allait pas en plus le laisser s’incruster chez lui, utiliser ses affaires, fouiller dans son appartement…

Ugh, non. Jamais de la vie. On dit qu’entre deux maux il faut choisir le moindre, et Tom avait choisi. C’était donc ainsi qu’il s’était retrouvé à prendre le strict minimum de son appartement le jour de l’an et à suivre Dacre jusqu’à son appartement. Il suivit le jeune Auror à l’intérieur et resta sans voix sur le pallier.

« Ok. Je retire ce que j’ai dit. Ça va pas le faire du tout. »

Tom était assez ordonné comme personne et il aimait bien quand chaque chose était à sa place. Autrement dit, il n’était pas sur de pouvoir s’habituer à un système de rangement où les assiettes sales étaient tranquillement posées sur la cheminée. Il soupira et leva les yeux au ciel, essayant de ne pas paniquer. Ok, il avait assez crié comme ça, et ça ne servirait à rien de continuer. Qu’il le veuille ou non, il allait devoir vivre ici, il allait devoir s’y faire.

Il traina sa valise pour faire le tour de l’appartement et nota où se trouvaient la chambre de Dacre, la salle de bains, les toilettes, la cuisine et…

« Pitié dis-moi que tu as une chambre d’ami ? »

Dacre, qui avait bien été obligé de le suivre pendant qu’il faisait le tour de l’appartement se trouvait à présent quelques mètres derrière lui. Tom commençait à regretter d’avoir choisi de vivre ici au lieu de chez lui. La chambre d’ami n’était pas située si loin que ça de sa chambre à lui et s’ils avaient bougé les lits le plus près possible du mur, ils auraient probablement pu dormir chacun dans leur chambre. Bon, il devait bien l’avouer, il y aurait toujours eu le problème du réveil, il fallait toujours qu’ils aient une certaine distance de marge sinon ils risquaient de rester coincés et d’être obligés d’abattre un mur. Et il n’en revenait pas d’avoir déjà pensé à ce genre de détail, comme si cette situation allait pouvoir durer.

Enfin pour le problème de la chambre, au fond de lui, il savait très bien comment ça allait finir. Ils allaient être obligés de dormir dans la même pièce. Urgh. Il se mit à murmurer doucement des insultes en se maudissant encore un peu plus pour la nuit passée.

« Ok, ok, ce n’est pas… dramatique. Je suppose qu’on devra faire avec. »

Il soupira un grand coup, essayant de se convaincre que ce n’était pas le bout du monde. Il était déjà au bord de la crise de nerf. Il n’en revenait toujours pas. Toute cette situation était purement ridicule. Il se promit de ne plus jamais toucher à l’alcool de sa vie et fut pris d’une irrésistible envie de boire une bière.

Il était foutu.

« Ok je prends le lit et tu dormiras par terre. Tu dois bien avoir un matelas ou quelque chose. »

Non, ce n’était pas une question. Tom n’était vraiment pas d’humeur à discuter de ce genre de choses, il n’en revenait toujours pas d’être obligé de devoir discuter de ce genre de choses. En plus de ça, il avait passé assez de temps avec Dacre à Poudlard pour savoir qu’il acceptait toujours tout sans rien dire. Il était trop renfermé pour se révolter.

Tom soupira à nouveau et posa sa valise près du lit.

Tom n’avait pas l’habitude que l’on s’oppose à ses décisions. Alors forcément, il ne s’était vraiment pas attendu à ce que Dacre en particulier ne dise quoique ce soit. En plus il ne lui demandait pas non plus la lune ? Il voulait juste un lit dans lequel dormir, il n’avait pas l’impression de jouer les divas non plus. Après tout, tout ça ce n’était pas de sa faute, il savait que ce n’était pas non plus la faute de Dacre mais, inconsciemment, il le blâmait quand même, parce qu’il devait bien blâmer quelqu’un et que c’était la première personne qui lui était venu à l’esprit.

Aussi, forcément, quand Dacre se rebella, Tom resta quelques secondes bouche-bée, incapable de prononcer le moindre mot. Il n’y eut qu’un léger son exprimant sa surprise qui sortit et il fixa Dacre pendant un petit moment, attendant de voir s’il était sérieux ou pas.

« Eh c’est pas de ma faute si tu tiens pas l’alcool. Et je suis pas responsable de toutes les conneries que fait Mark. »

Il commençait déjà à perdre patience et se rendit compte à quel point leur cohabitation allait être dure vu comment elle partait. Certes, ce n’était que leur premier jour, et ils étaient encore tous les deux sur les nerfs après s’être réveillés avec probablement la pire surprise au monde. Sans compter qu’ils avaient encore tous les deux la gueule de bois – fichu nouvel an. Il soupira et essaya de se calmer, mais ce calme ne fut que de courte durée. En effet, quelques secondes plus tard, Dacre lui apprenait une meilleure nouvelle encore.

« Quoi !? Comment tu peux ne pas avoir d’autre matelas ? »

Il jura quand Dacre tourna les talons et essaya de s’en aller, et il allait le suivre pour le forcer à l’écouter et lui rappeler qu’ils étaient encore loin d’en avoir fini avec cette discussion quand il eut une meilleure idée. Il resta exactement au même endroit et croisa les bras, les sourcils froncés, attendant patiemment que Dacre se prenne le champ de force en pleine face.

Il ne put empêcher un petit sourire malicieux d’étirer ses lèvres quand il vit Dacre reculer soudainement en se tenant le nez. Le serment inviolable qui le liait physiquement au jeune Auror était surement la pire chose qui lui soit jamais arrivée mais il n’y avait pas que des côtés négatifs, il avait maintenant un moyen plutôt original de le martyriser si l’envie lui en prenait.

Et il avait le sentiment que l’envie lui en prendrait souvent si Dacre continuait à se comporter comme ça. Il avait imaginé leur cohabitation déjà assez difficile comme ça en pensant que Dacre se laisserait marcher dessus, mais alors si en plus de ça il n’avait pas l’intention de lui rendre la vie facile… Décidément Tom ne comprenait pas pourquoi Dacre ne pouvait tout simplement pas s’écraser comme il l’avait toujours fait et pourquoi il décidait subitement de se rebeller, au pire moment possible pour Tom. A croire qu’il faisait tout pour lui rendre la vie infernale.

Il suivit finalement Dacre et se retint de dire quoique ce soit quand ce dernier mit les coussins et autres par terre pour pouvoir s’asseoir. Il soupira longuement, essayant vraiment de prendre sur lui pour ne pas exploser. Mais il n’arrivait pas à se souvenir d’une pire journée dans sa vie, et rien que de penser qu’il n’avait pas encore entièrement réalisé… Il avait déjà pensé à tout ce que ce serment inviolable impliquait pour leur – non, pas leur, pour sa – future vie mais il était sur qu’il avait oublié des détails logistiques et qu’ils allaient leur revenir en pleine face un jour ou l’autre.

« Arrête de te plaindre, ça nous avance pas. » Déclara-t-il d’un ton exaspéré tout en ayant l’impression que Dacre ne l’écoutait pas le moins du monde. « Eh, tu m’… »

Mais il fut interrompu en plein milieu de sa question, Dacre lui donnant au moins la réponse au passage. Il enfouit son visage dans ses mains en entendant le jeune Auror continuer à parler. Oh. Mon. Dieu. Est-ce qu’il avait toujours parlé comme ça ? Parce que si c’était le cas, Tom comprenait pourquoi il avait fait de sa vie un véritable enfer quand ils étaient tous les deux à Poudlard. Sérieusement, qui parlait comme ça ? Il cherchait les coups là aussi, ce n’était pas de la faute de Mark et de ses copains.

Tom rit doucement quand Dacre fit sa réflexion, et força un sourire sarcastique sur ses lèvres tout en fixant le jeune homme.

« Bien sur, oui, je vois, j’étais à Gryffondor alors forcément je suis allergique à tout ce qui ne touche pas de près ou de loin au Quidditch ? » Il pencha légèrement la tête sur le côté, son sourire toujours aux lèvres. « Pour ton information je devenu suis écrivain, je pense pouvoir supporter d’être entouré de livres pendant quelques heures, mais merci de t’inquiéter pour moi. »

Rajouta-t-il d’un ton sarcastique avant de décroiser les bras et de s’approcher doucement. Il s’assit sur le canapé qui se trouvait à côté du fauteuil où Dacre était lui-même assis et enfouit à nouveau son visage dans ses mains, massant son front et essayant de faire disparaitre son mal de crâne.

« Je ne dormirai pas par terre. C’est hors de question. » Déclara-t-il finalement après avoir relevé la tête pour regarder Dacre. Fallait pas déconner non plus, c’était l’invité ici, il n’allait pas être obligé de dormir par terre non plus. Il n’en revenait toujours pas d’avoir simplement accepté la situation – certes il n’avait pas le choix mais il faisait quand même son possible pour la rendre la moins douloureuse et difficile possible – alors fallait pas trop lui en demander non plus.

Il examina rapidement le canapé sur lequel il était assis et ne mit pas longtemps à comprendre qu’il ne passerait jamais dans le couloir menant à la chambre de Dacre. Donc, c’était déjà une option de moins, le canapé était trop loin de la chambre pour permettre à l’un de dormir dans le lit et l’autre sur le canapé. Ils pouvaient toujours aller chercher un matelas chez Tom mais il n’était pas sur qu’il y aurait la place dans la chambre pour le sien, en plus de ça, il faudrait qu’ils fassent appel à des professionnels pour les aider à ramener le matelas jusqu’ici – le métro ou le taxi étaient deux options à oublier – et ils ne pourraient probablement pas le faire venir aujourd’hui.

En plus de ça il n’était pas sur de vouloir voir les regards des déménageurs venant apporter un matelas à deux hommes habitant visiblement ensemble.

Il se gratta la tête et soupira à nouveau en se rendant compte à quel point sa vie était devenue merdique littéralement du jour au lendemain.

« Crois-moi, j’ai autant envie que toi, si ce n’est plus, de trouver une solution pour remédier à… ça. » Dit-il en faisant un geste vague censé les désigner l’un après l’autre. « Mais on va avoir du mal à y aller aujourd’hui et je pense qu’il faudrait surtout décider de ce qu’on va faire en attendant d’avoir trouvé une solution. Alors je sais que tu te crois plus intelligent que tout le monde mais crois-le ou non, on risque d'être coincé comme ça pendant un moment. »

Il se força à ne pas penser à l'éventualité où ils seraient coincés comme ça pour toujours, se laissa retomber en arrière et reposa sa tête sur le haut du canapé. Il sortit une cigarette d’une de ses poches et l’alluma sans prendre la peine de demander à Dacre si la fumée ou l’odeur le dérangeait. Après tout, il était chez lui maintenant non ? Oh, bon sang, il avait vraiment besoin d’une cigarette. Il se leva et se mit en quête de quelque chose qui pourrait faire office de cendrier et après avoir hésité à se servir d’un des pulls de Dacre, il décida d’être raisonnable et prit un gobelet en plastique qui trainait quelque part.

Tom laissa échapper un petit rire quand Dacre reprit la parole et murmura quelque chose qui ressemblait bien à un « Si tu le dis… » entre ses dents. Il avait presque oublié à quel point Dacre pouvait se montrer arrogant et supérieur, et dire qu’on leur avait parfois reproché d’être un peu durs avec le jeune homme à Poudlard. Dacre aurait du savoir que personne n’aimait se faire traiter d’abruti, surtout quand on ne l’était pas, et c’était le cas de Tom. Il avait passé pas mal de temps à Poudlard à faire croire qu’il ne valait pas mieux que ses potes, mais au fond, il s’était toujours trouvé meilleur qu’eux.

Autant dire qu’il n’appréciait pas tellement le ton supérieur de Dacre. Bien sur qu’il se croyait le plus intelligent des deux dans la pièce. Tom n’avait même pas le cœur de le contredire ou de lancer une dispute à ce sujet, et il se rendit compte qu’il allait devoir prendre sur lui plus de fois qu’il ne l’avait initialement prévu s’il voulait rendre cette cohabitation à peu près vivable.

Tom écarquilla les yeux et fixa Dacre qui semblait perdu dans la contemplation de la rue à travers la fenêtre. Mais de quoi est-ce qu’il parlait ? Il venait juste de faire une remarque sur la météo. Sérieusement ? « Eh, mais tu m’écoutes au moins ? »

Il ne savait pas pourquoi, mais il avait comme l’impression que Dacre ne prendrait jamais la peine de répondre à cette question, et pourtant Tom avait la réponse.

Tom posa son coude sur son genou et laissa sa joue reposer contre son poing, fixant Dacre d’un air tout sauf amusé. Il n’aimait pas l’impression que Dacre ne prenait pas tout ça au sérieux mais il n’était pas sur d’aimer plus le jeune homme quand celui-ci proposait des solutions. Tom prit dix secondes pour bien comprendre ce que le jeune auror proposait et quand ce fut le cas il explosa tout bonnement de rire.

Ses nerfs étaient entrain de lâcher, c’était la seule explication possible. « Je te demande pardon ? Tu ne viens quand même pas de proposer ce que je pense que tu viens de proposer ? » Il resta bouche-bée pendant encore quelque chose et, voyant que Dacre était on ne peut plus sérieux, passa sa langue sur ses lèvres et se contenta de lui lancer un sourire défiant.

Si c’était comme ça qu’il voulait le jouer, d’accord. « Ok, pas de problème. Je prendrai le côté droit. » Bien sur, il s’attendait à ce que Dacre lui annonce d’une seconde à l’autre qu’il le faisait juste marcher et qu’il allait bien entendu accepter de dormir par terre. Parce que c’était à lui de le proposer et pas à Tom. Dacre ne dit rien mais Tom écarta le sujet de son esprit, il savait qu’il était plus têtu que Dacre et que le jeune homme abandonnerait quand il verrait à quel point Tom était sérieux et prêt à dormir dans le même lit que lui.

Tom leva les yeux au ciel devant le faux sourire de Dacre. Il détestait quand les gens souriaient comme ça, il avait toujours l’impression qu’on le prenait pour un con. Ce qui, dans le cas du jeune auror, était vrai, et donc deux fois plus désagréable encore. Il ne bougea pas d’un pouce cependant. Il aurait aimé dire qu’il n’avait pas faim juste pour contrarier Dacre – par principe – mais au moment où il ouvrit la bouche, son estomac grogna assez fort pour être entendu dans un rayon d’au moins dix mètres – fichu serment inviolable.

Il referma donc la bouche et se contenta d’hausser un sourcil en fixant Dacre, l’air de lui demander s’il avait un problème.

_ Quel genre ? .... Les livres que tu écris.

Tom fronça les sourcils et étudia le visage de Dacre, essayant de deviner s’il cherchait à lancer cette conversation pour se moquer de lui ou un autre truc du genre. Il n’en avait pas l’impression, mais ça ne voulait pas dire grand-chose. Enfin, il soupira et se leva finalement, sans dire un mot il suivit le jeune auror jusque dans la cuisine et poussa un cri d’exclamation en voyant la vaisselle sale empilée.

« Comment est-ce que tu peux vivre ici ? » Il laissa échapper une légère plainte de dégoût, sortit sa baguette et commença à nettoyer la vaisselle sale. Il laissa sa magie faire le boulot et se retourna finalement pour faire face au jeune homme. Il s’appuya contre le mur de la cuisine et croisa les bras sur sa poitrine.

« Alors, qu’est-ce qu’il y a à manger ? » Il avait été habitué à ce que Jessica lui fasse la cuisine alors il espérait que Dacre était au moins aussi bon parce que lui était littéralement incapable de faire cuire un œuf sans risquer de mettre le feu à l’immeuble tout entier. Il s’écarta du mur l’espace de quelques secondes, juste le temps d’ouvrir le frigo, d’en sortir un soda, de l’ouvrir et de commencer à boire.

Il avait terriblement envie de descendre, choisir le premier bar sur lequel il tombait et d’y passer la nuit à se mettre minable. Le souvenir de la cuite de la nuit précédente ne lui suffisait pas pour couper cette envie. En revanche, l’idée de devoir trainer Dacre avec lui réussissait à lui donner la force de ne pas sortir. Il avait l’impression qu’il allait passer pas mal de temps cloitré ici, parce que s’il devait trainer un boulet pareil partout où il allait… Les endroits où il allait accepter qu’on le voit publiquement allaient tout de suite diminuer.

Alors oui, ils avaient intérêt à trouver une solution pour remédier à ce serment inviolable, et vite. Tom se massa doucement le front en soupirant et releva finalement les yeux pour regarder Dacre. « J’écris des romans. » Il essaya vraiment de ne pas rendre sa réponse agressive, mais il pouvait sentir sa mâchoire se resserrer malgré lui. Il ne savait même pas pourquoi, mais il supposait que c’était parce qu’il s’attendait à ce que Dacre lui décoche une remarque cinglante et qu’il commençait physiquement à s’y préparer.

Il attendit quelques secondes et finit par se détendre. « Tu sais, on est pas obligés de faire ça. » Il s’éclaircit la gorge et fit un nouveau geste pour les désigner tous les deux vaguement. « Je veux dire, faire semblant de s’intéresser à la vie l’un de l’autre. C’est pas parce qu’on va être obligé de passer du temps ensemble qu’on est ami. »

Il savait qu’il abusait, qu’il ne facilitait pas la situation, mais pour être honnête il était encore énervé qu’ils soient dans cette situation, et il ne pouvait pas s’empêcher de blâmer au moins un peu Dacre. Il n’était juste pas d’humeur à faire un effort pour se rendre aimable ou pour faciliter la tâche au jeune auror. Mais plus que tout il détestait qu’on le force à faire quoique ce soit, et il avait l’impression qu’il allait devoir apprécier, ou au moins supporter, la compagnie de Dacre.

Et c’était quelque chose qu’il ne voulait pas être forcé à faire. Alors oui, il ne rendait la situation facile à personne, mais il avait des raisons d’être de mauvaise humeur et de ne faire aucun effort. Et il refusait d’écouter la petite voix dans sa tête que Dacre avait autant de raison que lui de se plaindre.

« Je voulais juste mettre les choses au clair. » Il leva les mains comme s’il essayait de se défendre avant de boire une nouvelle gorgée de son soda.

Tom détestait l’impression qu’il avait que Dacre n’écoutait pas un mot de ce qu’il disait. Il ne se montrait peut-être pas aimable mais la moindre des choses, c’était de faire semblant d’être intéressé quand quelqu’un vous parlait. Dacre, quant à lui, ne semblait pas avoir envie de se donner cette peine et Tom du se retenir de lui lancer une remarque cinglante juste pour attirer son attention. Il n’avait pas l’habitude qu’on l’ignore, et il détestait vraiment ça.

Il le regarda cuisiner en silence. Peut-être que Dacre avait comprit le message et qu’ils pourraient en rester là. Ce fut pour ça que Tom fut entièrement pris de court quand le jeune auror partit dans son monologue, prenant à peine le temps de respirer entre chaque phrase. Tom le fixa simplement, fronçant les sourcils pendant les moments où il se sentait encore insulté.

Et après les gens se demandaient pourquoi il ne l’aimait pas ? En revanche, il n’était pas sur d’apprécier le fait que ce soit réciproque. Il avait l’habitude que les gens l’apprécient, il n’était pas détestable en soi, et il avait ses fans. Il ne pensait pas être une mauvaise personne, alors pourquoi est-ce que Dacre ne l’aimerait pas ? Tom avait ses raisons pour ne pas aimer Dacre, sérieusement, il était arrogant, coincé et il avait la fâcheuse habitude de prendre tout le monde pour des cons. Mais pourquoi est-ce que Dacre ne l’aimait pas ? Ça n’avait aucun sens dans l’esprit de Tom.

« Parfait. » Répondit-il d’un ton sec qui montrait bien qu’il était agacé. Il n’avait vraiment d’autre à répondre et à l’instant présent, il voulait juste avoir le moins de chose à faire avec Dacre. Même s’il savait que ça allait s’avérer extrêmement difficile.

Il marmonna dans sa barbe en jetant de temps en temps des coups d’œil à Dacre pour voir où il en était de la préparation de leur repas et en continuant son soda. Il commençait à avoir faim mais également à sérieusement se demander si Dacre était potentiellement capable d’empoisonner la part de Tom en laissant la sienne intacte. Il fut interrompu dans ses pensées par la voix du jeune homme.

Il laissa tomber sa tête en arrière et soupira longuement, essayant de se calmer. Il détestait quand les gens faisaient ça, c’était probablement un des trucs les plus insupportables au monde. Quand les gens parlaient d’une personne présente à la troisième personne, en pensant qu’ils ne pouvaient pas les entendre. Ses parents le faisaient constamment quand il était petit, ils parlaient toujours de lui et de Henry quand Tom était dans la même pièce et pouvait les entendre, et il détestait cette impression que les gens ignoraient complètement sa présence, comme s’il ne comptait pas.

« Est-ce que tu pourrais arrêter de faire ça ? » Déclara-t-il les dents serrées. Il prit une autre gorgée de son soda et le reposa peut-être un peu plus brutalement que nécessaire sur le comptoir. Il pinça l’arête de son nez et passa sa langue sur ses lèvres. Il savait qu’il avait juste besoin de s’énerver parce qu’il n’avait pas encore accepté la situation, mais tout de même, Dacre avait le don d’être irritant et ça n’aidait pas, mais alors pas du tout.

« Je suis là, ok ? Je peux t’entendre, tu peux me poser directement la question plutôt que de faire comme si je n’existais pas. »

Il abusait probablement de lui demander de ne pas lui parler pour ensuite lui demander de ne pas l’ignorer, mais il n’y pouvait rien. Il n’essayait pas d’être juste ou même d’être aimable, il essayait juste de réaliser ce qui était entrain de se passer et tout ce que ça impliquait sans imploser ou taper une véritable crise de nerf. Et c’était beaucoup plus dur que ça n’en avait l’air. Alors il savait qu’il n’était pas malin de partir du mauvais pied comme ça avec quelqu’un avec qui il allait devoir passer plus de temps que nécessaire, mais il ne pouvait pas s’en empêcher.

A l’instant, il ne voulait pas faire des efforts pour rendre leur situation meilleure, il ne voulait pas qu’il y ait de situation. Il voulait juste pouvoir rentrer chez lui, s’asseoir sur son canapé en lisant le journal, ou un bouquin, ou regarder la télé même, pourquoi pas. Tout sauf être coincé ici avec un homme qu’il ne connaissait que de Poudlard et pour qui il ressentait une antipathie visiblement mutuelle.

Il espérait toujours que ce n’était qu’un cauchemar et qu’il allait se réveiller. Ou alors que Mark lui avait juste fait une blague – vraiment pas drôle – et que l’effet du sort se dissiperait de lui-même dans peu de temps.

_ Ont-ils toujours une fin heureuse ?

Tom mit quelques secondes à comprendre de quoi il était entrain de parler, et quand ce fut enfin le cas, il ressentit soudainement le besoin intense de fouiller la cuisine en quête d’alcool. Il était quasiment certain que Dacre n’en aurait pas, ou s’il en avait, il l’avait bien planqué, mais il n’avait pas grand-chose à perdre à chercher.

Il commença à fouiller dans des placards au hasard, tombant sur une collection assez impressionnante de boîte de conserve qu’il avait réussi à garder assez longtemps pour qu’elles aient dépassées leur date de péremption. Après avoir fouillé deux placards sans succès il se retourna vers Dacre.

« Pourquoi tu veux savoir ? Tu es entrain de me dire que la réponse t’intéresse vraiment ? » Il laissa échapper un petit rire et lui lança un sourire moqueur avant de continuer sa fouille. Toujours rien. Il aurait du s’en douter. Enfin maintenant qu’il avait vu les placards remplis de nourriture ayant dépassé leur date de péremption, il préféra jeter le reste de son soda sans vérifier la date. Il préférait ne pas savoir maintenant qu’il en avait bu mais ne voulait pas non plus prendre de risque.

« Et moi qui croyait que tu étais au-dessus de ce genre de futilités. » Finit-il d’un ton sarcastique, parce qu’il savait que Dacre se croyait au-dessus de tout le monde. Et il l’était peut-être, Tom ne le connaissait pas assez pour juger, tout ce qu’il savait c’était qu’il n’aimait pas ça. Que ce soit vrai ou pas, ça n’excusait pas l’air dédaigneux et hautain qu’il avait toujours.

Il referma le dernier placard et se tourna vers Dacre, sa bouche tordue en une grimace qui n’aurait vraiment pas du être aussi mignonne qu’elle l’était. Il retroussa ses lèvres et finit par aller s’asseoir à la table. Il passa sa main dans ses cheveux, légèrement embarrassé et finit par relever les yeux vers Dacre.

« Ecoute… » Il essaya de s’excuser mais pour une raison inconnue – ce n’était pas du tout par orgueil – les mots refusèrent de sortir. Il finit par abandonner ce qu’il avait essayé de commencer à dire et par répondre simplement à sa question.

« Généralement oui. J’ai écrit quelques nouvelles avec une fin tragique mais je n’ai jamais essayé de les faire publier. Je pense que le monde est déjà assez rempli de tragédie pour que ce soit la peine que j’en rajoute. » Il croisa les bras sur sa poitrine et s’installa un peu plus au fond de son siège.

Il ne discutait jamais de ses romans, enfin à part avec sa maison d’édition mais ce n’était pas pareil, ça ne comptait pas vraiment. Aucun de ses amis n’aimait la littérature, ou n’en avait quoique ce soit à faire.

Il n’était pas sur que ce soit une bonne idée de discuter bouquin avec Dacre, mais là encore, il n’était pas sur que ce soit une bonne idée de discuter de quoique ce soit avec le jeune auror, alors maintenant qu’il avait lancé le sujet ?

« J’en déduis que tu n’as jamais rien lu de ce que j’ai écrit. Tu méprises tous les livres ou bien alors juste les miens ? » Il essaya de ne pas rendre son ton trop agressif, mais il avait l’impression qu’il ne pouvait pas s’en empêcher. Enfin il lança un sourire malicieux au jeune homme pour essayer de lui faire comprendre que pour une fois – étrangement – il ne cherchait pas forcément la confrontation.

Tom essaya de se concentrer sur son assiette pour éviter de croiser le regard de Dacre. Il ne savait pas pourquoi il avait soudainement essayé de se montrer gentil avec le jeune homme, ou en tout cas aimable. Bon d’accord, au moins poli et sociable. Dans tous les cas il n’était pas sur de vouloir voir Dacre le fixer avec ses yeux de merlan frit. Tom fut donc surprit quand il remarqua le petit sourire sur les lèvres du jeune auror quand il daigna enfin lever les yeux pour le remercier silencieusement de lui avoir apporté son assiette et ses couverts.

Peut-être que le jeune homme n’était pas si terrible que ça, après tout, ils n’avaient même pas passé une journée entière ensemble encore, si ça se trouve ils allaient même bien s’entendre ? Tom n’osait vraiment pas y croire, mais il se sentait déjà un peu plus optimiste que tout à l’heure. Il savait qu’il n’y avait aucune chance qu’ils deviennent meilleurs amis, après tout, il devait bien y avoir une raison pour qu’il l’ait martyrisé à Poudlard, non ? Il devait avoir une bonne raison de ne pas l’aimer, là comme ça, la raison ne lui revenait pas, mais il en avait probablement eut une.

Ou alors peut-être que Mark en avait eut une et qu’il avait juste suivi. Il préférait ne pas y penser. C’était du passé de toute façon, ce qui est fait est fait. Il attaqua donc son omelette, timidement au début – il n’avait toujours pas entièrement éloigné la théorie de l’empoisonnement, preuve qu’il lisait vraiment beaucoup trop de Poirot.

Tom se figea quasiment complètement quand Dacre complimenta même ses livres. Bon, il savait qu’il n’aurait pas du se sentir flatté étant donné que le jeune auror n’avait même pas lu ses livres, mais il ne pouvait pas s’empêcher de l’être. Juste un peu. Ou peut-être était-ce juste la satisfaction de voir qu’il avait réussi à calmer le jeu. Il ne savait pas vraiment quelle option il préférait pour être honnête.

« Er… » Il allait essayer de remercier maladroitement Dacre quand un hibou débarqua dans l’appartement et eut au moins l’avantage de l’interrompre avant qu’il ne dise quelque chose d’idiot. Il fronça les sourcils et jeta un coup d’œil vers la fenêtre par laquelle le hibou venait d’entrer. Il regarda Dacre aller collecter le courrier et se surprit à se demander s’il y avait moins de dix mètres entre lui et le hibou et s’il ne ferait pas mieux de se lever et de suivre Dacre, au moins quelques pas, pour lui permettre d’aller collecter la lettre.

Le temps qu’il se rende compte qu’il était entrain de penser à ce genre de détail, Dacre avait déjà atteint le hibou et récupéré la lettre. Le hibou était reparti aussi vite qu’il était arrivé et Tom se reconcentra sur son omelette. Il savait à quel point c’était désagréable de lire quelque chose et d’avoir l’impression que quelqu’un essayait de le lire avec vous. En plus de ça, ils allaient tous les deux probablement devoir abandonner une bonne partie de leur intimité dans les prochains jours/semaines, il essayait de lui donner un peu de répit avec sa correspondance au moins.

Tom sursauta et failli s’ouvrir le palet avec sa fourchette en entendant soudainement la voix de Mark dans la pièce d’à côté. Il se demanda d’abord ce que Mark foutait bien ici et aussi comment il allait pouvoir lui expliquer que lui était ici à diner tranquillement avec Dacre. Il savait exactement ce que Mark penserait de la situation et il ne tenait pas vraiment à entendre son point de vue. Il était sur le point de lancer son assiette encore à moitié pleine n’importe où juste pour essayer de donner l’impression qu’il était juste passé vite fait pour quelque chose d’aussi innocent que parler boulot, ou vérifier qu’il était rentré en un seul morceau après la fête de la veille, quand il comprit que Mark n’était pas réellement présent.

Il ne bougea pas, il n’essaya pas de regarder d’où le son provenait. Il savait ce que Dacre venait de recevoir et il savait que ce n’était jamais agréable et il savait surtout que c’était toujours humiliant et il n’avait pas envie de rendre la situation encore plus inconfortable pour Dacre en le regardant pendant que Mark lui hurlait dessus. Il ne pouvait déjà pas lui faire croire qu’il n’avait rien entendu, la situation était déjà assez bizarre comme ça.

Quand finalement Tom releva les yeux, il remarqua immédiatement la mâchoire contractée du jeune homme ainsi que la façon dont il essayait d’éviter son regard et de faire comme si rien ne s’était passé. Tom aurait du faire comme si rien ne s’était passé non plus, il aurait croire le fait que Dacre n’en ait rien à faire. A la place, il déclara :

« Mark peut être un vrai con des fois. » Il ne savait même pas comment c’était sorti. Il s’était déjà disputé avec Mark, bien sur, et c’étaient des choses qu’il lui avait déjà dit, mais ce n’était jamais quelque chose dont il avait parlé en dehors de son cercle d’ami. Et même s’ils vivaient désormais ensemble, Dacre ne faisait vraiment pas partie de ses amis. Il baissa la tête et avala un morceau de son omelette, se demandant pourquoi il avait dit ça.

Il lui fallut un petit moment pour réaliser qu’il le pensait juste sincèrement. Il avait été témoin des « blagues » de Mark pendant des années, pendant tout leur temps à Poudlard il avait été là quand Mark s’était amusé à traumatisé les autres élèves, et ça n’avait jamais réellement dérangé Tom. Il avait même parfois – souvent – participé. S’ils le faisaient, c’était parce qu’ils avaient leur raison, parce que c’était juste ce que les garçons faisaient quand ils n’aimaient pas quelqu’un et qu’ils voulaient s’amuser.

Mais maintenant il avait grandi, et plus important encore, il n’était pas là avec Mark, et pour la première fois il voyait ce que ça devait faire d’être de l’autre côté, du côté de ceux qui recevaient les mauvais traitements de Mark et de sa bande. Alors oui, peut-être qu’il se sentait un peu coupable, surement même, mais ce n’était pas comme s’il allait pouvoir se rattraper.

Il se leva et rempli son verre d’eau du robinet. Il le but d’une traite et se resservit avant d’aller se rasseoir. Il joua avec sa fourchette pendant quelques minutes, hésitant à manger. Ce n’était pas immangeable, si Tom était tout à fait honnête, il devait même avouer que c’était pas mauvais. Ok c’était même bon. Ce n’était pas de la grande cuisine, fallait pas exagérer, ce n’était qu’une omelette, mais bon, déjà il n’avait pas essayé de l’empoisonner et c’était un progrès en soi.

Il laissa finalement retomber sa fourchette sur la table. Il n’avait plus faim. Il releva les yeux vers Dacre et détourna aussitôt les yeux. Il but une nouvelle gorgée d’eau et reposa le verre probablement un peu plus fort que nécessaire, mais sur le coup, il ne s’en rendit pas compte. Quand il croisa à nouveau le regard de Dacre il leva les yeux au ciel, soupira et se laissa retomber en arrière dans sa chaise.

« Tu peux m’expliquer pourquoi tu laisses Mark te traiter comme ça ? Vous n’êtes pas tous les Aurors ? » Il n’avait pas voulu dire ça sur un ton aussi irrité qu’il l’avait fait, mais il n’y pouvait rien. Il savait qu’il n’avait aucun droit d’être agacé, mais Dacre le regardait avec son air de chien battu et Tom se sentait coupable, comme si c’était de sa faute s’il se faisait maltraiter par Mark parce qu’il s’avérait qu’ils étaient meilleurs amis. En vérité, le regard de Dacre était probablement normal, mais la culpabilité de Tom lui jouait des tours.

Tom avait l’impression que Dacre lui reprochait le comportement de Mark et il ne voulait pas en être tenu pour responsable. Ce n’était quand même pas de sa faute, si ? « Si tu arrêtais de t’écraser aussi, et que tu lui tenais tête, il arrêterait de te traiter comme ça. C’est de ta faute aussi. »

Ok, c’était sorti tout seul. Mais c’était vrai aussi, si Dacre arrêtait de s’allonger par terre pour faciliter la tâche à Mark et lui permettre de s’essuyer les pieds sur lui aussi, Mark aurait probablement arrêté de l’emmerder depuis longtemps. Mais non, il fallait qu’il ne dise rien et qu’il accepte en silence. Forcément aussi que c’était tentant pour quelqu’un comme Mark – et Tom refusa d’écouter quand une petite voix dans sa tête rajouta « Et comme toi ».

Peut-être qu’il se cherchait juste des excuses, et qu’il essayait juste de défendre son copain au passage, Tom n’en savait rien. Ce qu’il savait, c’était qu’il n’avait aucun droit de se montrer agressif envers Dacre alors qu’il n’avait véritablement rien fait pour le mériter. Il détestait juste cette impression que tout était soit tout noir ou tout blanc, il savait que Mark pouvait être con, mais il n’était pas le seul fautif. Il y avait toujours deux versions d’une même histoire et il n’aimait pas la façon dont la situation était présentée, comme si Mark – et lui – avaient tous les torts.

Tom savait qu'il avait eut tort de s'en prendre comme ça à Dacre. Après tout le jeune homme n'avait strictement rien fait, au contraire, il ne faisait que subir les agressions constantes de Mark, et Tom n'avait probablement aucun droit de le lui reprocher ou de lui dire que c'était de sa faute. Il aurait pu ne pas autoriser Mark à lui marcher dessus, c'était vrai, mais Mark aurait tout aussi bien pu ne pas essayer. Il savait très bien qu'il aurait du trouver que son ami était plus fautif dans l'histoire que le jeune homme avec lequel il était coincé, mais il n'arrivait pas à se l'admettre totalement. Parce que si Mark était fautif, alors il l'était aussi.

« C'est ça. » Souffla-t-il d'un ton qui sous-entendait clairement qu'il trouvait l'excuse de Dacre bidon. Bien sur s'il avait essayé de se défendre ça n'aurait servi à rien, c'était toujours ce que les victimes se disaient, non c'est pas de ma faute, ça n'aurait rien changé si j'avais essayé de l'arrêter. Tom en avait assez entendu dans sa vie. Et il connaissait assez Mark, si Dacre avait été assez convaincant il lui aurait foutu la paix. Non ? Il voulait le croire, mais il avait assisté trop souvent à des scènes où son meilleur ami profitait d'autres personnes sans écouter un seul mot de leur protestations pour en être totalement certain.

Et puis merde. Il baissa les yeux et regarda partout dans la pièce, essayant d'ignorer le regard perçant du jeune homme qui refusait de le quitter. Il se rendait compte que c'était impoli de fixer les gens comme ça ? Tom essaya de le fixer à son tour, prenant un air agacé, mais après quelques secondes les yeux bleus-gris du jeune homme devinrent trop pour lui et il détourna à nouveau le regard.

Il but une nouvelle gorgée d'eau et se gratta la nuque doucement, cherchant un endroit à fixer dans la pièce de façon à ne plus sentir le regard cuisant de Dacre sur lui. Il pouvait arrêter de le fixer comme ça? Il avait l'impression d'être mis totalement à nu et ça lui déplaisait très fortement.

Finalement, Tom ne put s'empêcher de regarder à nouveau Dacre. Qu'est-ce qu'il venait de lui dire ? Il avait comprit ce à quoi Tom jouait, mais ce n'était pas tellement ça que le jeune écrivain avait retenu. Non, c'était plutôt le fait qu'il ait énervé Dacre encore plus que Mark à Poudlard. Il n'avait pourtant pas été aussi affreux que ça avec lui, enfin un peu, mais pas plus que Mark ! Ça n'avait pas de sens dans l'esprit du jeune homme, aussi il décida de ne rien dire et de laisser Dacre lui expliquer ce qu'il avait voulu dire par là.

Il le regretta dés que Dacre eut continué. Il secoua la tête d'un air désapprobateur et laissa échapper un léger rire en levant les yeux au ciel. C'était la meilleure celle-là. Il l'avait énervé parce qu'il avait refusé de jouer les rats de bibliothèque, c'était ça qu'il essayait de lui dire ? Qu'il s'était senti agacé que Tom n'exploite pas « son potentiel » ? ses professeurs lui avaient déjà assez dit comme ça pendant sept ans, il n'avait pas besoin qu'un type comme Dacre vienne le juger en plus. Il ne savait pas ce que ça avait été pour lui, il n'avait pas eu le choix. Il n'aurait jamais supporté de vivre comme un outsider, comme Dacre. Ça n'avait jamais été une option pour lui, alors oui, entre bouffer et être bouffé il avait vite choisi et il refusait que le jeune homme le juge pour ça.

Il détestait les gens qui le jugeaient sans rien savoir de lui. Surtout qu'en l'occurrence, Dacre n'avait vraiment rien à dire sur le sujet, ils n'étaient pas amis et Tom n'appréciait pas la liberté qu'il prenait en lui parlant comme ça.

Tom se releva brusquement et finit son verre d'eau avant de le laisser dans le lavabo. Quand il se tourna vers Dacre, son visage exprimait assez bien la colère et l'agacement qu'il ressentait. Il leva les bras. « Oh, excuse-moi si mon parcours scolaire t'a personnellement offensé, je ne m'en rendais pas compte. La prochaine fois dis-le moi et je ferais quelque chose pour te mettre plus à l'aise. » Lâcha-t-il finalement du ton le plus sarcastique qu'il était capable d'employer.

Dans son agitation il n'avait pas remarqué le moins du monde l'embarras de Dacre, et même s'il l'avait noté, il n'aurait jamais été capable de le comprendre. « Pour qui tu te prends à me juger comme ça ? On se connait même pas, ok ? Tu ne sais rien du tout de moi. Tu crois que parce que tu as toujours eu des notes excellentes tu sais tout ? Il marqua une légère pause le temps de se mordre la lèvre et d'essayer de modérer ses propos. En vain. « Tu t'es jamais dit que si Mark te traitait comme ça c'était parce qu'il en avait marre que tu te crois tellement mieux que lui ? »

Encore une fois, il essayait d'éviter à tout prix de se comparer avec Mark dans cette discussion et de se placer plus comme un tiers objectif, mais il savait que Dacre le mettait dans le même sac et ça avait le don de l'agacer. Il s'était toujours trouvé mieux que Mark, mais il savait aussi qu'il avait passé tout Poudlard à se rabaisser à son niveau.

« C'est pas de la faute de Mark si personne pouvait te supporter, alors arrête de jouer les martyres. » Il savait qu'il était allé un peu trop loin, mais il avait tendance à s'emporter sous le coup de la colère. Il savait qu'il allait regretté d'avoir dit ça et que sa foutue conscience allait le lui reprocher pendant un petit moment, mais merde aussi, il le cherchait là ! Il passa ses mains sur son visage et finit par les enfouir dans sa poche.

« C'était que Poudlard, faut pas en faire tout un drame. » Conclut-il dans un murmure où lui-même pouvait entendre la culpabilité. Il détourna les yeux et commença à fixer le sol comme si c'était la chose la plus intéressante qu'il avait eut l'opportunité de voir depuis plusieurs années.

Tom s'amusait à jouer avec sa lèvre inférieure tout en continuant sa contemplation du sol. Parfois, il détestait vraiment son caractère impulsif, il lui arrivait toujours de dire ou de faire des choses qu'il regrettait immédiatement après les avoir dites ou faites, et ce qu'il venait de lancer à Dacre en faisait définitivement partie. Il n'avait fait que dire la vérité, après tout, à Poudlard, tout le monde, ou quasiment tout le monde, avait détesté le jeune homme. Mais il savait qu'il avait été particulièrement méchant de le lui rappeler, surtout de cette manière là.

Il releva les yeux rapidement quand il sentit du mouvement près de lui et il regarda Dacre s'éloigner, se retenant au dernier moment de lui rappeler la présence du champ de force. Tant pis pour lui, s'il se le prenait dans la tête ce n'était pas la faute de Tom. Au final, il s'arrêta juste devant et posa ses mains dessus. Tom le regarda discrètement de derrière pendant quelques secondes, essayant de se persuader que Dacre n'en était quand même pas venu aux larmes.

Il le connaissait depuis des années et il avait assisté à des séances d'humiliation bien plus méchante que celle-ci à Poudlard, et il n'avait jamais vu Dacre véritablement réagir. Il ne se souvenait pas d'une seule fois où le jeune homme avait même répondu à Mark, ou d'une où il aurait craqué et se serait mit à pleurer. Il n'allait quand même pas commencer maintenant à cause de Tom, si ? Il n'avait rien dit de si terrible, allez.

Il finit cependant par remarquer les petits mouvements des épaules de Dacre et du se rendre à l'évidence. Il ferma les yeux et baissa la tête, essayant d'enlever ces images de sa tête. Tom avait fait beaucoup de conneries dans sa vie, et il savait qu'il avait pas mal plaisanté et qu'il s'était payé la tête de pas mal de gens à Poudlard et après, mais il n'était pas du genre à aimer voir les autres souffrir. Surtout quand c'était de sa faute. Et voilà, maintenant il se sentait définitivement coupable.

Le sentiment ne fit que s'amplifier quand Dacre se décida enfin à parler. Tom l'écouta, les yeux ouverts mais la tête toujours baissée. Il avait croisé les bras sur sa poitrine et refusait strictement de tourner les yeux vers le jeune Auror. C'était déjà assez pénible à entendre, il n'avait pas envie d'avoir le support visuel en plus de ça. Il l'écouta patiemment, ne cherchant pas à l'interrompre.

Pour être totalement honnête, il était plutôt choqué. Il n'avait jamais réfléchit à l'après Poudlard, pour lui, les gens avaient grandis, tout le monde s'était séparé et même s'il avait lui-même gardé quelques potes de ses années scolaires, ils n'avaient plus exactement la même relation qu'à l'époque. Apparemment, ce n'était pas le cas de Dacre, et Tom s'en serait presque voulu de ne s'être jamais demandé ce que la vie avait du être pour lui après qu'ils aient tous obtenus leur diplôme.

Pendant un moment Tom fut tenté d'essayer de rassurer Dacre, de tout mettre sur le dos de Mark, et de lui dire que s'il avait été au courant de la fête en l'honneur du jeune auror, il y serait allé. Mais il se souvenait assez bien de Mark lui racontant sa petite blague à l'époque, et il n'y était pas allé pour autant. Il n'avait rien fait pour l'arrêter, il se souvenait même d'avoir trouvé ça plutôt drôle sur le moment. Maintenant qu'il avait devant lui la victime de la plaisanterie, forcément, c'était beaucoup moins drôle. Il ne s'était jamais demandé ce que ça faisait d'être « de l'autre côté », et il n'aimait pas spécialement l'aperçu que Dacre était entrain de lui donner. Ça ne l'aidait en tout cas pas du tout à apaiser sa conscience.

Faute de quelque chose de réconfortant à dire, il se tut donc et écouta ce que Dacre avait encore à lui dire, essayant d'enfouir sa culpabilité le plus profond possible. Au final, il releva les yeux juste au moment où le jeune Auror essuyait les larmes de ses joues à l'aide du revers de sa chemise. Tom rebaissa donc aussitôt les yeux et fit semblant de n'avoir rien vu. Il était censé dire quoi ? Il n'en savait rien. Avec quelqu'un qu'il avait réellement apprécié, il aurait su quoi dire. Ou même avec quiconque d'autre que Dacre, mais il avait l'impression de parler à un cas désespéré. Il aurait bien aimé lui dire que tout le monde ne l'avait pas détesté à Poudlard mais il savait que c'était faux.

Et il savait aussi que Dacre était loin d'être bête et que ça ne servait à rien d'essayer de lui mentir. Il décida donc, encore une fois, de ne rien dire et de laisser le jeune homme finir ce qu'il avait à dire. Ce n'était apparemment pas tous les jours que ça lui arrivait de se lâcher comme ça, peut-être que c'était juste ce dont il avait besoin, et Tom lui devait bien ça.

Il sentit plus qu'il ne vit Dacre se retourner vers lui et quand il releva les yeux vers lui il fut choqué de voir la couleur qu'avaient pris ceux du jeune homme. Tom avait presque l'impression d'avoir une personne entièrement différente en face de lui, il avait l'air moins froid, plus humain, et plus accessible aussi. Mais quand Tom se rappela que c'était parce qu'il venait de pleurer, il se força à trouver le regard du jeune auror moins hypnotisant.

Pour la troisième fois en l'espace de quelques minutes, Tom resta complètement sans voix. Il avait ouvert la bouche mais aucun mot n'en sortait. Dacre avait voulu être son ami ? Ça alors, lui qui avait toujours pensé que le jeune homme était du genre à mépriser tout le monde et à apprécier sa solitude. Pas pour la première fois depuis qu'il était sorti de Poudlard il venait de réaliser que peut-être il avait été plus important aux yeux de quelqu'un que ce quelqu'un ne l'avait été pour lui, et après tout ce que venait de lui avouer Dacre, ça le faisait se sentir encore plus mal à l'aise.

« T'en fais pas pour ça, je ne compte pas finir à Azkaban pour meurtre. » Déclara-t-il d'un ton qu'il essaya de rendre amusé. Il ne savait vraiment pas quoi dire à Dacre, il n'avait jamais été du genre à se montrer particulièrement gentil. Il ne traînait qu'avec des mecs, et la plupart d'entre eux n'avaient jamais eut les mêmes problèmes que le jeune auror, et même s'ils les avaient eu, Tom les aurait laissé se démerder tout seul. Même Jessica avait toujours été du genre forte et indépendante, ou alors peut-être était-ce simplement qu'elle parlait de ses problèmes et allait se plaindre à ses copines et pas à Tom ?

Le fait était que Tom n'avait pas l'habitude de ce genre de situation, et il les avait toujours trouvé particulièrement gênantes. Il baissa légèrement les yeux et finit par lâcher doucement – avant qu'il ne change d'avis : « Je ne détestais pas à Poudlard. Je ne déteste toujours pas d'ailleurs. »

Il ne savait pas comment c'était possible vu le nombre d'heures qu'il avait passé avec Mark à en faire voir de toutes les couleurs au pauvre Dacre, mais il savait au fond de lui que c'était vrai. Il n'était pas non plus entrain de lui dire qu'il l'adorait et qu'ils s'entendaient super bien, non, seulement qu'il ne le détestait pas. Il tolérait sa présence, et Tom n'était pas prêt à aller plus loin pour l'instant.

« C'étaient... » Il hésita et finit par enfouir ses mains encore plus au fond de ses poches. « C'étaient juste des blagues. A Poudlard, je veux dire. On essayait juste de s'amuser, je pensais pas que... Enfin, je veux dire, je pensais pas que ça... » Te tenait tellement à cœur ? Que ça t'avait autant pourri la vie ? Il n'arrivait pas à terminer sa phrase, en partie parce qu'il n'arrivait pas à trouver une manière de qualifier ce que Dacre avait subit de manière à ne pas se faire trop passer pour le connard de service. « Bref. »

Il essaya d'expliquer ce qu'il voulait dire avec des gestes vagues mais finit par laisser retomber ses bras le long de son corps. Il avait très bien compris de quoi il voulait parler de toute manière, Tom ne pensait pas que ce soit utile de revenir sur l'épisode où Dacre avait pleuré, c'était probablement encore plus embarrassant pour lui que ça ne l'avait été pour Tom, et ça voulait dire quelque chose.

« Allez, si hier bourrés on a réussi à s'entendre, c'est que ça doit pas être totalement impossible. » Lança-t-il d'un ton moqueur pour essayer de détendre l'atmosphère. Il laissa échapper un petit rire timide et essaya de reprendre une posture un peu moins tendue. Il ne s'en était même pas rendu compte mais tout son corps s'était raidi au fur et à mesure que Dacre parlait.

Tom sortit son téléphone portable de la poche de son jean et en profita pour vérifier rapidement ses messages. Il ignora la petite dizaine de textos de Mark qui lui demandait s'il avait envie de sortir ce soir. Il lui répondit simplement qu'il avait encore trop la gueule de bois tout en essayant d'éviter de penser à ce qu'il allait pouvoir ou devoir faire pour cacher cette « cohabitation forcée » à son meilleur ami. Pourvu qu'il ne débarque pas à l'improviste à son ancien appartement...

Il bailla. « Je ne sais pas pour toi, mais la journée a été assez longue comme ça pour moi. » Il vérifia l'heure et se rendit compte qu'il était encore loin de l'heure à laquelle il se couchait généralement. Mais il avait raison, la journée avait été longue, et il voulait être en pleine forme s'ils devaient chercher un remède à leur problème à la bibliothèque le lendemain.

« Vu que tu as le rapport de Mark à corriger, ça te dérange pas si je prends le lit, pas vrai ? » Demanda-t-il d'un ton défiant. Ce n'était peut-être pas beau de sa part de jouer le coup comme ça, mais il était crevé et il avait besoin d'un lit et d'une bonne nuit de sommeil.

Tom n’était même pas si fatigué que ça, il avait juste besoin que tout se calme un peu. Il venait de vivre la journée la plus complète et la plus perturbante de toute sa vie et il n’avait qu’une hâte : qu’elle s’arrête. Et il ne pouvait pas s’empêcher d’espérer que le serment inviolable soit rompu tout bêtement pendant la nuit et qu’il ouvrirait les yeux en tant qu’homme à nouveau libre. Il savait que les chances que ça arrive étaient faibles voire inexistantes, mais il continuait de cultiver cet espoir un peu fou tout de même.

Le jeune homme se retint de faire un commentaire sur la montre à gousset de Dacre – mais sérieusement, une montre à gousset ? – au dernier moment et se contenta de dissimuler son sourire amusé en tournant la tête. Il avait le sentiment qu’il allait avoir l’occasion d’en apprendre de belles sur le jeune Auror avec qui il allait devoir partager sa vie, faute d’un meilleur terme pour décrire exactement leur relation.

« Sérieux ? » Demanda-t-il en riant, les bras toujours croisés sur sa poitrine, quand Dacre lui avoua le secret de sa réussite avec le boulot que Mark lui collait en plus. Tom contempla l’idée de répéter cette information à Mark pour lui éviter de se faire virer, mais il ne voyait pas comment le faire sans incriminer Dacre, alors il l’oublia. Non pas qu’il mettait Dacre devant son meilleur ami, ce n’était pas tant ça, seulement pour le coup, Mark était celui en tort, et Dacre en avait probablement assez bavé comme ça pour toute sa vie. Il ne tenait pas à en rajouter encore une couche, surtout avec ce que le jeune Auror venait de lui avouer sur les gens qui continuaient à faire de sa vie un enfer.

Tom dissimula un léger frisson et chassa cette pensée de son esprit. Il ne voulait plus y repenser. Il n’était pas responsable de ce que ces idiots continuaient à lui faire subir après tout, il n’avait même pas été au courant avant ce soir. Bon, il avait été au courant pour Mark, de temps en temps, mais ce n’était pas son rôle à lui de défendre la veuve et l’opprimé. Si Dacre ne pouvait pas se défendre lui-même, ce n’était quand même pas de sa faute à lui ! Tom secoua doucement la tête pour éviter de retomber dans le même débat intérieur que tout à l’heure, il n’avait vraiment aucune envie de repenser à la part de responsabilité qu’il avait à prendre dans la vie que menait Dacre aujourd’hui. Il préférait rejeter purement et simplement toute responsabilité, puisqu’elle n’était pas directe.

« Et moi qui croyais que tu étais sans défense. » Déclara-t-il d’un ton légèrement moqueur en esquissant un nouveau sourire amusé. Il se força à bailler encore une fois pour signaler son envie que la journée s’arrête. Il allait probablement tourner dans son lit – enfin dans le lit de Dacre, mais il refusait de l’appeler comme ça, ça sonnait bizarre – pendant quelques heures avant de s’endormir mais il préférait quand même essayer d’aller dormir maintenant. Il regarda Dacre poser les assiettes et les couverts sales dans l’évier et soupira. Il sortit sa baguette et les nettoya rapidement. Il détestait se lever avec de la vaisselle sale dans l’évier, ça lui donnait l’impression de vivre dans une porcherie.

Le jeune homme fronça les sourcils quand Dacre se plaignit qu’il allait devoir dormir par terre. Premièrement, il aurait pensé que le jeune Auror se battrait un peu plus que ça pour garder son lit et quelque part il était un peu… Déçu ? Et deuxièmement ce n’était pas juste ce qu’il était entrain de faire ! Il venait de lui raconter les épisodes traumatiques de sa vie qui étaient en partie dus au comportement de Tom et maintenant il lui faisait du chantage affectif pour récupérer son lit. C’était bas, très bas. Tom n’était même pas sur qu’il le fasse exprès mais le fait était là, il lui racontait à quel point sa vie pouvait être dur à cause de Tom et de ses amis, et maintenant il jouait les victimes forcées à dormir par terre à cause de lui.

Bon, techniquement oui, Tom allait le forcer à dormir par terre… Oh et puis merde !

« Oui chérie. » Lâcha-t-il d’un ton sarcastique quand il réalisa à quel point ce que Dacre venait de dire lui rappelait les reproches constants de Jessica. A croire qu’ils ne pouvaient pas s’entendre plus de deux minutes d’affilées avant de recommencer à s’insulter ou à s’énerver.

Il s’appuya à nouveau contre l’évier qui était dans son dos, les bras croisés sur la poitrine et laissa échapper un petit soupir. Il passa sa langue sur ses lèvres. « Tu vas passer la journée de demain à te plaindre que tu as mal au cou, pas vrai ? »

Il fixa Dacre pendant quelques secondes, n’attendant pas particulièrement de réponse pour autant. Il savait que c’était ce que le jeune Auror allait faire si jamais Tom le laissait dormir par terre. Il était juste entrain de peser le pour et le contre pour savoir quelle option allait lui causer le moins de souci pendant les prochaines vingt-quatre heures. Impossible qu’il dorme par terre, sinon il allait faire de la vie de Dacre un véritable enfer, il se connaissait. Impossible que Dacre dorme par terre sinon il allait tellement lui taper sur les nerfs demain que Tom allait finir par l’égorger vif.

« C’est pas vrai… » Déclara-t-il à voix basse plus pour lui-même qu’autre chose. « Ok, ok, j’ai compris. » Il leva les yeux au ciel comme s’il essayait d’implorer le seigneur de lui donner la force de ne pas craquer. « Je suppose qu’on peut partager le lit. Mais je te préviens, » commença-t-il en pointant Dacre du doigt et en prenant un air un peu plus sérieux et un peu plus décidé surtout, « tu gardes tes mains pour toi. »

Il avait soudain entendu des rumeurs sur Dacre, notamment qu’il n’était pas… Du même bord que Tom ? Enfin bref, il n’avait pas tellement envie de tester cette théorie pendant la nuit. Il essaya de se rassurer en se disant qu’il avait déjà dormi avec des filles dans son lit sans pour autant essayer quoique ce soit avec elles, mais ça n’empêchait pas la situation d’être particulièrement bizarre. Heureusement que ce n’était que pour une nuit.

« Bon, où sont tes toilettes ? » Demanda-t-il tout en commençant à chercher par lui-même. Il priait juste pour que Dacre ne lui fasse pas de mauvaise blague et ne refuse pas de le suivre juste pour le plaisir de le voir se prendre le champ de force en pleine tronche. Parce que ce ne serait vraiment drôle. Enfin, Tom garda la blague dans un coin de sa tête quand même, il pourrait peut-être l’essayer un jour sur Dacre, qui sait ?

Il préférait passer aux toilettes avant d’aller dormir, par habitude pour commencer, mais également parce qu’il avait comme l’impression que Dacre n’apprécierait pas d’être réveillé en plein milieu de la nuit si Tom avait une envie pressante. Il ouvrit finalement la porte de la salle de bains et resta sur le seuil pendant quelques secondes.

« Tu sais, pendant qu’on décidait quel appartement choisir, tu aurais pu préciser que ta salle de bains était immense. Tu t'es pas dit que ça allait poser problème ? » Dit-il d’un ton agacé. Les toilettes étaient les plus proches de la porte donc il y avait largement la place pour que l’un d’eux soit dehors pendant que l’autre les utilisait. La baignoire en revanche… Il n’avait pas un mètre ruban dans la tête, mais à vu d’œil, ça risquait d’être juste.

Tom s’était toujours considéré comme quelqu’un d’assez chanceux, mais plus il restait chez Dacre plus il se rendait compte que sa chance était entrain de tourner. Il n’avait jamais été particulièrement bon en calcul mental et choses comme ça mais à vu d’œil il n’y avait aucune chance qu’il puisse prendre un jour une douche sans que Dacre ne soit dans la même pièce que lui. Il se massa doucement le front et essaya de chasser les images de sa tête. Il ne prendrait pas de douche ce soir, ce n’était pas la mort, ils verraient demain. Ils allaient bien trouver quelque chose, quitte à créer une cloison entre les toilettes et la baignoire pour s’autoriser un minimum d’intimité.

Il regarda Dacre tester le champ de force d’un air désespéré. Il savait qu’il fallait bien qu’ils le testent, histoire d’être sur, mais vu qu’en l’occurrence il avait eu raison avec ses estimations, il préférait prétendre qu’il l’avait su depuis le début et que Dacre venait juste de perdre du temps à vérifier. Enfin, même si d’habitude Tom aimait avoir raison, là il aurait aimé avoir tort. Est-ce que la situation pouvait encore empirer ? Il n’en était pas sur, il ne voyait pas ce qui pourrait lui arriver de pire maintenant.

Quand Dacre quitta enfin la pièce, Tom attendit quelques instants pour être sur qu’il soit arrivé et qu’ils disposent tous deux du maximum de marge possible pour bouger. Il alla ensuite se poser devant le lavabo et se passa de l’eau sur le visage. Il n’arrivait pas à croire qu’à peine 24h auparavant sa vie ait été parfaitement normale, idyllique même. Et maintenant il se retrouvait coincé avec… Dacre. Qu’est-ce qu’il avait bien pu faire pour mériter ça ? Il passa quelques minutes à fixer sa réflexion dans le miroir et à se passer encore de l’eau sur le visage, comme si ça avait une quelconque chance de le faire se sentir mieux ou d’arranger la situation dans laquelle il se retrouvait coincé.

Il abandonna finalement, passa aux toilettes et revint pour se laver les mains. Il hésitait à aller dans la chambre maintenant. Non pas que Dacre lui fasse peur, ce n’était pas ça le problème. Seulement avec ce foutu serment inviolable il essayait de profiter des moments d’intimité dont il disposait au maximum, parce qu’ils promettaient d’être rares. Alors certes, il avait connu mieux comme espace étant donné que Dacre ne se trouvait que derrière la cloison, dans sa chambre, mais il n’était pas prêt de retrouver plus d’espace que ça alors il était déterminé à en profiter. Même si ce n’était que pour respirer cinq minutes, faire le point et juste apprécier un peu sa solitude.

Il entendit Dacre crier à travers la cloison. Ste Mangouste ? Vous allez voir qu’il avait réussi à se casser quelque chose en prime. Etonnamment, ça ne donna pas spécialement envie à Tom de se presser pour aller dans la chambre. A la place, il se lava les mains pour la cinquième fois d’affilée et prit une bonne minute pour les essuyer avec la première serviette qui lui passa sous la main. Quand finalement il commença à tellement s’ennuyer qu’il se sentait prêt à considérer la compagnie de Dacre comme un divertissant acceptable, il quitta la salle de bains et marcha doucement jusqu’à la chambre.

Il referma la porte derrière lui, ayant un peu peur de constater l’état de la pièce dans laquelle il venait de mettre les pieds. Son appartement à lui était très bien organisé et rangé, alors sa chambre n’offrait pas de distraction particulière, mais vu l’état de l’appartement de Dacre, il avait peur de retrouver des choses qu’il n’aurait jamais voulu voir trainant un peu partout. La chambre à coucher était probablement la pièce d’une maison la plus susceptible de détenir des informations privées et intimes, et il n’était pas sur d’avoir envie d’en apprendre plus sur Dacre sur ce point là.

Au final, quand il osa jeter un coup d’œil, la première chose qui le frappa fut la taille du lit. C’était une blague n’est-ce pas ? « Ne me dis pas que tu peux pas t’offrir un lit de taille normale ? Je sais que tu dors toujours seul dedans mais quand même. » Il grogna légèrement en se rendant compte qu’il devait ressembler à Mark quand il disait ce genre de choses et passa sa main dans ses cheveux.

« Désolé, fais comme si j’avais rien dit. » Il laissa échapper un petit soupir et remarqua pour la première fois le jeune homme en pyjama dans la pièce. A première vue il ne saignait pas et ne s’était rien cassé non plus. Il portait un pyjama bleu qui le mettait particulièrement en valeur – non pas que Tom ait remarqué – et qui accentuait son côté grand et mince.

« Et non, je m’en fous du côté. » Continua-t-il en haussant les épaules. Il s’allongeait toujours dans le lit du même côté quand il était avec Jessica mais c’était uniquement parce qu’elle avait un côté préféré, et maintenant qu’il y pensait il aurait été incapable de dire lequel. Il n’arrivait même pas à se souvenir de quel côté du lit il dormait en général. Il choisit donc le côté droit au hasard. Il enleva son t-shirt et le déposa au pied du lit. Il hésita à enlever son jean également mais étant donné qu’il allait dormir avec Dacre dans un lit bien trop petit pour deux, il décida de le garder. D’habitude il dormait en caleçon mais pour cette nuit, il allait devoir éviter.

Il se glissa sous les couvertures et profita des quelques secondes où il était tout seul dans le lit avant que Dacre ne l’y rejoigne. Qu’est-ce que ce lit était petit. Il soupira et passa ses mains sur son visage, essayant de trouver la force de ne pas éjecter Dacre du lit maintenant en lui disant qu’il avait changé d’avis. Il n’avait pas prévu que le jeune Auror possède un lit aussi petit pour deux. Qui n’avait pas un lit deux places de taille normale chez lui ? Il avait beau avoir dit ça de manière méchante tout à l’heure, il était clair que le jeune homme n’avait jamais ramené qui que ce soit chez lui pour y passer la nuit.

Tom ne savait pas tellement comment digérer cette information alors il la laissa de côté pour l’instant. Il ferma les yeux et resta allongé sur le dos, les bras le long du corps, en attendant que Dacre éteigne les lumières. Tom était prêt à s’endormir immédiatement mais quand il entendit l’aveu du jeune Auror, il ne put s’empêcher de rouvrir les yeux. A son plus grand désarroi il se rendit compte que le jeune homme avait allumé une bougie sur la table de nuit.

« T’es pas sérieux là quand même ? T’as quel âge là ? » Et maintenant il avait besoin d’une veilleuse en plus. Entre le lit d’une taille anormalement petite et la bougie qui donnait une ambiance assez particulière à la chambre, Tom était à deux doigts de penser que Dacre avait tout planifié depuis le début pour se retrouver avec Tom dans son lit. Il chassa encore une fois cette hypothèse de son esprit, un, ce n’était pas possible de prévoir autant en avance, deux, il n’arrivait pas à croire que Dacre soit ce genre de personne. Il n’avait aucun mal à imaginer que le jeune Auror ait pu être intéressé par lui, ce n’était pas ça, mais il n’imaginait pas Dacre mener ce genre de plan. Il devait être frustré mais pas à ce point là quand même.

« Allez éteins ça, t’es pas tout seul au cas où tu l’aurais pas encore remarqué et moi la lumière me dérange. » Tom s’était forcé à dire ça d’un ton plus gentil qu’il ne l’aurait fait en temps normal, parce qu’après tout ce qui s’était passé en seulement une journée il avait tendance à y aller doucement avec le jeune Auror, comme s’il s’agissait d’un oiseau blessé qu’il avait recueilli chez lui.

Tom se retourna dans le lit de manière à être allongé sur son flanc, le dos tourné à Dacre. « Et maintenant, si ça ne te dérange pas, je vais essayer de dormir. » Il essaya d’étirer ses jambes un peu mais ses pieds rencontrèrent ceux de Dacre au bout du lit et il se rétracta immédiatement, comme si le contact l’avait brûlé. La nuit allait passer vite, il le sentait. Il laissa échapper un petit soupir et essaya de trouver un endroit confortable où poser ses bras. Il fut ainsi obligé de reculer un peu et de se rapprocher de Dacre. Il sentait la chaleur du corps du jeune homme juste à côté de son dos et s’il ne le touchait pas réellement, c’était tout comme.

Après deux minutes de silence où Tom n’avait même pas essayé de fermer les yeux par peur de s’endormir et de se rapprocher encore un peu plus de Dacre pendant son sommeil, il se rendit compte qu’il allait avoir énormément de mal à s’endormir dans ces conditions. Tout ça c’était de la faute de Dacre.

Il bondit quasiment dans le lit pour se remettre sur le dos et fixa le plafond, les yeux grands ouverts. « Pourquoi tu veux passer à Ste Mangouste au fait ? » Demanda-t-il d’un ton las tout en ignorant la petite voix au fond de sa tête qui lui rappelait à quel point la scène sonnait domestique. « J’aimerais autant qu’on ne perde pas de temps si possible. Je ne sais pas si tu as remarqué, mais la situation n’a rien d’idéal. » Il choisit bien sur ce moment pour essayer de bouger son bras. Sa main toucha la hanche de Dacre et il laissa échapper un léger grognement de frustration.

« Ugh, c'est ridicule. » Soupira-t-il tout en frôlant à nouveau le jeune homme en essayant de bouger. Il n’allait jamais réussir à s’endormir comme ça.

Tom laissa échapper un petit rire en imaginant la scène, Dacre se promenant dix mètres derrière lui avec un sac cachant son visage dans la rue. « Ça ne devrait pas être nécessaire. » Répondit-il doucement et d’un ton beaucoup plus gentil et naturel qu’il se serait cru capable d’utiliser en parlant avec Dacre. Surtout alors qu’ils étaient dans le même lit. Le jeune Auror avait le don de l’intriguer, il arrivait à l’agacer par sa seule présence et pourtant, de temps en temps, c’était même rare, il réussissait à le faire sourire et à rendre sa présence presque… Agréable ? Du moins supportable, et ce n’était pas quelque chose auquel Tom s’était attendu. Peut-être qu’il y avait véritablement une chance qu’ils arrivent à se supporter. Après tout Dacre avait lui-même avoué qu’il aurait aimé être ami avec Tom, et le jeune écrivain respectait l’intelligence plus que tout chez les autres. Alors il allait bien finir par trouver des bons côtés à Dacre, non ?

Il l’espérait en tout cas. Il restait néanmoins persuadé que ce serait plus facile de réussir à s’entendre avec Dacre s’ils n’étaient pas obligés de rester comme ça collés l’un à l’autre constamment. Enfin ils allaient devoir faire avec.

« Etonnamment non, ça ne me tente pas. » Répondit-il d’un ton amusé quand Dacre lui fit enfin part de son plan de tester le transplanage à Ste Mangouste. Ils devraient aussi essayer de transplaner ensemble, théoriquement ils ne s’éloigneraient pas de plus de dix mètres l’un de l’autre s’ils transplanaient ensemble, ça paraissait même impossible, mais Tom n’était pas du genre à prendre de risque avec la désartibulation et tant qu’ils seraient à Ste Mangouste, il préférait qu’ils le testent là-bas pour la première fois. Il n’avait jamais bien compris ce qu’il se passait exactement pendant un transplanage et il n’était pas sur d’avoir envie de le comprendre en répandant la moitié de ses membres aux quatre coins du monde.

Il soupira et se frotta à nouveau le visage, comme s’il essayait de convaincre son corps et son esprit qu’il était fatigué. « Ok, on ira à Ste Mangouste demain. Je ne sais pas comment on va expliquer la situation aux médicomages par contre… » Il aurait voulu en rire mais visiblement c’était trop tôt parce qu’il ne trouvait pas du tout la perspective drôle. Ils allaient devoir expliquer leur « problème » à un médicomage avant de faire l’expérience, ou en tout cas après si jamais ils se retrouvaient effectivement désartibulé et ce n’était pas quelque chose qu’il était impatient de faire. Il aurait du s’en foutre totalement, après tout, ce n’était pas comme s’il avait des amis qui travaillaient à Ste…

« Et putain… » Jessica. Elle était en plein stage, enfin d’après les souvenirs de Tom. Il n’avait jamais réellement écouté quand elle parlait de ses études, ça le saoulait de l’entendre parler de ses trucs de médicomage alors que ses parents l’avaient toujours saoulé pour qu’il le devienne lui-même. Et merde. Il jura doucement et ferma les yeux, puis, réalisant enfin qu’il était juste à côté de Dacre, essaya de se rattraper. « Non, t’inquiète, rien d’important, j’étais juste entrain de repenser à un truc. »

Il ne savait pas pourquoi il avait choisi de ne pas lui dire. Parce qu’il était tard ? Parce qu’il aurait l’occasion de lui dire demain ? Parce qu’il n’avait pas spécialement envie d’expliquer à Dacre qu’ils allaient devoir éviter à tout prix Jessica s’ils allaient à Ste Mangouste le lendemain parce qu’il était hors de question qu’elle pense qu’il était… Gay.

D’ailleurs, au moment même où il le pensait, Dacre lançait le sujet. Tom sortit de ses pensées et se concentra sur ce que le jeune Auror était entrain de lui dire. « Oh… » Fut la seule chose qu’il eut la présence de dire au premier abord. Il ne s’était pas attendu à ce que Dacre commence à parler de ça, il ne s’était même pas attendu à ce que le jeune homme comprenne que Tom était persuadé qu’il… était de l’autre bord. Et il s’était encore moins attendu à ce qu’il aborde un sujet aussi personnel.

Sans compter que Tom avait vraiment été persuadé que Dacre était gay. « Peu importe, ça change rien. Je m’en fous de toute façon. » Finit-il par lâcher en haussant légèrement les épaules. « C’est juste que tout le monde supposait… Enfin bon, c’est ta vie tu fais ce que tu veux. » Il se rallongea sur son flanc le dos tourné à Dacre, se sentant malgré tout un peu plus détendu. C’était bête, il le savait, mais il avait l’impression qu’il avait moins à s’inquiéter de ses mouvements dans le lit s’il n’y avait pas cette ambigüité dans l’air.

« Et je sais que je n’ai rien à craindre. » Commença-t-il d’un ton étonnamment sérieux. « Je n’aurais aucun mal à te foutre par terre si jamais j’en avais besoin de toute façon. » Finit-il d’un ton malicieux avant de jeter un coup d’œil par-dessus son épaule vers Dacre.

« Allez bonne nuit. » Il remit la couverture en place sur lui pour éviter de geler sur place pendant la nuit et ferma les yeux. Il mit un petit moment à s’endormir, mais autant parce qu’il n’avait pas l’habitude de partager un lit aussi étroit que parce qu’il le partageait avec Dacre. Il se retourna pendant une bonne demi-heure, évitant toujours au maximum de toucher le jeune homme pour éviter de le réveiller et aussi parce qu’il était encore un peu gêné d’avoir des contacts dans un lit avec un homme. Il devait bien l’avouer, c’était une première. Et il n’était pas sur d’avoir envie de retenter l’expérience. Jamais.

Il se jura de penser à acheter un matelas le lendemain et finit par s’endormir.