« Journée d'misère, besoin d'un verre. » | FE Eleana |

La journée fut longue et épuisante. Ma transformation d'hier soir avait été très éprouvante et mes articulations me faisaient souffrir. Le doute et l'inquiétude planait dans mon esprit et mon estomac se serrait à chaque fois qu'un nouveau patient arrivait aux urgences. Avais-je fais du mal à quelqu'un la nuit dernière ? Y avait-il eu des victimes de ma monstruosité ? Jusque là nous n'avions eu que deux cas de coupures profondes et un cas d'accident pendant un duel de sorcellerie. Rien de bien alarmant, les patients étaient tous repartis en promettant d'être plus prudents à l'avenir. Des cernes violettes et profondes creusaient le contour de mes yeux comme si j'avais été frappé. Assis constamment, je devais me battre pour ne pas m'évanouir sur mon bureau. Combien de cafés avais-je déjà bu depuis ce matin ? Six ? Dix ? J'avais perdu le compte. A la pause déjeuner, je fus incapable d'avaler quoi que ce soit. Comme d'habitude mes collègues riaient de bon coeur et racontaient tour à tour leurs aventures trépidantes de pères de famille en crise de la quarantaine. Certains trouvaient cela abusif et inapproprié, mais moi je voyais leur vie tristement banale comme un exploit. Un homme maudit comme moi n'a que très peu de chances d'avoir un quotidien comme le leur. Le patron m'avait convoqué le mois dernier suite à ma première transformation cauchemardesque et pour le moins désastreuse. Mon salaire avait été utilisé au remplacement du matériel endommagé et j'étais surveillé de très près par le ministère. Une autre personne que moi aurait certainement vu un affront dans cette décision, mais j'y voyais personnellement une aide précieuse pour m'empêcher de faire du mal à quelqu'un. Si cela arrivait, la culpabilité me rongerait jusqu'à m'en tuer.

Finalement, la fin de la journée arriva sans prévenir. Je l'avais attendue comme un soulagement à mes souffrances, mais elle fit son entrée comme un boulet de canon dans l'estomac. Je n'étais pas encore prêt à rentrer chez moi, visiblement. Une jeune secrétaire arriva en se dandinant sur ses escarpins vernis rouges. A en juger par sa tenue de civile, elle n'allait pas tarder à quitter l’hôpital. A en juger par son maquillage et le rose sur ses joues, elle non plus ne rentrerait pas tout de suite chez elle.

« Ah Docteur Wayllander, je vous ai cherché partout.
- Eh bien vous m'avez trouvé Gladice.
- Le Docteur Shepperd a oublié ce dossier à l’accueil. Vous pourriez lui donner ?
- Ça ne peut pas attendre demain ?
- C'est que c'est urgent. J'aurais demandé à quelqu'un d'autre si je ne savais pas que vous le connaissez et que vous savez où il vit...
- C'est bon Gladice, je vais lui apporter.
- Merci ! Vous me sauvez la mise, je vous revaudrai ça ! »

Elle s'éloigna en trottinant sur ses talons. Visiblement elle était déjà en retard à son rendez-vous. Soupirant et nostalgique, je l'observais partir, rêvant de cette époque où j'avais moi aussi cette insouciance, cette envie de sortir faire la fête dès que j'en avais l'occasion, la musique, les filles, l'alcool, les rires, la vie. Le dossier entre mes mains portait le tampon rouge " top secret ", aussi ne me permettais-je pas de l'ouvrir. Ma curiosité était en déclin ces derniers temps, surement à cause de la fatigue. Une fois ma blouse blanche retirée, je passais voir une dernière fois Brittany avant d'éteindre la lumière et de quitter le bâtiment. Tous les patients dormaient et l'infirmière de nuit était à son poste à l'heure prévue. Mes pas me menèrent dans les rues de Londres qui sombraient lentement dans l'obscurité. Le coucher de soleil à l'horizon était caché par les bâtiments mais on devinait sa splendeur devant l'éclat rouge sang du ciel. Cette couleur me filait plus la chair de poule qu'autre chose. Enfin, j'arrivai devant la porte de chez Sam. L'avantage avec lui, c'était nos points communs. Tous les deux portions la lourde malédiction de la lycanthropie, ainsi que la tâche non sans défis d'être médicomage. Depuis peu il avait recueillie ma meilleure amie Eleana, battue par son époux et rendue muette par le traumatisme. Enfermée dans cette demeure, elle tremblait dès qu'elle apercevait le perron. Compréhensible.

Mon doigt tremblant ( de fatigue ou bien à cause des cafés ) s'écrasa sur la sonnette sans délicatesse. un oeil inquiet apparu de derrière le rideau qui couvrait la vitre de la porte. Sa peur me faisait de la peine. J'aurais aimé tomber sur ce connard qui avait osé lui faire tant de mal. Le fait que ce soit Eleana qui aille à la porte prouvait sans hésitation que Sam n'était pas encore rentré. Tant pis, voir mon amie me ferai du bien de toute façon. Ça faisait longtemps et j'avais besoin de parler de la nuit dernière.

« C'est moi, Puce. Je peux entrer ? »

Ce petit surnom ne sonnait plus du tout bizarre, depuis le temps que je l'appelais comme ça. C'était un rituel et ma manière à moi de la rassurer.

Depuis que Eleana avait refusé de prendre son disque afin de l'écouter, elle ne quittait plus sa chambre à part pour prendre ses repas ou lorsque Sam était absent. Elle l'évitait le plus possible pour ne pas avoir de conversation avec lui. Elle se doutait bien que ça le blessait, mais elle aussi était blessée qui lui ait montré quelque chose de son ancienne vie. C'était un joli cadeau, mais elle n'en voulait pas. Elle refusait tout ce qui se rapprochait de près ou de loin à sa vie antérieure. Eleana ne jouait plus que des morceaux de compositeurs connus et ne voulait plus jouer ses propres morceaux. Elle n'avait plus la voix qui allait avec.

C'était trop douloureux pour elle de jouer ses musiques et de ne pas pouvoir les accompagner au chant. La jeune femme ne voulait plus souffrir. Elle pensait avoir souffert assez pour toute une vie. Orpheline, Eleana avait été recueilli par un orphelinat moldu et avait connu la seule femme de sa vie, Mélodie, qui lui avait appris à aimer le piano et à en jouer à merveille. Il y avait eu Killian ensuite qui était devenu son mari par la suite et qui la battait au point de l'avoir presque tuée la dernière fois. Et maintenant, elle se retrouvait sans voix. Son traumatisme émotionnel était trop important d'après Sam et il n'avait pas trouvé le moyen de la soigner.

Eleana aurait aimé que ce traumatisme parte en même temps que ses confessions sur la raison de sa présence dans la rue le soir où le médicomage l'avait trouvé. Seulement, même après avoir révélé que son mari la battait, sa voix n'était pas revenue. Sam avait donc pensé que le fait de voir son disque, de l'écouter allait l'aider. Cela n'avait pas été le cas. La blonde n'était pas en colère contre lui, mais contre elle. Elle n'avait pas su apprécier son cadeau et l'avait repoussé sans ménagement alors qu'il venait d'essayer de se rapprocher d'elle. Eleana se retrouvait donc toute seule chez Samuel puisqu'il n'était pas encore rentré.

Elle se trouvait dans le salon, le piano devant les yeux incapable de faire courir ses doigts dessus. Elle ne savait pas ce qui lui arrivait. Encore ce matin, elle arrivait à jouer merveilleusement bien et là, elle ne comprenait pas. C'était son instinct qui lui avait dit que quelqu'un approchait de la maison. Ce quelqu'un n'était pas Samuel. Elle savait reconnaître ses pas. Cela était plus léger et plus discret. Lentement, elle se leva sans faire de bruit et se dirigea vers la porte. Son angoisse était presque palpable et elle aurait aimé plus que tout au monde que Sam soit prêt d'elle pour la rassurer. Lui seul aurait trouvé les bons mots pour l'empêcher d'avoir peur.

La sonnette retentit à ce moment. Eleana sursauta au bruit et déplaça le rideau afin de voir qui était la personne qui avait osé sonné à sa porte. Ses yeux tombèrent sur un regard familier. C'était celui de son meilleur ami, Cooper Wayllender. Ils s'étaient rencontrés lors de leur scolarité à Poudlard. Cooper étant plus âgé que Eleana l'avait pris sous son aile et l'avait aidé lors de ses années à l'école de sorcellerie. Il avait été un des premiers à apprendre que Killian, le mari de Eleana, la battait. Il avait souvent voulu faire quelque chose pour aider la jeune femme, mais elle avait toujours tout fait pour l'en empêcher.

Elle se doutait bien qu'il ne cherchait qu'à la venger, mais Killian n'était pas fou. Il avait du changer d'adresse pour ne pas qu'on le retrouve. Eleana hésita à ouvrir la porte. Elle était angoissée de se faire surprendre par son mari sous polynectar. Elle attendit quelques secondes de voir si Cooper allait parler et lorsque ce fut le cas, elle fut rassurée. Son meilleur ami était le seul à l'appeler Puce. Elle ne savait pas d'où cela lui venait. Si au début, elle avait tout fait pour qu'il arrête d'utiliser ce surnom ridicule avec le temps elle avait appris à l'apprécier. Avec de multiples précautions, Eleana ouvrit la porte à Cooper.

Ce n'était pas la première visite du jeune homme et il était donc au courant de son mutisme. Elle ne préféra pas ''parler'' pour le moment et s'effaça pour le laisser passer. Eleana n'était pas détendu avec la porte ouverte. Cependant, elle attendit patiemment que Cooper soit à l'intérieur avant de la claquer assez fortement. Ce bruit fit sursauter le pauvre médicomage et la jeune artiste lui lança un regard désolé. Maintenant que tout était fermé, son visage se décrispa et elle offrit à son meilleur ami un sourire sincère. Elle était vraiment contente de le voir. Elle le prit alors dans ses bras pour lui faire un câlin.

Eleana avait beau se montrer forte, elle avait besoin de chaleur humaine et de réconfort. La blonde se défit alors de leur étreinte amicale avant d'examiner de plus près son visage. Cooper paraissait fatigué et les cernes sous ses yeux n'arrangeaient pas les conclusions de la jeune femme. « Comment tu vas Coop ?» Eleana faisait souvent passer ses amis avant elle et ils le lui reprochaient souvent. Cependant, sa curiosité refit surface et elle s'interrogea sur sa venue. « Qu'est-ce que tu fais ici ? Si tu viens voir Sam, il n'est pas encore rentré... Je sais pas où il est et ça m'angoisse. »

Samuel était l'un des piliers de la vie de Eleana maintenant qu'elle n'était plus la jeune femme insouciante d'avant. Le savoir dehors, si loin d'elle l'angoissait peut être plus qu'elle ne voulait l'avouer.

Spoiler:

Eleana mit un peu de temps à m'ouvrir mais je ne m'inquiétais pas, je me contentais d'attendre en souriant, sachant que la peur de mon amie était plus que normale étant donné son passé très obscur. une fois rassurée, elle ouvrit la porte, me laissa entrer, et claqua la porte violemment derrière moi en m'arrachant un sursaut. Elle fit une petit mine désolée mais je haussais les épaules, l'air de lui dire que ce n'était pas bien grave. Après tout, l'idée que la maison puisse rester ouverte ne devait pas la rassurer du tout. A ses yeux, le mal était partout et plus particulièrement en ce qui concernait ce pauvre connard de Killian. Mais pourquoi Sam n'était pas encore rentré ? Il était parti depuis longtemps de l’hôpital, il devrait être rentré depuis au moins une heure. D'un autre côté, le connaissant, il devait être tout aussi fatigué que moi. Rares étaient les personnes au courant de sa deuxième nature sauvage, tout comme celles au courant de la mienne. C'est l'une des nombreuses choses que Samuel et moi avions en commun. Ma question resta dans un coin de mon esprit. Elle tomberai bien assez tôt dans la discussion.

Enfin discussion, façon de parler puisque Eleana se trouvait toujours incapable de prononcer le moindre mot. Son seul moyen de se faire comprendre était d'écrire les mots dans l'air à l'aide de sa baguette. Aussi étrange que ça puisse paraître, j'aimais assez ces petites lettres dorées flottant dans la pièce, même si rien ne pouvait remplacer la douceur de la voix de ma meilleure amie qui me manquait tant. Pour le moment je ne lui avais pas avouée ma nouvelle nature. Elle avait déjà du mal à supporter celle de Sam, alors comment réagirait-elle en apprenant que j'étais dans le même cas ? Je n'étais pas prête à la perdre, je ne voulais pas qu'elle ai peur de moi, mais d'un autre côté je ne voulais pas la blesser dans un écart d'humeur comme j'en avais souvent ces derniers temps. Aujourd'hui, le risque était nul puisque je m'étais transformé la veille. La fatigue maintenait le loup prisonnier au fond de moi. Bonne nouvelle, enfin presque.

C'est sans grande surprise que j'accueillais la petite blonde dans mes bras. Je n'osais pas trop la serrer contre moi, de peur de la casser tant elle me semblait fragile en comparaison de ma force un peu surnaturelle. Elle était si fine, si pâle, si sensible que je prenais garde à tous les gestes que je faisais, un peu comme si j'étais constamment en présence d'un vase de chine très ancien en porcelaine. La délicatesse n'était pas mon fort, mais je savais me contrôler en la présence d'Eleana. Elle finit par se détacher de moi pour me regarder. Les petites lettres dorées finirent par apparaître, comme prévu.

« Comment tu vas Coop ?
- Eh bien, comme tu peux le voir je suis ici, tu peux donc en déduire que tu me manquais trop. »

Un sourire sincère et doux s'étala sur mes lèvres. J'étais venu à la base pour donner le dossier oublié à Sam, mais maintenant que j'étais sur place, je réalisais à quel point elle m'avait en effet manqué. Pourtant quelque chose clochait dans son regard, je pouvais le voir, le sentir, comme je l'avais toujours fait. Elle était un livre ouvert pour moi depuis notre première rencontre. La raison de cette petite tension arriva, et je ne fus pas surpris de retrouver dans ses " paroles " la même question que je m'étais posée en entrant.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? Si tu viens voir Sam, il n'est pas encore rentré... Je sais pas où il est et ça m'angoisse.
- Ben je suis venu te voir et lui rapporter ça. »

Je sortais de ma mallette en cuir noir un dossier dans une pochette plastique violette portant une étiquette " IMPORTANT " et le nom de Samuel. Je lui tendit et poursuivais mon explication.

« Il l'a oublié à l'accueil et la secrétaire avait un rendez-vous galant alors je suis chargé du courrier. »

Mon humour m'avait toujours permis d'aider Eleana à se détendre, mais je sentais bien que cette fois ce ne serait pas suffisant pour la calmer. L'absence de son ami la dérangeait beaucoup. Jusqu'où son imagination était allée ?

« Ne fais pas cette tête d'enterrement Puce, je suis sûr qu'il va bien et qu'il ne va pas tarder à rentrer. Et si on prenait un petit thé tous les deux en l'attendant, hm ? »

Spoiler:

Sa peur était encore trop présente pour qu'elle puisse faire confiance à qui que ce soit et donc, elle attendit patiemment que Cooper se mette à parler avant de lui ouvrir la porte. Elle n'avait qu'une peur que ce soit Killian qui ait pris du Polynectar et qu'il ait pris l'apparence d'un de ses proches. Il y avait cependant peu de chance qu'il sache où elle était. Mais dans le doute, Eleana ne voulait pas prendre de risque. Alors lorsque Cooper utilisa son surnom, la jeune femme se détendit et soupira de soulagement. Même lorsque c'était Samuel à la porte, Eleana était effrayée à l'idée que ce soit Killian qui l'ait retrouvé. Elle ouvrit donc la porte et le fit entrer assez vite afin de la refermer. Savoir la porte ouverte l'angoissait encore plus que lorsqu'elle voyait quelqu'un devant. Elle perçut le haussement d'épaule de Coop et ne prit pas ça exactement comme il l'aurait voulu. Il voulait lui montrer qu'il s'en moquait, mais elle voyait bien la flamme de la colère briller dans ses yeux.

Elle connaissait très bien Cooper, et savait qu'il se contrôler pour ne pas partir de suite à la recherche du mari de Eleana. Cependant, elle se doutait qu'il n'était pas resté à leur ancien appartement. Plutôt que de ressasser des souvenirs durs pour elle, elle s'enquit de la santé de son meilleur ami. Elle sourit faute de pouvoir faire sortir un petit rire de sa bouche. « Toi aussi tu m'as manqué Coopie. En même temps, Samuel et toi êtes les deux seules personnes que je vois... Forcément, vous me manquez plus vite. » Eleana soupira. Vivre enfermée tous les jours ne lui avait jamais plus, mais c'était nécessaire. Malgré ça, elle se sentait oppressée. Elle avait envie de liberté, de sentir l'air frais dans ses cheveux, de voir le soleil plutôt que de rester cloitrée chez Sam. Cependant, elle avait vraiment trop peur de tomber sur Killian qu'elle supportait son enfermement volontaire sans broncher. La jeune femme demanda alors ce qu'il faisait là.

Cooper sorti de sa mallette un dossier portant la mention ''IMPORTANT'' et le tendit à sa meilleure amie. Elle continua de le regarder avec un air interrogateur sur le visage. Comment se faisait-il que Sam n'ait pas lui-même récupérer le dossier alors que les eux hommes travaillaient ensembles. Coop compris les questions muettes de la jeune femme et s'empressa de lui donner des explications. Eleana vit très bien les efforts de Cooper pour la faire sourire. Cependant, elle ne le pouvait pas puisqu'elle était trop occupée à se faire du soucis pour son hôte. Son meilleur ami venait de lui confirmer qu'il était parti avant lui de Sainte-Mangouste et donc, logiquement, il aurait du être rentré. Et si Killian l'avait retrouvé et l'avait tué ? Et si on l'avait enfermé parce qu'il était un loup garou ? Et s'il s'était blessé ? Tout plein de scénarios se formèrent dans la tête de la jeune femme. Elle imaginait le pire comme d'habitude. Eleana ne pouvait pas se l'empêcher.

Samuel avait tout fait pour elle, depuis le jour où il l'avait retrouvé dans la rue dans un sale état. Elle trouvait donc normal de se faire du soucis pour lui. Son inquiétude du se peindre sur son visage puisque Cooper essaya de la rassurer. « Oui tu as raison Cooper. Ce n'est pas parce que je vais m'inquiéter qu'il va arriver plus vite. » Elle tenta sans grand succès de faire reprendre un rythme normal à son cœur, mais elle n'y arriva pas. Son inquiétude était vraiment trop importante pour qu'elle puisse l'effacer d'un coup. Néanmoins, elle s'astreignit au calme. « Oui allons prendre un thé. » A peine les lettres dorées avaient quitté le ciel que Eleana tourna les talons et partit dans la cuisine préparer le thé. Cooper allait surement se mettre à l'aise dans le salon en attendant la jeune chanteuse. S'occuper les mains aida Eleana à se détendre. Son rythme cardiaque s'apaisa, son souffle devint régulier et elle affichait maintenant une mine plus ou moins soulagée.

Elle réapparut avec les tasses de thé dans le salon et prit place près de Cooper en lui tendant la sienne. Elle aurait très bien pu les faire léviter, mais elle n'en avait pas eu envie. « Comment ça se passe le travail ? Qu'est-ce qui s'est passé de nouveau dans ta vie récemment ? » Eleana voulait simplement lancé la conversation pour penser à quelque chose d'autre que Sam qui n'était toujours pas à la maison. Cependant, elle était loin de se douter que son meilleur ami lui cachait quelque chose d'important dans sa vie.

Lorsque Eleana m'invita à m'asseoir, j'eu du mal à m’exécuter. J'avais du mal à cacher ma fatigue et ma honte de lui cacher le plus gros secret de ma vie désormais. En vérité je savais où se trouvait Sam, certainement dans un coin sombre à essayer de ressembler à un humain sans aucune culpabilité à être un monstre. Il n'aimait pas rentrer à la maison et laisser ma meilleure amie le voir dans cet état. Il prenait toujours le temps de se débarbouiller, de se changer, de se coiffer, de reprendre un masque d'homme sans soucis. Je sentais qu'Eleana s'inquiétait comme d'habitude et j'aurai aimé lui dire que c'était inutile, mais la vérité, c'était que sa peur était justifiée. Je n'aurai pas du venir ici, je suis également un danger pour elle à présent, et pourtant je ne peux pas me résoudre à l'abandonner sans lui donner d'explication. Dans un sens, je suis persuadé qu'elle est digne de confiance et qu'elle ne le criera pas sur les toits, mais...pourrais-je encaisser son regard changer en se posant sur moi ? Serais-je capable de voir l'amitié s'éteindre dans ses yeux, la peur remplacer l'amour ? Non, impossible.

Elle s'éloigna vers la cuisine pour préparer le thé et je remerciais le ciel qu'elle préféra le faire elle-même plutôt que de le faire léviter jusqu'au salon. Au moins ça me laissa quelques minutes pour relever la manche de mon pull pour réajuster le bandage qui cachait une vilaine plaie. L'avantage d'être un loup-garou médecin, c'est la possibilité de savoir se soigner soi-même, permettant ainsi de ne pas crier aux urgences que je suis un lycanthrope assoiffé de sang. Lorsqu'elle revint, je fixais mes pieds sous la petite table basse du salon, l'air pensif. J'étais venu dans un autre but bien plus complexe que celui d'un livreur de courrier. Je mesurais la difficulté de ce que je prévoyais de faire, mais je ne trouvais aucune issue heureuse où ma meilleure amie pourrait me faire de nouveau confiance. Toutes les prévisions que je voyais étaient sombres et ne m'offraient aucune échappatoire.

Lorsqu'elle me demanda ce qui se passait dans ma vie récemment, mon bras blessé se crispa un peu, me tirant un léger rictus de douleur qui sembla passer inaperçu aux yeux d'Eleana qui était en train de servir le thé. Elle ne se méfiait pas, elle avait cette innocence pure en ma compagnie qui coupait complètement de son attitude lorsqu'elle était seule. Elle ne se sentait pas en danger et imaginer rien qu'un instant que ça puisse changer me déchirait le coeur. Finalement je n'étais pas mieux que ce fou de Killian qui l'avait battue. Je n'étais pas le même genre de monstre, mais j'étais un monstre quand même. Je pris soin de saisir ma tasse de la main gauche alors que j'étais droitier, pour le pas souffrir et me trahir. Je voulais passer aux aveux de façon douce et compréhensive, pour lui éviter toute frayeur.

« Au boulot ça va, c'est plutôt calme même si on a eu un type aux urgences salement amoché, la nuit dernière. »

Oui, ma propre victime à qui j'avais du effacer les derniers souvenirs qui auraient pu me compromettre. Le ministère m'avait fait jurer de rester discret et je n'étais plus censé attaquer les innocents. J'avais décidé d'aller me transformer plus loin, hors de la ville pour ne tuer personne. Mais ce type se promenait dans les bois de nuit, c'était un accident. J'avais du le traîner jusque devant la porte de St Mangouste puis me changer et passer par la porte de derrière pour aller faire semblant d'être au service de nuit et de découvrir avec une grande surprise ce pauvre homme de 50 ans en train d'agoniser d'une hémorragie interne et de plusieurs fractures ouvertes. Finalement je soupirais et relevais un visage meurtri vers celui d'Eleana.

« Ma puce, j'ai une terrible histoire à te raconter. »

Je reposais la tasse et joignais mes mains ensemble. Je savais que tôt ou tard je serais obligée d'en arriver là, mais rien ne m'avais jamais semblé aussi difficile dans toute mon existence.

« C'est l'histoire d'un homme et d'un loup, mais...c'est surtout l'histoire d'un monstre. »

Je me mis à tout lui raconter, la morsure de Greyback pour obtenir le médaillon pour lequel ma mère et mon père étaient morts afin de le protéger. La première transformation qui avait durée des heures et m'avait infligé une souffrance inimaginable. Je lui racontais ma solitude, ma peur, ma douleur, ma culpabilité. Je lui expliquait comment le ministère m'avait mis en garde, comment j'avais honte d'avoir presque tué ce promeneur hier soir. Je lui disais tout, comme un conte, utilisant mon nom comme celui d'un personnage imaginaire sortit tout droit d'une vieille histoire d'horreur pathétique. Quand j'eu fini, je relevais mes yeux nimbés de larmes vers les siens. Ma voix rauque et brisée se contenta de terminer par une phrase simple.

« Y a pas d'issue à ce cauchemar. Je suis désolé. »