And into the forest I go, to lose my mind and find my soul - ft. Luna

summer 1998 • Loutry-Ste-Chaspouleft. Luna Lovegood

Les bouts de bois et les feuilles craquaient sous ses pas, il repoussait non sans agacement les branchages qui lui barraient le passage et qui le ralentissaient. Le Mangemort se déplaçait à visage découvert, il ne craignait pas de croiser quelqu’un, ni qu’on le reconnaisse dans un trou aussi paumé que celui-ci. Tout de noir vêtu, il n’y avait que ses boucles rousses qui mettaient un peu de couleur, de vie et de chaleur sur cette sombre silhouette. Il s’enfonçait dans la forêt en boitant, cherchant un endroit où reprendre son souffle. Un liquide chaud et poisseux coulait le long de sa jambe, l’odeur âcre du fer lui chatouillait le nez. Après quelques pas vacillants, Rowan s'affala finalement contre un vieil arbre à l’écorce brune. Il porta sa main gantée à sa cuisse, là où pulsait la douleur, et raffermit sa prise sur sa jambe pour étouffer un grognement de protestation. Il se laissa glisser le long du tronc pour s’installer entre ses racines noueuses et couvertes de mousses, mais plier la jambe lui arracha un gémissement plaintif entre ses dents serrées. La tête en arrière, les yeux fermés, le Mangemort inspira un bon coup pour se reprendre. La douleur lui faisait tourner la tête, mais elle avait quelque chose de merveilleux : elle le faisait se sentir vivant.

Tuer des gens le mettait également en joie, et c’était dans ce but très peu noble qu’il s’était rendu à Loutry-Sainte-Chaspoule en cette fin d'après-midi d’été. Le Soleil déclinait à peine à l’horizon, il fallait attendre encore une heure ou deux pour le voir peindre le ciel de rose et d’orange. Rowan appréciait ce moment, encore plus que la nuit elle-même. Cet instant un peu magique, où le ciel s’embrasait et se teignait des couleurs de l'agonie du Soleil. Il s’était dit que sa mission de repérage serait vite achevée et qu’il serait de retour chez lui juste à temps pour assister à ce délicieux spectacle depuis son balcon, un verre de whisky pur feu à la main. Mais non. Trop confiant, comme toujours, il s’était égaré dans les bois bordant le village, un foutu loup avait croisé sa route et avait confondu sa jambe avec un bon morceau de viande. Dommage pour lui. A présent, le fichu animal ne mordrait plus jamais personne.

Du bout des doigts, Rowan écarta le tissu de son pantalon noir et il réprima une grimace en découvrant l’état de sa cuisse. Mulciber n’avait rien d’une chochotte, voir un peu de sang ou des plaies ouvertes était son pain quotidien (et son fond de commerce) mais dès lors que cela le concernait, cela le dégoûtait. C’était un crime de faire couler un sang aussi précieux que le sien, d’abimer un être aussi parfait que lui ! Et puis, entre nous, ça faisait un mal de chien. Il bougea sa jambe en grognant de douleur et s’adossa à l’arbre pour s’installer le plus confortablement possible. Il fallait qu’il soigne sa jambe avant qu’elle ne s’infecte. Quel était le sortilège, déjà ? Il tira sa baguette de son manteau en essayant de se souvenir. Episkey convenait aux blessures mineures et, après un nouveau regard vers sa cuisse ensanglantée, Rowan jugea qu’il fallait quelque chose de plus puissant. Vulnera Sanentur, quelque chose comme ça. Mais il doutait d’y arriver. Il n’avait rien d’un médicomage, lui. Il ôtait la vie, il ne la soignait pas.

Un craquement dans les branchages le fit sursauter. Il se redressa à moitié et brandit sa baguette en direction de la source du bruit. Tel un prédateur à l'affût, il scruta les alentours en silence. Cela pouvait être tout et n’importe quoi. Une petite bestiole inoffensive, les congénères du loup qu’il avait zigouillé, des sorciers du village, des moldus perdus… Il se sentait observé, cela l’agaçait.

Il haussa le ton, prêt à faire feu sur le premier être vivant qui l’attaquerait ou qui s’approcherait un peu trop de lui.

« Qui va là !? »

Rowan opta intérieurement pour la bête sauvage attirée par l’odeur du sang, c’était toujours plus simple que de gérer un être doté d’un minimum d’intelligence et de parole. Avec les humains, il fallait toujours discuter, toujours trouver des arrangements... Quel ennui ! Il s’appuya sur le tronc de l’arbre pour se remettre sur pied. La douleur dans sa jambe le tiraillait, mais le Mangemort préférait être debout pour se battre.