Stranger than paradise [FE]

Bella était levée depuis tôt ce matin là, elle ne dormait jamais beaucoup, elle détestait l’inaction et même en dormant, elle avait parfois l’impression de s’ennuyer. Elle avait profité de la fraîcheur de l’aube pour marcher un peu dans les rues de Londres, toujours habillée de la même robe noire, sobre, son visage enfouie sous une capuche pour ne pas être reconnue. Si le ministère refusait toujours de reconnaître le retour du Mage Noir, Bellatrix ne pouvait pas se permettre pour autant de se promener à découvert dans les rues de la capitale. Elle était recherchée elle. Evidemment son évasion de la prison d’Azkaban n’était pas passée inaperçue et ça le ministère ne pouvait pas le nier, elle se devait donc d’être prudente. Malheureusement pour elle, sa prudence se trouvait souvent rapidement oubliée lorsque l’opportunité de faire du mal se présentait. Avec l’intention parfaitement innocente de se promener tranquillement, Bellatrix préféra donc les rues du Londres moldu à celles de l’allée des Embrumes.

Bella transplana tranquillement dans une ruelle déserte et vérifia que personne ne pouvait distinguer son visage avant de s’engouffrer dans la rue adjacente. Ces précautions étaient sans doute inutiles mais elle voulait éviter de prendre trop de risques tout de même, peut-être bien que les médias moldus aussi avaient diffusé son portrait… Elle plissa les yeux en sentant le soleil taper plus fort déjà que tout à l’heure. Par Merlin ce qu’elle détestait le soleil. Pour tout le monde il était symbole de joie, de sérénité et de bonheur… tout ce que Bella vomissait en fait. Elle garda sa capuche, cette fois pas pour éviter d’être reconnue mais bien pour ne pas prendre trop le soleil et continua de marcher. La matinée devait être déjà bien avancée désormais mais Bellatrix ne croisa quasiment personne, d’ailleurs elle ne savait pas bien ce qu’elle cherchait exactement comme victime potentielle. Lorsqu’il s’agissait de torturer, elle ne faisait aucune discrimination Peut-être qu’en continuant elle tomberait sur un sorcier du ministère ou alors sur un moldu dont la tête ne lui revenait pas. En attendant elle ne voyait pas encore de raison de sortir sa baguette et de se faire trop vite repérer.

Alors qu’elle commençait à désespérer de trouver ne serait-ce qu’une gamine seule qu’elle pourrait traumatiser, elle aperçut justement une très bonne raison de sortir sa baguette. Sur le trottoir d’en face se promenait un jeune homme brun à la figure pâle et à l’air niais. En tout cas c’était comme cela que Bellatrix le voyait. Elle cligna des yeux plusieurs fois de suite, se frotta même le visage pour être sure qu’elle ne rêvait pas, elle n’en revenait pas de la chance qu’elle avait. Non, Bellatrix ne venait pas d’apercevoir le chanteur du groupe dont elle était fane L’homme qui se promenait innocemment à quelques mètres seulement était quelqu’un de bien plus important pour la brune, et de bien plus important pour le Seigneur des Ténèbres. Sirius Black, son cousin, se tenait juste là sous ses yeux.

Sans même réfléchir plus avant, Bellatrix traversa la rue d’un pas vif, sortant sa baguette à mesure qu’elle s’avançait. Elle sentait son cœur s’agiter de plus en plus à chaque pas qu’elle faisait et l’adrénaline annonçant le combat augmenter dangereusement. Car cette fois, il ne s’agirait pas d’un combat ordinaire ou du simple massacre d’une famille de traîtres à leur sang. Non. Cette fois, il s’agirait d’un combat entre elle et son cousin, son idiot de cousin. Bella enleva doucement sa capuche, dévoilant son visage au jeune homme. Elle voulait que Sirius puisse voir qui allait l’agresser pour son dernier combat. Et Bellatrix voulait pouvoir lire la peur et la détresse dans son regard. Elle s’arrêta finalement à quelques mètres de lui et leva sa baguette, visant directement le cœur de Sirius avant de lui lancer :

« Tu aurais peut-être mieux fait de rester caché dans les jupes de Dumbledore finalement…»

Accompagnant le tout du sourire sadique dont elle seule avait le secret, elle lança un Doloris qui frappa son cousin de plein fouet, le projetant en arrière dans une ruelle déserte. Bella avait fait exprès de lancer son sortilège pour à peine une seconde, elle voulait simplement le mettre à terre, le déséquilibrer, et par la même occasion le mener là où personne ne pourrait venir l’aider. Elle s’avança vers le corps du membre de l’ordre, se plaçant entre lui et la sortie avant de prononcer cette fois ci, non sans un certain plaisir, le sortilège de mort. Elle sourit en voyant l’éclair de lumière verte partir. Cette fois c’en était fini de Sirius Black. Pour de bon. Et personne ne viendrait le sauver cette fois.

Bella regardait avec satisfaction le corps étendu de son cousin par terre. Elle sentit une part de son énergie se vider alors que son sort partait dans sa direction, et il était apparemment impuissant. Apparemment, puisque ce que Bella n’avait pas vu, c’était que son cousin avait anticipé son attaque. La lumière de l’Avada Kedavra l’empêcha pourtant de voir Sirius se jeter sur le côté pour l’esquiver. La seule image qui lui apparut fut son visage, dur, froid, apparaître comme par enchantement juste devant le sien. Elle crut tout d’abord que c’était son fantôme qui voulait la hanter, mais si c’était le cas, c’était raté. Voir son fantôme la suivre partout lui rappellerait seulement le succès de son action, et elle pourrait ainsi en profiter à longueur de temps. Ce ne fut que lorsqu’elle reçut son poing, bien réel lui, dans la figure qu’elle comprit qu’il avait survécu.

Désormais allongée par terre, Bella se retint de pousser un hurlement de douleur. Ce n’était pas l’envie qui lui manquait mais elle ne voulait pas donner la satisfaction à Sirius de laisser apparaître le moindre signe de souffrance. Il ne fallait pas inverser les rôles. Faire souffrir les autres, c’était sa vie. Son cousin n’était qu’un amateur. Dans les combats de sorciers, Sirius se défendait comme une fillette, mais elle devait avouer qu’en combat moldu, il savait prouver que c’était lui l’homme. Et il semblait se débrouiller plutôt pas mal pour une fois. Encore par terre, elle remarqua que sa lèvre saignait. Serrant la mâchoire dans un geste de fureur pur, elle entendit son cousin se précipiter par terre dans son dos. Sans avoir besoin de se retourner, elle comprit : sa baguette. Esquissant un sourire à peine le temps d’une seconde, elle se releva à son tour dans un geste d’une vivacité impressionnante pour son âge et se plaqua d’elle-même contre le mur de la ruelle. Elle entendit un Stupéfix rugir dans son dos et rigola presque de la nullité de son sort… Un stupéfix ? Vraiment ? C’était avec des sorts de gamins de 14 ans qu’il comptait la défier ? Pire encore que le coup de poing qu’il lui avait mis, l’évident manque de sérieux avec lequel il la prenait l’énerva au plus haut point. S’il ne jouait pas le jeu à fond, il insultait son talent de sorcière, mais puisqu’apparemment il ne voulait pas lui montrer le respect qu’elle méritait, elle n’avait qu’à lui prouver qu’elle en était digne.

Se décollant doucement du mur de pierre contre lequel elle venait de se jeter, elle s’avança vers son cousin. Sa baguette en main, un grand sourire aux lèvres. D’un geste désinvolte, elle cracha le sang qui commençait à s’accumuler au bord de ses lèvres, puis elle regarda Sirius directement dans les yeux :

« Il va falloir faire mieux que ça cousin. C’est drôle, contrairement à tous tes amis, j’ai toujours su que tu n’avais pas tué Pettigrow. » Se délectant de l’expression de surprise qui se dessinait sur le visage de Sirius, elle poursuivit en ricanant « Tu n’en as pas les couilles »

Si elle continuait à provoquer son égo surdimensionné à coups de sarcasmes, et s’il continuait à lui répondre à coups de poings, ça allait finir en bain de sang. Aucun des deux ne laisserait l’autre s’en sortir, il y’avait trop de haine entre eux, un passé bien trop profondément gravé en eux pour que cette fois ils se dégonflent. Et à l’idée qu’un d’eux deux allait finalement mourir de la main de l’autre, Bella se sentit soulagée. C’était l’issue idéale, et elle avait attendue toute sa vie pour une opportunité pareille. Ce matin, elle ne la manquerait pas.

Maintenant qu’ils avaient tous les deux esquivé les attaques rapides de leur adversaire, le combat n’était plus une question de vivacité mais de puissance magique. Bella n’avait donc aucun doute sur l’issue du combat. D’ailleurs, ça n’avait rien d’étonnant qu’ils arrivent si bien à esquiver les attaques de l’autre, malgré les années de séparation et de haine, ils s’étaient connu tout petit, et ils se ressemblaient trop pour ne pas se comprendre ( flippant non ? ). Même si Bella ne pensait pas Sirius à la hauteur du duel qui l’attendait, elle ne voulait prendre aucun risque, elle ne lui laisserait pas une chance. Et le meilleur moyen qu’elle avait de rendre Sirius quasiment inapte au combat, plus que d’habitude encore, c’était de le faire sortir de ses gonds. Un bon dueliste devait savoir se contrôler, malheureusement, Sirius était impulsif et il s’énervait aussi facilement que son débile de filleul. Un rictus affreux dessiné sur le visage Bella lui lança donc :

« C’est dommage que Potter ne soit pas là pour voir ça. J’aurais fait d’une pierre deux coups… Et puis il aurait aussi pu profiter du spectacle… »

Voilà une sacrée réplique. Narguant son cousin de son plus atroce sourire, Bella s’avança encore un peu, espérant ainsi que son prochain sortilège serait d’autant plus douloureux. Avec un peu de chance, Sirius finirait peut-être même par la supplier de le tuer, elle s’imaginait déjà la scène. Le cœur bondissant dans la poitrine, Bella prononça finalement son sort :

« Bombarda ! »

La lutte entre les deux cousins devait être belle à voir, aussi bien pour le combat magique, que moldu… que pour le joutes verbales. A vrai dire c’était peut-être encore le meilleur du combat, ce que Bella appréciait le plus. Certes elle aimait torturer les gens physiquement, cela allait sans dire, mais leur faire mal psychologiquement était plus délicieux encore. Les blessures physiques guérissaient, mais les blessures morales étaient plus dures à effacer, certaines vous marquaient à vie. Et elle en savait quelque chose. Grâce à son cher cousin, entre autres. S’efforçant d’oublier tout cela pour en revenir au combat, Bella commença à sourire, sentant la véritable bataille approcher, mais les paroles de son cousin lui ôtèrent immédiatement le sourire qui venait de naître sur ses lèvres :

« En parlant de ça, ce n'est pas moi qui flatte celles de Voldemort et qui suis prêt à me mettre à genoux pour lui prouver ma loyauté et le satisfaire. T'as pas mal à la bouche, Bella ?… A force de dire des âneries ... »

Bella en resta bouche bée ( ironie powa ). Elle qui aimait bien les insultes et les provocations, elle trouvait tout de suite cela moins drôle lorsqu’elle en était la victime. Sirius était allé trop loin cette fois… Elle pouvait se moquer de Potter, après tout ce n’était qu’une larve, un sous sorcier… et encore. Le regarder était une insulte suffisante pour la brune. Mais elle ne permettrait pas à Sirius de s’attaquer à sa loyauté envers le Seigneur des Ténèbres, c’était tout ce qui lui restait. Et elle n’appréciait pas non plus le sous entendu atroce qu’il avait glissé. Justement Bella n’était pas ce genre de femmes, elle avait mérité sa place dans les rangs du mage noir, et elle le lui prouverait. Elle ferait même en sorte qu’il ne l’oublie plus jamais…

Elle s’efforça d’oublier ce que Sirius venait de lui dire, se rappelant que c’était le jeu. Il en avait toujours été ainsi. Au lieu de se morfondre ou de commencer à lui sauter dessus pour le rouer de coup, comme lui l’aurait fait à sa place, elle se reconcentra, ou en tout cas elle essaya. Elle força un nouveau sourire atroce avant de répondre à sa réplique : s’attaquant à la seule personne que Sirius aimait peut-être au moins qu’elle aimait le Seigneur des Ténèbres : son abruti de filleul, Harry Potter. Avant même que Siris ait eu le temps de répondre, elle vit bien que sa répartie avait eu l’effet escompté. Elle crut avoir en face d’elle un chien agressif à l’œil mauvais, pourtant Sirius ne s’était pas transformé. Il fallait croire que son statut d’animagus avait déteint sur lui On aurait dit qu’il avait la rage, au propre comme au figuré d’ailleurs, apparemment elle avait visé juste. Affichant cette fois un sourire parfaitement sincère, elle lança son attaque.

Apparemment elle avait dégainé juste à temps. Elle avait à peine entrevu les lèvres de son cousin bouger avant que son sort ne parte, en plein dans sa direction. Il eut à peine le temps de se jeter en arrière dans l’espoir vain d’échapper au sort, et Bella resta debout, un grand sourire aux lèvres, contemplant son travail. L’explosion avait été assez dévastatrice, surtout que la ruelle n’était pas très large. Elle s’était approchée de l’endroit où Sirius devait avoir atterrit et y était arrivée juste à temps pour entendre ce qui lui sembla être ses derniers mots :

«…asse ménopausée »

«Charmant… comme toujours.»

Fut la première chose qui lui traversa l’esprit. Ce qui l’étonnait, c’était que Sirius ne continuait pas à lui balancer des vacheries, même mourant, il continuerait à la provoquer, elle en était sure. Mais justement, après le chaos du Bombarda, le silence régnait en maître dans la ruelle. Elle s’approcha du corps de son cousin, gisant par terre. Maintenant que le brouillard s’était légèrement dissipé elle le distinguait nettement. Il ne bougeait plus, il était peut-être assommé, ou mort. Sans bien comprendre pourquoi, Bella frissonna légèrement à cette idée. Secouant violemment la tête pour s’enlever cette idée ridicule des pensées, elle s’arrêta devant le corps de son cousin, le regardant avec suspicion. Elle ne pouvait pas croire qu’il était mort, il n’abandonnait pas aussi vite, il était peut-être en train de feindre l’inconscience pour la piéger ! Oui ça lui ressemblait plus déjà. Elle lui lança un coup de pied dans le ventre mais lorsqu’elle ne vit aucune réaction de sa part, elle en conclue qu’il était bel et bien évanoui.

La baguette abaissée, elle restait bloquée sur cette image. Sirius baignait dans son propre sang, dans une ruelle répugnante de la capitale Anglaise. Une rue moldue qui plus est. C’était vraiment pathétique. Bon ben… ne restait plus qu’à l’achever n’est-ce pas ? Mais pourquoi ce simple geste lui paraissait si compliqué maintenant ? C’était sans doute la pression… Elle avait tué des dizaines de personne, des bébés, des adultes, des femmes, des vieux… mais alors qu’elle avait le pouvoir de décider de la vie ou de la mort de son plus vieil ennemi, elle restait comme paralysée. L’enjeu était grand, mais pendant le combat elle n’avait pas eu une seule seconde d’hésitation. C’était peut-être trop facile… trop lamentable, même pour Sirius. Non pas qu’il méritait mieux mais bon… elle aurait préféré le tuer en plein combat, sans avoir à réfléchir aux conséquences. Prendre les vies d’inconnus n’était rien, mais celle de son cousin… c’était une sensation étrange. Pourtant, elle aurait tué père et mère pour servir le Seigneur des Ténèbres, mais achever un de ses plus grands ennemis lui semblait impensable désormais. Il lui semblait que toute sa vie, elle avait attendu ce moment, et voilà que désormais, elle aurait voulu être partout, sauf ici. Il fallait avouer que Sirius ne lui rendait pas la tâche plus facile… Il était inconscient, incapable de la provoquer pour l’énerver… quel nul celui là. Jamais là quand on avait besoin de lui. Et étendu ainsi sur le sol, immobile, Bella prit enfin le temps d’observer son visage, son nez, ses cheveux… ses lèvres. La prison l’avait peut-être changé, mais pour Bella il était resté le même que dans leur enfance, alors que le corps de l’adulte gisait devant elle, c’était l’enfant qu’elle revoyait. L’enfant qui la hantait.

Fermant les yeux pour chasser ces images de son esprit, elle ne les réouvrit que pour constater l’échec cuisant de son entreprise. Elle qui était si douée pour la légilimencie, pour compartimenter son esprit, pour le contrôler… la voilà incapable d’arrêter de revoir son cousin sous son meilleur jour. Pourquoi fallait-il que ce soit si dur ? Si un mangemort passait par là, elle allait se faire tuer, elle était comme paralysée. Mais lorsqu’elle imagina un serviteur du Mage Noir passer par ici et les tuer tous les deux, elle se sentit frissonner. Elle n’avait pas peur de la mort, non, alors pourquoi cette pensée l’effrayait-elle autant ? Non. Elle ne devait pas y penser, elle devait arrêter de ses poser ces questions. Elle se prit la tête à deux mains, essayant en vain de se retrouver elle-même, de redevenir celle qu’elle croyait être Bellatrix… Mais devant son impuissance totale, elle lâcha un hurlement atroce, puis transplana, loin d’ici.