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| | | Sujet: Regrets ? Sam 2 Oct - 13:13 | |
| Nostalgie ? Dépression ? Regrets? Pas vraiment mais, ce matin-là, pire qu’à son habitude, l’humeur de Justin n’était pas au beau fixe. Le mois de juin aux Bermudes est pourtant l’un des premiers très chauds de l’année. La température monterait doucement sans être éprouvante grâce à la brise permanente, tout annonçait une nouvelle journée parfaite sans ouragan à redouter même si c’en était la saison.
Installé dans un transat de la terrasse couverte, fixant les doux rouleaux de la mer azurée, Davenport sirotait son café en fumant négligemment une cigarette. Derrière lui l’imposante villa entourée de bougainvillées dormait encore. Justin adorait cette heure où il pouvait goûter une paix profonde. Souvent, dans cette solitude, il se faisait l’effet d’un acteur prêt à entrer en scène avant le lever du rideau. Le stress allait venir, il faudrait encore et toujours endosser son costume et jouer son rôle. Il ne s’en plaindrait pas sauf qu’aujourd’hui, pour une raison inconnue, des souvenirs affluaient, le rôle lui pesait.
Six mois plus tôt il aurait dû mourir ! Tous les médecins le lui avaient confirmé : son cas était désespéré. Les savants se demandèrent bien par quel miracle le moribond avait survécu. Davenport s’était tu. Il savait lui, grâce ou à cause de qui tout était arrivé.
Comme dans un rêve éveillé, les yeux perdus dans les tréfonds de sa mémoire, Justin revint dans cette chambre de soins intensifs où tous l’avaient abandonné à son funeste sort. Personne à son chevet, personne pour lui tenir la main alors que déjà son âme cherchait un passage dans les ténèbres environnantes. Le voile allait s’ouvrir, il y aspirait. Il ne souffrait cependant plus, sans doute par les drogues injectées. Sa main avait touché le voile, il était prêt à le passer. Il laisserait derrière lui une foule de souvenirs et des êtres très chers auprès desquels il aurait souhaité vivre plus longtemps mais … c’était ainsi... Qu’avait-il fait pour mériter ça ? Rien de bien grave… il avait aimé une femme, la plus adorable des femmes, celle pour qui il aurait combattu des dragons, levé des légions : Samantha ! Malheureusement cette femme n’était pas la sienne et l’époux trompé s’était vengé de façon magistrale.
Le retour chez les vivants avait été brutal. Comme sucé en arrière, Justin avait repris conscience dans une chambre moins vide que celle quittée. Près de lui, le narguant, se tenait le mari bafoué. Réflexe ? Justin chercha sa baguette. Sanders avait ricané. Ses paroles teintées de fiels résonnaient encore à ses oreilles :
Ne cherche pas ta baguette. T’es pas assez en forme pour un Avada… moi oui. Ne cherche pas Sam non plus. Elle et moi venons de renouer de très, très chaudes relations.
Il aurait préféré mourir que d’entendre ça. Puis, contre toute attente, Andreï avait clamé :
Tu dois vivre, tu vas vivre ! POUR ELLE ! Uniquement pour elle ! OUVRE GRAND TES OREILLES ! Si jamais un jour j’apprends que tu la fais pleurer, si tu portes la main sur elle, JE JURE QUE TU Y PASSERAS POUR DE BON ! A BON ENTENDEUR !
Quels moments atroces ! Si apprendre qu’il devait la vie à Sanders l’écœurait déjà, savoir que Sam avait été le retrouver, sans doute pour marchander son sauvetage, l’achevait.
Sanders s’était évaporé. Lui, aussi faible qu’un nourrisson, il n’avait rien trouvé de mieux que de tomber de son lit. Quelque chose craqua dans la chute. Justin ne s’en soucia pas. Rampant vers la porte, il n’avait pu que frapper le panneau de la porte de sa chambre ce qui attira enfin l’attention de l’infirmière. Que d’émois ! Un condamné à mort qui se réveille ! En deux temps trois mouvements, le personnel ameuté l’avait remis dans ses draps où il s’était débattu en réclamant Samantha, Michael et, à défaut, Lord Cavendish.
Ce dernier répondit à son appel malgré l’heure tardive. Il rayonnait de satisfaction en voyant l’ami de son beau-fils dans un tel pétard.
Milord, avait insisté un docteur, vous devez nous aider à convaincre Mr Davenport de prendre un calmant. Il envoie tout au diable, jure comme un charretier et fait peur aux infirmières ! Jambe brisée, deux côtes cassées, il est… complètement fou…
Laissez-le tranquille, je m’en charge. Où sont ses effets personnels ?
On lui indiqua un casier. Sir John le fouilla dès qu’ils furent seuls. Il y trouva l’objet voulu et l’amena à Justin après avoir tenté un sort qui resta sans effet.
Voilà ta baguette, mon ami. Maintenant, tu vas te calmer et répondre à mes questions, d’accord ?
Pas le temps pour ça ! Sanders m’a injecté un truc. Ça doit être l’antidote du poison… C’est Sam qui l’a payé… d’elle-même, je pense. On doit la sortir de ses pattes, je…
Du calme Justin. J’ai eu l’occasion de parler avec Sam… elle a les pieds sur terre. Elle s’en sortira. Que t’a dit Andreï ?
En s’énervant, Justin lui avait déballé ce dont il se souvenait.
J’étais à moitié dans le cirage, mais j’ai pigé l’essentiel : il est capable de l’embobiner à nouveau… JE NE VEUX PAS LA PERDRE, SIR JOHN ! Je dois la retrouver ou Je… je préfère crever.
Mon jeune ami, ton jugement est faussé. D’après ce que tu as dit, Sanders… te la confie. Il te donne Sam, Justin ; il s’efface de sa vie, de la tienne !
Les mots avaient mis du temps à percer l’esprit embrouillé de Davenport. Il n’y croyait pas trop à ce cadeau… ça n’avait pas beaucoup de sens, selon lui.
Andreï ne donne jamais rien pour rien… Il est capable de tout ! Si ça tombe, Sam est prisonnière quelque part… Il me la rendra morte pour mieux me faire expier… Je dois…
Tu n’iras nulle part dans ton état, Justin. On va venir te plâtrer. Ton vol plané à terre a fait des dégâts.
Une paire de sortilèges, et je serai sur pied.
C’est la première chose que j’ai essayée, Justin. Rien n’y fait… J’ignore ce que t’a filé Sanders mais… on dirait que la magie n’opère plus sur toi.
La belle affaire ! Justin s’en fichait, il voulait à tout prix retrouver Samantha au plus vite.
Le plus vite mit quatre jours pleins à porter ses fruits. Mis au parfum par Lord Cavendish, Les Forester ( La princesse Orloff, mère d’Andreï et Gerry, père de Sam) aidèrent aux recherches. Les patronus rodèrent longtemps autour d’un périmètre infranchissable. Après l’intervention de briseurs de sorts appelés en renfort, Sam fut découverte dans une résidence de banlieue. Justin tenait à peine sur ses béquilles quand il entra, volontairement seul, dans cette bicoque de luxe glaciale. Il avait jugé que c’était à lui de faire ce « boulot »
Sam ? Sam je suis là…
Sa voix ne rencontra aucun écho. La trouille au ventre, il en fouilla des pièces en clopinant, misérable. Personne en bas… Il monta à l’étage. Porte après porte, il avait exploré presque toutes les pièces quand enfin, il la trouva. En position fœtale sur un lit, Sam… dormait.
Choir près d’elle, soupirer de joie en la prenant dans ses bras, Justin ne savait quel saint remercier. Il se prit une paire de baffes magistrales qui l’enchantèrent mais moins que ce qui suivit quand elle le reconnut... le bonheur…
Six mois… Six mois de mascarade… Il est des silences qui valent mille mots.
Le retour à la « normalité » s’effectua sans trop de mal. Sam était en bonne forme. Le frigidaire était plein, elle n’avait eu ni faim ni soif. Elle était restée complètement seule ces derniers jours, essayant de sortir sans le pouvoir, dépourvue de tout sauf de provisions de bouche. Justin était heureux… Il n’avait pas su ( ou pas pu) lui cacher la dernière intervention de Sanders à leur égard. Ça l’avait laissée… songeuse. Faisant fi de ces états d’âmes comme des siens, Justin avait endossé son costume de scène, celui de l’homme parfait qui blaguait de tout, déplaçait des montagnes selon ses besoins pour arriver à ses fins. Sam jouait le jeu…
Il n’était pas dupe, elle non plus.
Des compromis furent indispensables vis-à-vis de Nate, la maîtresse de Sanders. Nate… dolore aeterna
Quelque part Justin était et resterait lié à elle qu’il le veuille ou non. Les enfants, leur lien le plus fort, furent au centre d’un débat âpre et amer. Justin voulait ses enfants. Ses droits étaient incontestables. Dès l’adultère prouvé – grâce au double des clichés de Thaïlande – Nate dut la boucler. Cependant Davenport n’était pas d’un naturel cruel. La détresse de Nate, rencontrée par les hasards du ministère, l’avait ému et obligé à des concessions. Il accepta qu’elle puisse recevoir chez elle leurs enfants, une semaine par mois tant qu’aucun satellite indésirable ne se manifesterait. Chaque séparation lui coûtait énormément mais les retrouvailles valaient toutes les peines du monde.
Marrant comme les grandes avaient d’emblée accepté Sam en nouvelle maman. Les pauvres petites en avaient bavé durant leur séjour avec leur mère biologique flanquée de Sanders. Viv et Flore ne firent aucun mystère de ce qu’elles avaient vu, entendu ou subi avec eux. Elles étaient ravies de pouvoir vivre près des « cousins » De Brent, même si chez eux, ce n’était pas trop la joie à cause des problèmes conjugaux de leur parent. Pauvre Michael ! Il en avait tiré une tête quand il avait su que son meilleur copain avait failli partir pour de bon sans lui avoir dit au revoir.
Tous les jours ils se voyaient, s’entraidant avec leurs enfants. Souvent Justin et Michael échangeaient des confidences. Ils ne se cachaient rien, même des choses que leur épouse ignorait. Ainsi l’ex-mangemort pouvait-il comprendre les craintes de son pote. Sa plus grande étant : perdre Sam.
Non, lui avait-il avoué un jour, Sam et moi ne parlons jamais de ce qui s’est passé cette nuit-là. On est si proches que c’est inutile, je t’assure. Je sais, et elle sait que je sais. C’est un peu comme pour Nate et moi.
Ne me dis pas que tu en pinces encore pour cette vache ? s’était récrié Michael.
Ce n’est pas de l’amour… peut-être un peu de pitié… mais on ne range pas près de 7 ans de vie commune au placard comme si rien. Elle est enceinte d’Andreï, en plus…
Tu es jaloux ?
Non, pas de danger, rit tristement Justin.
Tu as bien raison, d’ailleurs si Sanders vous surveille comme tu sembles le craindre, il doit savoir que Sam est aussi dans une « position » intéressante. Sacré Justin ! Vous avez été vite, avec Sam.
Les formes de Miss Forrester ne laissaient aucun doute sur son état, à présent. Mais cette déclaration de Michael, si elle se voulait flatteuse pour son pote, avait mis ce dernier mal à l’aise :
Tu ne sais pas tout Michael… Je ne suis pas le père du bébé de Sam. Elle commençait sa grossesse quand elle m’a rejoint au Venezuela.
A Michael d’ouvrir des yeux ronds :
Tu veux dire que… Que c’est Sanders qui…
Il doit croire que je suis le père. Nous entretiendrons cette fable jusqu’au bout. Ce gosse est le mien, quoiqu’il dise ou fasse.
Et les divorces, où en êtes-vous ?
Pour les moldus, c’est réglé. Nate l’a eu à ses torts, Sam aux siens puisqu’elle a quitté le domicile conjugal. Mais Sanders s’est montré raisonnable… trop, à mon sens. Pour les sorciers, par contre, nous sommes toujours mariés et donc adultères. Briser un serment pareil est plus complexe que l’on croirait. Ma belle-famille me soutient, qui l’aurait cru ? C’est surtout le côté Orloff qui en rajoute. Néanmoins, au bout d’un an de séparation, le divorce sera prononcé.
Vous n’avez plus si longtemps à attendre, alors.
Non, mais ça m’ennuie de nous savoir encore liés à ceux-là.
Et ta… santé ?
Bof…
Pourquoi le cacher, Justin était bien moins fringant depuis sa résurrection. Sa patte brisée ne se ressoudait pas normalement. Ni docteurs moldus, ni sorciers n’y pigeaient rien. Condamné à traîner la jambe, interdit d’efforts physiques à moins de souffrir le martyre, cette diminution minait le moral de Justin. Même au lit, il se sentait minable et le supportait mal. La magie elle-même semblait l’avoir déserté. A peine s’il réussissait des sorts mineurs, et encore après beaucoup d’efforts. Des « cadeaux » de Sanders, sûrement…
Pour Sam, il portait le masque de l’indifférence et de la bonne humeur sans se leurrer sur l’efficacité du stratagème.
Le soleil éclaboussait la plage de sable blanc. Son café était froid. Justin écrasa sa cigarette en entendant des bruits de pas dans son dos. Le rideau se levait, le théâtre pouvait commencer.
Se retournant, il sourit largement :
Bonjour mon amour ! Bien dormi ?
Il voulut se lever, elle s’empressa de l’en empêcher, l’entourant de ses bras aimants et l’embrassant tendrement. Il l’attira sur ses genoux faisant fi de la douleur déclenchée par ce petit poids déposé.
Et lui, comment va-t-il ? s’enquit-il en caressant tendrement le joli bedon de sa compagne.
Sam assura que tous les deux allaient bien en se moquant un peu de Justin qui ne démordait pas de son idée sur le sexe du bébé.
C’est un garçon ! Je suis sûr que tu le sais mais tu ne veux pas me le dire, vilaine fille ! Le petit déjeuner est prêt… Non, ça ne m’a pas fatigué. Promené ? Euh… non, pas encore. Suis même pas habillé ! Que diraient les voisins ?
En fait de voisinage, ils étaient vraiment à l’abri. St Georges leur offrait un coin de tranquillité à toute épreuve, exactement ce dont ils rêvaient. Des petites criques naturelles formaient des piscines d’eau tiède toute l’année… un paradis.
Sam se releva en riant et alla composer le plateau du repas qu’ils prendraient dehors. C’était la semaine sans enfants… Ils avaient tout leur temps rien que pour eux deux.
Que ferons-nous aujourd’hui ? Shopping ?
Il savait que Sam adorait Hamilton, son animation et ses boutiques. Ils en profiteraient pour passer voir la gynécologue attitrée de Sam, le docteur Jane Lewis, recommandée par Lady Marcia Grey, personnellement. Justin refusa l’aide de Sam pour sa toilette, il détestait encore plus son handicap dans ces circonstances. Comme d’habitude, Sam prit le volant. La dernière tentative de conduite par Justin avait faillit les envoyer dans le décor. Aussi la prudence s’imposait même si Davenport le regrettait, en douce.
Traverser les multiples ponts reliant les îlots ne leur demanda pas trop de temps. La capitale colorée leur servit son décor typique dans lequel les tourtereaux se fondirent. Au bout d’une heure, Davenport déclara forfait :
Je m’assieds à cette terrasse, amuse-toi bien. N’oublie pas le rendez-vous avec le toubib, dans deux heures !
Il s’installa, calant sa béquille entre deux siège, commanda un café et regarda la mer. Il en avait éclusé trois quand une Sam joyeuse, portant de nombreux paquets vint le rejoindre. Elle lui raconta ses visites en prenant aussi un petit noir serré, puis rassembla ses colis pour aller à la voiture. La voir si chargée et lui si empoté à l’aider n’arrangea pas le moral de Justin. Il aurait dû s’y faire, mais…
En route vers le cabinet de la gynécologue, Sam lui parla du projet qu’elle couvait depuis quelque temps : ouvrir un restaurant ! Ils en avaient débattu bien souvent. Au départ, le jeune homme avait été très enthousiaste, persuadé alors être à même de la seconder efficacement dans cette entreprise. C’était avant de réaliser que son état physique ne l’améliorerait pas. Depuis, c’était devenu un sujet délicat. Être chef coq demande une activité physique intense. Il s’en savait incapable à présent. Ne souhaitant pas troubler la belle humeur de sa chérie, Justin écouta, fit des remarques pertinentes, et… noya le poisson en détournant la conversation. Lui, il parla du voilier dont il rêvait et qu’il ne piloterait sans doute jamais. Le lady Nate, son monstre des mers, avait fini à la casse. Il ne le supportait plus mais désirait le remplacer par un bâtiment plus mignon, sur lequel il escomptait embarquer avec femme et enfants se perdre dans le vent.
Le docteur Lewis trouva Sam en forme, le bébé aussi. A 24 semaines, l’enfant encombrait fortement sa mère mais dans l’ensemble, tout était normal. Pour une primipare, Sam se montrait exemplaire et suivait à la lettre les recommandations de son médecin : elle devait surtout commencer à lever le pied et se chouchouter davantage. De quoi rendre Justin encore plus maussade. N’était-il pas qu’un poids mort pour elle ? Que n’aurait-il pas donné pour la seconder plus efficacement ! Hélas…
Après un déjeuner assez amusant en bord de mer, le couple rentra au bercail. Là, une surprise les attendait en la personne de lord Cavendish et de Maître Abermale. Des cris de joie retentirent à leur approche. Viviane et Flore leur sautèrent dessus à peine franchie la porte d’entrée.
Mais… Salut mes puces ! rit Justin en les recevant dans son giron. C’est merveilleux que vous soyez là ! Mais…
Tonton Dish est venu nous chercher chez maman Nate, dit Flore en s’accrochant à sa jambe blessée.
IL est de nouveau là, alors on a appelée Milord, compléta son aînée.
La grimace de Justin n’avait rien à voir avec la douleur occasionnée à sa guibole démolie. Le « Il » signifiait Sanders. Et avec lui dans les parages, bonjour les ennuis !
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Dim 3 Oct - 14:32 | |
| Comment pouvait-on être aussi con ? Andreï Sanders se poserait longtemps cette question. Un seul fait demeurait : il l’était bel et bien. Des mois à préparer des plans, intriguer, falsifier des preuves, engager des comparses, les éliminer, avaient été réduits à néant en quelques heures ! Tout ça pour les beaux yeux de Samantha Forrester. Son but était pourtant atteint : Davenport allait enfin payer son forfait et lui allait récupérer la seule femme qu’il ait jamais aimée, sa femme. Mais voilà… Samantha était enceinte de Davenport ! Sanders pouvait être immonde, glacial et tout ce que l’on veut mais quand il s’agissait du bonheur de Sam, il devenait chèvre. Jamais il n’aurait pu se regarder encore dans un miroir en sachant que, par son intermédiaire, celle qu’il adorait lui en voudrait de reste de sa vie pour l’avoir privée du père de son enfant. Elever le gosse de Davenport ne l’aurait pas gêné, mais le regard de Sam porté sur lui et ses actes aurait été insupportable. Il ne restait qu’une chance infime d’empêcher le drame. Tant pis ! Andreï devait la tenter.
Après avoir abandonné son épouse, Sanders s’était mis en contact avec ceux chargés du contrat sur la tête de Justin. Il s’était fait remonter les bretelles parce que, dans ce milieu, on élimine plus facilement que l’on ne sauve les gens et, une fois l’exécution en marche, les portes se fermaient, le retour en arrière, les regrets n’avaient plus de raison d’être. Vive la magie ! Sans elle Andreï n’aurait pas su rouvrir le contact et « forcer » la main aux exécuteurs. 1million de dollars pour un antidote ! Quand il y pensait, Andreï en était malade. Une veine qu’il ait réussi à négocier de ne payer qu’en cas de résurrection du condamné. Et cela avait fonctionné, même si on l’avait averti de certains effets secondaires indésirables. De ça, Sanders se foutait. Davenport vivrait, cela suffisait !
1 Million de dollars pour faire sourire Sam… dans les bras d’un autre ; pour qu’un gosse puisse connaître son père...
*Andreï, tu vieillis mal, mon pote !*
Les suites de ce sauvetage in extremis, il ne voulait pas les vivre en direct. Il n’allait quand même pas faciliter les retrouvailles de sa femme et de son amant, non ?
*Qu’ils se débrouillent !*
Sam ne manquerait de rien dans la villa louée. Si Tintin était aussi malin que supposé, il mettrait rapidement la main dessus, alors… Autant disparaître de la circulation. Dire au revoir à Nate ne l’effleura même pas. Il ne pensait qu’à un chose : s’évaporer.
Le monde étant ce qu’il est, il existe toujours un coin où ça barde. Voilà exactement ce qui manquait à Andreï : que ça bouge ! Avec ses « petits » talents et antécédents, il ne manquerait pas de boulot.
La « ferme » eut la désagréable surprise de voir le major Sanders vouloir reprendre du service actif. Sa venue en créa des remous ! Le haut comité débattit longuement sur ce « cas » particulier. Cependant, ses états de services parlaient pour lui et les interrogatoires poussés auxquels on soumit le candidat ne purent que reconnaître les « qualités » du major. Deux mois d’entraînement intensif le remirent au top niveau mais on hésitait encore à l’envoyer sur le terrain.
C’est le meilleur agent d’infiltration que nous n’ayons jamais eu dans nos rangs ! prêchait pour lui le directeur Worpeld. Personne… ou presque… ne sait comment il s’y prend mais il a toujours réussi ses missions…
En y laissant parfois des plumes, comme dans l’affaire Longwood ! Et que dire du fils du colonel Peeters ? Sous ses ordres, on a failli le perdre !
On l’a mis à pied pour ça, suffisamment je crois. Ce gars n’est peut-être pas psychologiquement parlant quelqu’un de… stable. Mais je vous fiche mon billet qu’il vaut mieux l’avoir dans notre camp que dans celui des autres ! On le met à l’épreuve trois mois, après on avisera. Rompez, messieurs !
L’affaire avait été entendue et Sanders remis dans le circuit.
Quelle joie de reprendre de vieilles habitudes ! Sniper à l’occasion, démanteler des réseaux clandestins, pose d’explosifs, trafics en tous genres, récupérer des otages, voilà qui était plaisant. Au moins pendant ce temps, il lui arrivait d’oublier sa femme et… les futurs enfants. Si Nate n’avait pas menti, alors un petit Sanders se formait dans ses entrailles. Si au départ cette nouvelle lui était passée par-dessus la tête, il fallait bien avouer qu’elle l’avait marqué plus que prévu. Il s’en était fichu royalement et s’en moquerait sans doute encore s’il n’y avait eu cette guerre entre l’Ethiopie et l’Erythrée. Expédié sur place avec un bataillon médiateur, Sanders s’était retrouvé en plein conflit armé. Il avait l’habitude mais… Cette mission-là était différente. Il ne s’agissait pas de prendre part aux échanges mais de protéger les populations en déroute. Monter des camps de fortune, assurer le ravitaillement, soulager des maux n’était pas tellement dans ses cordes. De la misère, il en avait déjà vue souvent, trop souvent... L’unité médicale se trouvant débordée, on l’y affecta. Sachant que l’on ne raterait aucun faux pas de sa part, il s’employa au mieux à seconder médecins et infirmiers. Les cris des blessés, les pleurs des femmes… ceux des enfants… L’horreur !
Si au loin, bien douillettement, on négociait ferme, là Sanders connaissait l’enfer. Il venait de passer près de 24 heures d’affilée à recoudre, amputer, panser des gens quand une estafette vint le quérir. Un village était en proie à un sac en règle, il fallait une intervention musclée. Il était crevé mais dut obéir. En tenue de combat, celle qu’il préférait, il dirigea ses hommes vers le point de l’affrontement. Pas joli… ! Tirs de mortiers, mitraillade nourrie : un vrai massacre d’une population innocente qui n’opposait qu’une faible résistance.
Prendre à revers les assaillants était l’ordre du jour. Personne ne lui avait intimé de ne travailler que de l’extérieur. Aussi ne se gêna-t-il pas pour y transplaner. Ce qu’il y entreprit n’était pas très catholique, et alors ? Il fallait bien protéger ces gens ? Sanders s’y employa sans compter. Des sortilèges, il en distribua à tout va. Quelques bombarda maxima, beaucoup de protego et aguamenti, les agresseurs virent souvent leurs tirs déviés. Une habitation était sur le point de s’effondrer, ravagée par un incendie. Dehors, une femme hurlait : son bébé était à l’intérieur.
*Un dommage collatéral de plus…* pensa-t-il furtivement, prêt à passer son chemin.
Mais la femme le vit et l’accrocha. Tant de détresse… Dans son état de fatigue, il risquait d’être désartibulé. Dans le fond, qu’importait ? Il s’élança. Un aller et un retour qui valait le détour. La reconnaissance de cette indigène le retourna. Sa joie quand elle reçut son enfant dans les bras n’avait pas de prix. Même s’il se prit une balle perdue dans l’épaule la minute suivante.
Son exploit, il aurait voulu le passer sous silence. Malheureusement, son intervention avait été remarquée. Plusieurs témoins jurèrent que sans ce major issu dont ne sait où les pertes humaines auraient été doublées. Qu’en avait-il à cirer d’une médaille et d’une citation au tableau d’honneur ? Outre ces remerciements pour services rendus, on lui octroya une longue permission.
Deux jours d’hôpital, il était libre d’aller où bon lui semblait... La belle affaire ! Où se rendre sinon chez sa mère ?
La princesse Orloff trouvait la Floride trop chaude à cette époque de l’année. Sanders se douta qu’elle insisterait auprès de son mari pour renter en Angleterre. Il n’avait aucune envie d’être confronté à Gerry Forrester, son beau-père. Même s’il jugeait n’avoir rien à se reprocher dans le capotage de son mariage avec Sam, revoir le père de celle-ci ne lui seyait pas. Aussi s’arrangea-t-il pour rencontrer Anastasia seule.
Mon petit ! s’effara-t-elle en accueillant chaudement son rejeton remuant. Dans quel état es-tu encore ?
C’est rien maman !
Rien ? Tu es maigre comme un clou, as le bras en écharpe et ce n’est rien ?
Une éraflure sans importance. Je suis en permission. J’ai rempilé, tu vois.
Emotionnée, la princesse déploya mille attentions auprès de son garnement de fils. Elle voulait des détails, il en fut avare. Il la laissa babiller tout son saoul avant d’oser poser ses propres questions. C’était dur mais il devait savoir :
Et Sam… des nouvelles ?
Tu penses encore à elle ? Mon petit, tu devrais tourner la page. J’ai pourtant suivi tes instructions dans la seule lettre que tu m’aies envoyée… Si ça peut te réjouir, pour les sorciers tu es toujours son mari. Elle contacte parfois Gerry… elle est heureuse et... ne demande jamais de tes nouvelles.
Pas grave, mentit-il.
Tu ne me demandes pas des nouvelles de Nate Sommerby ?
Il haussa les épaules :
Je suppose qu’elle se sera trouvé quelqu’un d’intéressant pour chauffer son lit.
Andreï ! Comment peux-tu être aussi cynique ? Nate est une jeune femme très bien ! J’ai eu l’occasion de la croiser à plusieurs occasions, Andreï ! Elle m’a paru… très triste… très seule… Tu n’as pas été très honnête avec elle, avoue !
Ne t’en déplaise, si ! Je n’ai jamais rien promis à Nate, rien ! Si elle s’est entichée de moi, je n’y peux rien.
A d’autres, Andreï ! Cette fille est folle de toi et… et elle porte ton enfant ! Ça ne représente donc rien à tes yeux ? Je t’assure que pour moi, cela représente beaucoup !
Epouse-la, alors !
Andreï ! Je me demande parfois pourquoi tu es ainsi…
A ton avis… maman ? ( ironie)
Ce n’était pas très gentil de rembarrer ainsi sa génitrice et lui démontrer sa part de responsabilité dans l’attitude de son fils.
Tu me fais peur Andreï ! Tu pourrais au moins faire preuve de commisération… vis-à-vis de Nate ? Si tu ne veux pas le faire pour elle, fais-le au moins pour… moi ! Je me fais vieille ! J’aimerais… oui, j’aimerais beaucoup tenir mon petit-fils dans mes bras avant de franchir le voile.
Tu n’es pas malade au moins, maman ? Réponds !
Anastasia connaissait bien son « petit ». Elle joua à la perfection le rôle de vieille dame sur la pente du déclin fatal. De quoi mettre Andreï en couleur sur toute la ligne, ou presque. Il marcha à fond, paniquant à l’idée qu’avant peu sa mère quitterait ce monde. Quelque part, il sentit qu’elle exagérait mais… Il restait un mais, et un de taille !
D’accord, je vais aller voir Nate. Elle me fichera dehors, tu l’auras voulu ! *Et je l’aurai mérité*
La demeure de l’ex-Mrs Davenport était bien plus agréable en cette saison qu’en plein hiver. Nate devait aimer les roses, l’allée qui menait à la porte en était largement bordée. Il s’amenait les mains vides, et alors ? Aucun bouquet de fleurs ne pourrait pardonner son inconduite. A son coup de sonnette, une soubrette inconnue ouvrit. Elle tiqua devant cet officier de l’armée américaine en grand uniforme qui stationnait sur le seuil, le bras en écharpe. Intimidée, elle ne l’en laissa pas moins poireauter dans le vestibule tandis qu’Andreï ouvrait les oreilles. Des cris d’enfants… Il aurait dû s’y attendre.
*Davenport a lâché du lest, on dirait…*
La miss prit son temps avant de le recevoir. Fourbissait-elle des armes à son encontre ? Sûrement. Enfin, après un temps certain, la soubrette reparut et l’introduisit dans un petit salon coquet. Nate était là, assise dans un fauteuil à regarder la porte-fenêtre donnant sur le jardin en fleurs. Belle ? Oui, comme toujours. Son profil pur aurait fait les délices d’un peintre, sa poitrine pleine et son joli bedon aussi.
Bonjour, Nate. Je profite d’une perm pour passer te voir…
Aucune réponse, aucun signe vers lui… soupir.
Je me doute que tu m’en veux et je le comprends. Je n’ai pas la prétention d’espérer ton pardon, ni intervenir à nouveau dans ta vie. Je passe prendre de tes nouvelles… sur les conseils de ma mère.
Il aurait pu mentir, déclarer n’importe quoi mais cela faisait un bail que Sanders savait que la vérité était souvent une arme plus efficace que l’affabulation. Toujours pas de réaction, tant pis.
Je vois que tu te portes bien. Tes enfants sont avec toi, bonne chose. Excuse-moi de t’avoir dérangée. Au revoir, Nate.
Il recula… déçu. A tout prendre, il aurait préféré être bombardé d’injures ou recevoir un vase à la tête plutôt que cette indifférence silencieuse. Au moment où Il ouvrait la porte de son bras valide, une fillette déboula dans ses jambes :
Maman, Vivi est tombée, elle saigne et …
Un cri perçant vrilla les oreilles des adultes. Flore venait de reconnaître en ce militaire l’homme qui avait vécu là des mois auparavant, celui qui avait voulu la place de son père, celui qui avait fait pleurer… tout le monde !
Arrête ton cirque, Flo ! Je ne suis pas croquemitaine ! Où est Viviane ?
Il n’avait aucun droit de se mêler de ça, et alors ? Sans se soucier de Nate, il suivit la gamine jusqu’au jardin où l’aînée des Davenport pleurnichait, assise dans l’herbe en se tenant le genou. Son hurlement valait bien celui de sa sœur. Andreï s’en foutait :
Cesse de brayer comme un putois, idiote. Je vais pas te manger. Montre-moi ton genou !
Tremblante, la gamine avait libéré ses mains.
Une jolie écorchure ! On ne devra pas t’amputer pour ça.
Le sortilège de guérison fut instantané, Viviane bondit sur ses pieds. Elle prit sa cadette par la main et elles filèrent Merlin sait où. Revenant vers l’habitation, Andreï vit Nate plantée sur le seuil. Son regard était dur, dépourvu d’aménité quoique teinté de… curiosité ?
Je n’allais quand même pas la laisser saigner comme un porcelet ! grogna-t-il. Ce n’était rien du tout. Aucune comparaison avec ce que j’ai dû faire ces temps derniers. Me laisseras-tu passer ou préfères-tu que je fiche le camp d’ici en transplanant ?
Elle s’écarta, il avança. Tiens, une remarque sur son bras…
Ouais, une balle perdue ! Rien de glorieux, ni de trop douloureux. Mais… et toi… ? Est-ce que ça va ?
En réponse, elle l’invita à boire une tasse de café. Après tout, cela valait mieux que du cyanure ! A distance, ils rentrèrent dans le confort de la maison. Face à face, ils attendirent le plateau requis à la domestique. Aucun ne parlait, le silence était pesant. Pour meubler, tant il était mal à l’aise, Andreï commenta brièvement son emploi du temps depuis son départ. Il termina, la mine sombre :
De telles atrocités font réfléchir. Je crois que je vais raccrocher pour de bon. J’aurais souhaité…
Il n’eut pas l’occasion d’achever sa tirade, Lord Cavendish et maître Abermale se matérialisaient sans s’être annoncés. L’avocaillon s’empressa de débiter un laïus :
Bonjour Miss Sommerby. Conformément à l’ordonnance reconnue lors du divorce moldu, la garde des enfants doit être suspendue étant donné la présence d’un certain individu.
Nous sommes navrés, Nate mais la loi est la loi ! compléta Lord Cavendish.
Les gamines, radieuses de leur coup, se tenaient dans l’encadrement de la porte, chacune tenant un des jumeaux dans les bras.
Nate rugit telle une lionne dépossédée de sa portée. Andreï se dressa, blême :
Je… je ne savais pas ! Je m’en vais ! Laissez les enfants, c’est moi qui pars.
Rien n’y fit. Incrédule, il regarda le groupe s’évaporer. La scène à laquelle il pensait avoir droit en arrivant se déclencha alors…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 8 Oct - 23:18 | |
| Oublier! Oublier! Elle fermait fort les yeux, essayant d’effacer de son esprit les dernières heures. Impossible. Cauchemar ? Non. Ce serait mentir. Sam ne pouvait qualifier ainsi sa rencontre avec son mari. Elle s’en blâmait. Son amour pour Justin l’avait poussée à accepter ce marché, en le jugeant ignoble, pourtant, une fois face à Andrei, elle avait compris tant de choses.
Tu m’as tellement manqué Sam…Je t’adore Sam. Toi seule compte et comptera à jamais…
Il le lui avait prouvé…et elle avait succombé à cet amour irrémédiable. Elle lui avait dit un jour qu’avec lui pas de demi-teintes. On l’aimait ou on le haïssait. Sam ne voulait plus être sa femme mais ne pouvait pas le haïr…elle l’avait trop aimé. Leur seule erreur : elle aimait encore plus Justin, tant que donner la vie pour lui ne lui aurait pas pesé. Pourquoi ? Le cœur n’a t’il pas de raisons que la même raison ne comprend pas ?
Et il avait fallu peupler ce qu’il voyait déjà comme réconciliation avec un mensonge énorme, celui qui l’avait rendu fou…de rage, de haine presque mais surtout d’une douleur qui atteignit Sam tout autant que les coups octroyés. Elle pensa qu’il allait la tuer mais ne l’avait pas fait. Au milieu de sa hargne déchaînée, elle devina la douleur qui l’agitait.
TU ME RENDS DINGUE !... Inutile de chercher une issue ou d’attendre la cavalerie. Personne ne connaît cette maison.
Et il était parti…et n‘était plus revenu. Combien de temps resta t’elle là ? Sam n’aurait su le dire.
Affolée, déboussolée, déchirée, elle ne sentit pas passer heures ni jours. Son sacrifice aurait été vain…Justin n’aurait pas survécu. À quoi bon vivre ?...La vie sans lui manquerait de tout sens…
Sam ? Sam je suis là…
Elle rêvait. C’était sa voix. Elle ferma très fort les yeux. Ne pas se réveiller…Rêver de lui…à jamais…
*Je t’aime tant, Justin…*
Encore au creux de ce qu’elle croyait être illusion, se sentir serrée, en étroite étreinte, l’avait fait réagir avec une violence inespérée. Il aurait au moins mérité cela…mais voilà, que bien éveillée, le rêve n’en était plus un, c’était bien Justin qui était là, si près d’elle, vivant. Absolument vivant. Défaillante d’un bonheur sans nom, elle l’avait couvert de baisers délirants, en pleurant…de soulagement et aussi de remords.
Quand Justin, mitigé, avait avoué d’où venait son salut, Sam avait dû faire un effort pour ne pas hurler…mais au lieu de cela, se permit seulement ce qu’il interpréta comme un air songeur. Sans questions. Il savait, sans besoin de paroles, quel avait été le prix pour sa vie.
Six mois…tant de temps et si peu, à la fois.
Bonheur ? Certes. Splendide. Unique. L’amour, c’est beau. La réalité, cruelle. Justin lui était revenu mais, malgré tout, le prix avait été élevé. Il n’était que l’ombre de lui-même. Démuni, atteint à jamais, presqu’invalide. Courageux, sans se plaindre. Il assumait mais souffrait en silence de n’être plus celui d’antan. Sam ne l’aimait que plus, sans pour autant être dupe de ses états d’âme. Merveilleux comédien !
Une autre journée au paradis. À leur paradis. Elle se réveilla doucement, sans sursauts, se laissant aller, encore un instant à rêvasser, au calme. D’un geste très doux, elle se passa lentement sur son ventre ballonné, le bébé bougea, comme pour lui souhaiter le bonjour, la faisant sourire, ravie…Justin s’obstinait à parler de « lui », Sam taisait jalousement…elle savait mais adorait ce petit jeu et rêvait gentiment !
Mais tout n’était ni rose ni facile. Leur bonheur avait son prix et il était élevé. Pour Sam, cela avait signifié un douloureux distancement avec Gerry. Pauvre Gerry adoré, déchiré entre l’amour de sa femme et celui de sa fille. Relation compliquée. Sam avait brisé le cœur d’Andrei et cela, Anastasia ne pouvait pas le pardonner tout à fait, même si elle semblait comprendre ce qui avait poussé sa belle- fille à prendre cette décision. Cela faisait longtemps que Sam devait se contenter de bavarder avec son père au téléphone. Elle ne l’avait pas revu depuis des mois et cela faisait mal…
Retrouver ses enfants avait rendu Justin fou de bonheur mais provoquait aussi des sentiments mitigés. Il avait revu Nate, une ou deux fois et en était revenu abattu. Elle lui avait fait tout le mal du monde mais au fond de lui-même, il gardait encore le souvenir des années parfaites partagées avec sa rousse. Sam taisait ce qu’elle pouvait en penser.
Contraire à ce qu’elle avait craint, les filles de son aimé l’avaient acceptée en toute joie de cœur et en peu de temps, elle était devenue Maman Sam. Les tout petits ne demandaient pas mieux qu’une mère aimante et un père dévoué. Le matin où Anthony la surprit en disant distinctement « Maman », Sam pleura de tendresse. Peu après, Philip se joignit à l’exploit…du coup, elle était devenue la mère de quatre enfants et attendait un cinquième.
*Et dire que tu ne te sentais même pas prête pour un seul !*
Alonso avait adopté d’emblée sa trépidante nouvelle vie, quoique parfois pouvoir dormir la sieste en paix lui manquait. Les petites raffolaient de lui mais son préféré restait indiscutablement Justin…pas à dire, il l’aimait, ce gars !
Cette semaine les enfants étaient avec leur mère. La maison était plongée dans un silence soyeux, merveilleux…Sam se leva, enfila son peignoir et descendit…Elle savait où le trouver…
Sa jambe ne lui donnait pas de repos, il s’était levé, comme toujours, au petit matin, silencieux comme Alonso, qui l’avait suivi. Sam avait senti la caresse de ses lèvres sur ses cheveux et avait continué à se feindre endormie. Il avait besoin de cette solitude. Sa solitude. Son silence. Sa distance. Son seul et unique confident demeurait Michael, indéfectible loyauté. Ils partageaient joies et misères, avec une équité enviable. Sam devinait que le seul qui connaissait vraiment Justin à l’endroit et à l’envers, était bien De Brent. Elle s’entendait aussi à merveille avec lui…C’était déjà cela de gagné ! Solitaire, allongé dans son transat, Justin semblait se livrer, comme tous les matins à de profondes réflexions mais Sam savait très bien qu’il ne faisait que préparer sa mise en scène pour une autre journée parfaite au paradis…avec elle, pour elle…S’armant de son plus beau sourire, elle avança vers lui…le méritait elle vraiment ?
Bonjour mon amour ! Bien dormi ?
Elle l’empêcha de se lever et correspondit, véhémente, à son baiser, à son étreinte et ne put éviter qu’il l’attire sur ses genoux.
Je dors comme une marmotte…c’est terrible !, assura t’elle en riant doucement alors qu’il s’enquérait sur le bébé.
Et lui, comment va-t-il ?
Sam lui passa la main dans les cheveux et l’embrassa, mutine.
Bébé se porte comme un charme…c’est tout activité, là dedans !
C’est un garçon ! Je suis sûr que tu le sais mais tu ne veux pas me le dire, vilaine fille !
Elle riait, follement attendrie en l’embrassant .
Oui, je suis vilaine…et je ne dirai rien…M. le curieux ! Maintenait, laisse moi te gâter un peu…je vais…
Le petit déjeuner est prêt.
Mais je voulais le faire, protesta t’elle, tu dois te ménager, mon amour…
Non, ça ne m’a pas fatigué.
Et même si, il ne l’avouerait jamais.
Tu es merveilleux ! Et…tu es allé te promener un peu ? Il fait si bon à cette heure…
Promené ? Euh… non, pas encore. Suis même pas habillé ! Que diraient les voisins ?
Cela les fit rire de concert. Leur villa était suffisamment isolée du monde comme pour ne pas avoir ce genre de préoccupation.
Tout était si merveilleusement parfait et paisible que parfois elle se prenait à penser que tout serait merveilleux pour le reste de leurs vies. Le mirage durait deux ou trois minutes. Samantha était trop sensée comme pour ne pas savoir qu’il n’en était rien.
Petit déjeuner sur la terrasse, au bord de la piscine, en contemplant la plage de sable blanc, la mer calme, faisant des plans pour la journée. Justin la gâtait outrageusement et ne voulait que lui faire plaisir. Sam agréait en devinait qu’il ne voulait par cela que compenser ce qu’il tenait pour déficience. Il se sentait si inutile, selon ses propres mots mais à ses yeux était et serait toujours l’homme de sa vie…e santé ou maladie. Pour le meilleur ou pour le pire.
Les médecins, moldus ou sorciers ne trouvaient aucune explication pour ce rétablissement infructueux. A seules, avec sa conscience, Sam se refusait à croire que son ex-mari ait pu être capable d’une aberration pareille mais craignait de se tromper.
Après avoir couru les boutiques à s’en soûler, Sam rejoignit Justin pour se rendre chez la gynécologue qui suivait sa grossesse. Jane Lewis était une femme charmante, qui lui rappelait parfois son amie Lavinia. Après l’examen de routine et avoir déclaré trouver mère et enfant en parfait état, elle déclara néanmoins que le moment était venu de prendre les choses avec plus de clame et se laisser chouchouter un peu plus. L’expression pincée de Justin ne lui échappa pas, elle aurait tapé le Dr. Lewis.
Je me sens parfaitement bien et ne suis pas du genre à passer le jour les pieds sur des coussins à me faire servir. Je ne suis pas malade…seulement enceinte !
Jane Lewis avait souri en lui tapotant la main.
Vous êtes une petite femme très active mais celui-ci est votre premier enfant…prenez le avec du calme, d’ici un mois vos allez me donner raison.
Et d’énumérer toute sorte de maux qui l’accableraient sous peu…pieds enflés, jambes lourdes, mal au dos, fatigue, mauvaise digestion, sommeil inquiet…et on n’en finissait pas. De quoi penser qu’avoir un enfant était une épreuve terrible au lieu d’un bonheur !
Il ne faut pas croire tout ce qu’elle dit, assura t’elle, sur le chemin du retour, pas de quoi en faire un foin. Pimms est merveilleuse avec les enfants…si tu insistes on peut lui demander si elle a une jumelle, ça nous arrangerait !
Elle riait de la tête tirée par son chéri qui, bien entendu, envisageait déjà engager une armée de domestiques.
Jamais de la vie…Horreur ! Au plus…une femme de charge…pas de cuisinière…au moins laisse moi ce plaisir…oui !?
Elle avait failli dire que trop de monde affairé pour son bien être la ferait se sentir handicapée et leur conversation de peu auparavant lui revint. Son rêve d’ouvrir un restaurant était devenu un sujet trop délicat. Elle savait trop bien que Justin aurait adoré ce projet et qu’ils auraient formé un duo imbattable mais dans son état, impossible d’y penser. Il pensait plutôt à un beau bateau, pour parcourir le monde au gré des vents et marées et encore là…
*Un miracle…il nous faut un miracle !*
Mais bien sûr, les miracles, ce n’est pas sur demande !
Voulant sembler aussi désinvolte que possible elle se lança sur d’autres idées.
Je parlerai à Ella May, j’adore cette femme, elle s’y prend si bien pour gérer le chez soi de Michael…je suis sûr qu’elle pourra me filer un coup de main…et puis, tu vas voir, j’ai acheté des trucs adorables pour la chambre de Bébé…Je veux déjà commencer à la décorer. Si on en croit à ce que dit le Dr. Lewis dans deux mois et demi…tu en seras pour tes frais avec un bébé braillard sur les bras…
De main de maître, elle prit le petit tournant pour entrer chez eux et gara la voiture face au perron. Enceinte ou pas, Sam adorait conduire et se prenait parfois un peu pour Fangio, ce qui n’était pas pour trop ravir son chéri, qui, mine de rien, pensait toujours que les femmes au volant, ça ne donnait rien de bon. En riant, elle lui tira la langue et descendit…
Oups ! Ce comité d’accueil était des plus inattendus. Lord Cavendish , Artemius Albermale…et les enfants !
Avant que ces messieurs puissent dirent quoique ce soit, Viviane et Flore avaient sauté sur leur père, en donnant une explication de leur présence, si anticipée.
Tonton Dish est venu nous chercher chez maman Nate, assura Flore de sa petite voix flûtée.
IL est de nouveau là, alors on a appelé Milord, compléta Viviane.
Sam sentit les jambes lui manquer, sans le bras protecteur de Milord elle serait tombée assise par terre. Pas besoin d’un dessin, le « Il », vexé, de Viviane ne pouvait que signaler une seule personne au monde : Andrei.
Il refaisait surface après des mois de silence et éloignement, même si Sam, qui ne perdait pas tout à fait le contact avec ses anciennes relations, connaissait, sommairement son parcours des derniers temps. De retour à La Ferme, le Major Sanders faisait ce qu’il réussissait le mieux : risquer sa peau là où on avait besoin d’hommes sans froid aux yeux.
*S’il se fait tuer, je l’aurai sur ma conscience !*
Qu’à peine de retour , il aille retrouver Nate, lui fit supposer que ces mois d’absence voulue l’avaient mené à réfléchir, après tout, l’ex femme de Justin attendait un enfant de lui. Quelle situation tordue !
La seule chose qui lui restait à espérer est qu’Andrei voit clair dans ses sentiments envers la rouquine et mette un peu d’ordre dans la pagaille de sa vie…S’il savait. Dans un temps approximativement très proche, sans le savoir, il serait père, par partie double…sauf que, Sam y pourvoirait, jamais de tout jamais, il ne saurait que son enfant à elle…était aussi le sien. Pour tous et chacun, le bébé à naître serait l’enfant de Justin et c’était très bien ainsi.
Nous avons agi selon ce qui est stipulé, assura Artemius, très sérieux, et je dois avouer ne pas m’être attendu à me trouver devant un homme si…comment dirais je…
Surpris !, ajouta Lord Cavendish, il a même assuré être disposé à disparaître à l’instant pour épargner à Nate d’être privée des enfants mais, bien entendu, la loi…c’est la loi.
Sam, dûment installée dans un fauteuil, se taisait, suivant la mise à jour sans savoir que penser. La petite Flore vint se jucher sur ses genoux pour lui faire un gros câlin.
Je suis contente d’être avec toi, Maman Sam…mon petit frère va bien ?
Encore une de convaincue. Sam sourit, attendrie en caressant la tête de la petite, réclinée sur sa poitrine.
Oui, mon ange, le bébé va très bien…
Viviane se joignait aux câlins. Les trois serrées dans le fauteuil tandis que ces messieurs s’en allaient discuter au bureau du maître de céans.
Dites moi, mes chéries…Andrei vous a effrayées ? Il…a été…méchant avec vous ?
Nooon, assura Flore, véhémente, cette fois, il a été presque gentil…il a guéri Vivi qui s’était fat mal…mais tu sais ,Maman…on préfère être ici…
Avec Papa et toi…on est une vraie famille…Maman Nate…elle ne l’aime que lui…quand il est là !
Les paroles de Viviane lui allèrent droit au cœur. Elle les aimait, ces gamines qui lui étaient échues comme filles et vraisemblablement, elles le lui rendaient bien. Au fond de son cœur, Sam souhaita qu’Andrei puisse refaire sa vie auprès de sa rousse. Elle avait beau ne pas porter Nate dans son cœur, rien ne la poussait à désirer autre chose qu’à voir son ex mari trouver une femme qui ne verrait que par ses yeux, ce qui semblait bien être le cas.
Allons voir Tony Et Phil…Ils m’ont manqué, ces deux là !
Escortée des deux gamines, elle se déplaça à l’étage où Mrs . Pimms s’occupait des jumeaux. L’accueil des deux petits garçons fit fondre Sam. Les deux mioches arrêtèrent leur petit cirque en la voyant apparaître pour se lancer dans une sarabande endiablée de « Maman » à tort et à travers. Elle les dévora de baisers, leur fit des chatouilles, les adora un peu plus si possible mais quand elle voulut les soulever dans ses bras, Mrs. Pimms s’interposa.
Pas question…Ils sont déjà trop lourds pour vous.
Mais…
Inutile de protester, Madame…des câlins va et passe…vous n’êtes plus en état de vous encombrer de ces deux chenapans…Il faut prendre soin de vous. Je ne veux pas vous voir accoucher avant la date prévue !
Vous exagérez, Pimms !
Pensez ce que vous voudrez mais elle n’est pas encore prête à venir .
Pimms !!!
La femme sourit et lui tapota la main.
Je suis assez douée pour cela…mais ne vous en faites pas, bouche cousue…Avez-vous déjà commencé à préparer sa chambre ?
À peine…
Il faudra s’y mettre, dit elle, en souriant.
Et de commenter, comme si rien, qu’elle connaissait la personne parfaite pour leur filer un coup de main. Sam soupira. Parfois, ces sorcières exercées la dépassaient un peu.
*Et demain…voilà Mary Poppins qui se pointe !*
Elle ne fut pas loin de la vérité. Trois jours plus tard, la maisonnée Davenport se vit agrémentée d’un nouveau membre. Nanny O’Higgings. Le rêve de toute future mère. En un quart de tour, cette petite femme potelée, rose et tout sourire, empocha le cœur de tout le monde. Tout en aidant Mrs. Pimms avec les mioches présents, elle exerça ses talents de médiatrice, conseillère, confesseur, confidente, décoratrice et as du golf, avec singulière grâce et bonne humeur.
Rien de pouvait aller mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au moment où…
Madame…Mrs. Forrester au téléphone.
La seule et unique Mrs. Forrester que Sam connut était sa belle-mère. Or, depuis sa séparation d’Andrei, elles ne s’étaient ni revues ni parlé. Qu’une sorcière comme Anastasia Orloff préfère lui téléphoner que lui envoyer un hibou, lui mit la puce à l’oreille.
Anastasia ?...C’est vous ?
Oui, mon petit, c’est moi. Je n’aurais pas voulu faire irruption dans ta vie tranquille de cette façon mais il y a quelque chose que…
Ne…me dites pas que quelque chose est arrivée à Andrei ? Il va bien ?, ce fut presque un cri, se surprenant elle-même de sa réaction.
Pas autant qu’à sa belle-mère.
Non. Andrei va bien, mais déjà un sanglot étouffé la trahissait, ce…n’est pas lui…Samantha…ma petite chérie…c’est…ton père.
GERRY !...Que…que se passe t’il avec lui !? Que se passe t’il avec Papa ?
Il...a eu un accident, ma chérie…un accident de voiture…
Le cri de Samalerta tout le monde. Éperdue, elle criait presque au téléphone, tout enpleurant comme une Madeleine. Justin arriva juste pour lui prendre le téléphonede la main alors qu’elle s’effondrait presque dans les bras de Miss O’Higgings. On la calma force de mots rassurants. Et quelques petits sortilèges apaisants. L’état de Gerald Forrester était grave mais assez stable. À quoi bon mentir, Anastasia l’avait avoué à Justin, on craignait pour sa vie. Dans le peu de conscience qui lui restait, Gerry avait réclamé sa fille…
Défaite, Sam avança vers le lit où se trouvait son père. Faisant fi de son état délicat et des hauts cris poussés par tous, elle n’avait pas réfléchi deux fois avant de transformer la télécommande de la TV en portoloin. De justesse si Justin avait eu le temps de l’accrocher pour partir avec elle.
Gerry…Gerry…Papa ! Je suis là…
Elle était entrée seule dans la chambre. Endolorie, à bout de nerfs, elle prit sa main inerte et l’embrassa cent fois et l’appelant.
Me fais pas ça, Gerry…Je t’aime…j’ai besoin de toi…Papa…
Le front appuyé sur sa main, elle pleurait toutes les larmes de son corps quand un attouchement inespéré la fit presque sursauter. Pensant à Justin, venu la réconforter, elle inclina la tête sur la main posée sur son épaule…reconnaissant aussitôt son erreur et se redressant, ahurie :
Toi !?!? |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Sam 9 Oct - 23:34 | |
| « Eh bien, toi qui aimes tant les gosses, tu auras un joli bâtard pour t’occuper ! »
Ceux là avaient été les derniers mots d’Andrei avant de disparaître de sa vie…Méprisant sarcasme. Face à la porte fermée, Nate avait eu deux options. S’éperdre en désespoir et pleurer toutes les larmes de son corps ou puiser, Dieu sait où, le courage suffisant pour prendre les rênes de sa vie. Elle avait choisi la seconde, à crève cœur.
Andrei Sanders était entré dans sa vie et y était passé comme une tempête dévastatrice, semant son passage de décombres, détruisant l’édifice parfait d’une vie…parfaite. La sienne ! Le moment était venu de prendre ce qu’il en restait et reconstruire, sur de meilleures bases. Nate avait relevé le menton, décidée. Ravalé ses larmes et affiché son sourire le plus doux en appelant ses filles.
Allons faire un bonhomme de neige, mes chéries.
Elles adorèrent l’idée et entre rires et cris joyeux, les trois étaient sorties au parc enneigé. L’air était vif, mordant. Peu importait. Flore planta la carotte tenant lieu de nez, Viviane enroula l’écharpe et Nate mit le vieux haut de forme déniché au grenier.
Il va pas revenir, Maman ?
Non, ma chérie, il ne va pas revenir.
Elle déposa un baiser sur la tête de sa fille aînée tout en serrant doucement la menotte de Flore qui demandait :
T’es triste, dis ?
Je vous ai avec moi, mes amours…Tout va bien. Je vous ai, vous !
Et Papa ? Il va venir, hein ?
Je ne sais pas, Viv…qui sait ? Sûrement un de ces jours…Qui veut du chocolat chaud et du gâteau !?
La meilleure façon de contourner les épineuses questions.
Plus tard, assise, en solitaire dans le séjour, Nate avait allumé la télévision. Rien que pour entendre d’autres voix qui, sans rien lui dire, palliaient tant de silence.
Preston Yates , composé et sérieux, comme d’habitude, épluchait les nouvelles du jour dans son style particulier, ça devait le changer d’être par monts et par vaux, en risquant la peau. Tiens voilà qu’il semblait aussi s’y prendre, avec la chronique sociale…
« …Impossible d’ignorer les faits concernant l’homme du moment, Justin Davenport, qui après son retentissant retour pour se voir acquitté de toute charge, a fait encore la une des nouvelles, ces derniers jours, après être interné d’urgence dans un des hôpitaux de la capitale suite à un malaise au Beach Blanket Babylon… »
Nate resta en suspens, les yeux écarquillés de surprise, le cœur battant à mille, se souvenant des paroles d’Andrei :
« Rassure-toi, ça ne devrait plus trop tarder. »
Mon Dieu…Il l’a fait…il a tué Justin ou essayé, du moins…
Yates, de l’autre côté de l’écran se chargea de l’informer :
« …Se reprend de manière satisfaisante et, aux dires des médecins, miraculeuse… »
Elle n’écoutait plus. Se précipitant sur son carnet d’adresses, elle le feuilleta fébrile jusqu’á trouver l’information voulue. Dix minutes plus tard, à la fin des nouvelles, elle s’empara du téléphone. Avoir Preston au bout de la ligne ne s’avéra pas une mince affaire mais vu son insistance, parvint à ses fins. Lui tirer les vers du nez, tint du tour de force mais Nate savait se montrer très convaincante à ses heures.
Son arrivée à l’hôpital ne passa pas inaperçue. Pour son malheur, le premier à croiser son chemin fut Michael De Brent. Il la toisa, l’air mauvais et l’aurait certainement étranglée, en toute joie de cœur, si Lord Cavendish n’était judicieusement intervenu.
Je me demande bien ce que vous venez faire ici, Nate.
Elle le défia du regard.
Je viens d’apprendre ce qui s’est passé avec Justin. Comment va-t-il ? Qu’est il arrivé ?
Comme si tu ne le savais pas, maudite femme !, grommela Michael, enragé.
Non. Je ne le savais pas et maintenant, je voudrais voir Justin.
Et qui te laisse croire qu’il veuille te voir, lui ? Tu ne lui as pas fait assez de mal déjà ? Fiche le camp !!!
Nouvelle intervention de Milord pour calmer les esprits exaltés. Nate ne laissa pas de remarquer que De Brent avait une mine à faire peur et espéra qu’il finirait par crever mais évidemment, ce n’était pas de sitôt qu’il allait lui faire plaisir.
Nate, je suis désolé mais je ne pense pas que ce soit une bonne idée d’entrer voir Justin. Il a passé par des moments très difficiles et n’a aucun besoin d’autres secousses.
Mais je…
Tu as compris, dégage !, gronda Michael que son beau père retenait du bras, pour éviter qu’il ne lui saute dessus, pour l’occire séance tenante.
Il ne lui resta qu’à rentrer chez elle pour méditer sur le poids de ses méfaits et diverses misères.
Justin se récupéra rapidement, enfin façon de dire et quitta l’hôpital en chaise roulante poussée par un Lord Cavendish très sollicite. Nate suivit cela de loin, de derrière un arbre, se sentant comme une vile espionne. Heureusement pas de Michael à l’horizon, pas de risque de se faire débusquer. Pas trace non plus de Samantha. Pincement au cœur. Andrei devait l’avoir rejoint et convaincue de sa dévotion inaltérable. Ils couleraient le parfait amour, loin de là, laissant derrière eux la ruine de deux vies, irréconciliables à jamais.
Cette supposition de Nate tint le chemin à peine quelques jours. Encore la télévision se chargea de la mettre au courant. Justin avec des béquilles, un peu pâlot mais ravi avec une Samantha resplendissante à ses côtés. Andrei avait échoué sur tous les plans. Davenport était bel et bien vivant, follement épris de sa blonde radieuse qui le couvait d’un regard d’adoration sans limite.
La petite guerre sournoise qui les opposait ne faisait que commencer. Ce fut âpre, amer, cruel. Justin ne cherchait aucune conciliation. Il voulait ses enfants, elle aussi. Mais le droit l’assistait, lui, dans toute sa force et splendeur. Elle avait lourdement fauté, toutes les preuves étaient à son encontre. Femme adultère, qui avait abandonné mari et enfants pour courir après son amant. De quoi la mettre au ban de la société, si rigoureuse dès qu’il s’agit de la morale des autres. Ils ne se rencontrèrent que deux ou trois fois, flanqués de leurs avocats, pas une seule fois à seules. Nate se savait perdue. Aucun tribunal ne lui confierait jamais la tutelle des enfants. Cela lui brisait le cœur mais encore là, Justin démontra sa grandeur d’âme. Lui faisant l’aumône d’une semaine par mois, sous l’unique condition que Sanders ne soit pas dans les alentours. Elle se hâta d’accepter.
Et il fallut adapter la vie aux circonstances. À la solitude. Pesante solitude. Trois semaines par mois passées à préparer avec amour le séjour de ses enfants. Sa grossesse progressait gentiment, sans sursauts. Comme jamais, elle ne ressentait aucun malaise, tout se passait merveilleusement bien, il ne lui manquait qu’une chose pour que tout soit parfait mais Nate évitait d’y penser. Elle avait refoulé Andrei au niveau des impossibles et s’efforçait de l’oublier mais bien sûr, cela s’avérait bien plus difficile que prévu. Elle lui en voulait de toutes ses forces et aurait voulu pouvoir le haïr pour sa lâche défection mais ne pouvait même pas lui en faire reproche. Elle avait connu les règles du jeu et s’était laissée aller à bercer un rêve. Tant pis. La réalité était autre. Andrei ne l’avait jamais aimée et le plus sûr était qu’il courait de nouveau le monde à la recherche d’émotions fortes, de celles qui aident l’oubli. Cet oubli, où il les aurait remisés, elle et son enfant à naître.
Anthony et Philip étaient deux petits robustes chenapans, complices ingénieux. Leur babil incompréhensible avait enfin mué en mots, ce qui semblait les émerveiller au plus haut point. Ils s’y exerçaient avec entrain, faisant les délices de Nate qui n’avait qu’un chagrin…pour eux, leur mère était Sam…elle, elle n’était que…MaNate…Elle avait même perdu ce droit. Viviane et Flore ne se faisaient aucun problème. La situation leur résultait très accommodante.
Tu es notre Maman Nate et Sam est notre Maman Sam…c’est chouette…et Papa est content.
Vous…aimez beaucoup Sam, n’est ce pas ?
Elle n’aurait jamais dû poser cette question. Les deux petites s’étaient lancées dans un élogieux panégyrique des diverses et nombreuses vertus de Sam.
Tu sais, Maman Nate…elle sait faire des gâteaux…miam…et puis tout…ce qu’elle nous prépare pour manger à la recré est si bon…que tout le monde veut avoir pareil.
Coup bas. Nate était toujours aussi nulle en cuisine mais mère prévoyante, avait pris à son service une de ces perles rares qui serait en mesure de subvenir à tous les caprices alimentaires de ses enfants, si gâtés niveau gastronomique. Elle avait refait la décoration des chambres d’enfants et fut ravie de les voir si surprises et contentes. Il y avait des cadeaux pour tous. Chaque visite chez leur mère était une vraie fête de Noël pour les gosses Davenport…tout autant que leur retour chez Papa. Une situation extraordinairement agréable, si on y pense bien !
Viviane et Flore avaient , des mois auparavant reçu, avec certaine circonspection la nouvelle de la prochaine venue d’un nouveau bébé. Et encore là, elle n’avait pas l’exclusivité…
Maman Sam aussi va en avoir un !, assura Viviane, sentencieuse, Papa est si heureux, le pauvre !
Le pauvre !?...Qu’a-t-il, ton père ? Tu le plains beaucoup, ces derniers temps !
Viviane avait promis de ne rien dire mais c’était déjà trop tard pour faire marche arrière. Flore lui largua un coup de coude mais rien n’y fit !
Il a mal…sa jambe lui fait toujours mal…Il marche tout drôle et se fatigue…c’est plus comme avant !
Elle ne s’était pas attendue à cela, après tout, depuis le temps, il aurait dû être en forme mais déjà les jumeaux entraient en scène et il ne resta aucun moment pour penser aux malheurs de son ex mari.
L’après midi était splendide. Viviane et Flore jouaient à cache-cache dans le jardin. Elle les entendait rire, crier, discuter…rire de nouveau. Tout était merveilleux, paisible. Plus tard, elle sortirait promener les jumeaux…
Madame…Madame…
Elle avait l’air passablement agitée, Emilie, la jeune soubrette.
Qu’y a-t-il ?, s’enquit elle, agacée, on dirait que vous avez vu le diable, ma bonne !
Oh non, pas le diable !, soupira la jeune fille en roulant des yeux, un beau monsieur en uniforme qui demande à voir Madame.
D’autant qu’elle pouvait se souvenir Nate ne connaissait aucun militaire.
Et ce monsieur en uniforme a-t-il eu la charmante déférence de dire son nom…décliner son rang ?
Vi…Major Sanders !...Euh…Madame va bien !? Vous êtes toute pâle, soudain !
Nate essaya de reprendre le contrôle de sa respiration, des battements déréglés de son cœur, de ses idées parties en débandade. Andrei. Six mois plus tard. Sans un mot entre temps, comme si rien. Machinalement, elle remit à sa place une mèche folle, lissa sa robe, ordonna quelques objets sur la table, sans même les voir. Se leva, alla vers un des miroirs et se regarda attentivement. Perdue sa silhouette de sylphide, les rondeurs de la maternité avaient pris la place de ses attrayantes courbes. Soupir. Elle retourna à son fauteuil, prit son attitude la plus digne.
Faites le entrer, Emilie.
Elle ne bougea pas d’un pouce quand il entra dans le petit salon, son regard demeura obstinément rivé sur le jardin, où jouaient ses filles.
Bonjour, Nate. Je profite d’une perm pour passer te voir…
*Grand bien lui en fasse, sa perm !*
Je me doute que tu m’en veux et je le comprends. Je n’ai pas la prétention d’espérer ton pardon, ni intervenir à nouveau dans ta vie. Je passe prendre de tes nouvelles… sur les conseils de ma mère.
*Et que voulait il ? Que je le reçoive les bras ouverts, en pleurant de bonheur ?...Qu’est ce qu’elle a foutre avec tout ça, sa mère ?*
Elle avait rencontré Anastasia quelques fois, de façon tout à fait casuelle. Une chose menant à l’autre. Elles avaient bavardé, évoqué des souvenirs communs en prenant un thé à Harrod’s. Comme tout le monde et bien entendu, avec plus d’intérêt que le commun, la princesse avait suivi le déroulement de l’affaire Davenport. Rien ne lui échappait, encore moins l’état de la jeune femme. Deux et deux faisant toujours quatre, elle avait tiré ses conclusions. Nate n’avait rien nié. Oui, l’enfant attendu était bien de son fils. Non. Elle n’attendait rien de lui. À croire que cela avait marqué la noble dame, sans doute savoir qu’un petit bâtard de son précieux sang allait naître l’avait amenée à certaines réflexions.
Je vois que tu te portes bien. Tes enfants sont avec toi, bonne chose. Excuse-moi de t’avoir dérangée. Au revoir, Nate.
*Quoi ? Il va partir ? Comme ça ?*
Mais elle se sentait incapable de réagir, de bouger, de dire quoi que ce soit. Coincée de partout, partagée entre la rancœur, la rage…la douleur et la joie folle de le revoir. Qu’il pense ce qu’il voudrait…rien ne pouvait être pire que tout ce silence, que ces six mois d’indifférence…
Flore sauva la mise en apparaissant, toute chamboulée.
Maman, Vivi est tombée, elle saigne et …
En reconnaissant Andrei, elle laissa échapper un cri perçant, comme s’il était le diable en personne. Avant que Nate puisse placer un mot, il avait pris les devants.
Arrête ton cirque, Flo!Je ne suis pas croquemitaine!Où est Viviane ?
*Mais il se mêle de quoi, celui là !?*
Pour la première fois depuis son entrée, elle daigna lui accorder un regard de biais. Il avait beaucoup d’allure en uniforme. Teint basané, traits plus accusés. Il avait maigri et ses yeux avaient un éclat de glace. Il sortit au jardin, sans faire attention à elle , suivant Flore. Elle resta sur le seuil, guettant la suite.
Le cri affolé de Viviane lui parvint distinctement, ainsi que les paroles sèches d’Andrei.
Cesse de brayer comme un putois, idiote. Je vais pas te manger. Montre-moi ton genou !
Elle ne capta pas le reste, un instant plus tard, ses deux filles revenaient au pas de course, comme fuyant l’enfer et passant à côté d’elle, sans lui adresser la parole, galopèrent vers l’étage.
*Mais…qu’est ce qu’il leur a dit…ou fait ?*
Il revenait vers la maison, l’air presque vexé. Sans ouvrir la bouche, elle lui décocha un regard interrogateur. Sanders se contenta de grogner une explication.
Je n’allais quand même pas la laisser saigner comme un porcelet ! Ce n’était rien du tout. Aucune comparaison avec ce que j’ai dû faire ces temps derniers. Me laisseras-tu passer ou préfères-tu que je fiche le camp d’ici en transplanant ?
Légère hésitation, elle s’écarta pour le laisser entrer. Son bras en écharpe méritait au moins une question.
Tu es…blessé ?
Ouais, une balle perdue ! Rien de glorieux, ni de trop douloureux. Mais… et toi…? Est-ce que ça va ?
Imperceptible haussement d’épaules.
Oui, très bien, merci. Tu veux boire un café ?
Il accepta. Nate le précéda dans le petit salon et sonna Emilie. Ordre donné, la petite soubrette détala comme un lapin. Ils prirent place, face à face, en silence. Ce fut enfin lui qui le rompit, comme si se contempler en chiens de faïence l’incommodait. Il parla de ce qui l’avait occupé tout ce temps. Nate écoutait, sans interrompre. Il racontait les guerres comme qui parle de n’importe quoi. La mort, la souffrance, la misère faisaient son jour le jour. Il jonglait avec sans crainte, aurait on dit, peut être que risquer sa peau pour quelque haut principe comblait ses propres carences. Son récit la surprenait, l’émouvait aussi, sans le laisser transparaître…Il avait découvert, de quelque atroce façon, ce qu’est le don de soi…Lui, en mission de paix ? Lui, défendant les pauvres et démunis de ce monde ?
De telles atrocités font réfléchir. Je crois que je vais raccrocher pour de bon. J’aurais souhaité…
Elle ne sut pas ce qu’il aurait souhaité. Un apparition aussi inespérée que peu souhaitée venait de se susciter. Lord Cavendish et Artemius Albermale. Ce dernier fut rapide aux explications.
Bonjour Miss Sommerby. Conformément à l’ordonnance reconnue lors du divorce moldu, la garde des enfants doit être suspendue étant donné la présence d’un certain individu.
Ceci dit en décochant un regard peu amène au major de l’armée américaine. Milord ajouta, grave :
Nous sommes navrés, Nate, mais la loi est la loi !
Nate porta la main au cœur, regardant tour à tour les nouveaux arrivants et ses deux filles, qui venaient d’entrer, chacune avec un des jumeaux dans les bras. Elles avaient l’air indubitablement ravies.
Non ! Non…pas mes enfants…non, vous ne pouvez pas me les prendre ainsi…J’ai le droit…une semaine…cela fait à peine trois jours…je vous en prie…
La réaction d’Andrei la surprit, soudain blême, il s’était redressé.
Je… je ne savais pas ! Je m’en vais ! Laissez les enfants, c’est moi qui pars.
Mais ni Lord Cavendish ni le vieux Albermale n’étaient prêts à céder d’un poil. Elle devina qu’ils prenaient le plus grand plaisir à lui infliger cette nouvelle punition. Ses prières restèrent sans effet, elle ne put même pas prendre congé de ses enfants, déjà ils s’étaient enfumés avec les deux exécuteurs des vœux du sieur Davenport.
Décomposée de douleur, rage et surprise, Nate se tourna vers l’unique coupable de ses déboires.
C’est ta faute !!! À Cause de toi…on m’a pris mes enfants !...Pourquoi es tu revenu !!!??? Je te déteste, Andrei Sanders…je te hais…je voudrais te tuer, en ce moment !
Faute de mieux, elle lui balança une gifle d'anthologie
Tu es parti en te fichant de tout et de moi…Pourquoi tu n’es pas resté dans quelque trou, à pourrir !? Après tout…ça t’est absolument égal ce que nous devenons…
Furieuse, elle aurait voulu le frapper mais, à la réflexion, préféra s’en abstenir. Hors de lui, Andrei était un adversaire à craindre et elle n’était pas en état de lui faire face.
Depuis quand ce que peut dire ta mère t’affecte…tu te balances de tout et de tous…Tu voulais faire ta petite bonne œuvre du jour ?!?...Allons faire une petite visite de courtoisie à cette idiote de Sommerby, voir comment ça se passe pour elle !?...C’est ça, ta pitié pour le prochain !?...Va te faire foutre…va secourir d’autres qui en auront besoin…
Elle prit une profonde inspiration en reculant d’un pas alors qu’il en avait avancé d’un. Redressant le menton, elle le foudroya d’un regard défiant.
Nous…nous nous portons très bien, ni lui ni moi avons besoin de toi…refais ton chemin, Andrei…Ne reviens plus…À quoi bon ? Nous…saurons bien nous y prendre…On se fait à tout…
Il avança d’un nouveau pas.
Ne…ne t’approche pas…
Il se fichait de son avis comme de sa première chemise. Nate recula encore un peu mais buta contre un guéridon, manquant de peu de perdre l’équilibre. Il la retint à temps.
Je…ça va…, elle voulut se détacher de sa poigne mais il la retenait avec force. Un frisson d’affolement la parcourut.
Lâche moi…va…t’en…tu as…déjà causé assez de misères pour un...jour…
Mais le major Sanders ne semblait pas trop disposé à lui faire plaisir. Il la jaugea d’un long regard où se mêlaient sarcasme, commisération, une certaine colère et aussi…quelque chose de semblable à de la douceur.
*Tu rêves toute éveillée, ma fille…*
Laisse moi, Andrei…laisse moi, je te dis !!!
Elle avait peur de lui mais encore plus de ses propres faiblesses. Il suffisait de le sentir proche pour que tout son univers, minutieusement bâti, bascule. Pour lui, elle avait envoyé sa vie au diable et avait dû se refaire, seule, parmi les décombres. Il lui avait tant de fois démontré le peu qu’elle pouvait signifier pour lui…
Tu…n’as pas voulu de nous…Nous…ne voulons plus de toi…
Cela aurait été si facile, s’il avait compris d’une fois pour toutes et fait demi -tour, mais non…au lieu de cela, sans qu’elle puisse lui échapper, Andrei l’enserrait dans une étreinte affolante et la bâillonnait d’un baiser renversant qui lui tourna la tête, mettant en échec tous les schémas si patiemment élaborés. Elle se débattit, rien n’y fit, même avec un seul bras, il avait trop de force.
Qu’est-ce…que tu…veux ? C’est quoi…le nom de ce jeu ?...Le repos du guerrier ?
Mais il continuait de se ficher d’elle et l’embrassait de nouveau, la faisant trembler des pieds à la tête, s’accrochant à lui pour ne pas tomber.
Nate aurait voulu le frapper, le griffer au sang et arracher sa peau en lambeaux mais au lieu de cela, ses mains finirent par se perdre dans sa nuque et tout son être se tendit vers lui et elle redit un à un, fiévreusement, ses baisers.
Pourquoi…es tu venu ?, voulut elle savoir en le regardant droit aux yeux, pour mieux faire tes adieux ?
Sa réponse la laissa muette de stupeur et avant qu’elle puisse reprendre ses esprits, il l’avait entraînée dans un très court transplanage qui les mena à l’étage silencieux.
Il est parfois des rêves, qui de tant être rêvés…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Lun 18 Oct - 22:15 | |
| Le bébé allait bien, Sam se portait comme un charme, de quoi rendre n’importe quel futur papa très heureux. Après la visite à la gynécologue, Justin n’avait pu s’empêcher d’énumérer quelques suggestions afin de soulager Miss Forrester dans ses tâches quotidiennes :
Le docteur a raison, tu sais. Les fins de grossesses sont souvent désagréables…
Il savait de quoi il parlait. Pour Viviane et Flore, Nate s’était montré un brave petit soldat mais l’attente des jumeaux, avec l’état d’esprit qui l’habitait à ce moment, avait rendu sa femme d’une humeur de chien. Justin se souviendrait longtemps de cette période pénible durant laquelle il s’était dépensé sans compter pour aider une Nate acariâtre, dégoûtée de tout, se plaignant de tout.
Il ne faut pas croire tout ce qu’elle dit, pas de quoi en faire un foin. Pimms est merveilleuse avec les enfants…si tu insistes on peut lui demander si elle a une jumelle, ça nous arrangerait !
On va engager une autre nounou, un secrétaire aussi et pourquoi pas une cuisinière ? Nourrir tout notre monde demande des efforts. Je ne veux pas que tu te fatigues, et…
Sam ne voulait rien entendre.
Jamais de la vie…Horreur ! Au plus…une femme de charge…pas de cuisinière…au moins laisse moi ce plaisir…oui !?
Elle papota allègrement tout le trajet du retour, pensant déjà à décorer la chambre du bébé :
Si on en croit à ce que dit le Dr. Lewis dans deux mois et demi…tu en seras pour tes frais avec un bébé braillard sur les bras…
Soupir…
J’adore ça, tu le sais… Ne t’en fais pas, j’assumerai. *Je l’ai toujours fait… avant*
Avant, il pétait la forme, savait nocer jusqu’à des heures indues et reprendre le collier comme si de rien n’était. Avant, il arrivait à se lever d’un bond pour courir auprès des mioches et les dorloter sans bayer. Changer les couches, donner bains ou biberons ne l’embarrassait nullement. Maintenant… Quelque part l’angoisse le tenaillait encore et toujours… Mais le sourire de Sam illuminait son horizon. Elle était si adorable quand elle le regardait ainsi !
Regarde plutôt la route, tu vas nous envoyer dans le décor.
Elle riait encore en débouchant dans l’allée…
Ses filles, ses trésors, sa vie ! Davenport n’en revenait pas de les voir déjà de retour. Joie de courte durée vu l’annonce faite par celles-ci. Sam accusa le coup en titubant presque. Elle s’inquiéta ensuite sur les agissements de son ex et la tendresse des fillettes à son encontre parut la rassurer autant que leurs paroles. Enfin maîtresse d’elle-même, comme si rien elle s’éloigna avec Viviane et Flore, laissant Justin entre amis.
Alors, Sanders pointe à nouveau son nez ? Chez Nate, comme par hasard !
Calmez-vous, Justin. Vos petites ont réagi avec brio en nous appelant à la rescousse. C’était prévu.
Je sais Milord, n’empêche que ça me fout les boules chaque fois que ce type est dans le secteur. Il vendrait du sable à un bédouin ! Dieu sait quel plan cet esprit tordu a encore mijoté.
Nous nous sommes arrêtés un instant chez moi avant de venir ici, Justin. Il semble que le major Sanders soit en permission suite à une blessure reçue lors…
D’un combat quelconque dont je me moque bien ! Il aurait mieux fait d’y laisser sa peau !
Mon jeune ami, nous comprenons très bien tes préoccupations, seulement là tu n’es pas objectif.
Excusez ma grossièreté Maître, et vous aussi Milord. Vous vous dévouez pour moi et je vous reçois comme un rustre. Entrons, si vous le voulez bien. Nous avons à discuter.
Tentant de ne pas grimacer en se déplaçant, Justin guida les visiteurs jusqu’au salon. Il donna un ordre au passage à l’elfe domestique qui s’empressa de préparer thé et café. Se laissant tomber lourdement sur un fauteuil, Davenport soupira :
D’après vos dires, Milord, Andreï était prêt à s’en aller pour que Nate ne soit pas en tort ?
En effet ! Je suis certain qu’il était sincèrement surpris par la situation. Sans doute ne restera-t-il que peu de temps, et…
Justin ricana, amer :
Rêvez, si vous le voulez ! Nate sait se montrer très persuasive quand elle veut… Sanders encore plus. Y a-t-il un moyen de durcir la clause restrictive ?
Maître Abermale fronça les sourcils :
Arrête-moi si je me trompe. Tu voudrais supprimer complètement la garde partagée si Andreï s’installe à demeure ?
Oui ! confirma Justin avec un sourire féroce. Nate devra faire un choix, c’est son problème.
Abermale et Cavendish échangèrent un regard navré. D’ordinaire Davenport n’était pas aussi vindicatif voire cruel. Six mois d’infirmité l’avaient indiscutablement changé. Conscient, il n’en était pas fier mais ne pouvait s’empêcher d’en vouloir à Nate et Andreï pour tous les torts causés. Il avait su, par Michael, que Nate était passée le voir pendant son agonie. Il avait félicité son pote d’être intervenu et d’avoir bloqué le passage à cette vipère sans doute venue se repaître de ses malheurs. Contraindre maintenant son ex à choisir entre la garde des enfants et son amant lui paraissait… amusant.
Les deux hommes ne s’attardèrent pas, promettant de voir comment satisfaire Justin. Plusieurs jours s’écoulèrent sans rien amener de neuf à l’exception de l’entrée en fonction d’une certaine Miss O’Higgings. Tout le monde adora aussitôt cette Nanny efficace à l’humour bienveillant et bienvenu. Les filles étaient ravies d’être à la maison chaude, comme elles aimaient l’appeler, leurs parents évitaient le sujet épineux se concentrant à jouer à la famille idéale. Dans le fond ce n’était pas difficile sauf quand il s’agissait de participer activement aux débordements des gamins. Là, souvent Davenport devait déclarer forfait en raison de sa jambe douloureuse mais la plupart du temps il arrivait à s’en tirer par une pirouette ou l’autre. Puis vint ce fameux soir…
Les enfants étaient couchés, les Davenport goûtaient une paix tranquille en sirotant le café lorsque la Nanny déboula en requérant Samantha. Madame…Mrs. Forrester au téléphone.
Air anxieux de Sam, grimace de Justin. Si Anastasia se permettait de sonner après des mois de silence, c’est qu’il y avait urgence. Sam devait l’avoir pressenti vu sa précipitation à aller répondre. Non qu’il se voulût curieux, Davenport se leva à la suite de sa compagne en traînant la patte. Au combiné, les préliminaires furent brefs et Sam s’écria :
Ne…me dites pas que quelque chose est arrivée à Andrei ? Il va bien ?
Dieu que ça faisait mal à entendre. Ainsi, tel qu’il l’avait souvent supposé, Sam s’inquiétait encore du sort de son ex-époux. Serrant les dents, Justin était demeuré à distance. Lui qui n’avait jamais souhaité de mal à personne en vint presque à désirer une annonce fatale.
*S’il pouvait avoir crevé pour de bon…*
Il s’en voulut aussitôt de ces pensées peu charitables quand un autre cri de Sam intervint :
GERRY !...Que…que se passe t’il avec lui !? Que se passe t’il avec Papa ?
Affreusement désolé, il se précipita aussitôt sur la jeune femme à deux doigts de s’évanouir. Il connaissait l'amour qui unissait père et fille. Être responsable de leur éloignement ne le réjouissait pas. Le hurlement avait fait sortir Nanny et Mrs Pimms de leur coin et toutes les deux se chargèrent d’apaiser la future mère qui défaillait, incohérente. Prenant le cornet, Justin avait affronté la belle-mère de Sam :
Davenport à l’appareil. Qu’en est-il au juste ?
Un accident de voiture, Justin. C’est grave… Il faut que Samantha vienne rapidement, il l’a réclamée. Les médecins ne se prononcent pas encore sur l’issue... Il est stable, mais…
Où est-il ?... Nous viendrons.
Il avait raccroché et s’était penché sur une Sam décomposée qui, en écoutant les propos de son compagnon avait réagi de façon spectaculaire en créant un portoloin.
Sam attend, il faut…
Seul un réflexe l’empêcha de demeurer sur le carreau tandis que la femme de sa vie prenait la clé des champs. Se matérialiser en plein hôpital modu avait été évité de justesse. Le couple se matérialisa dans le parking arrière.
Tu es folle ou quoi ? s’énerva Justin plus effrayé que fâché. Tu n'as pas pensé au bébé?
Sam s’était débattue, voulant à toute force entrer. Force fut de la raisonner.
On y va, bien sûr que oui. Entrons au moins comme des gens civilisés.
Quelques sortilèges leur donnèrent l’aspect de visiteurs inquiets mais normaux. On ne leur refusa pas l’accès aux soins intensifs. Une seule personne à la fois pouvait être présente au chevet du grand blessé ; Justin céda du lest à regret.
Le couloir était désert à cette heure tardive. Les quelques nouvelles glanées à l’accueil restaient floues : Gerald Forrester passerait ou non la nuit ; personne n’osait se prononcer. Accablé, Davenport aurait volontiers outrepassé les ordres de l’infirmière surveillante et rejoint Samantha dans cette chambre pour la soutenir. Livré à lui-même dans la solitude, ses idées vagabondèrent allègrement tout en clopinant de long en large :
*Pauvre Gerry ! Pauvre Sam ! Elle n’avait pas besoin de ça, surtout en ce moment… Le père d’Andreï est mort dans un accident de voiture… Ben oui… pas de chance ! On n’a jamais su déterminer les causes exactes de ce drame… Ce sont des coïncidences malheureuses… Telle mère, tel fils ! Qu’est-ce que tu racontes ? Qui sait si Anastasia n’a pas voulu se libérer de son 1er mari… Tu deviens fou ! STOP ! Elle a peut-être récidivé ou alors Andreï pourrait avoir saboté la voiture de Gerry, juste pour attirer Sam ici … ? TU DERAILLES ! D’ailleurs, il n’est pas là !*
Ça carburait ferme dans la tête de Justin qui, perdu, fut à deux doigts de pénétrer illico dans la chambre de Gerry. Il hésitait à pousser la poignée quand une voix derrière lui le fit sursauter :
Justin ?
Retourné d’un bloc, il affronta la belle-mère de Sam :
Anastasia… Princesse Orloff… je ne sais que dire… Je suis désolé. Nous venons d’arriver, Sam est avec Gerry !
Idée saugrenue ? Il lui sembla que Mrs Forrester amorçait un sourire… satisfait.
Je l’ai quitté il y a quelques minutes pour boire un thé. Il n’a pas repris conscience depuis… longtemps.
Il va s’en sortir, assura Justin très vite. Gerry est quelqu’un de solide.
Même les plus robustes ont leurs faiblesses, Justin.
Son ton était empreint de commisération, au point que Justin le prit pour lui avant de se souvenir que l’on disait Andreï blessé, lui aussi. Il se mordit dans la langue afin d’éviter de demander des nouvelles de son ennemi. Mine de rien, il s’informa :
Connait-on les circonstances de l’accident ? Gerry est un bon conducteur. Sam m’a souvent raconté des périples en voiture avec lui, et…
C’est incompréhensible ! Il revenait chez nous… La circulation était rare… la voiture a quitté la route. Pas de témoin, c’est tout ce que je sais.
Ils restèrent là à se contempler en chien de faïence jusqu’à ce que Davenport regarde sa montre :
J’aimerais épauler Sam. C’est si dur pour elle. Dans son état, elle…
La réaction d’Anastasia fut vive. S’interposant entre la porte et Davenport, elle débita :
Laissez-leur encore un moment. Il y a si longtemps qu’ils ne se sont vus.
Deux et deux feraient toujours quatre. La vérité sauta aux yeux de Justin mieux qu’une bombe incendiaire :
IL EST LÀ ! Écartez-vous, Princesse Orloff !
NON ! décréta l’altesse russe ergots sortis. Mon fils est avec sa femme auprès de mon époux.
Elle n’est plus sa femme !
Et n’est pas la vôtre non plus !
Pas pour longtemps ! Laissez-moi passer !
Campée solidement sur ses petits pieds, Mrs Forrester ne bougea pas d’un pouce :
Ecoutez Justin, je vous aime bien. Je sais que mon Andreï vous a causé des ennuis. Il n’est pas aussi mauvais que vous le pensez. Il… il a changé.
Votre amour vous aveugle, Anastasia ! Sauf le respect que je vous dois, retirez-vous ou je…
Prêt à tout, Justin se vit en train de saucissonner la princesse et l’aurait sans doute fait si, soudain, la porte ne s’était ouverte. Très pâle, Sam s’encadra dans l’ouverture, Andreï dans son dos. En un clin d’œil, elle s’abattit dans les bras d’un Justin fou d’inquiétude tandis que des sanglots secouaient les épaules chéries :
Sam, mon amour, ne me dis pas que…
Ouf ! Rires et pleurs mêlés, la jeune femme avoua que Gerry s’était réveillé et réclamait son épouse. La princesse s’engouffra dans la chambre ; les trois visiteurs restèrent dans le couloir. Obstinément, toute son attention tournée vers celle qu’il aimait, Justin refusa de regarder Andreï en face. Un sarcasme l’atteignit pourtant :
Occupez-vous de vos affaires… et de mon ex aussi tant que vous y êtes. Viens ma chérie, on va prendre une chambre dans un hôtel proche. On reviendra demain.
Pas de bagages ? La réception ne s’en formalisa pas, elle avait l’habitude d’héberger des proches de patients hospitalisés. Banale, la chambre où Sam et Justin trouvèrent asile les agréa néanmoins. Aucun des deux n’avait faim, ils ne commandèrent qu’un en-cas qui traîna dans les assiettes. Sam but un soda, Davenport s’octroya du bien plus fort. Le mutisme de Sam lui pesait mais il préférait que ce soit elle qui parle librement de ce qui s’était passé dans cette chambre. Evidemment, elle comprit son désarroi, voire ses angoisses.
…Rien ? Tu prétends qu’il ne s’est rien passé ? Voilà un rien qui a duré, excuse-moi de te le signaler… Comment ça, je suis furieux ? Pas du tout ! Je suis frustré, ça oui ! Tu passes près d’une demi-heure au chevet de ton père en compagnie de ton ex et je devrais être rassuré, me contenter de ce … rien ? … Désolé ? Il se dit désolé ? (rire méprisant) et tu le crois, évidemment… Non, je n’en crois rien ! Andreï ne changera jamais ! Tu sembles oublier la maîtresse façon avec laquelle il embobine les gens, toi en particulier. Tu en as pourtant été assez victime, non ? *Et moi aussi* … Si ça te plaît d’abonder en ce sens et de croire à ses bobards, libre à toi. Je sais que tu viens de traverser une rude épreuve. On est crevé tous les deux, nous disputer ne résoudra… rien. Bonne nuit !
Justin vida son second verre d’un trait, se mit en boule tout habillé sur le lit et bouda en feignant de s’endormir. Il avait entièrement confiance en l'amour que Sam lui portait. Mais savait très bien quel charme Andreï pouvait déployer si l'envie lui en prenait...
Mauvaise nuit ! Sam allongée près de lui écrasa gentiment, sa respiration régulière le prouvait. Lui ne ferma pas l’œil. Des questions s’entrechoquaient avec tant de violence qu’il n’y tint plus au bout d’une paire d’heures et se releva. L’hôtel, quoique modeste, était doté de toutes les commodités modernes. Trouver un ordinateur fut une formalité, y pianoter à loisir détendit Davenport. Des contacts, Davenport en avait dans tous les coins du monde. Rien de plus facile que d’envoyer des demandes de renseignements à ses « amis » Simples et précises, ses nterrogations tournaient toutes dans le même sens : situer les allées et venues d’Andreï Sanders peu avant l’accident de Gerry Forrester ; comment cet accident avait-il eu lieu? Les amorces lancées, les poissons seraient-ils au rendez-vous ?
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 22 Oct - 18:19 | |
| Préméditation ? Avec Sanders allez savoir ? Pourtant, cette fois, c’est sans idées prédéfinies qu’il s’était rendu chez Nate. Il obéissait à sa mère ? Ce serait bien la première fois. Non, ce n’était pas cela qui l’avait motivé mais bien la curiosité. De nombreuses interrogations l’habitaient en se présentant chez son ex-maîtresse. Nate l’enverrait-elle aux diables ? Serait-elle aussi belle que dans ses souvenirs ? Avait-elle pris un nouvel amant ? Possédait-elle encore des sentiments pour lui ? A toutes ces questions, l’esprit d’Andreï répondait par l’affirmative. Bien sûr son égo se flatterait d’un accueil chaleureux mais là… inutile de rêver. Si des sentiments existaient, ils seraient plutôt du genre… acide. Le fait d’être reçu sans trop lanterner était déjà un point positif en soi. Après tout ce qu’il avait fait à Natacha, celle-ci aurait été en droit de lui interdire sa porte ou mieux de lui lancer directement un Avada.
*Elle est très féline… aussi curieuse que toi, voilà tout. *
N’empêche que la miss n’était pas cordiale. Sans l’irruption de Flore dans ses pattes, Andreï serait parti sans remords vu le peu de succès rencontré. A tout prendre, il préférait l’engueulade véhémente plutôt que cette froide indifférence. Puis, sans avertissement, l’avocaillon commis par Davenport s’était matérialisé en compagnie de Cavendish. Et là, il avait d’un coup mesuré l’ampleur des dégâts causés par son intrusion chez Nate.
*L’ordonnance du divorce… ? Tintin aura exigé que je ne sois jamais présent avec ses filles ! NDD !*
Devant l’attitude de bête traquée de Miss Sommerby, il avait tenté de récupérer le coup… en vain. Comme un chien battu, il avait regardé Nate qui, enfin, réagit en lui balançant ses vérités :
C’est ta faute !!! À Cause de toi…on m’a pris mes enfants !...Pourquoi es tu revenu !!!??? Je te déteste, Andrei Sanders…je te hais…je voudrais te tuer, en ce moment !
Très bas, il répondit :
Fais-le, je le mérite.
Elle ne semblait rien entendre ou ne rien vouloir entendre ce qui revenait au même. Elle lui asséna une baffe magistrale et poursuivit :
Tu es parti en te fichant de tout et de moi… * C’est vrai*Pourquoi tu n’es pas resté dans quelque trou, à pourrir !? *J’aurais mieux fait, oui* Après tout…ça t’est absolument égal ce que nous devenons…*C’est faux ! Archi faux !*Depuis quand ce que peut dire ta mère t’affecte…*Jamais… au grand jamais*tu te balances de tout et de tous…*C’était vrai*Tu voulais faire ta petite bonne œuvre du jour ?!?**Pas du tout, voyons ? J’ai pas l’âme d’un bon samartitain.*.Allons faire une petite visite de courtoisie à cette idiote de Sommerby, voir comment ça se passe pour elle !?
Idiote, oh oui, elle l’avait été et là, dans sa splendeur furibonde, c’était une ravissante idiote, la plus adorable des idiotes. Ni injures ou insultes n’atteignirent Andreï. Les réactions de Nate au lieu de l’énerver amusèrent Andreï. Tant de fougue, de passions déployées trahissaient certes du ressentiment à son encontre mais surtout quelque chose de plus profond : un désarroi émouvant. Ne cessant de la fixer, sans esquisser l’ombre d’une défense contre le déballage verbal, au lieu de se replier Sanders avança vers la jeune femme. Son air de biche aux abois confirma ce qu’Andreï devinait : elle avait peur. Peur de lui, et aussi… peur d’elle-même. Elle recula tant et si bien qu’elle se cogna au meuble derrière elle et faillit perdre l’équilibre. Geste innocent de secours ? Pas tout à fait. Sanders savait très bien ce qu’il faisait. S’il lui manquait une preuve de son ascendant sur Nate, il l’eut en la sentant frissonner dans son bras valide :
Je…ça va… Lâche moi…va…t’en…tu as…déjà causé assez de misères pour un...jour…
Dommage… je n’ai plus du tout envie de m’en aller.
Il fut un temps pas si lointain où Sanders aurait jubilé d’exercer son pouvoir sur cette femme. Cette domination était intacte, il la percevait dans cette tentative éperdue que Nate effectuait pour lui échapper. Elle était si… belle, émouvante, attendrissante. Le désir qu’il avait d’elle devint torture. Elle tenta encore de le repousser, de l’exclure :
Tu…n’as pas voulu de nous…Nous…ne voulons plus de toi…
Ne mens pas, Nate. Ni à moi ni … à toi-même !
Comment l’empêcher de débiter des âneries ? En l’embrassant, pardi ! Délicieuse sensation. Etourdissante, même. La jument renâclait encore mais le licol se resserrait.
Qu’est-ce…que tu…veux ? C’est quoi…le nom de ce jeu ?...Le repos du guerrier ?
Ce n’est pas un jeu… Tu devrais le savoir, depuis le temps.
Sa poigne ne se relâcha pas. Bientôt il sentit la résistance de Nate l’abandonner. Elle se savait à nouveau à sa merci :
Pourquoi…es tu venu ? Pour mieux faire tes adieux ?
Enfiévré, il ne put que répliquer :
Pour mieux te dire bonjour ! Nate… je ne peux pas vivre sans toi.
Si Andreï était un excellent agent, il existait un terrain où il savait déployer d’autres talents. La chambre de la jeune femme était idéale pour le meilleur des combats. Six mois d’abstinence n’avaient fait que renforcer le désir qu’il éprouvait pour sa maîtresse. Même s’il avait quasi sans cesse pensé à Samantha, Andreï devait reconnaître avoir presque autant songé à sa folle rouquine. Elle seule semblait le comprendre et partager ses délires. L’épisode fut mémorable. Quoique son bras amoché le fît souffrir, Sanders sut se montrer à la hauteur des exigences de son amante. Sa plus grande crainte était de ne pas lui faire mal. Autant qu’il sache, les femmes enceintes ne requièrent pas de précautions particulières dans l’acte de chair, n’empêche que c’était une première ! Si bébé rouspéta de la violence des ébats, Nate ne lui en souffla pas un mot, trop occupée à lui donner une réplique encourageante.
…
Le calme revint. Sens apaisés, Andreï se montra d’une tendresse inédite. Au lieu de se retourner et s’endormir tel un ours ordinaire, il accommoda sa compagne au creux de son bras valide, ne cessant de lui distribuer baisers et caresses :
Tu voudrais me haïr, n’est-ce pas ma douce ? T’en fais pas, nous sommes deux en ce cas… Oui, tu as bien entendu : je me hais. J’avoue ne pas m’être comporté en… gentleman.
Il rit quand elle le pinça cruellement :
Je ne parle pas seulement de maintenant mais surtout de nos dernières relations. Je suis un immonde salaud. J’ai profité de toi, de ton attachement pour moi dans l’unique but de récupérer Sam…
Que la Miss se cabre à nouveau n’avait rien d’extraordinaire. Il resserra son étreinte ferme mais douce :
Là, là ! Calme-toi. Il faut bien que l’on évoque nos ex, non ? Cela m’a pris du temps pour réaliser que Sam s’est échappée des sentiers que j’avais imaginés pour nous… Oui, j’ai voulu faire tuer Justin… Je ne désespère pas de le voir crever un jour, du reste... Non, pas pour récupérer Sam, juste par, euh… principe ! … Ben oui, j’en ai figure-toi ! … Ah ? Justin ne va pas bien ? Je ne m’en plaindrai pas. Le gars à qui j’ai acheté son antidote a parlé d’effets secondaires. Je n’y ai pas accordé d’intérêt : je voulais rendre son père à l’enfant de Sam… Ce qui m’a amené doucement à la conclusion qu’il serait injuste que ton enfant ne me connaisse pas.
Nate paraissait mi-figue mi-raisin. Peut-être s’était-elle attendue à d’autres aveux mais ceux-là Andreï n’était pas encore prêt à les sortir.
Parle-moi de cette ordonnance concernant tes enfants. Si j’ai capté, tu ne les as avec toi que si je ne suis pas là, c’est ça ? … On s’arrangera. Ce n’est pas si compliqué. Je ne me pointerai jamais pendant ta semaine de garde, si tel est ton souhait… J’habiterai mon domaine, ma mère n’y vient que rarement. N’empêche que ce sera très dur de ne pas t’avoir sans cesse à mes côtés.
La Miss doutait toujours de ses bonnes intentions. Il lui cloua le bec d’un baiser passionné et souffla :
Non, je ne disparaîtrai plus *de mon chef, en tout cas* Je te l’ai dit : je raccroche uniforme et armes. Notre enfant mérite bien ça, non ?
Quelques jours s’écoulèrent dans la joie des retrouvailles. Malgré une certaine suspicion, Nate paraissait toute disposée à accepter le compromis proposé. Andreï se tiendrait à distance chaque fois que ce serait nécessaire pour que Nate puisse tranquillement recevoir ses quatre enfants. Puisque, selon eux, elle serait libre plusieurs semaines avant la garde normale, Andreï jugea utile d’opérer un rapprochement avec la princesse, sa mère. Il annonça la couleur après une après-midi lascive passée à se câliner. Sans cacher sa fascination pour l’abdomen rebondi de sa compagne, le jeune homme déclara :
Que dirais-tu si je nous organisais un dîner sympa avec Anastasia ? Elle t’apprécie, sais-tu ?... Bien sûr qu’elle est au courant que tu ne m’as pas jeté dehors... Elle s’en réjouit pour nous. Tu sais, elle n’est plus toute jeune… J’aurais souhaité adoucir ses vieux jours… J’aimerais que vous vous entendiez bien, toutes les deux.
Certes en disant cela, Andreï était conscient qu’il jetait une passerelle vers un avenir où Nate et leur enfant seraient prépondérants. Il voulait sincèrement la paix et le pardon de ses fautes, se sentait prêt à bien des concessions pour y parvenir. Jusqu’où arrondirait-il les angles était une bonne question.
La réunion eut lieu par un beau dimanche. Prévenue à temps, la princesse Orloff se montra enthousiaste à l’idée de recevoir ce couple inhabituel. Très diplomate, elle s’était arrangée pour éloigner son mari qui, selon ses dires, les rejoindrait au dessert. L’accueil fut très chaleureux. Anastasia accapara immédiatement Nate en la bombardant de questions sur le déroulement de sa grossesse. Elle voulait tous les détails dont le capital : quel était le sexe du bébé. La future mère ne fit aucun mystère : ce serait un garçon.
Félicitations ! s’empressa la Princesse en embrassant la jeune femme. Un héritier mâle ! Rien ne pouvait me faire plus plaisir ! Andreï, j’espère que tu as mis en route la procédure de régularisation ?
Pas encore, mère ! répondit-il embarrassé. Nous venons à peine de renouer et il se passera encore des mois avant que l’enfant naisse.
Apparemment, Anastasia s’était déjà fait tout un cinéma dans lequel Sander n’était pas encore certain du rôle à jouer en tant qu’acteur. Entre l’entrée et le plat consistant, Andreï laissa les femmes entre elles afin d’assouvir son besoin de nicotine au fumoir. L’absence de Gerry était une bénédiction. Il aimait beaucoup son beau-père avec qui il avait connu des débuts assez difficiles. Forrester ne l’avait pas encadré dès qu’il avait posé les yeux sur Sam. Finalement il avait agréé Sanders car il aurait accepté le diable en personne si celui-ci avait eu l’heur de plaire à sa fille chérie. Preuve en était qu’il ne soit pas monté aux créneaux quand elle avait jeté son dévolu sur ce crétin de Tintin. Somme toute, n’importe qui aurait reçu l’agrément de Gérald du moment que Sam s’en contentait. Piètre consolation… Tout aurait pu, aurait dû être différent… Samantha… Son amour… A quoi bon les regrets… Le mal était fait. Il devrait vivre avec ce poignard dans le cœur le reste de ses jours.
La glace du dessert fondait dans les coupes. Nerveuse, Anastasia n’écoutait plus que distraitement la conversation qu’essayaient de soutenir Nate et Andreï. Sans cesse elle consultait sa montre au point que son fils s’en mêla :
Inutile de t’inquiéter de la sorte, maman. Gerry aura été retenu, et…
Il prévient ! Il me prévient toujours ! J’ai essayé son portable, il n’est pas branché.
Veux-tu que j’envoie un patronus en recherche ?
Sa mère refusa cette proposition, la jugeant un peu trop… hâtive. Une heure s’écoula dans une certaine tension puis le téléphone sonna :
C’est sûrement lui ! Il va m’entendre !
En fait ce furent les invités qui entendirent. Au cri de sa mère, Andreï se rua dans le salon et arriva juste à temps pour soutenir une Princesse livide qui défaillait :
Maman, qu’est-ce qu’il y a ? Gerry ? Il est arrivé quelque chose à ton mari ?
Entre deux sanglots, Anastasia avoua la nouvelle : Gerry avait eu un grave accident de voiture. On l’avait conduit à l’hôpital.
On va y aller, maman. Je t’y accompagne de suite.
Se tournant vers Nate accourue aussi, il bredouilla, confus :
Pardonne-moi ma chérie... Il faut que je… Tu comprends ?
D’une certaine façon, il l’excluait à nouveau. Cela lui déplaisait autant qu’à elle mais il s’agissait d’un cas de force majeure… ainsi que d’une opportunité en or de revoir Sam, bien que cette pensée furtive ne l’atteignît pas immédiatement.
A l’hôpital on se montra strict : pas plus d’un visiteur à la fois dans la chambre. Les moldus étant des idiots, Andreï sous désillusion accompagna sa mère jusqu’au chevet de Gerald Forrester. Des blessés, Andreï en avait vu de plus mal lotis. Il s’abstint de commentaires devant le corps couverts de bandelettes d’où sortaient des tuyaux de tous genres. Une main compatissante sur l’épaule d’Anastasia, il tenta de la rassurer :
Il est entre de bonnes mains. Il est solide, il s’en tirera.
Une paire d’heures s’écoulèrent auprès du blessé qui ne reprit conscience en aucun moment. Mrs Forrester désespérait :
On devrait le transférer à Ste Mangouste, les médicomages sauraient mieux le rafistoler que ces moldus… Moi je n’ai pas la force de tenter quoique ce soit.
On ne peut pas le déplacer dans cet état, maman ! Il faut attendre. Ne… Ne crois-tu pas qu’il faudrait prévenir Sam ?
Tu as sans doute raison… Gerry serait heureux de la revoir même si… s’il n’en a pas conscience.
Téléphone-lui. Ne dis pas que je suis ici.
Andreï… Tu ne vas pas… Tu ne feras rien de travers, n’est-ce pas ? Sam vit en paix, tu as trouvé une gentille fille qui t’aime…
Le sourire ambigu de son fils ne rassura qu’à moitié la Princesse qui consentit néanmoins à appeler sa belle-fille. Au retour de la communication avec les Bermudes, Anastasia confirma l’arrivée prochaine de Sam :
Il sera avec elle, il me l’a dit !
Dans son état ?
Il dut expliquer ce que Nate lui avait raconté sur la santé de Justin. L’opprobre se peignit sur la mine fatiguée de Mrs Forrester qui conclut :
Malade ou pas, il ne laissera pas seule Sam dans une épreuve pareille ! Tu en seras pour tes frais, Andreï.
Va te balader un peu, maman. Prends un thé au un café, tu en as besoin. Je veillerai Gerry.
L’attente fut courte, comme il le prévoyait. Furtive, l’air épouvanté, Sam se glissa dans la chambre de l’inanimé. Touchant tableau que celui de cette fille affligée, pleurant en étreignant la main paternelle :
Gerry…Gerry…Papa ! Je suis là… Me fais pas ça, Gerry…Je t’aime…j’ai besoin de toi…Papa…
Pathétique… Ne pouvant détacher son regard ému de cette scène affligeante, Andreï lutta contre le désir fou qui s’emparait de lui. Il s’efforça à la modération et avança doucement dans le dos de Sam. Son cri effrayé quand elle le reconnut en suspendant son geste d’abandon contre la main posée sur son épaule le crucifia :
Toi !?!?
Acteur consommé, Andreï se montra assuré :
Surprise ? Je n’allais pas laisser ma mère affronter seule cette situation.
Les yeux noyés de larmes, ses rondeurs accentuées, la rendaient encore plus belle que la dernière fois où ils s’étaient croisés.
Ne tire pas cette tête Sam ! Je ne te veux aucun mal, comment le pourrais-je *moi qui t’aime tant* Viens-là et pleure tout ton saoul si tu veux.
Trop secouée pour résister ? L’attraction première jouait-elle encore ? Le fait est qu’il reçut Sam contre son torse et l’y berça tendrement :
Chut, chut ! Il est aussi solide qu’un roc, ton paternel. Le pylône électrique qui l’abattra n’est pas encore dressé… Je suis sûr qu’il s’en remettra.
Comme il aurait été facile de profiter du désarroi de la miss. Même avec son amant derrière la porte, et son père dans le lit à côté, Andreï se convainquit que sa proximité personnelle n’était pas sans effet sur Sam. L’envie de prendre ses lèvres le tenailla. Il résista, se contentant de lui baiser les cheveux au parfum inoubliable. Sentit-elle le danger d’une étreinte prolongée ? La jeune femme se dégagea, il ne la retint pas lui offrant son mouchoir.
...Un piège ? Ne fais pas l’idiote, ça te va très mal. Je ne suis pour rien dans cet accident mais… j’avoue ne pas en être trop désolé puisqu’il me permet de te revoir. Que ça te plaise ou non, il est des choses que l’on ne peut changer… Je voudrais pourtant profiter de l’occasion pour te dire à quel point je suis désolé pour tout le mal que j’ai pu vous causer à toi et à Justin. Je regrette que ça ait tourné ainsi… Mais laissons cela : nous sommes ici pour Gerry. … On ne sait pas comment il s’en sortira. Veux-tu que j’essaye de le réveiller ? Tu sais, à la guerre d’où je reviens, j’en ai vu d’autres… bien pires ! Si nous conjuguions nos forces, cela serait peut-être bénéfique ?...
Elle hésitait mais qu’avaient-ils à perdre que de tenter la magie ? Andreï retira son bras de l’écharpe de soutien et prit la main de la jeune femme. De celle libre chacun utilisa sa baguette. Durmstrang n’était pas une école réputée pour prôner l’aide envers son prochain. Sur le tas, on en apprend des choses ! Soufflant les incantations à Sam, Sanders provoqua avec son aide une sorte d’aura dorée autour du corps inconscient. Inerte au début, Gerry finit par remuer lorsque la clarté le pénétra. Des yeux vagues les fixèrent :
Ana… Sam… ?
Rompant le charme, Samantha se jeta sur son père qu’elle inonda de larmes et de baisers.
Ma petite fille ! Comme tu m’as manqué !
Par-dessus l’épaule de sa fille chérie, il reconnut son gendre. Que faisaient-ils ensemble ?
And… Andreï ? Qu’est-ce que tu… ?
Remettez-vous Gerry. Je ne suis que de passage. Sam a été merveilleuse. Sans son amour pour vous, je n’aurais rien su faire. Tout va aller bien maintenant. Beaucoup de repos et il n’y paraîtra plus.
La question suivante du revenant concernait son épouse. Il était temps pour Andreï de fermer le rideau. Accompagnant Sam dans le couloir, il rassura aussitôt sa mère d’un clin d’œil complice.
Tu peux y aller, il t’attend.
Marrant de voir Tintin refuser de le regarder en face.
*Pauvre cloche… Le poison l’a bien arrangé… Tant mieux !*
L'ironie mordante prit le dessus:
On a besoin d'une béquille à présent, Justin? Nate sait faire des miracles en ces cas. J'en suis un bon exemple... Tu devrais la consulter...
C'était un bon jour! Davenport se contenta d'une réplique acerbe. Puis, tel un voleur – ce qu’il était en somme – il emporta Sam loin de lui. Resté seul dans le couloir, Andreï ne s’attarda pas. Gerry était hors de danger, Anastasia serait ravie de passer la nuit à son chevet. N’était-il pas temps de rentrer chez lui ? Pas de suite…
La mine sombre de Nate ne présageait rien d’amical quand il pénétra tardivement au salon où elle avait usé le tapis en y faisant les cents pas. La meilleure défense est l’attaque :
Gerry est tiré d’affaire, assura-t-il en allant au bar se servir un verre. La magie épuise ! Je suis claqué… Sam ? Bien sûr qu’elle était là ! Normal, non ? … Comment ça, ça a duré ? On n’a pas regardé notre montre en… Quoi ? Faisant l’amour ? ( il éclata de rire) Tu devrais savoir que ça nous aurait pris bien plus de temps que ça ! On a soigné Gerry. …Justin ? Je l’ai vu... pas brillant, en effet. Cessons de parler d’eux veux-tu, on a mieux à faire.
Que nenni ! Nate était d’humeur belliqueuse. Elle cherchait vraiment la bagarre, lui pas. La fatigue de ces dernières heures lui pesait. La moutarde menaçant de piquer au nez, il était temps d’en finir :
Tu veux vraiment savoir à quoi j’ai passé mon après-midi ? Viens, je vais te montrer !
Assez rude, il lui accrocha la main et la força à l’accompagner à l’étage. La porte s’ouvrit à la volée sur… un champ de roses. Tables, commodes, chevets, tapis étaient couverts de somptueuses gerbes de coroles écarlates.
J’ai dévalisé 10 fleuristes pour garnir ta chambre. Si ça te plaît pas tant pis.
Grognon, il la planta sur le seuil et se dirigea vers la pièce de repos des invités. Comme frappé d’une idée, il revint sur ses pas :
Ah ! dit-il en fouillant sa poche. Je suis aussi passé chez le bijoutier.
Il sortit un écrin qu’il lui fourra brutalement en main :
Tu peux la balancer à la flotte mais si tu me veux pour mari, tu n’as qu’à la porter ! Bonne nuit !
Rageur, il reprit la direction de la chambre d’amis. Quelle romantique demande en mariage…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Lun 1 Nov - 12:12 | |
| Lui !? La dernière personne qu’elle aurait souhaité rencontrer là, au chevet de son père, quoiqu’en y pensant bien c’était assez logique, comme il lui fit remarquer :
Surprise ? Je n’allais pas laisser ma mère affronter seule cette situation.
Sam fit un effort pour reprendre contenance mais cela s’avérait bien difficile, trop d’émotions, sursauts et craintes se bousculaient dans son esprit comme pour en venir à bout rien qu’en le désirant.
Oui….bien sûr…seulement que...je ne m’attendais pas…à…à…te trouver là…
*Ni le voulais, non plus !*
Elle serra les lèvres et respira un bon coup dans un vain essai de se calmer. Si voir Gerry dans cet état la mettait au désespoir, être face à face avec son ex mari n’arrangeait en rien les choses. Il le devina et se montra conciliateur.
Ne tire pas cette tête Sam ! Je ne te veux aucun mal, comment le pourrais-je ? Viens-là et pleure tout ton saoul si tu veux.
*Tu m’en as déjà fait tant…*
Mais pour stupide que cela puisse paraître, Sam ne parvenait pas à le détester , le craindre suffisait amplement, pourtant, en cet instant, elle céda à sa propre douleur et au besoin d’être rassurée. Il la retint contre lui, apaisant.
Il va mourir, sanglota t’elle, éperdue, tout contre son épaule, Gerry va mourir…il...il...semble…si démuni…là…
Chut, chut ! Il est aussi solide qu’un roc, ton paternel. Le pylône électrique qui l’abattra n’est pas encore dressé… Je suis sûr qu’il s’en remettra.
Elle continua de pleurer alors qu’Andrei la berçait comme à un enfant. Sam ferma très fort les yeux. Un instant…juste un instant d’oubli. C’était comme cela aurait toujours dû être…si…mais il y avait eu ce si…et tout avait foiré, tout s’était perdu, irrémédiablement gâché. Sentir ses lèvres sur ses cheveux l’émut mais la fit réagir aussi. Que faisait-elle là ? Justin était à deux pas, de l’autre côté de la porte et elle…Sans brusquerie, Sam se dégagea de ses bras. Il ne fit aucun geste pour la retenir, ce qu’elle remercia en silence en prenant le mouchoir tendu. Se tamponnant les yeux, elle essaya de mettre frein aux idées odieuses qui couraient dans sa tête…sans y parvenir, tout à fait.
C'est…si…inespéré…de te trouver ici...au chevet de Papa…Il semblerait que tu m’attendais…C’est ainsi, Andrei ? Une espèce de…piège…je n’en sais rien, comme si…
C’était stupide de dire cela et il s’en défendit aussi.
Un piège ? Ne fais pas l’idiote, ça te va très mal. Je ne suis pour rien dans cet accident mais… j’avoue ne pas en être trop désolé puisqu’il me permet de te revoir.
Elle leva un regard noyé de larmes vers lui.
Ne…dis pas de sottises…cela ne mène à rien.
Que ça te plaise ou non, il est des choses que l’on ne peut changer…
Andrei…
Il ne la laissa pas poursuivre.
Je voudrais pourtant profiter de l’occasion pour te dire à quel point je suis désolé pour tout le mal que j’ai pu vous causer à toi et à Justin. Je regrette que ça ait tourné ainsi… Mais laissons cela : nous sommes ici pour Gerry. … On ne sait pas comment il s’en sortira. Veux-tu que j’essaye de le réveiller ? Tu sais, à la guerre d’où je reviens, j’en ai vu d’autres… bien pires ! Si nous conjuguions nos forces, cela serait peut-être bénéfique ?...
Elle aurait voulu lui demander tant de choses…lui dire qu’elle s’était fait de la bile en sachant qu’il courait les guerres sans aucun souci pour sa peau…mais fut consciente du besoin de distance, pour vivre chacun leur vie, de la meilleure façon possible.
Or là, pour aider Gerry…elle passerait outre n’importe quoi.
Oui…cela lui fera sans doute…beaucoup de bien !
Main dans la main, ils étaient de nouveau le duo parfait. Suivant les indications qu’il lui donnait, Sam récita incantations et sortilèges, jusqu’á voir, émerveillée, se former une douce aura dorée autour de son père qui sembla l’imprégner avant de fondre en lui. Elle n’y croyait presque pas quand enfin, Gerry battit des paupières et un instant plus tard, fixa un regard vague sur eux :
Ana… Sam… ?
Lâchant la main d’Andrei, elle se précipita sur lui.
Gerry…Gerry…Papa…tu m’as fait si peur…
Elle pleurait en l’embrassant comme une folle.
Ma petite fille ! Comme tu m’as manqué !...And… Andreï ? Qu’est-ce que tu… ?
Il devait s’en faire, des idées, ce cher homme mais Andrei ne lui laissa pas le temps d’aller plus loin.
Remettez-vous Gerry. Je ne suis que de passage. Sam a été merveilleuse. Sans son amour pour vous, je n’aurais rien su faire. Tout va aller bien maintenant. Beaucoup de repos et il n’y paraîtra plus.
Samantha déposa un baiser sur le front de son père.
Et sans l’aide d’Andrei…je n’aurais pas trop su que faire…repose toi, Papa…je reviendrai demain…Oui, je serai là jusqu’à ce que tu ailles bien…Je t’aime, Gerry…nous allons dire à Ana de venir…elle va être si heureuse…
La princesse ne se fit pas répéter de rejoindre le chevet de son mari. Instant d’embarras. Justin, la mine sombre, attendait aussi. Sans hésitation, Sam se jeta dans ses bras, en pleurant.
Sam, mon amour, ne me dis pas que…
Elle releva la tête, sourire mêlé aux pleurs.
Non…Il va mieux…Il s’est réveillé…
Andrei ne pouvait que suivre la scène et bien entendu ne se priva pas de se montrer poison.
On a besoin d'une béquille à présent, Justin? Nate sait faire des miracles en ces cas. J'en suis un bon exemple... Tu devrais la consulter...
C’était carrément odieux de sa part. Sam lui adressa un regard féroce qu’il ignora, déjà Justin ripostait.
Occupez-vous de vos affaires… et de mon ex aussi tant que vous y êtes. Viens, ma chérie, on va prendre une chambre dans un hôtel proche. On reviendra demain.
Elle le suivit sans un mot, plantant Andrei au milieu du couloir.
L’hôtel n’était pas un des ces palaces auxquels ils étaient habitués mais le moment se prêtait mal à ce genre de contemplations. Sam se sentait soudain très lasse, toutes ces émotions en si peu de temps l’avaient rudement éprouvée. Justin ne pipait mot mais elle le connaissait assez comme pour savoir qu’il n’avait pas du tout agréé sa rencontre avec son ex. S’approchant de son chéri, qui sirotait son whisky d’un air renfrogné, elle passa la main dans ses cheveux et l’embrassa, câline, sur la joue.
Ne fais pas cette tête…Je sais que la situation, tantôt, ne t’a pas ravi…Je ne pouvais pas savoir qu’Andrei serait là…et puis…il ne s’est rien passé…
La réaction de Justin la prit de court, le voilà qui sautait comme soupape de sécurité.
Rien ? Tu prétends qu’il ne s’est rien passé ? Voilà un rien qui a duré, excuse-moi de te le signaler…
Elle recula d’un petit pas et le considéra, navrée, sentant, encore une fois, les larmes lui piquer les paupières.
Tu...es furieux !
Il demeurait intraitable.
Comment ça, je suis furieux ? Pas du tout ! Je suis frustré, ça oui ! Tu passes près d’une demi-heure au chevet de ton père en compagnie de ton ex et je devrais être rassuré, me contenter de ce … rien ?
Justin, ne sois pas ridicule ! Tu es en train de me faire une scène, juste parce que…c’est idiot. Andrei n’y pouvait rien…il était là, au chevet de Papa…c’est tout et était si désolé…
Et l’autre de lui rire au nez, méprisant.
Désolé ? Il se dit désolé ? Et tu le crois, évidemment…
Et pourquoi je ne le croirais pas, s’il te plaît ? Andrei n’est pas un menteur…
Non, je n’en crois rien ! Andreï ne changera jamais ! Tu sembles oublier la maîtresse façon avec laquelle il embobine les gens, toi en particulier. Tu en as pourtant été assez victime, non ?
Sam sentait la moutarde lui monter gentiment au nez, elle pouvait bien comprendre que Justin ne soit pas ravi mais de là à se montrer si amer !
Nous avons tous souffert. Je n’ai pas été plus victime d’Andrei que lui de moi, il me semble que c’est moi qui l’ai abandonné définitivement…et ça lui a fait du mal…n’essaye pas de le voir toujours comme un tortionnaire sans cœur…
Si ça te plaît d’abonder en ce sens et de croire à ses bobards, libre à toi. Je sais que tu viens de traverser une rude épreuve. On est crevés tous les deux, nous disputer ne résoudra… rien. Bonne nuit!
Il avait raison, se disputer aigrement ne donnerait rien de bon, autant faire semblant de n’avoir rien entendu et aller plutôt prendre un bain qui aiderait à dénouer ses muscles tendus et endoloris. Plongée dans l’eau tiède, Sam laissa son esprit divaguer, sans penser vraiment à quoique ce soit…un moment de vide, de silence, qui l’apaisait…mais cela ne dura que trop peu, angoissantes, les réalités revinrent au galop. Dans son sein, l’enfant sentit l’émoi de sa mère et bougea, pour faire sentir sa présence.
Tout va aller bien, ma chérie !, susurra Sam en caressant la courbe de son ventre, tout va aller bien…
Elle voulait y croire de toutes ses forces !
Justin feignait dormir mais elle savait qu’il était parfaitement éveillé et boudait. Faisant semblant de ne rien remarquer, Sam se glissa sous les draps, s’accommoda à son aise. Cinq minutes plus tard, elle dormait paisiblement, le sachant proche, ce qui suffisait pour la rassurer.
Le lendemain, à peine le petit déjeuner expédié, elle voulut se rendre à l’hôpital. Justin avait meilleure mine que la veille mais n’était pas encore remis de sa mauvaise humeur. Sam pressentit que cela durerait autant qu’ils devraient rester en Angleterre, au chevet de Gerry.
Je t’aime, Justin... C’est tout ce que je voulais te dire avant d’aller voir Papa…Non…je ne sais pas si Andrei sera là et même s’il y est...qu’est ce que cela peut faire ? Je ne vais pas passer ma vie à me cacher de lui ni de personne…Ne te fais pas des idées débiles, mon amour…Non…je suis sûre que tout va aller bien…Je resterai le plus possible avec Papa…C’est pour lui que je suis là…pour personne d’autre…Que dirais tu, si au lieu de tourner en rond à te faire du mauvais sang, tu nous cherchais un gentil coin où vivre un temps…je n’aime pas trop les hôtels et sais que toi non plus..Un petit chez nous temporaire ? Dis…ça ne te plairait pas…ça nous ferait un peu...comme des vacances…
Elle aurait fait n’importe quoi pour rendre Justin 100% heureux mais savait sciemment que ce ne serait pas possible…et craignait en connaître la raison.
*C’est pas seulement Andrei…c’est aussi sa rousse…Il ne l’oublie pas…Ça lui fait toujours mal. Dieu…que la vie est compliquée !*
Sans vouloir maintenir Justin à l’écart mais jugeant que le moment n’était pas encore propice pour qu’il rencontre Gerry elle partit seule, non sans avant avoir promis de le tenir au courant des faits de sa journée.
*Il a peur que je file avec Andrei ou quoi ?*
Question stupide. Bien sûr que c’était cela que Justin craignait. Il se trouvait là, infirme, démuni, aigri, suspicieux…et n’avait même pas son indéfectible ami pour lui remonter la morale. Pauvre Michael, il aurait difficilement pu le faire, alors que lui-même avait rudement besoin d’un bon coup de pouce, pour remonter la pente après la défection de sa femme.
Anastasia se trouvait au chevet de son mari quand Sam pointa son nez dans la chambre. Gerry avait meilleure mine, après son retour à la vie. Légèrement incorporé dans son lit, il avait encore l’allure d’un grand malade mais son sourire rassura la jeune femme.
Entre donc, ma chérie, je suis contente de te voir plus gaillarde qu’hier…Tu te sens bien ?
Elle s’était levée et allait vers elle, la détaillant minutieusement. Son regard s’arrêta un instant sur son ventre si évident sous les plis de sa robe.
Je vais bien, Anastasia, merci…nous allons bien !
Sourire pincé mais l’accolade fut sincère.
La maternité te sied, Samantha, tu resplendis.
Un rien de reproche dans le ton mais déjà Sam fit diversion en s’élançant vers le malade.
Gerry...Gerry…ne me joue jamais plus un tour si pendable!!!
Désolé, mon ange…je jure ne pas l’avoir fait exprès…mais au moins ça aura servi pour te voir !
Pas besoin de t’estampiller contre un poteau, Papa, si tu voulais me voir…tu pouvais aller me visiter…ou me demander de venir !
Elle caressa doucement la joue de son père qui souriait, aux anges.
J’y ai pensé tant de fois…Ana a raison…tu es radieuse…es tu heureuse, mon petit ?
Sam acquiesça en silence, désirant qu’il change de thème…c’était tout de même gênant pour elle parler de cela face à la mère d’Andrei, ce que celle ci comprit au quart de tour.
N’ai pas honte d’être heureuse avec Justin, Samantha…la vie a parfois une façon particulière de dévoiler ses desseins…Quelquefois, il est nécessaire de se tromper avant de trouver le bon chemin…mais assez de philosophie…Les docteurs ont dit que Gerry est hors de danger, sa récupération demandera un peu de temps mais tout ira bien…
C’est merveilleux, ça ! On pourra bientôt aller faire la fête, alors…
Oui… et on dansera jusqu’à l’aube !, assura Gerry en serrant la main de sa fille comme s’il avait du mal à la croire si proche.
S’imaginer en dansant comme une dingue dans son état la fit rire.
J’aurais l’air d’une grosse toupie…on attendra encore un petit peu de temps…, elle porta la main de son père à sa joue en soupirant, émue, ce n’était peut être pas la meilleure façon de faire les choses mais d’ici deux mois, tu seras grand-père, Gerry…il y a beaucoup de choses qui devront changer…
Pas besoin d’en dire plus, Mr.Forrester connaissait bien sa fille et savait exactement où elle voulait en venir.
Oui, ma chérie…tout devra changer…plus de distance entre nous, plus jamais.
De l’autre côté du lit, la princesse Orloff hocha la tête, en souriant.
Andrei n’apparut pas de la journée ni le lendemain ni le jour d’après. Et elle ne demanda pas de ses nouvelles. Gerry reprenait rapidement ses forces et Justin semblait avoir calmé ses appréhensions, pour lui faire plaisir, il avait trouvé un cottage charmant, situé pas trop loin de l’hôpital. Sam, bien malgré elle, avait vu mettre à sa disposition une voiture, avec chauffeur, pour faire ses déplacements. Elle avait joliment tempêté, rien n’y fit, il lui faudrait se faire à l’idée d’être couvée comme un petit objet fragile.
Elle aurait reconnu cette chevelure rousse entre mille. Rien ne l’emballait moins qu’une rencontre avec l’ex Mrs Davenport mais là, impossible de faire de mi tour et l’éviter, comme en la pressentant, Nate s’était retournée et l’avait vue. Pendant un instant, les deux jeunes femmes se toisèrent en silence. Sam se décida enfin à parler.
Bonjour, Nate. Pas de souci, je sais que cette rencontre ne te réjouit pas…Pas plus qu’à moi, d’ailleurs, mais enfin…puisqu’on en est là. Comment vas-tu ?
Aucun doute qu’elle se portait comme un charme. Toujours si impétueusement belle. Sam ne put laisser de remarquer la superbe bague qui ornait son annulaire gauche, impossible de s’y méprendre, c’était bien une bague de fiançailles. Minime pincement au cœur.
Je me réjouis pour toi, Nate…et j’espère que tu seras aussi heureuse que tu rêves de l’être. Oui…je vais très bien…Justin ?...Tu veux réellement savoir comment il va ? Andrei a dû t’en parler…
Il l’avait fait. Sam vit son éternelle rivale soupirer, un éclat chagrin passa dans ses yeux.
Tu peux t’imaginer qu’un homme comme lui admet mal être dans cet état…Ne prends pas cet air apitoyé…il n’en a que faire de ta pitié...ni de celle de quiconque…Tu le connais assez bien pour le savoir !
Nate hocha la tête mais ne dit rien à ce sujet, préférant demander comment allaient ses enfants.
Ils se portent à merveille. Nous parlons tous les jours avec les filles. Heureusement qu’elles vont à l’école…l’absence de leur père leur pèse moins ainsi…je m’en veux de les en avoir privées mais Justin n’a rien voulu entendre que je vienne seule...enfin, tu comprends.
*Quelle conversation débile !*
La situation ne manquait pas d’absurde ironie. Elles, qui avaient pas mal de raisons pour se haïr dévotement, étaient là, à bavarder de façon si…civilisée. Rester debout trop longtemps ne seyant à aucune, elles optèrent pour s’asseoir prendre un café, comme des vieilles amies qui se retrouvent au hasard de leurs emplettes.
Notre vie est très tranquille, aux Bermudes…l’endroit est charmant mais pas besoin de te le décrire, tu connais aussi…Michael ? Comique que tu me le demandes, il n’est pas saint de ta dévotion, pour autant que je sache…Disons qu’il va aussi bien qu’on peut aller avec tout ce qui lui arrive…Non, il est en parfaite santé.
Elle en resta là et passa à s’intéresser au bébé de la rouquine.
Ah, ce sera un garçon. Andrei doit être très content…et Anastasia aussi, elle est très imbue des traditions…fière de son nom…et de tout ce que cela entraîne !...Le nôtre ? Je ne vais pas dire ce que ce sera…
Nate avait ri en assurant que ce n’était pas elle qui vendrait la mèche, devinant de toute façon le sexe du bébé, après tout, elle avait plus d’expérience que Sam en cette affaire.
Non...je n’ai pas encore choisi de prénom… mais j’aimerais bien voir la tête de Justin si je lui annonçais que j’aimerais appeler le bébé Pepper…ou Piper…ou n’importe quoi dans le genre…Il est si…conventionnel !
Elles étaient d’accord sur ce point. Toute gêne envolée, elles devisaient, en riant, insouciantes, oubliant ces différences qui les avaient si cruellement opposées. À les voir, personne n’aurait supposé qu’elles avaient été…et étaient encore rivales, à moins de croire que pareil échange de maris pouvait se passer sans dommages.
Regardant l’heure, Sam s’apprêtait à prendre congé quand Miss Sommerby fit une proposition qui la laissa muette pendant un instant.
QUOI ?...Tu ferais ça pour Justin ?...Oui, je sais de quoi tu es capable…Andrei m’en a parlé…Tu crois que… ? Écoute, Nate…c’est très généreux de ta part mais je doute fort que Justin accepte…Il…est…fier et borné…il préférera rester comme ça toute sa vie…à te devoir son salut…Oui, il t’en veut toujours trop, à quoi bon mentir…Tu veux que j’essaye de le convaincre ? Mais voyons, il me semble que je suis très mal placée pour ça…ou peut être pas…Non, je ne promets rien…on verra…je…t’appellerai…
Elle y pensait, à cette étonnante proposition lorsque la voiture s’arrêta face au perron. La porte s’ouvrit à l’instant et Justin apparut sur le seuil, lui donnant la bienvenue avec un sourire. Sam lui jeta les bras au cou, l’embrassant, mutine.
J’ai tardé un peu plus que prévu…mais je voulais faire quelques achats. Gerry va chaque jour mieux, merci…Il…veut te voir. On ira ensemble demain, qu’est ce que tu en dis ? Non…ne le prends pas comme une convocation péremptoire pour te passer au crible, mon chéri…Il veut tout simplement mieux connaître l’homme qui vit avec sa fille…après tout, c’est son droit le plus légitime…Mmmm ! Que ça sent bon, ici…Tu as fait la cuisine…Tu es merveilleux, Justin…le plus merveilleux des hommes.
Merveilleusement éreinté, voilà ce qu’il était, ce qui auparavant était un passe temps très agréable signifiait maintenant une douloureuse épreuve mais Sam n’en fit pas, de commentaire. En riant, elle le força à s’installer dans le divan, prenant place près de lui et se lovant dans ses bras.
Que ça fait du bien être là…tu m’as manqué toute la journée. Qu’est ce que tu as fait, toi ? Moi ?...J’ai passé des heures à bavarder avec Gerry. Non, Justin…lui, il n’a pas pointé son nez…
Devait elle lui annoncer que son ex s’était fiancé avec son ex à lui ? Non. Ce n’était pas le bon moment. Il l’apprendrait bien en son temps…et Merlin savait quel effet cela pourrait lui faire. Elle bavarda de tout et de rien puis se levant d’un bond, décida aller préparer un apéritif…La crampe arrêta son élan, lui coupant le souffle et la faisant se plier en deux en portant la main au ventre. Justin s’affola. Avant qu’elle ne songe à protester, Sam se retrouva allongée dans le divan, des coussins sous les jambes en attendant l’arrivée de…Lavinia, convoquée en catastrophe par un Justin qui perdait la tête.
Le Dr. Dexter, avec sa belle humeur habituelle, leur largua un petit sermon sur les bienfaits du repos exigé à une femme enceinte.
Je sais que tu te sens pleine de vie et énergie, ma belle, mais de là à courir le monde comme une dingue….Tu vas avoir un bébé…Tu n’as pas oublié ça, quand même !?
Sans faire attention aux outrées protestations de son amie, Lavinia procéda à l’examiner minutieusement.
Bon, rien de quoi faire trop de foin. Le bébé a changé de position, c’est tout…c’est ce qui a provoqué cette crampe. Tant que ce n’en soit qu’une de temps en temps, ça peut aller…mais si cela se répète souvent, il faudra prendre d’autres résolutions. Tu entres dans une phase délicate de ta grossesse, Samantha, si tu veux que cet enfant naisse à terme…et bien, il va falloir que tu y mettes de ta part.
Ce qui veut dire ?
Une vie calme, sans sursauts ni émotions fortes…repose toi, laisse toi chouchouter. Désolée pour Gerry mais je suis sûre qu’il comprendra très bien si tu ne passes pas toute la journée à son chevet…à moins qu’il veuille te voir accoucher sur le lit d’à côté !
Exagère pas, Lav….ne fais pas attention à ce qu’elle dit, mon chéri…tu sais, elle adore être alarmiste.
Mais Justin concordait mot pour mot avec Lavinia. Sam soupira bruyamment, deux esprits bornés alliés contre elle…elle était perdue.
Dès que Gerry ira mieux…on rentrera à la maison.
Lavinia sourit, pleine de commisération.
Ma chérie, quand je dis repos, c’est exactement de cela que je parle…pas question pour toi de faire un voyage en avion…ou en portoloin…
Là, Sam s’affola carrément.
Je…je ne peux pas rester ici…je ne veux pas avoir mon bébé ici…Je…Lav, trouve une solution…
Samantha Forrester…suis pas Dieu !
Elle en aurait pleuré, en fait, c’est ce qu’elle fit. L’idée de mettre au monde son enfant alors qu’Andrei se trouvait dans les parages, la rendait malade d’angoisse. Il était trop malin et savait très bien compter… |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mar 2 Nov - 21:02 | |
| Pour mieux te dire bonjour ! Nate… je ne peux pas vivre sans toi.
Paroles qu’elle n’aurait jamais cru entendre de sa bouche. Étourdie, affolée, émerveillée, Nate se vit entraînée dans le refuge de sa chambre. Lieu privilégié où Andrei exerçait, à la perfection sa domination sur elle. Délire pur. Nate ne voulait plus penser, seulement se diluer dans ce bonheur insensé, se perdre en lui…revivre, après ces mois de cruelle absence, pendant lesquels elle l’avait cru perdu à jamais.
Fougueux, passionné mais aussi d’une tendresse inédite. Nate filait au creux d’un rêve, dans les bras de l’homme qui avait su, si bien, bouleverser sa vie. Chaque baiser, chaque caresse étaient un baume pour son âme meurtrie.
Tu voudrais me haïr, n’est-ce pas ma douce ? T’en fais pas, nous sommes deux en ce cas…
Elle leva la tête pour le regarder, malicieuse.
Ai-je bien entendu ?
Oui, tu as bien entendu : je me hais. J’avoue ne pas m’être comporté en… gentleman.
Nate ne se priva pas de le pincer en bonne et due dorme.
Ça…c’est le moindre à dire !
Il se trouva le cœur de rire tout en poursuivant ses aveux, assez surprenants, s’il y a lieu de le dire.
Je ne parle pas seulement de maintenant mais surtout de nos dernières relations. Je suis un immonde salaud. J’ai profité de toi, de ton attachement pour moi dans l’unique but de récupérer Sam…
La mention de ce nom la mit mal à l’aise, d’un mouvement plein d’humeur, elle voulut se dégager de son étreinte mais il la retint, sans aucune brutalité.
Là, là ! Calme-toi. Il faut bien que l’on évoque nos ex, non ? Cela m’a pris du temps pour réaliser que Sam s’est échappée des sentiers que j’avais imaginés pour nous…
L’ex Mrs. Davenport ne put retenir un sourire pincé.
Elle t’a bien rendu la monnaie de ta pièce et en récompense tu as voulu la priver de Justin. Très louable de ta part.
Oui, j’ai voulu faire tuer Justin… Je ne désespère pas de le voir crever un jour, du reste...
Réplique mordante.
Bien sûr, pour aller consoler ta Sam !
Non, pas pour récupérer Sam, juste par, euh… principe !
Là, elle rit, avec une pointe d’ironie.
Principes, toi ?
Ben oui, j’en ai figure-toi !
Je devrai te croire sur parole. Au fait, sais tu que Justin ne va pas bien du tout. J’ai eu l’occasion de le revoir une paire de fois, aux tribunaux. Il semblerait qu’il se soit brisé une jambe…et n’en guérit pas…
Il n’en sembla pas du tout consterné. Mais à quoi s’attendre d’autre ?
Ah ? Justin ne va pas bien ? Je ne m’en plaindrai pas. Le gars à qui j’ai acheté son antidote a parlé d’effets secondaires. Je n’y ai pas accordé d’intérêt : je voulais rendre son père à l’enfant de Sam…
Toujours elle !
Ce qui m’a amené doucement à la conclusion qu’il serait injuste que ton enfant ne me connaisse pas.
Vraiment ?...C’est très…honorable de ta part !
Elle ne pouvait pas éviter une pointe d’amertume, là. Andrei, prévoyant, changea habilement de thème.
Parle-moi de cette ordonnance concernant tes enfants. Si j’ai capté, tu ne les as avec toi que si je ne suis pas là, c’est ça ?
Tu as parfaitement saisi la teneur de l’affaire, chéri !
On s’arrangera. Ce n’est pas si compliqué. Je ne me pointerai jamais pendant ta semaine de garde, si tel est ton souhait…
Nate se redressa sur un coude et le regarda.
Bien sûr que c’est mon souhait le plus fervent…j’aime mes enfants.
J’habiterai mon domaine, ma mère n’y vient que rarement. N’empêche que ce sera très dur de ne pas t’avoir sans cesse à mes côtés.
Hum ! Tu prendras la clé des champs dès que…
En un tour de bras il l’avait renversée sur les oreillers et l’octroyait d’un baiser bouillant de passion.
Non, je ne disparaîtrai plus. Je te l’ai dit : je raccroche uniforme et armes. Notre enfant mérite bien ça, non ?
Elle répondit à son baiser, avec délicieuse fougue.
Je voudrais tellement y croire…
Mais elle ne laissait pas moins d’être sur ses gardes. Une certaine suspicion était de mise. Après tout, savait t’elle à quoi s’en tenir vraiment avec lui ? Certes, il était de retour, se montrait tendre, attentionné, aimant…pas vraiment amoureux mais Nate avait appris, à ses dépends, que cela pouvait ne durer que le temps d’assouvir sa passion…et sa curiosité. Son état exerçait sur lui quelque chose de semblable à la fascination, comme s’il avait du mal à croire que son enfant puisse être en train de grandir là…Il touchait, écoutait, guettait chaque soupçon de mouvement et se montrait ravi quand il pouvait sentir les, parfois très vigoureux, coups de pied de son fils, qui tiraient une moue à Nate mais qui l’attendrissaient follement, lui.
Nate le laissa accommoder un coussin à son dos avec un soupir d’aise et pensait même s’octroyer un petit somme quand Andrei demanda :
Que dirais-tu si je nous organisais un dîner sympa avec Anastasia ? Elle t’apprécie, sais-tu ?
Ta mère m’apprécie ? C’est vrai qu’on a échangé quelques propos…mais de là à m’apprécier…enfin, si tu le dis…et tu lui as déjà raconté que je ne t’ai pas mis à la porte ?
Il eut un de ses sourires pleins de malice qui la ravissaient.
Bien sûr qu’elle est au courant que tu ne m’as pas jeté dehors...
Et quelle est son opinion sur cela ?
Elle s’en réjouit pour nous. Tu sais, elle n’est plus toute jeune…
*Qu’entend t’il par là ? Anastasia Orloff n’a pas 80 ans tout de même...loin de là !*
J’aurais souhaité adoucir ses vieux jours… J’aimerais que vous vous entendiez bien, toutes les deux.
*Ce qui veut dire quoi au juste ?*
Elle se garda bien de poser la question.
Je ne vois pas trop pourquoi nous ne pourrions pas le faire…je t’assure que je n’oublierai pas mes bonnes manières !
C’était un dimanche. Ils arrivèrent à la demeure des Sanders à l’heure dite. Anastasia les accueillit, très contente, ne démontrant rien de sa possible réserve face à ce couple irrégulier. Elle avait eu la délicatesse d’éviter que son mari, le père de Sam, se trouve là pour le repas. À peine installés, Son Altesse tourna son attention vers elle, voulant tout savoir, connaître pratiquement chaque détail de sa grossesse et son déroulement.
Tout va parfaitement bien, sans aucun autre problème que les habituels…
Elle se doutait bien que la Princesse n’était pas sans savoir que celui-ci n’était pas son premier enfant mais bien le cinquième, passant outre ce détail, elle combla la grande curiosité de la future grand-mère.
C’est un garçon.
Félicitations ! Un héritier mâle ! Rien ne pouvait me faire plus plaisir ! Andreï, j’espère que tu as mis en route la procédure de régularisation ?
Un certain gêne, presque imperceptible, flotta un instant en l’air, avant qu’il ne réponde tranquillement :
Pas encore, mère ! Nous venons à peine de renouer et il se passera encore des mois avant que l’enfant naisse.
Nate faisait semblant de s’intéresser aux plantes exotiques qui ornaient le salon.
*Seulement deux mois et demi…*
Qu’Andrei les laisse seules en disant qu’il allait fumer donna envie à Nate de lui jeter quelque chose à la tête mais resta sagement à sa place, attendant l’interrogatoire, qui ne rata pas.
Parlez moi de votre famille, Natasha !...Quel prénom charmant...assez inusuel pour quelqu’un qui vient de…Australie ?
Presque, assura Nate, souriante, je suis néo-zélandaise. Lubies de ma mère. Que dire de ma famille ? Les Sommerby de Whangarei sont ce que l’on peut appeler…piliers de la société, aristocratie locale. C’est une très vieille famille, conservateurs endurcis, très regardants des mœurs.
Ceci suffit largement à la Princesse pour savoir que celui là était un thème algide qu’il valait mieux ne pas toucher. Heureusement Andrei ne tarda pas à les rejoindre et le reste du repas se passa dans une ambiance de chaleureuse convivialité mais, arrivant au dessert, les jeunes gens ne purent laisser de remarquer que la dame de céans semblait de plus en plus préoccupée, jetant des coups d’œil désolés à sa montre ou tendant le cou au moindre bruit.
Inutile de t’inquiéter de la sorte, maman. Gerry aura été retenu, et…
Son Altesse assura que son mari la parvenait toujours mais s’efforça pour ne pas s’alarmer, refusant l’envoi d’un patronus pour savoir où se trouvait sa chère moitié. La tension était montée d’un cran et ne cessa de croître à mesure que les minutes passaient. Nate eut un mauvais pressentiment mais le tut, attendant la suite qui ne fut pas du tout l’espéré, pas de mari donnant des explications et des excuses mais un appel téléphonique, qui bouleversa totalement la placidité de ce début d’après midi.
Gerry Forrester avait eu un accident de la route et se trouvait à l’hôpital. Andrei prit les dispositions nécessaires : accompagner sa mère à l’hôpital et…
Pardonne-moi ma chérie... Il faut que je… Tu comprends ?
Comprendre ? Elle en comprenait, des choses et pas toutes pour la mette en joie. S’agissant du père de Sam, quoi de plus normal que la fille débarque séance tenante. Andrei la voulait loin du lieu des possibles retrouvailles.
*J’espère que Justin arrivera accroché comme du lierre et ne leur laissera pas un instant de paix !*
Tiens moi au courant !, demanda t’elle pour la forme, sûre qu’il n’en ferait rien.
Encore là, elle ne se trompa pas. Les heures s’écoulaient à une lenteur désespérante lui laissant amplement le loisir de se faire toute sorte d’idées, de monter tous les scenarii possibles, imaginant de mille façons la rencontre d’Andrei et sa blonde. Il avait beau dire ne pouvoir vivre sans elle, Nate n’était pas dupe un instant…Andrei Sanders avait son ex dans la peau et si celle-ci avait l’heur de reconsidérer sa position et claquait des doigts, il accourrait à ses bras sans de lui donner le temps d’un repentir.
Elle était là, à faire les cents pas, usant le tapis, comme lionne en cage, depuis Merlin sait combien de temps, quand enfin Andrei eut la bonne idée de rentrer. Son regard devait valoir mille reproches car, sans lui donner le temps de placer un mot, il se lança dans les explications :
Gerry est tiré d’affaire. La magie épuise ! Je suis claqué…
Il se servait tranquillement à boire quand « la » question fut posée.
Et…elle ?
Pas besoin de faire un dessin, il savait exactement de qui parlait Nate.
Sam ? Bien sûr qu’elle était là ! Normal, non ?
*Le voilà ravi !*
En tout cas…ça a duré !, riposta t’elle, vexée.
Comment ça, ça a duré ? On n’a pas regardé notre montre en…
Vous avez fait l’amour ou quoi ?!?
Elle se sentait étouffer de jalousie…
Quoi ? Faisant l’amour ? ( il éclata de rire) Tu devrais savoir que ça nous aurait pris bien plus de temps que ça !
Mufle !
Il rigolait encore en la voyant enrager mais crût bon éclairer sa lanterne.
On a soigné Gerry.
Ah…bien sûr.
Faisant un effort pour se calmer, Nate s’enquit.
Et…lui ?
Justin ?
Qui d’autre ?
Je l’ai vu... pas brillant, en effet. Cessons de parler d’eux veux-tu, on a mieux à faire.
*Belle façon de s’en sortir.*
Tu me laisses poireauter comme une sotte toute l’après midi, sans donner une nouvelle…et tu rentres, comme si rien…Tu ne vas pas me faire croire que tu as passé autant de temps à jouer les médicomages dévoués auprès de ton beau-père !
La réaction d’Andrei la prit de court, au lieu de se mettre à discuter avec elle, il la prit de la main, sans trop de douceur et l’entraîna à sa suite, vers l’étage.
Tu veux vraiment savoir à quoi j’ai passé mon après-midi ? Viens, je vais te montrer !
Quand il ouvrit la porte de leur chambre à toute volée, Nate sentit que toute jalousie, colère, hargne s’envolaient…Elle resta sur le seuil, sidérée devant le spectacle offert. Des magnifiques roses rouges emplissaient tous les espaces…Il y en avait des centaines. Merveilleuses corolles écarlates dont le parfum embaumait l’air, entêtant…
J’ai dévalisé 10 fleuristes pour garnir ta chambre. Si ça te plaît pas tant pis.
*Ne pas me plaire ? Grand bêta…c’est sublime !...*
Mais trop saisie, elle était incapable de prononcer un traître mot, ce qu’il interpréta de la pire façon, la plantant sur le seuil fleuri…pour revenir sur ses pas la seconde d’après.
Ah ! Je suis aussi passé chez le bijoutier.
Et de lui mettre un écrin dans la main.
Tu peux la balancer à la flotte mais si tu me veux pour mari, tu n’as qu’à la porter ! Bonne nuit !
Nate mit deux secondes à se reprendre assez comme pour ouvrir l’écrin et y découvrir une magnifique bague, dont le brillant scintillait de tous ses feux. Une bague de fiançailles…
*Il vient de …Oh, mon Dieu…*
Et sans le penser deux fois s’élança à sa suite, le rattrapant avant qu’il n’entre dans la chambre d’invités. Sans rien dire, elle lui jeta les bras au cou et l’embrassa follement, éperdue d’un bonheur auquel elle n’avait pas osé croire.
C’est la demande en mariage la plus romantique dont une femme peut rêver, susurra t’elle, à même ses lèvres, souriant à même son sourire, oui…je te veux pour mari !...Oui…oui…je te veux mille fois…
Puis, se dégageant de son étreinte, lui tendit l’écrin.
Juste pour la tradition…ce serait fantastique si tu me la passais toi-même au doigt !
Comme dans un rêve, sentant son cœur battre à rompre et un nœud d’indescriptible émotion lui serrer la gorge, Nate leva sa main tremblante pour qu’il glisse la bague à son annulaire gauche.
Sans mots d’amour, sans promesses…peu importait. Il était là et elle ne voulait rien d’autre. En cet instant, tout restait remisé à fond de décor. Justin, Sam…les enfants…sa famille qui la reniait. Adieu amertume, solitude…Bienvenue, nouvelle vie…Andrei…amour… ……
C’était la quatrième fois que Nate changeait la texture et la couleur des rideaux, sans pouvoir se décider. Elle avait passé grande partie de la matinée à choisir le motif qui ornerait les murs pour enfin préférer les peindre d’un ton uni , manquait une bordure qui soit à son goût.
*À ce train là, Bébé ira à Poudlard avant que j’ai fini de décorer sa chambre !*
Cette fois, elle avait voulu faire tout soi même. Pas comme pour ses antérieurs enfants. Alors, elle s’était contentée de donner les ordres pertinents et se désintéresser de l’affaire. C’était plutôt Justin qui avait eu toujours son mot à dire, soignant jusqu’au dernier détail. Et ce n’était, définitivement, pas Andrei qui allait passer du temps à s’occuper de cela. Il se contentait de donner son avis et de se moquer d’elle qui changeait d’idée chaque dix minutes.
Le shopping était toujours une activité à laquelle Nate s’adonnait en toute joie de cœur. Cette après midi là, elle admirait quelque pièces de merveilleuse layette dans une boutique chic au nom français, quand la sensation d’être observée la fit se retourner. Samantha Forrester, ex Sanders, se tenait à quelques pas d’elle, en toute évidence, pas trop ravie avec cette rencontre. Nate prit son temps pour la détailler. La maternité lui seyait particulièrement, elle rayonnait.
Bonjour, Nate. Pas de souci, je sais que cette rencontre ne te réjouit pas…Pas plus qu’à moi, d’ailleurs, mais enfin…puisqu’on en est là. Comment vas-tu ?
Toujours aussi directe. Tu as raison, cela n’a pas de quoi nous réjouir. Merci, je vais très bien. Inutile de te le demander à toi…tu as l’air en pleine forme.
Elle la vit tiquer en voyant la bague qui ornait son annulaire. Ce fut à peine perceptible mais cela ne lui échappa pas.
*Ne me dis pas...Ça lui fait de l’effet !*
Je me réjouis pour toi, Nate…et j’espère que tu seras aussi heureuse que tu rêves de l’être. Oui…je vais très bien.
Merci…et…Justin, comment va-t-il ?
Justin ?...Tu veux réellement savoir comment il va ? Andrei a dû t’en parler…
Il y avait de la mordacité dans sa réplique. Nate n’évita pas un léger soupir, même en n’étant pas dans les meilleurs termes avec son ex, elle ne pouvait s’empêcher de sentir un certain chagrin en le sachant dans ce triste état.
Il m’en a parlé, oui…Je savais qu’il n’allait pas trop bien il y a quelques mois…mais pensais qu’il se serait remis. Comment le prend t’il ?
Tu peux t’imaginer qu’un homme comme lui admet mal être dans cet état…Ne prends pas cet air apitoyé…il n’en a que faire de ta pitié...ni de celle de quiconque…Tu le connais assez bien pour le savoir !
Pas à dire, la miss était à la défensive !
Comment vont…mes enfants !?
*Le comble avoir à lui demander de leurs nouvelles à…elle !*
Tout allait à merveille dans leur petit monde si parfait. Impossible autrement avec Justin aux commandes !
Je ne sais pas toi, mais à moi, les pieds sont en train de me tuer...asseyons nous plutôt…Raconte moi plutôt comment va tout là bas, chez vous ? Au fait, comment va De Brent ?
Michael ? Comique que tu me le demandes, il n’est pas saint de ta dévotion, pour autant que je sache…Disons qu’il va aussi bien qu’on peut aller avec tout ce qui lui arrive…
*Tiens, il lui arrive quelque chose ? Tant mieux !*
Serait il de nouveau malade ?
Non, il est en parfaite santé.
*Dommage*
Rompues aux arts de la politesse mondaine, elles continuèrent à bavarder comme si rien. De ceci, de cela. Du temps. De bébés. Nate avoua attendre un garçon, Sam, elle, fit des mystères.
Entre nous, je suis assez douée pour deviner…et dans ton cas je dirais que c’est une fille. Je ne me trompe pas, hein ?...Pas de souci, je ne vais le dire à personne…et alors, tu as déjà un prénom ?
Non...je n’ai pas encore choisi de prénom… mais j’aimerais bien voir la tête de Justin si je lui annonçais que j’aimerais appeler le bébé Pepper…ou Piper…ou n’importe quoi dans le genre…Il est si…conventionnel !
Cette remarque les fit rire et du coup, Nate éprouva presque de la sympathie pour elle. La conversation se poursuivait un moment, à bâtons rompus, puis Sam décida qu’il était temps pour elle de rentrer. Mue par un élan inespéré, Nate la retint.
Je sais que tu vas croire que je suis folle ou Dieu sait quoi…mais, je pense qu’il est temps de mettre un point barre à cette histoire. Nous nous sommes fait beaucoup de mal, les uns aux autres…Je voudrais faire quelque chose, en réparation…Tu sais que je peux aider Justin avec...son problème, j’ai ce don…Cela ne demandera que peu de temps et fera la différence pour le reste de sa vie...et de la tienne…
Sa proposition sembla ahurir Samantha qui commença par s’y refuser, tout de go, en assurant que Justin ne voudrait rien savoir.
Il…est…fier et borné…il préférera rester comme ça toute sa vie…à te devoir son salut…
Tant que ça !? Il m’en veut donc toujours autant ?
Oui, il t’en veut toujours trop, à quoi bon mentir…
C’est bien lui, ça…têtu et rancunier mais enfin. Toi, tu peux le convaincre, Sam...qui d’autre sinon ?
Tu veux que j’essaye de le convaincre ? Mais voyons, il me semble que je suis très mal placée pour ça…ou peut être pas…
Mal placée ? Tu veux rire…je le lui demanderais de vive voix mais je doute qu’il me laisse placer un mot…Penses y…j veux l’aider…s’il veut être mon ennemi, autant qu’il soit d’une pièce…essaye…on n’y perdra rien !
*Tu deviens folle, ma fille…c’est quoi ça, ces élans de bon cœur !?*
Non, je ne promets rien…on verra…je…t’appellerai…
J’attendrai…prends soin de toi…et d’elle…
Elle était encore sous les effets étranges causés par cette rencontre ce soir là, en s’accommodant au coin du feu, dans les bras d’Andrei.
Tu ne devineras jamais avec qui j’ai bavardé cette après midi ?
Il n’en avait pas la moindre idée.
Avec Sam…oui, ne me regarde pas comme ça ! Je suis quand même capable de maintenir une conversation civilisée avec ton ex sans lui arracher les yeux. Oh...elle se portait comme un charme…et a l’air parfaitement heureuse et comblée avec …mon ex…c’est débile, tout ça…enfin…Je ne sais pas ce qu’il est en train de m’arriver…mais je sens tout à coup, l’irrépressible besoin de faire le bien….un vrai bien…un grand bien…Non ! Pas à toi, mon chéri...je ne pense pas que tu ais besoin d’aide. Je…pensais à…Justin !...Oh la…monte pas sur tes grands chevaux…oui, j’ai pensé que si je le remets d’aplomb…peut être qu’il ne sera pas si hargneux…
Elle se retourna pour le regarder.
Non…je ne suis pas dingue…ça fait un bon moment que j’y pense…Qu’on le veuille ou pas, Justin n’est pas un mauvais type…Non, je ne suis pas tombée sur la tête, je te dis… ni eu une révélation cosmique…mais je trouve que cette guerre…a trop duré !
Là, Andrei semblait franchement suspicieux mais Nate était emballée avec son rôle de bonne samaritaine. Le bonheur la rendait généreuse, elle révisait les schémas de sa vie et devait reconnaître pas mal de ses torts. Après tout, Justin avait été le plus exemplaire des maris et si quelqu’un l’avait poussé aux extrêmes…c’était bien elle. Il était et serait toujours le père de ses enfants…
Dis moi sentimentale, si tu veux…mais cinq gosses sur les bras et éclopé en sus…même s’il sait se montrer odieux quand il veut…Andrei…aide moi !
L’autre semblait considérer la possibilité qu’un dérèglement hormonal soit en train de lui jouer des mauvais tours mais elle se maintint ferme dans sa petite idée.
Même s’il ne veut pas…
Ce qui, entre nous, voulait déjà tout dire…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Sam 6 Nov - 12:05 | |
| Saleté de nuit, de climat, de guibole ! Toute la nuit y était passée sans qu’aucun résultat tangible ne transparaisse. Bien sûr ses prospections n’en étaient encore que partielles. Que n’aurait-il pas donné pour trouver quelque chose de flagrant à mettre sous le nez de Sam pour lui extirper définitivement Sanders de la tête… et du cœur. Jaloux ? Ben oui, et alors ? Il y avait de quoi, non ? Peut-être que s’il s’était senti moins diminué, Justin aurait réagi différemment et ce serait moqué de la réapparition d’Andreï. Mais là… Là cela débordait. Il connaissait trop bien les protagonistes de leur quatuor infernal pour être détendu.
Qu’elle le veuille ou pas, Samantha conservait des sentiments pour son ex… tout comme lui en gardait pour Nate malgré le mal causé. Souvent il s’en voulait de penser à sa rouquine alors qu’il vivait à présent le plus bel amour dont un homme puisse rêver. Il aurait été si simple de tourner la page… Il ne le pouvait tout simplement pas. Peut-on aller contre sa nature ? Pas Davenport, en tout cas. Pas plus qu’il n’oublierait Léanor son premier amour, il ne se délivrerait jamais des années de bonheur vécues auprès de Nate Sommerby. Tel il était… Tel il demeurerait.
*NDD, il doit bien exister une faille quelque part ! *
Selon lui Sanders avait prémédité son coup, provoqué l’accident de Gerry, dans l’unique but de faire venir Sam en Angleterre, l’y revoir, la reprendre…
*Et elle marche à fond dans sa combine !*
Il ne pouvait lui donner tort, en plus ! Quel charmant compagnon lui offrait-il en comparaison du fringuant major? Un éclopé épuisé en moins de deux par la moindre tâche, un comédien qui tentait de sauver la face…un boulet… une ruine. Samantha méritait beaucoup mieux que ça ! Comment rivaliser avec le « héros » Sanders sinon qu’en brisant l’image de ce fauteur de troubles ?
Mais rien de concret ne se dessinait. Il continuerait à chercher le temps qu’il faudrait. Lassé des piètres résultats obtenus durant sa nuit d’insomnies, Justin ferma ses contacts et rejoignit Sam dans leur chambre minable proche de l’hôpital. Il prit une douche en faisant attention à ne pas glisser sur le sol mouillé et s’abstint de chanter à tue-tête les airs habituels d’opéra qui accompagnaient en général ses ablutions afin de ne pas déranger le sommeil de Sam.
L’aube pointait son nez qu’il ne dormait toujours pas. Assis dans l’unique fauteuil de la pièce sans âme, il couva sa belle d’un regard ému où se confondaient amour fou, espoirs et désespoir. L’apparition qui surgit devant lui le sidéra. Ce patronus, il le connaissait très bien. Aussitôt en alerte, il capta le message et en resta extrêmement songeur.
*Incroyable… Si je m’attendais…*
L’effet de surprise dissipé, Davenport se prit à sourire en solitaire. Voilà de quoi occuper ses pensées de façon plus positive. Lui qui adorait rendre service, le voilà servi…
Enfin Sam émergea, gaie comme un pinson. Il avait commandé un petit déjeuner qui s’avéra frustrant tant en qualité qu’en ses suites. Sam, sitôt rassasiée déclara en vitesse :
Je t’aime, Justin... C’est tout ce que je voulais te dire avant d’aller voir Papa…
Et Andreï… ?
Plus forte que lui, cette remarque acide était sortie toute seule. Il se taxa d’idiot mais l’avait émise.
Non…je ne sais pas si Andrei sera là et même s’il y est...qu’est ce que cela peut faire ? Je ne vais pas passer ma vie à me cacher de lui ni de personne…Ne te fais pas des idées débiles, mon amour…
*Un peu tard pour ça !* Tu n’es pas certaine des résultats de « votre » magie groupée ?
Je suis sûre que tout va aller bien…Je resterai le plus possible avec Papa…C’est pour lui que je suis là…pour personne d’autre…Que dirais tu, si au lieu de tourner en rond à te faire du mauvais sang, tu nous cherchais un gentil coin où vivre un temps…je n’aime pas trop les hôtels et sais que toi non plus...*Peu de le remarquer*Un petit chez nous temporaire ? Dis…ça ne te plairait pas…ça nous ferait un peu...comme des vacances…
C’était une excellente idée qui lui donnerait du lest afin de concrétiser ses projets personnels dont elle ignorerait la teneur aussi longtemps que nécessaire. Il se fit boudeur :
Si tu y tiens, d’accord, je vais fouiner. Je ne ferai pas de « Folie » (allusion à son ancienne propriété incendiée par Andreï) Je te le promets mais je tiens à ce que tu m’informes de tes déplacements et de tout événement… hors norme.
Une façon comme une autre de savoir si Sanders se manifesterait ? Oui… et non. Puisque Sam était devenue la prunelle de ses yeux, il se devait de connaître ses faits et gestes. Sam n’était pas Nate. Cette dernière avait supporté quatre grossesses sans encombre. Sam en était à sa première… Il angoissait qu’il lui arrive quoique ce soit et voulait être là, au cas où.
Une fois seul, Justin activa un portoin selon les indications fournies par le patronus reçu quelques heures auparavant. Il se réceptionna du mieux qu’il put, jura quand sa guibole faiblarde refusa son action et se remit debout avec la dignité restante. Un elfe connu le reçut avec déférence à la porte de la villa où il sonna :
Par ici, s’il vous plaît. Monsieur est attendu.
En clopinant gauchement, Davenport suivit le mouvement. Des questions bouillonnaient sous ses cheveux courts. Que lui voulait-elle ? Pourquoi l’avoir choisi lui ? N’était-il pas la dernière personne à qui elle se serait adressée ? Mélangé d’excitation et de crainte, Justin entra dans un salon coquet où il la vit…
Tour à tour différente et similaire à ses souvenirs, Alix Blackstorm le regarda s’avancer :
Bonjour Justin ! Merci d’être venu rapidement.
Je réponds toujours vite aux appels concernant…
Un geste déterminé freina l’évocation d’un nom familier. Justin tiqua, fronça les sourcils et fut contraint à s’asseoir face à Mrs De Brent.
Je… Je ne savais pas à qui m’adresser. Tu es le seul qui me soit venu à l’esprit. Tu es proche de lui… Le plus proche de tous. Il a confiance en toi, j’ai appris à me fier à toi malgré… nos différents.
Alix, soupira-t-il, tu le rends chèvre ! Mich…
NON ! Ne prononce pas son nom, s’il te plaît ! Il m’est intolérable encore. Ce n’est pas de ma faute, je le jure ! Ni la sienne, bien sûr. Mon attitude peut l’amener à me détester, j’en suis consciente. Qu’il décide de refaire sa vie sans moi serait normal… Ce n’est pas ce que je veux mais je suis incapable de le supporter à l’heure actuelle. J’ai besoin de lui… je le sens. J’ai besoin de toi, Justin… Tu pourrais m’apprendre… me réapprendre qui il est vraiment… Fais ça pour nous… pas pour moi mais pour lui.
Oh, la belle proposition farfelue ! Ainsi lui, Davenport, celui qui jadis aurait bouclé avec plaisir cette ex-mangemorte pour l’expédier à Azkaban, devait se montrer clément et reconnecter deux âmes perdues ?
Désolé Alix ! Mes problèmes personnels m’empêchent de…
Royale malgré des signes évidents de fatigue, Alix planta une cigarette dans son support et l’alluma :
Ne voudrais-tu pas recouvrer tes facultés, Justin ? De toi à moi, ça te plaît d’être infirme, diminué, en loques ? J’avais beau être sous sédatifs et sortilèges, j’ai su… je sais tout des maux qui te rongent… Toi et moi, ça n’a pas toujours été la joie...
*Tu parles ! J’oublierai jamais que tu m’as sauté sur le râble pour t’échapper du ministère*
Je te propose un marché, mon « cher »… Tu m’aides à me souvenir correctement de lui, je te rends forces et mobilité. À prendre ou à laisser !
Wow ! Expectative prometteuse… Déjà, Justin entrevit un avenir radieux où il serait au top. Cela faisait longtemps… Si longtemps… Trop… Sam serait sûrement ravie de le revoir tel qu’il était… Au plein de sa forme, Justin pourrait écraser Sanders… Il pourrait à nouveau jouer des heures avec ses enfants… Il saurait participer à toutes sortes de sports sans fatigue… Il…
Tu es plus tentatrice que le serpent de la Bible, Alix. Tu me proposes ça juste si…
Si tu m’aides à le retrouver… On nous a séparés, je meurs sans lui. Je l’aime à l’infini et ne peux le lui dire, ni prononcer son nom. Il doit m’en vouloir à mort, c’est… affreux. Aide-moi, je t’aiderai...
Un verre plus tard, le pacte se scella.
Une potion à avaler deux fois par jour. Miss Blackstorm avait récupéré toutes ses facultés sauf des bribes de mémoire. Dans le fond, Justin avait tout à gagner, peu à perdre... On topa tels des complices.
Retour joyeux en Angleterre, potion en poche. Ses recherches de logement voulues par Sam l’amenèrent à choisir un cottage sympa. Proche de l’hôpital où Gerry récupérait, nanti de tout le confort moderne, Justin était fier de sa trouvaille. Sam, quoique ravie, sautait sans cesse entre lui et son père. Au moins Andreï se tenait à distance. Ce qu’elle lui annonça ce jour-là ne le réjouit qu’à moitié : Gerry voulait le rencontrer :
Il…veut te voir. On ira ensemble demain, qu’est ce que tu en dis ?
Je suppose que c’est normal...*Il veut comparer pire ou meilleur*.
Non…ne le prends pas comme une convocation péremptoire pour te passer au crible, mon chéri…Il veut tout simplement mieux connaître l’homme qui vit avec sa fille…après tout, c’est son droit le plus légitime…
Ouais… De quoi constater de visu à quelle larve s’était liée sa fille chérie… Il passa outre. Dire qu’il s’était décarcassé pour lui concocter ses plats préférés… Pleine d’entrain – Merlin sait pourquoi – Sam s’activa afin de préparer leur apéritif : cocktail de fruits pour elle, pur feu corsé pour lui. Son cri, son effondrement mains serrées sur le ventre faillirent le rendre dingue. Il la releva, prêt à transplaner à Ste Mangouste mais se freina en la déposant sur le divan :
Mon amour, une contraction ? C’est trop tôt ! Vite, allonge-toi, Je…Je… j’appelle ta copine toubib.
Lavinia Dexter ! Etrange bonne femme ! Amie de Sam, doctoresse intime, elle savait tout sur tout et chacun. Qui d’autre convoquer en urgence ? Ses propos furent à la fois rassurants et… alarmants. Cela signifiait en gros que Sam était clouée sur place.
Rien à dire, rien à faire… subir. Le fait que Sam se débatte, nie, réfute son nouveau statut de femme enceinte contrainte à l’inactivité totale, ne changea rien.
Tu dois respecter ce que Lav dit, mon amour : repos complet. On va s’arranger. J’irai voir ton père, il comprendra. Je sais que les gosses te manquent autant qu’à moi, on trouvera un compromis avec… Nate. Je… Je me débrouillerai.
[î]Certes, son ex était enceinte aussi… Accepterait-elle de les soulager de leurs enfants communs afin que Sam pût achever son terme en sérénité ? Question épineuse. Réclamer sa clémence était délicat. Rencontre fatale. Elle eut lieu dans un endroit banal : Green Parc.
Sa rouquine… Pincement en pleine poitrine. Elle était resplendissante, la maternité lui allait à merveille, comme toujours... Son allure aurait damné un saint… Justin n’en était pas un. Il endossa l’indifférence : [/i] Salut Nate ! Merci d’être venue.
Il se gratta la nuque, indécis :
Je ne vais pas réclamer ton pardon pour ce que je t’ai fait. J’admets que c’est de ma faute…* Je m’en veux tellement* Il fait frisquet. On devrait… Tu veux boire quelque chose ? Il y a un pub tout près, un chocolat ?
Elle accepta. Elle touillait sa boisson, lui la sienne.
Je sais que c’est dingue mais je t’aimerai toujours, Nate... STOP ! Dis rien, c’est pas la peine de s’éterniser là-dessus. Tu as choisis Andreï, moi Sam, ce sont nos choix, point barre. Je ne suis pas là pour plaider ma cause, mais la sienne. Sam va pas bien, je suis perdu. Il faudrait… Je souhaiterais…
Bon Dieu que c’était dur. Dire à une femme qu’il l’aimait en en aimant une autre…
Tu m’as donné le meilleur de toi... Je n’en ai jamais douté. Après tu m’as fais souffrir l’enfer mais je remise ça aux oubliettes. Pratique, hein ? Je suis con ( soupir sans joie) Une triste habitude dont tu t’es lassée… Je t’aime Nate, je… Je suis fou de Sam. Je... J’y suis pour rien, elle est mon âme sœur... tu as voulu autre chose, libre à toi. J’aurais vendu mon âme au diable pour toi. Tant pis, tant mieux ? L’avenir le dira. Si t’éprouves un soupçon de compassion pour ce qui fut nous ° ce dont je doute*, je souhaiterais que tu gardes nos enfants plus souvent, un moment. Sam a besoin de repos jusqu’au terme… Dis oui, dis non, je m’arrangerai.
Elle lui posa une question tellement stupide sur sa santé qu’il se hérissa :
Qu’en as-tu à cirer ? Je vais aussi bien que les circonstances me le permettent. Un pion chasse l’autre, non ? Fais comme tu veux. Nos filles… nos fils… Je sais que tu les aimes. Ils ne sont pour rien dans ce jeu de quilles et n’ont pas à devenir des dommages collatéraux ? Ce ne serait pas juste. Tu as choisi, vis avec ça je le ferai aussi. Tout aurait pu être différent… Il est trop tard à présent. J’espère que tout roule pour toi comme tu le veux.
Ça lui faisait mal de la voir si radieuse, si… fière… ? Pourquoi jouait-elle de façon si ostentatoire avec sa bague ?
*Bien bel objet… Je ne la lui connaissais pas…*
La vérité lui creva les yeux, son cœur saigna. Sanders l’avait demandée en mariage…
*Quel con ! Quel goujat !*
Il ne pensait pas à Andreï mais à lui, là. Nate rayonnait… Sam souffrait… Raterait-il toujours tout ? Il dissimula ses sentiments du mieux possible et orienta le sujet différemment. Arborant son sourire des bons jours, il dit :
Tu vas avoir un tit gars, non ?... Je suis observateur, tu sais ? Sam se fiche de moi mais je sais depuis un moment que pour nous c’est une fille. Je lui laisse croire que je marche… c’est un jeu. Non, je ne suis pas du tout déçu. Tony et Philip me comblent… Je ne te remercierai jamais assez pour eux… Le prénom ? J’en sais rien. ( il rit) Sam me fera la surprise. Du moment qu’elle ne l’appelle pas Madonna, Lourdes ou Pepper Laurie, ça ira.
Ce fut plus fort que lui, Justin lui prit la main et joua avec ses doigts si fins, si…
Tu es d’accord de prendre nos enfants avec… vous ? Oui, j’ai bien dit vous. Je suis passé chez le juge avant de venir ici et j’ai demandé de rayer cette restriction stupide. Du moment qu’Andreï ne sort pas d’armes devant eux, ne les effraie pas, il pourra rester à tes côtés pour t’aider avec eux. Pas la peine de dire merci… J’ai compris.
Un baiser sur les doigts délicats, il se leva et s’écarta en clopinant vers la porte. Elle l’apostropha, lui faisant une proposition si saugrenue qu’il en rit (jaune) :
Te mets pas en frais pour moi. Je ne cours plus, et alors ? C’est pratique d’être handicapé, parfois. D’ailleurs regarde, on m’ouvre la porte. Tu as guéri Andreï, *avec les résultat que l’on sait*ça suffit !
Un clin d’œil, il partit.
La bise qui soufflait fort lui fit relever son col. Cette « corvée » achevée, il lui en restait une autre avant de boucler la journée. Gerry…
Même sans le vouloir, les souvenirs affluaient en force. Quand Nate l’avait présenté à sa nombreuse famille néozélandaise, Justin avait été passé au crible. Il lui avait fallu du temps pour se faire accepter par ce clan. Il avait appris à les aimer les uns et les autres, vice versa. On se voyait parfois encore… pour les enfants.
*Un jour ou l’autre, je remettrai les pendules à l’heure par là …*
Nate avait choisi… lui aussi. Elle ne méritait pas une telle sanction familiale. S’il s’en était réjoui au départ, les mois passant il jugeait cela futile. On verrait…
Gérald Forrester avait été transféré des soins intensifs à l’étage de revalidation. La princesse Orloff était à ses côtés quand Justin pointa son nez.
Il était temps que vous veniez, Justin ! Mon époux vous attend.
Elle l’introduisit, lèvres pincées, sévère.
Bonjour Gerry ! Sam se fait du souci pour vous.
Je m’en fais pour elle ! Comment va-t-elle ?
Tant qu’elle ne bouge pas, ça va.
Vous êtes fier de ce que vous lui faites endurer ? Quelle idée de la mettre enceinte alors que vous n’êtes même pas mariés !
Quel accueil chaleureux ! On ne pouvait rêver mieux.
On… Nous n’avons pas choisi, ni… programmé. Je vais réparer ce… détail.
Un détail ? Ma fille n’est pas un détail ! POURQUOI ne l’avez-vous pas encore épousée ? Parce que vous êtes trop fier ? Elle n’en a rien à cirer de votre handicap.
La potion prise quotidiennement lui permettait à présent de se tenir debout sans faiblir. Justin expédia sa béquille, rageur :
Elle n’en a peut-être rien à cirer, mais j’ai ma fierté, oui ! Comment pouvais-je m’imposer à Sam dans cet état calamiteux ? Je me soigne, je vais mieux. Tenez ! (Il lui balança un écrin entre les mains.) C’est ce que je compte lui offrir dès que je serai sorti. Je ne suis pas le gendre idéal, Gerry. Il faudra pourtant vous y faire. Elle m’aime… Je l’aime de tout mon cœur. Je la défendrai de tout, toujours. (Il reprit l’écrin) Sam est unique… Un trésor que je n’échangerai pas même contre la Lune. J’ai tardé à faire ma demande non parce que j’espérais autre chose mais simplement pour lui laisser l’opportunité de… choisir. Si c’est moi qu’elle veut, je me dois d’être… à la hauteur. Je la veux elle ! Avec ses faiblesses, passion, défauts et qualités. J’aime votre fille, Gérald. Que ça vous plaise ou pas, je m’en tape.
Gerald fut pris d’une quinte de toux qui alarma Davenport :
Hey ! Pas de blague ! Je… Je ne voulais pas me montrer si…. virulent. Sam va me tuer si je vous cause du tort…
Remis de ses spasmes, Gerry afficha un sourire rayonnant :
T’es fait pour elle, mon gars. Dieu que je suis heureux ! Epouse-la vite ! Elle ne cesse de me parler de toi comme si t’étais Dieu. Le bébé sera…
Elle sera magnifique, Gerry. NOTRE fille sera magnifique. Vous serez le plus heureux grand-père, je vous le promets. Laissons Sam poursuivre son terme. Remettez-vous vite… papy !
Finalement cette courte entrevue plut à Davenport. Il reprit sa béquille dont il se sentait encore dépendant pour un temps, et clopina joyeusement jusqu’à la sortie de l’hôpital. Ce qui l’y attendait le prit carrément de court. Un poing vigoureux s’abattit sur son nez.
Cirage… noir total.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Dim 7 Nov - 15:05 | |
| Jamais de sa vie Andreï n’aurait proposé le mariage deux fois ! Il l’avait fait à la seule et unique qu’il jugeait digne de porter son nom, cela suffisait.
Il s’amollissait ? Changeait ? Il fallait être folle pour y croire. Les circonstances… Les principes ancestraux lui pourrissaient la vie plus que tout. Amen.
Sam… La revoir, la serrer contre lui, avait ravivé cruellement sa douleur perpétuelle. Faire de la magie avec elle, rendre son père valide, fut… un pur bonheur. L’instant divin était passé… trop vite à son goût. Perdu ? Oui, il devait l’admettre, il l’était. Sans Sam, la vie n’avait plus de sens. Que n’aurait-il pas donné pour filer en arrière ! Hélas, les retourneurs de temps étaient inaccessibles, sinon…
Il erra longtemps dans les rues de Londres à la recherche… de lui-même. Quel temps faisait-il ? Soleil, pluie, grisaille ? Il s’en foutait. Planté face à une devanture, il aurait pu geler sur place sans s’en rendre compte si le marchand ne l’avait apostrophé :
Elles vous plaisent ? Alors prenez-les, ce sont mes dernières !
Elle aimait les roses… les adorait. Il acheta le lot, paya et prospecta davantage.
*Je vais lui créer un parterre… Elle le mérite*
Semi conscient, il engrangea de quoi garnir une pièce complète. Une joaillerie arrêta sa course. Jaune, rose, bleuté ? Un diamant reste fidèle, lui. Il n’hésita pas longtemps à choisir celui qui conviendrait.
Pourquoi resta-t-il sur le banc d’un parc à contempler la bague en pleurant comme un malade ? Parce qu’il l’était. Malade d’un amour éteint, malade d’un amour naissant… À quoi bon lutter contre l’inéluctable ? Elles auraient ri de le voir ainsi ! Fleurs, bague, pour qui ? Il n’en méritait aucune. Il n’était digne de personne.
Sam… Il l’aimait à en crever. Elle s’en fichait, le rejetait. Pourquoi Tintin n’était-il pas mort ? Tout aurait pu être si simple alors ? Les enfants… Là-bas… le désespoir d’une mère inconnue, sa joie débordante ensuite, avaient radicalement modifié ses vues. Il trancha.
Nate fut acide… Prévisible, mais agaçant. Il en avait marre. Comme un gamin heureux d’une farce, il avait espéré autre chose. Nate ne comprendrait-elle jamais sans avoir besoin de mettre les points sur les i ? Sam aurait pigé au quart de tour, elle ! Oh, bien sûr, Miss Sommerby s’était vite amendée et avait capté le message sans qu’il eût à prononcer la phrase rituelle « veux-tu m’épouser ». Elle désirait juste qu’il lui passe la bague au doigt après un délirant petit discours enflammé. Il n’allait pas le refuser ce plaisir et s’exécuta de bonne grâce.
Depuis cet épisode, Nate se montra absolument charmante et pleine d’attentions avec lui, ce dont Andreï ne se plaindrait pas. C’est fou ce qu’une vague de fiançailles peut vous attirer les bonnes grâces de la future mariée. Lui, il ne s’était pas épanché sur ce « détail » Pas de serments à la noix, pas de date prévue pour l’événement non plus. Tandis que Nate entreprenait avec enthousiasme d’aménager la chambre du bébé, Andreï ne faisait… pas grand-chose. Si l’on requérait son avis, il le donnait sans s’implique davantage ni au décor, ni à la layette. Parfois, il allait voir sa mère en évitant l’hôpital, si bien qu’il n’y avait que certains soirs où c’était possible. Quand son fiston lui avait annoncé sa décision de faire de Nate une femme respectable, la princesse Orloff n’avait pas caché sa satisfaction :
Bravo Andreï, je suis fière de toi ! Il va falloir organiser tout ça !
Elle pétillait de joie, exactement comme elle l’avait fait pour son mariage avec Sam. Déjà elle devait imaginer une liste à rallonge d’invités incontournables, dresser des plans de table, choisir menu et robes… Il savait qu’il allait lui gâcher sa joie mais trancha :
Non !
Choquée, la princesse avait ouvert des yeux ronds :
Co… Comment ça non ?
Il est hors de question, tu m’entends, hors de question de revivre le cirque que tu m’as imposé avec… Sam. Tout ce tralala, cette débauche de gratin : c’est niet ! On fera ça simplement, très simplement.
Quand même pas qu’un mariage civil, Andreï ? Ce ne serait pas correct ! Sûrement que Nate voudra…
Ça m’étonnerait qu’elle veuille autre chose. Tu sais comment à tourné le premier. Si c’est le cas… tant pis.
Bon, soupira la princesse, tête de mule comme toujours ! Admettons… Et où en êtes-vous dans le choix du prénom ? Je me suis permise… Tu sais quand Gerry dort, il faut bien occuper son temps. Je tricote beaucoup mais j’ai aussi des loisirs. Alors, j’ai préparé quelques suggestions.
Toute heureuse, elle sortit un rouleau d’un tiroir et le lui tendit. C’était du pur Anastasia, là ! Longue comme un bras, Andreï lut la liste des prénoms pondus par sa mère. Pour son premier petit-fils, elle y avait mis le paquet !
Je la soumettrai à Natacha. Il y en a bien un là-dedans qui vous conviendra.
Tu… Tu ne donneras pas ton avis ?
(Haussement d’épaule) Bien sûr que si ! J’irai le déclarer à sa naissance, alors je dirai ce que je voudrai à ce moment-là. Fais pas cette tête maman ! Je n’irai pas l’affubler d’un truc ridicule et… on respectera la tradition Orloff.
Voilà mamy rassurée !
Peu après cette entrevue, Andreï était passé dans une salle de sport s’y défouler. Son bras était à nouveau fonctionnel mais une légère raideur persistait. La gym l’aiderait à retrouver sa souplesse d’antan. Jouxtant la salle de sport, il y avait un stand de tir. Plusieurs fois Andreï avait été tenté de s’y abonner. Bien sûr des cibles fixes n’avaient rien de bien excitant. Malgré tout, ce jour-là, il se décida. Il remplit le formulaire adéquat des nouveaux inscrits et se rendit dans la salle d’entraînement. L’instructeur était… une charmante demoiselle aux courbes parfaites. Professionnelle, Monica Flint s’enquit de ses préférences en armes de poing :
Je vois d’après votre fiche que vous n’êtes pas novice, Mr Sanders. Nous avons un beau panel de Brownings, Beretta ou colts. A moins que vous ne préfériez utiliser votre arme personnelle ?
J’ai laissé mon Magnum à la maison, rit-il. Ce Beretta ira très bien.
Il vérifia l’arme tendue aussitôt, jugea son poids, en s’abstenant cependant de le démonter entièrement. Consciencieux, il prit lunettes et cache-oreilles et s’installa. Ses premiers tirs furent espacés, de quoi tâter la précision de l’objet. Une fois qu’il eut trouvé la correction souhaitée, Andreï vida ses chargeurs avec son habilité habituelle, de quoi déclencher l’admiration des uns, la jalousie des autres. La belle instructrice lui offrit un sourire éclatant, teinté d’un poil de regrets :
Je constate que je n’aurai rien à vous apprendre, Mr Sanders. Dans ce domaine, du moins…
Trop rompu aux arcanes de la séduction, Andreï comprit parfaitement l’allusion. Laconique mais enjôleur, il répondit :
Il y a tant de domaines à explorer… Nous verrons bien… Bonne journée, Miss Flint !
En rentrant chez Nate, l’image de la ravissante tireuse était effacée depuis un bon moment. Sa fiancée n’était pas encore rentrée de sa virée personnelle. Si dévaliser les boutiques était un sport pour elle, lui il s’en passait volontiers. Pourtant il aimait la voir rentrer ravie de ses achats qu’elle déballait avec son petit air de gamine heureuse. Andreï s’amusait alors de voir s’accumuler des dizaines de grenouillères, pulls, chaussons, etc. Sans doute que le bébé serait un monstre genre mille pattes ou hydre à sept têtes pour enfiler tout ça…
Adorable chatte, Nate se glissa dans ses bras devant la cheminée. Ses pieds avaient dû souffrir de ses multiples courses. Il se pencha pour la déchausser lorsqu’elle le surprit :
Tu ne devineras jamais avec qui j’ai bavardé cette après midi ?
Elle avait un air mutin qui amena de la suspicion. Plutôt que de se lancer dans d’improbables énumérations, il attendit la suite.
Avec Sam…
Sam ? MA Sam ?
Question stupide mais il se sentait exactement comme ça en ce moment. Imaginer Sam en train de bavarder gentiment avec Nate autour d’un café était… inconcevable. Pourtant…
Oui, ne me regarde pas comme ça ! Je suis quand même capable de maintenir une conversation civilisée avec ton ex sans lui arracher les yeux. Oh...elle se portait comme un charme…et a l’air parfaitement heureuse et comblée avec …mon ex…c’est débile, tout ça…enfin…Je ne sais pas ce qu’il est en train de m’arriver…mais je sens tout à coup, l’irrépressible besoin de faire le bien….un vrai bien…un grand bien…
Il n’avait pas pu s’empêcher de rigoler :
Je suis toujours partant ! Tes massages sont divins…
Evidemment, il ne s’agissait pas de ça, ni même de lui qui plus est !
Non ! Pas à toi, mon chéri...je ne pense pas que tu aies besoin d’aide. Je…pensais à…Justin !
Méchante flèche ! Pourquoi gâcher la soirée en évoquant leurs ex ? Il grogna :
Z’aviez rien de mieux à faire que de parler de tintin ?
Oh la…monte pas sur tes grands chevaux…oui, j’ai pensé que si je le remets d’aplomb…peut être qu’il ne sera pas si hargneux…
Tu es pleine de bons sentiments à son égard, dis donc ! Je sais que tu serais capable de le sortir de là. Je le lui ai proposé à l’hôpital quand on est allé voir Gerry ! Bon, je lui ai balancé ça comme une vanne, j’admets. Mais, connaissant ton ex, il préférera crever que de te demander quelque chose.
Rien à faire, elle y tenait dur comme fer.
Dis moi sentimentale, si tu veux…mais cinq gosses sur les bras et éclopé en sus…même s’il sait se montrer odieux quand il veut…Andrei…aide moi ! Même s’il ne veut pas…
L’enjeu était de taille. En quelque sorte, Nate voulait contraindre Justin à accepter son traitement de choc. De gré ou de force, elle semblait prête à tout pour parvenir à ses fins. Et lui, il devrait marcher dans la combine ? Ah non alors !
Il prit le temps de la réflexion. Se servant un verre, lui offrant un cocktail de fruits, il se leva, marcha, se rassit plusieurs fois sans trouver les mots justes à débiter. Il ne voulait pas la blesser par des propos trop acerbes même si ceux-ci bouillonnaient en lui.
*Secourir Justin ? Et puis quoi encore ? S’il souffre de son état, tant mieux ! Il ne souffrira jamais assez ! Un bon ennemi est un ennemi mort ! *
Pourquoi aurait-il marché dans cette combine débile ? Pour mettre fin à la guerre entre leurs couples ? Au contraire ! Justin au top de sa forme serait un ennemi encore plus féroce. Si Nate escomptait par ce « geste » miséricordieux s’allier son pardon, elle se mettait le doigt dans l’œil. Davenport diminué, par contre, offrait beaucoup de possibilités. Tôt ou tard, Sam se lasserait de lui, en toute logique. Andreï ne savait que trop ce que c’était que d’être réduit à dépendre des autres à cause d’un handicap physique. Honte, regret, chagrin avaient été son lot et le seraient encore sans l’incroyable magie de Miss Sommerby. Ses actes avaient transformé sa vie. Elle lui avait rendu sa dignité d’homme debout ! Cela avait été déterminant dans ses sentiments pour cette jeune femme. Et il devrait risquer que Nate se rattache à tintin par ce même procédé ? Non et non !
Il prit une profonde inspiration, alluma une cigarette et alla la fumer dehors. L’air frais lui fit du bien. Qu’avait-il à perdre ou à gagner de revoir Davenport en forme ? A la fois tout et rien. Sam se contenterait peut-être de son éclopé chéri ? Elle ne voulait de toute façon plus de lui-même si… il en était sûr, elle ressentait encore des trucs pour lui. Autant que lui pour elle, à quoi bon nier. Nate n’avait cependant pas tort. Où est la gloire quand on se trouve face à un adversaire à terre ? Ne serait-ce pas plus réjouissant de voir Sam reconnaître ses erreurs sans avoir à s’apitoyer sur le sort d’un amant désarmé ? Elle ne reviendrait pas. Il devait clore ce chapitre mais ne l’admettait pas encore. Nate lui procurait une stabilité inédite. En retour, le moins qu’il puisse faire était de se montrer plus… conciliant. Il l’avait bassement utilisée, roulée dans la farine sous toutes les coutures. A cause de lui, elle était reniée de partout et, malgré ça, elle était toujours là, elle…
Pour le fils qu’elle allait lui donner, pour sa constance à l’aimer en dépit de tout ce qu’il lui avait fait endurer, Sanders plia. Il jeta son mégot dans les rosiers et rentra l’affronter :
Ok, tu as gagné ! On va s’arranger pour rafistoler tintin, si tu y tiens. Il se présentera une occasion ou l’autre où vous vous rencontrerez. Au besoin, on en inventera une. Tu lui proposeras tes soins et on verra bien selon ses réactions. S’il dit oui, l’affaire est dans le sac. S’il refuse – ce dont je ne doute pas un instant – on mettra Sam dans le coup et on appliquera le plan B.
En quoi consisterait ce plan… ? Bonne question. Au moins, Nate se montra-t-elle enchantée de cette décision. Une fois de plus Andreï constata que faire plaisir à sa fiancée donnait lieu à de très savoureuses compensations.
La rencontre qu’il pressentait entre les ex-conjoints vint beaucoup plus tôt que prévue. Nate n’en fit pas un mystère, Justin demandait à la voir incessamment. Les dés en étaient jetés :
Vas-y ! Ecoute ce qu’il a à dire et n’oublie pas de tâter le terrain de sa future guérison. Si tu veux, je resterai dans le par cet t’y attendrai.
Il leur devait au moins ça d’intimité. Tourner en rond, s’asseoir sur un banc, mater les nanas qui passaient… Pas la joie. Perdu dans ses pensées, Andreï fixait l’étendue infinie de nature ouverte aux promeneurs quand le trottinement des pas de Nate le réveilla. Vu sa tête, les nouvelles n’étaient pas réjouissantes :
Il ne veut rien entendre ? Ça ne m’étonne pas… Quoi ? Il veut que NOUS gardions vos enfants ? Mais…
Les explications de Nate étaient confondantes. Sam n’allait pas bien, Justin voulait qu’elle puisse bénéficier de tout le repos possible. Chère vieille douleur… Le premier réflexe d’Andreï fut d’aller aussitôt voir Sam. C’était si débile que la main de sa fiancée dans la sienne ne fut pas nécessaire à la remise en place de ses ardeurs.
Bon ! Plan B d’urgence ! Pas que je veuille tant que ça le voir vaillant mais Sam a besoin de quelqu’un de fort près d’elle. On s’occupera de tes mômes, t’inquiète, ça me fera de l’entraînement pour nous. Es-tu… Es-tu en forme… Assez en forme pour agir. Je…
Dieu qu’il se sentait bizarre soudain. Une main timide s’allongea vers le ventre rebondi de sa belle qu’il caressa avec une tendresse infinie :
Je ne veux prendre aucun risque ni pour lui… ni pour toi ! Si tu n’as pas la force, ça ne fait rien. On attendra.
Comme épanouie, Nate assura que tout irait bien. Il la crut.
Je te ramène Tintin chez nous ! Prépare-toi. Je… Je t’aime.
Il n’attendit pas de réplique à cet aveu aberrant de sa part et transplana aussitôt. Pas difficile de pister Justin. Ce type était extrêmement transparent pour quelqu’un d’aussi futé qu’Andreï. Quoi de plus logique que de l’imaginer en train d’expliquer à Gerry pourquoi Sam ne viendrait pas le visiter tel qu’elle le faisait quotidiennement ? L’attente fut brève à la porte de l’hôpital. La stature de Davenport encombré de sa béquille était reconnaissable entre mille. Pas besoin de faire dans la dentelle, non ? Depuis le temps qu’il rêvait de lui défoncer le portrait… La tentation était trop forte. A peine Justin franchit-il la porte qu’il se prit un poing en pleine poire. Distraire les témoins ? Un jeu !
Oh mon Dieu, la porte s’est refermée… Il pisse le sang, le pauvre !
Tu parles !
Les urgences ! C’est par où ?
Il soutint Davenport jusqu’à un couloir et s’évapora avec lui dès que l’opportunité se présenta. Nate Hurla en les voyant débarquer.
Hey ! J’avais dit que je l’amenais. J’ai jamais dit dans quel état !
On s’afféra. Réparer un nez, pas compliqué. La suite laissa Andreï muet d’admiration. Natacha, transfigurée, fit appel à une magie antique, issue d’autres lieux, d’autres époques. Elle était… transcendée. Si belle, si…
*Elle m’a fait ça… J’ai rien vu… Il ne voit rien non plus, tant mieux !*
S’il l’avait découverte dans cette aura magnifique, il en serait irrémédiablement tombé amoureux. Ne l’était-il pas déjà ? Cela ne comptait pas. Il emplissait ses yeux de ce tableau merveilleux. Des nuages dorés flottaient, des sons étranges jaillissaient… Qu’il fut touché par l’un d’eux ou pas ne le sortit pas de la transe splendide qu’il vécut à ce moment.
La magie épuise… Andreï se précipita pour recueillir la sorcière défaillante :
Tu te sens bien ?*Con, elle va pas bien, tu vois sa tête, non ?* Tu m’avais dit que… Nate !
Il s’affolait, perdait la tête. Nate évanouie, ne réagissait pas. L’autre, l’allongé, il s’en foutait. Il déposa sa fiancée sur le divan. Se désintéressant complètement de Justin.
Là, là ma belle ! Remets-toi ! Me fais pas ça… Dis-moi quelque chose…
Elle dit quelque chose, en effet. C’était si incongru…
*Rebondissement ? Elle délire !*
Il l’embrassa tant et si bien qu’elle rouvrit les yeux :
Tu as le chic pour faire crever les gens de trouille, toi... Lui ? J’en sais rien. Tu crois que j’allais m’en soucier alors que tu tombais dans les pommes ?
Un mouvement commun les fit se retourner vers la table où aurait dû se trouver Davenport. Il n’y était plus…
*Puisse-t-il être en enfer !*
Le lendemain, gai comme un pinson, Andreï se doucha. Nate était remise de ses émotions, ils ignoraient les résultats du traitement infligé à Davenport contre son gré mais s’en fichaient avec le sentiment du devoir accompli. Les gosses de Nate débarqueraient dans une paire d’heure. Il se devait d’être un beau-père acceptable pour les pestes d’aînées Davenport. Pourquoi cette envie stupide de chanter ? Parce qu’il était heureux, voilà tout !
Figaro si Figaro là, figaro si Figaro là lalalalala…
La tête de Nate se pointant dans la salle de bains valait un discours…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Dim 14 Nov - 22:33 | |
| En toute sincérité, elle n’avait pas cru qu’Andrei accepterait de l’aider avec son idée de remettre Justin en forme. Il faut dire que c’était une demande assez inédite et tout à fait hors lieu étant donné l’état des relations entre les deux couples. Bien entendu, Sanders n’agréa pas aussitôt. Nate ne voulait pas savoir, mais s’imaginait bien quelles idées tortueuses couraient dans la tête de son chéri. Elle ne pouvait pas l’en blâmer. Pour lui, Davenport était un ennemi sur toute la ligne. Il le détestait copieusement et cela n’était pas prés de changer, pas de sitôt, en tout cas.
Elle le laissa gamberger à son aise et resta, confortablement installée dans le divan alors qu’Andrei sortait fumer, laissant, elle-même, ses pensées partir en tous sens.
*Que veux tu, à la fin ? Rédimer tes torts ? Te faire pardonner ? Tu sais bien que Justin ne te pardonnera jamais…ou oui ? Tu as fait tellement de folies…tu as déçu tellement de gens…tu as tout perdu…Non. Pas tout…Tu as Andrei…Pour combien de temps ? Tant que ça dure…Tu l’aimes comme une dingue… et lui ? Il pense et pensera toujours à sa Sam…Faudra faire avec, idiote…Au moins, tu auras son fils…et le reste de ta vie pour te morfondre…*
L’erratique décours de ses réflexions fut coupé court par le retour d’un Andrei au semblant réfléchi, qui la surprit avec ses déclarations.
Ok, tu as gagné ! On va s’arranger pour rafistoler Tintin, si tu y tiens. Il se présentera une occasion ou l’autre où vous vous rencontrerez. Au besoin, on en inventera une. Tu lui proposeras tes soins et on verra bien selon ses réactions. S’il dit oui, l’affaire est dans le sac. S’il refuse – ce dont je ne doute pas un instant – on mettra Sam dans le coup et on appliquera le plan B.
Elle avait écouté sa tirade sans pouvoir donner crédit à ses oreilles.
*Quoi ? Il accepte !?...Incroyable !*
Merci…Merci, Andrei !, et de lui jeter les bras au cou pour lui exprimer clairement sa profonde satisfaction.
L’occasion se présenta de façon inespérée et beaucoup plus vite qu’ils ne l’avaient prévue. Nate raccrocha le téléphone d’un air songeur et resta un moment à repasser la conversation qui avait eu lieu tantôt…avec son ex.
Je me demande bien ce qu’il peut vouloir, celui là ?, soliloqua t’elle en tortillant une longue mèche fauve entre ses doigts.
Andrei, bien entendu, voulut savoir ce qui se passait pour la laisser si pensive.
Justin…Il vient de m’appeler.
De quoi le surprendre.
Ce qu’il veut ? Je n’en sais trop rien. Il dit qu’il a terriblement besoin de me voir…de me parler…Ma foi, oui, il semblait assez angoissé…c’est ridicule...pourquoi diables voudrait il me voir ?
Vas-y ! Écoute ce qu’il a à dire et n’oublie pas de tâter le terrain de sa future guérison. Si tu veux, je resterai dans le parc et t’y attendrai.
Tu es merveilleux, Andrei…oui, attends moi là..cela me rassure, savoir que tu seras près.
Pas qu’elle eut peur de son ex. Pas du tout. Mais cette rencontre n’était pas trop pour la mettre tout à fait à l’aise. Ils s’étaient fait trop de mal, Justin et elle…ou était ce elle qui lui avait fait tout le mal du monde ? Peu importait cela en ce moment. Les jeux étaient faits.
Ils s’étaient donné rendez vous en plein parc, entourés de gens, comme s’ils craignaient s’aborder en tête à tête. En avançant vers lui, Nate prit son temps pour le détailler. S’appuyant sur sa béquille, Justin n’avait pas l’air fringant qu’elle lui avait si bien connu. Une certaine amertume ou chagrin se traduisait dans son expression mais celle-ci changea aussitôt il l’aperçut.
Salut Nate ! Merci d’être venue.
Mais voyons…c’est normal, tu as éveillé ma curiosité…alors, tu me diras pourquoi ce besoin si soudain de me voir.
Le voir se gratter la nuque, comme toujours quand il était nerveux, fut sur le point de l’attendrir mais déjà il se lançait, direct, selon son style.
Je ne vais pas réclamer ton pardon pour ce que je t’ai fait. J’admets que c’est de ma faute…
*Hein ? Ai-je bien entendu ? Aurait il des remords ? Tu me surprends, Justin !*
Mais déjà il embrayait avec une proposition pleine de délicatesse. Du Justin pur.
Il fait frisquet. On devrait… Tu veux boire quelque chose ? Il y a un pub tout près, un chocolat ?
Oui. Pourquoi pas ?
Un petit pub sympa les accueillit. C’était un peu déroutant se trouver face à face avec l’homme qui avait partagé sept ans de sa vie, qui était le père de ses quatre enfants et ne savoir comment s’adresser à lui. Elle opta pour la neutralité.
Mais Justin avait le don de la prendre de court.
Je sais que c’est dingue mais je t’aimerai toujours, Nate...
Elle écarquilla les yeux et ouvrait déjà la bouche pour riposter mais il ne lui en laissa pas le loisir.
STOP ! Dis rien, c’est pas la peine de s’éterniser là-dessus. Tu as choisi Andreï, moi Sam, ce sont nos choix, point barre.
Seigneur, Justin Davenport…tu es si…plein de bon sens…et oui, tu es dingue…mais comme toujours, as raison…nous avons fait nos choix. Mais on n’est pas ici pour que tu fasses déclaration de tes hauts sentiments, n’est ce pas ? Qu’est ce qu’il se passe, Justin ?
Il eut l’air embarrassé mais parla, tout de même.
Je ne suis pas là pour plaider ma cause, mais la sienne. Sam va pas bien, je suis perdu. Il faudrait… Je souhaiterais…
*Sam va mal ? Bonté divine…tu ne seras pas le seul affolé, crois moi !*
Parce qu’elle ne doutait pas un instant qu’Andrei s’arrangerait pour le savoir, lui aussi mais le reste du discours de son ex l’empêcha de continuer à penser à cela.
Tu m’as donné le meilleur de toi... Je n’en ai jamais douté. Après tu m’as fais souffrir l’enfer mais je remise ça aux oubliettes.
*Tu n’en crois pas un mot, mon cher !*
Très pratique, dit elle avec un petit sourire en coin.
Pratique, hein ? Je suis con ... Une triste habitude dont tu t’es lassée…
*Oui, tu es con…et non, idiot, tu ne m’as pas lassée !*
Mais préféra ne piper mot et attendre la suite.
Je t’aime Nate, je… Je suis fou de Sam. Je... J’y suis pour rien, elle est mon âme sœur... tu as voulu autre chose, libre à toi. J’aurais vendu mon âme au diable pour toi. Tant pis, tant mieux ? L’avenir le dira.
Pourquoi cela lui fit si mal, soudain ? Elle ne s’attendait pas à ces aveux et s’en serait volontiers passée, de les entendre. À quoi bon raviver le passé ? Mais Nate se doutait bien que ce n’était pas tout, autant mieux en avoir le cœur net.
Oui…l’avenir dira…Tout ce que tu dis me touche *Crois moi ou pas, ton affaire !* mais je te connais assez comme pour savoir qu’il y autre chose que tu veux …
Comme d’habitude, Justin força sur le dramatique et fonça.
Si t’éprouves un soupçon de compassion pour ce qui fut nous ,je souhaiterais que tu gardes nos enfants plus souvent, un moment. Sam a besoin de repos jusqu’au terme… Dis oui, dis non, je m’arrangerai.
D’abord, il lui déclarait de peu son amour éternel, de suite après reconnaissait être fou de sa blonde, ratifiait son amour pour elle mais assurait que l’autre était son âme sœur. Il finirait par se perdre entre tant d’aveux mais enfin, retrouva la bonne raison et l’exposa, la laissant un instant assez effarée comme pour y répondre de façon cohérente, au lieu de quoi, elle dévia le thème.
Et toi ? Comment vas-tu ?
Sa réplique sonna vexée.
Qu’en as-tu à cirer ? Je vais aussi bien que les circonstances me le permettent. Un pion chasse l’autre, non ?
Ma foi, si tu le dis !, murmura t’elle, un brin agacée.
Lui, ne démordait pas de son idée.
Fais comme tu veux. Nos filles… nos fils… Je sais que tu les aimes. Ils ne sont pour rien dans ce jeu de quilles et n’ont pas à devenir des dommages collatéraux ? Ce ne serait pas juste. Tu as choisi, vis avec ça je le ferai aussi. Tout aurait pu être différent… Il est trop tard à présent. J’espère que tout roule pour toi comme tu le veux.
Elle ne put retenir un sourire splendide tout en jouant inconsciemment avec sa bague de fiançailles, geste qui ne sembla pas passer inaperçu à Justin dont les sourcils se froncèrent légèrement.
*Il ne s’y attendait pas, tiens !*
Mais, parfait comédien, il arbora son beau sourire et changea de thème.
Tu vas avoir un tit gars, non ?
En effet…mais comment le sais tu ?
Je suis observateur, tu sais ? Sam se fiche de moi mais je sais depuis un moment que pour nous c’est une fille. Je lui laisse croire que je marche… c’est un jeu.
Il pouvait être si adorable…Justin avait toujours été adorable mais elle avait tout fichu en l’air.
*À quoi bon y penser !*
Cela ne te déçoit pas, j’espère !
Non, je ne suis pas du tout déçu. Tony et Philip me comblent… Je ne te remercierai jamais assez pour eux.
Il n’y a rien à remercier, Justin…J’ai été aussi très heureuse de les avoir…je ne l’ai pas fait seulement pour te faire plaisir…Mais dis moi plutôt, vous avez déjà un nom pour la petite ? Le prénom ? J’en sais rien. ( il rit) Sam me fera la surprise. Du moment qu’elle ne l’appelle pas Madonna, Lourdes ou Pepper Laurie, ça ira.
Cela lui faisait vraiment plaisir de pouvoir parler avec lui, comme ça, sans envie de lui arracher les yeux ou de lui souhaiter que le ciel lui tombe sur la tête. Ils avaient partagé trop de merveilleuses expériences comme pour pouvoir le haïr…au fond de son cœur, Nate savait qu’en quelque sorte, elle aussi l’aimerait toujours un peu.
Son rire résulta contagieux. Elle fronça le nez en disant, hilare :
Je m’imagine…Piper Laurie Davenport…ça ferait un sérieux coup de moderne, là…Mais revenons à notre affaire…oui, je garderai les enfants, pas de souci…je…m’arrangerai…
Il ne fallait pas être devin pour savoir qu’elle pensait à Andrei, qui, si on en croyait à la clause rigoureuse devrait s’éloigner alors…mais voilà que Justin s’emparait de sa main en un geste…presque intime qui la troubla, malgré elle…pas autant que ce qu’il dit par la suite.
Tu es d’accord de prendre nos enfants avec… vous ?
Nous !?, reprit-elle, effarée, tu veux dire…Andrei et moi ?
Oui, j’ai bien dit vous. Je suis passé chez le juge avant de venir ici et j’ai demandé de rayer cette restriction stupide. Du moment qu’Andreï ne sort pas d’armes devant eux, ne les effraie pas, il pourra rester à tes côtés pour t’aider avec eux.
Justin…
Pas la peine de dire merci… J’ai compris.
Il baisait ses doigts, la faisant presque soupirer avant de se lever et s’éloigner en clopinant vers la porte.
Justin, attends…Je veux t’aider. Laisse moi le faire…tu sais bien que je peux…je…
Te mets pas en frais pour moi. Je ne cours plus, et alors ? C’est pratique d’être handicapé, parfois. D’ailleurs regarde, on m’ouvre la porte. Tu as guéri Andreï, ça suffit !
*Tant pis si tu ne veux pas, homme borné…ce sera fait, na !*
Elle quitta à son tour le pub et retourna au parc, où se trouverait sûrement Andrei. Il était là, en effet, rêvant à Dieu sait quoi si on en croyait à son air distrait mais elle n’eut pas à parler pour le faire retomber sur terre, comme si son sixième sens l’en avait averti, il atterrit tout seul à son approche.
Nate soupira, dépitée et s’assit à ses côtés, sur le banc.
Comme prévu…il ne veut rien savoir de se laisser aider…
Il ne veut rien entendre ? Ça ne m’étonne pas…
Ni à moi…mais ce n’est pas tout…en fait, il voulait me voir pour me demander de l’aide. Il veut que nous gardions les enfants…pour un certain temps.
Quoi ? Il veut que NOUS gardions vos enfants ? Mais…
Nouveau soupir. Autant le dire, de toute façon, il le saurait tôt ou tard.
Il semblerait que Sam ait des problèmes, elle doit garder repos presque absolu pour arriver à terme.
Pas besoin d’en dire plus, sa réaction fut telle que prévue…il ne demanderait pas mieux que de partir en courant voir ce qu’il en était vraiment de sa blonde. Nate eut un petit sourire triste et glissa sa main dans la sienne, pas pour le retenir…seulement pour se rassurer un peu, elle-même mais ce geste si simple sembla le calmer.
Bon ! Plan B d’urgence ! Pas que je veuille tant que ça le voir vaillant mais Sam a besoin de quelqu’un de fort près d’elle. On s’occupera de tes mômes, t’inquiète, ça me fera de l’entraînement pour nous.
Cela la fit sourire, rassérénée.
Tu peux le dire, oui.
La suite l’émut follement. D’un geste d’infinie tendresse, il caressa son ventre tout en disant :
Es-tu… Es-tu en forme… Assez en forme pour agir. Je… Je ne veux prendre aucun risque ni pour lui… ni pour toi ! Si tu n’as pas la force, ça ne fait rien. On attendra.
Elle posa sa main sur la sienne. Son cœur battait la chamade.
Je suis parfaitement en forme...et il va très bien aussi.
Je te ramène Tintin chez nous ! Prépare-toi. Je… Je t’aime.
Pendant quelques secondes elle ne put réagir…mais pour alors, Andrei avait transplané, la laissant là, ahurie, émerveillée…follement heureuse.
*Il t’a dit…t’aimer…Tu vois…les miracles…ça existe !*
Elle resta là encore un moment, à savourer ce bonheur intense qui la faisait presque flotter sur un merveilleux petit nuage rose.
De retour chez elle, Nate était de très bonne humeur. Tout á coup, sa vie semblait avoir pris le bon tournant. Ses enfants chéris viendraient passer un long temps en sa compagnie, cela leur donnerait l’opportunité d’apprendre à se connaître…surtout avec Phil et Tony. Avec Viv et Flore, il s’agirait de se rapprocher de nouveau, de gagner leur confiance et leur affection mais surtout de les apprendre à accepter Andrei…et enfin…Lui. Nate n’avait osé rêver à cela…à l’amour d’Andrei, à la tendresse découverte dans ses gestes, dans son regard…
Mais ce rêve parfait et harmonieux vola en mille éclats en voyant débarquer son chéri qui portait presque Justin dans les vapes et couvert de sang. Et dire qu’elle n’avait même pas eu le temps de se préparer dûment…
Mais…que lui as-tu fait, par Merlin ?
Hey ! J’avais dit que je l’amenais. J’ai jamais dit dans quel état !
Un bref examen suffit pour savoir qu’il ne s’agissait de rien de grave : un nez cassé, ça saigne avec profusion mais n’a jamais tué personne.
Je sais que Justin peut être têtu…oui, il ne se serait pas laissé faire autrement…Mets le là…sur la table…où d’autre ? On n’a pas de temps à perdre…s’il reprend ses sens ? Euh…Faudra le rendormir…
*Tout comme j’ai fait avec toi, mon amour !*
Elle n’en était pas à ça près. Le nez de son ex fut remis en place d’un sortilège simple et d’un autre, toute trace de sang, effacée.
Le rituel, comme tel, ne demandait rien d’autre que de la concentration et des bons sentiments. Elle en était pleine, de bons sentiments en ce moment là, de vibrations positives, dues au bonheur qui apaisait son âme.
Andrei se retira de quelques pas, la laissant seule, face à Justin, toujours évanoui. Pendant un moment, elle le contempla, en silence, amenant à elle des souvenirs…Souvenirs d’un hier déjà lointain et si proche à la fois…puis son esprit dériva lentement vers d’autres temps, autres lieux. Elle se revit au cœur de la forêt ancestrale où les secrets de la magie ancienne lui avaient été révélés.
Magie de la nature, de l’arbre, de la fleur, de la pierre…Magie de l’eau…de la mer et la rivière… Du daim, de l’aigle…Du ciel et de la terre…Magie simple…magie éternelle…
Peu à peu, tout se perdait en un tourbillon merveilleux où seul comptaient le souffle du vent venu des montagnes et le chant du ruisseau entre les galets et le chant de la baleine au large…et celui des oiseaux au ciel. Les bruissement des feuilles, l’arôme ineffable des bois au petit matin. L’éclat du soleil sur les champs paisibles. Le galop d’un cheval, libre comme le vent de la plaine. Le vol somptueux de l’aigle sur les hauteurs à la neige resplendissante…
Magie de mes ancêtres…magie du monde ancien…des rêves…reviens et rends à cet homme ce qu’il a perdu…ôte de son cœur l’amertume, redonne à son cœur la paix et fais le rire, joyeux…
Puis sa voix retomba en un murmure, lent, cadencé. Invocations précises en un langage perdu dans la nuit des temps…Psalmodies révérentes, hommage aux anciens dieux d’un monde révolu…en sentant une force nouvelle l’investir…l’emplir…faisant tressaillir l’enfant dans son sein avec tant de force qu’elle leva l’intonation de sa prière…avant de se sentir flotter au-delà de tout et de perdre conscience…
La voix affolée d’Andrei la ramena de loin.
Tu te sens bien ? Tu m’avais dit que… Nate ! Là, là ma belle ! Remets-toi ! Me fais pas ça… Dis-moi quelque chose…
Il était là, tout allait bien…C’était bon le savoir si proche…mais il fallait le prévenir.
Il…y a eu…des…rebondissements…
Comment lui expliquer en cet instant que quelque chose était partie, hors de son contrôle, elle même ne savait pas exactement quoi…son enfant l’en avait avertie. De toutes façons, les baisers d’Andrei avaient le don de la chambouler toute…et, comme en ce cas, de la rendre à la vie.
Tu as le chic pour faire crever les gens de trouille, toi...
Tant que ça ?, s’enquit elle, mutine même si encore avec un certain tournis,…et Justin ? Comment va-t-il ?
Lui ? J’en sais rien. Tu crois que j’allais m’en soucier alors que tu tombais dans les pommes ?
C’était si mignon de se préoccuper ainsi mais il fallait savoir comment se portait le patient…or, quand ils regardèrent en sa direction…il avait disparu.
Oh, mon Dieu…j’espère qu’il est parti tout seul et que ce n’est pas moi qui l’ai fait disparaître !
Andrei la rassura. Il ne s’était passé rien qui laisserait prévoir cela. Justin se serait réveillé tout seul et aurait opté pour s’enfumer sans rien dire, grand bien lui en fasse. Il serait sans doute furieux d’avoir été pris au piège…mais si tout avait bien marché…à cette heure, Davenport courait chez lui, plein de nouvelles forces, surprendre sa blonde adorée, avec ce miracle inespéré. Nate, elle se sentait un peu fatiguée mais rien d’extraordinaire, c’était surtout cette paix extasiante qui l’envahissait et résultait aussi enivrante que les baisers de l’homme qu’elle avait choisi, envers et contre tout.
Je t’aime tant, Andrei…je suis heureuse !
Rien d’autre ne comptait.
Il lui avait parlé de ses singulières paroles, à son réveil. Rebondissements ? Elle ne savait pas trop de quoi il pouvait s’agir. Bien sûr, ce genre de magie peut avoir, parfois, des aboutissants inattendus…
Figaro si Figaro là, figaro si Figaro là lalalalala…
Nate, qui était montée lui annoncer que le petit déjeuner était prêt, s’arrêta, trop surprise pour faire autre chose que rire.
Mais c’est quoi…ça ?...Andrei chantant sous la douche ? C’est une première…ca ressemble plutôt à Justin, ça !
L’énormité de cette constatation la sidéra.
*Ce n’est pas possible…ou…oui ?*
Mais l’autre s’époumonait, en toute joie de cœur avec l’aria de Figaro…et ne s’y prenait pas mal du tout.
*Mon Dieu…je n’y crois pas…manque de pot…j’aime pas l’opéra !*
Sans trop y croire, elle passa la tête dans la salle de bains où son chéri se séchait sur les derniers accords de cette aria immortelle du Barbier de Séville.
Tu…te sens bien, Andrei ?...Euh…non. Juste de la curiosité…je ne t’avais jamais …euh…entendu… si content ! …Mais non, voyons, mon chéri…pourquoi cela allait me déranger ? Je venais te dire que le petit déjeuner est prêt…les enfants seront là dans un moment !
Ravi, comme si on lui avait annoncé la meilleure nouvelle du monde, il l’embrassa avant de filer s’habiller. Nate n’était pas au bout de ses surprises. Il beurra ses tartines, bavarda, fit des plans sur que faire une fois que les petits seraient là. Il accepta même d’aller peut être à la fête foraine, ensemble.
Nate n’en revenait pas et cela fut encore plus surprenant quand les enfants arrivèrent, accompagnées de leur nouvelle nanny, Miss O’Higgings, Mrs. Pimms ayant carrément refusée à se trouver sous le même toit que ce couple adultère. La dame restait fidèle à ses principes et n’avait jamais pu pardonner la façon dont ces deux là l’avaient déjouée pour s’emparer des enfants aux Bermudes.
Les filles ne se laissaient pas facilement convaincre par cet Andrei si charmant et plein de patience, qui se comportait de la façon la plus adorable, avec elles. Qui jouait avec leurs petits frères et les faisait rire…
Nate, elle, suivait le mouvement, en proie de la plus fébrile des fascinations…le comble fut quand le soir de ce premier jours avec les enfants, une fois ceux-ci au lit, il voulut jeter un coup d’œil à la chambre qu’elle préparait pour le bébé et non content de regarder y apporta une paire de joyeuses innovations.
Un miracle ?...Qui sait ?...Elle devait, à tout prix, rencontrer Samantha et savoir ce qui se passait de son côté mais cela s’avéra impossible les jours suivants…Andrei semblait prendre son rôle de père substitut très au sérieux et même sans s’en plaindre, elle ne pouvait trouver une seconde libre…de toute la journée… |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 19 Nov - 11:30 | |
| Entrevue avec Nate, entrevue avec Gérald, passage intermédiaire chez le meilleur bojoutier de sa connaissance, Justin était heureux de ces démarches. Il n’avait qu’une hâte : rentrer près de Sam et faire sa demande.
Pour un contretemps c’en fut un de choc. Il vit trente-six chandelles sans même savoir d’où le coup était parti. Avait-il pris la porte vitrée en pleine poire ? Ce sont des accidents qui arrivent tous les jours...
Il eut vaguement conscience d’être allongé sur une table et d’entendre la voix de Nate. Perdu dans un brouillard opaque, il ne distingua rien de précis. Il lui sembla pourtant entendre des sons harmonieux… des rires. Peu importait si on se moquait de lui, il se sentait bien. Du moins pendant un moment. Ensuite, il eut l’impression d’être parcouru par un puissant courant électrique. Ça chauffait rudement fort. Des os craquaient, des muscles se déchiraient. Il voulu hurler et que cesse la douleur, en vain. Puis, aussi subitement que la torture avait commencé, elle s’arrêta. Pantelant, Justin s’était relevé. Il ne savait pas où il était. Qu’importe.
Marcher, marcher, marcher…
Combien de temps erra-t-il sans but ? Il ne le réalisa que lorsqu’une voix résonna près de lui :
Ça va monsieur ? Je vous observe depuis un moment… le parc va fermer, vous devez circuler.
Le gardien n’était pas inamical. Il s’intéressait réellement à ce type qui squattait le banc depuis des heures à fixer… le vide.
Voulez-vous de l’aide ? Faut-il appeler quelqu’un pour que l’on vienne vous chercher ?
Je… Non merci ! Bien aimable à vous. Je vais rentrer… à pied.
Ses premiers pas furent hésitants. Où avait-il paumé sa béquille ? Quand il réussit à avancer sans bibeloter, il s’enhardit. La marche s’accéléra et devint course. À croire que des ailes lui étaient poussées soudainement. Hélas, la sensation de légèreté ne dura pas.
*Pas étonnant, ça fait des mois que tu ne cours plus !*
Que s’était-il passé ? On ne devient pas valide en en rien de temps après une si longue période d’inactivité !
*Alix ! Sa potion est vraiment miraculeuse !*
Ce n’était pas de gaieté de cœur qu’il avait accepté son marché mais pour rendre Sam heureuse, il aurait marché dans n’importe quelle combine. Elle demandait si peu en contrepartie ! Juste des renseignements sur Michael. Il se promit d’aller la voir le lendemain en remerciement du service rendu. Avec une jambe neuve, une énergie inédite, il se sentait capable de… n’importe quoi. D’abord, il devait en faire la surprise à Sam. Consultant sa montre, il s’effara. La nuit commençait à tomber. La pauvre devait se demander où il avait traîné… Le pire est qu’il n’en savait rien.
*Bah, elle sera si contente qu’elle oubliera tout le reste…*
Du moins, il l’espérait. Il prit un taxi pour le ramener chez eux. Après un détour chez le fleuriste, il fit jouer la clé dans la serrure et entra, joyeux :
Houhou ! Je suis là !
Cavalcade joyeuse dans l’escalier, Viviane et Flore se jetèrent sur lui avec des cris de sioux. Baisers, câlins, c’était chouette d’être reçu au bercail de cette façon :
Maman est là ?
Où veux-tu qu’elle soit ? Elle s’inquiétait…
M’en doute Viv… J’ai une tite surprise pour elle. Elle est au salon ? Remontez jouer, on vous appellera.
Les fillettes filèrent, il s’avança, bouquet de fleurs derrière le dos :
Coucou ma puce. Désolé du retard…
Comme prévu, de doux reproches fusèrent.
… Je n’ai pas perdu mon temps, tu sais. J’avais des décisions à prendre… D’abord, accepte ceci… c’est rien du tout*En comparaison à ce qui t’attend*
Il l’empêcha de bouger, s’occupant des fleurs qu’il disposa dans un vase dont il détrôna les précédentes.
Je suis d’abord passé chez le notaire et l’avocat. J’ai ensuite rencontré Nate… Je devais le faire, ma chérie. J’ai trop peur que tu te fatigues… Elle prendra les gosses pour te soulager… Non, je ne me suis pas amusé, pas du tout…
Il tut l’amertume qui le hanta en voyant la splendide bague de fiançailles qui ornait le doigt de Nate. Se tâtant la poche, il fut soulagé d’y trouver les contours de l’écrin…
Je suis ensuite passé à l’hôpital… Oui, j’ai vu ton père… j’sais pas s’il m’apprécie… En tout cas, il était ravi que je lui montre ceci…
A pas lents, il s’approcha de la belle allongée, s’agenouilla et lui présenta le petit coffret :
Il y a longtemps que j’aurais dû te le demander. Pardon d’avoir tardé : Sam, mon amour, veux-tu m’épouser ?
Le moins que l’on puisse dire était qu’elle le veuille. Le baiser époustouflant dont elle le gratifia, le transporta d’allégresse.
On fera ça en petit comité le plus vite possible, si ça te va. On mettra tout le tralala que tu veux quand le bébé sera né. D’accord ? … Pour le moment on fête ça, hein ?
Quelques bulles à passé six mois de grossesse ne nuirait pas à l’enfant. Guilleret à plus d’un titre, Justin s’éclipsa quelques minutes, esquissant involontairement un pas de danse que ne rata pas l’œil de Sam.
… Ben oui, je suis d’excellente humeur, pourquoi non ? … Ma jambe ?
Il feignit d’être tout surpris :
Je ne t’ai pas dit ? On doit ce miracle à Alix… Une de ses potions magiques ! … Je me sens… revivre, Sam ! C’est formidable !
Il ramena bientôt les flûtes pétillantes. Le couple tendrement enlacé se mit à bâtir des projets sur leur futur proche. La nuit fut épique… Très en forme, pour une fois, Justin refoula néanmoins ses ardeurs recouvrées de peur de fatiguer Sam qui délira pourtant… joyeusement.
Le lendemain, selon son habitude, Justin se leva tôt pour préparer le petit déjeuner familial. Alors qu’il cassait les œufs destinés aux pancakes trois lui échappèrent provoquant un beau gâchis dans la cuisine. Toute la confection du repas requit une énorme concentration alors que d’ordinaire, il faisait ça les yeux fermés :
*Tu pètes la forme d’un côté mais on dirait que t’as perdu la main ailleurs…*
Il ne s’en soucia pas plus qu’ainsi puisque, finalement, le résultat fut mangeable. Mettre les filles au courant des changements proches réclamait de la diplomatie. Tout en leur servant leurs crêpes – un peu brûlées, il est vrai – il claironna :
Papa et maman vont bientôt se marier ! J’espère que vous êtes contentes ! Vous serez de délicieuses demoiselles d’honneur. Il faudra aussi préparer vos valises aujourd’hui. Maman Nate et Andreï vont vous loger quelque temps.
Viv fronça les sourcils, perplexe :
Tu veux rester seul avec maman Sam en nous expédiant chez eux, si je comprends bien ?
Non ! s’empressa-t-il de rectifier, c’est pas ça. Vous savez que maman Sam a besoin de repos à cause du bébé…
Maman Nate va nous donner un petit frère. Ça l’empêchera pas, elle, de nous garder. D’après ce que je vois, tu nous jettes ! En plus, j’aime pas Andreï !
Flore en remit une couche en se plaignant copieusement de leur futur beau-père :
Il nous aime pas ! Il râle tout le temps. Il veut jamais jouer avec nous !
La moutarde piqua les narines de Davenport qui trancha brutalement :
C’est ainsi et pas autrement ! Quand le bébé sera né, ça changera. Mangez tant que c’est chaud.
Sam le regarda avec des yeux ronds tandis que les filles piquaient du nez dans leur assiette :
Ben quoi ? s’énerva-t-il. Faut dire les choses comme elles sont, non ?
Elle émit une remarque dont il se ficha, haussant les épaules et saisissant sa tasse de café. Il fit la grimace :
*Pas un bon jour aujourd’hui. Suis même pas fichu de faire un noir correct. Ai la tête ailleurs…*
Embrassant rapidement Sam, il dit :
T’inquiète pas. J’ai encore beaucoup à faire aujourd’hui. Je rentrerai sans doute tard… Oui, j’espère être là quand les gosses partiront. Bye.
Se remettre en forme semblait être une bonne idée. Si sa guibole le soutenait à merveille, les muscles environnants avaient sérieusement besoin de rééducation. La salle de sport visitée le fit suer copieusement l’heure qu’il y passa. Vraiment amusant cette séance. C’est fou le nombre de minettes qui hantait ces lieux… Ensuite, vanné mais heureux, Justin contacta le notaire afin de régler le mariage civil. Tout baignait, Sam deviendrait officiellement Mrs Davenport fin de la semaine suivante. Qui inviteraient-ils à cet événement ? Michael était au premier rang des familiers, quoique… La fuite d’Alix semblait avoir marqué son copain qui, à son tour, avait déserté les rangs. S’il se cachait… il se cachait bien. L’évocation de Mrs De Brent força Davenport à se souvenir de sa promesse. Un saut jusqu’en Ecosse ? Pourquoi pas ? Rapide, l’entrevue eut lieu dans la villa-cottage déjà visitée avant. Non sans lui jeter un oeil admiratif, chose très inhabituelle, il fonça:
Alix, je tenais à te remercier de ton intervention. Je suis enfin redevenu moi-même grâce à toi. Tu voulais que je te renseigne sur... ton mari ? Dis-moi ce dont tu te rappelles exactement. * En tout cas, je comprends son choix... cette femme est superbe*
Le tableau brossé à grands traits ne laissa pas l’ombre d’un doute à Justin : on avait forcé l’esprit d’Alix à accepter pour vrai un tas d’inepties. Devait-il vraiment remettre les pendules à l'heure de ce côté. Selon Michael Alix était quelqu'un de très... particulier... Mais un ami reste un ami. :
Michael… tire pas cette tête, tu dois t’habituer à son nom ! Michael n’est pas si mauvais que ça. Il t’adorait, te vénérait presque ! Mais… il est rancunier aussi ! Fais gaffe à ne pas le laisser poireauter trop longtemps… Non, sais pas où il est. Si tu veux le savoir, cherche-le toi-même. J’espère que ça ira mieux entre vous avant peu. On fêtera ensemble la venue de la petite et notre mariage avec Sam. Porte-toi bien.
Corvée accomplie !
Aussitôt arrivé, aussitôt parti, qu’importe ce que penserait Alix de son « aide » en retour de l’immense service rendu. Avait-il pour habitude d’être plus… généreux ? Cela le tracassa légèrement mais il passa outre. Avec tout ça, la matinée avait filé en coup de vent. Rentrer ? Pour faire quoi ? Tenir la main à Sam alors qu’il y avait tant de choses amusantes à faire ? Autant en profiter. Un restaurant de qualité le tenta. Il y était déjà allé avec Sam. Y déjeuner serait idéal. Il en profiterait pour établir un menu digne du mariage. Un petit transplanage, il y fut. Son entrée fut saluée à grands cris par le patron :
Mr Davenport ! Quelle joie de vous revoir dans mon humble établissement ! Que me vaut ce plaisir ?
Prenant un air mystérieux, Justin réclama l’aparté. La discussion ne fut pas longue. Pour fêter l’accord, le jeune homme se vit offrir un plantureux déjeuner au cours duquel il ne se priva pas de complimenter le service des demoiselles mises à sa… disposition. L’après-midi, il flâna dans la ville sans but précis. Aller à l’hôpital ne le tentait pas du tout. Par contre une envie irrépressible de visiter une armurerie se présenta. Il y passa un temps fou à la recherche d’un petit bijou personnel.
Lorsqu’il rentra enfin chez lui, il trouva la maison anormalement silencieuse.
Hé, ho ! Papa est là !
Pas de joyeuse cavalcade… Intrigué, il posa son paquet dans son bureau puis rejoignit Sam qui lisait au salon.
Bonsoir mon amour. Où sont les filles ? Pas déjà couchées quand même ? Il n’est pas si tard que ça !
La tirade que lui débita la jeune femme le décomposa :
…Comment parties ? Mais…
Il tombait véritablement des nues. Comment avait-il pu oublier qu’il devait les conduire chez Nate ?
… Qui les y a menés ?... Ah… Je… Je suis navré. J’aurais souhaité au moins leur dire au revoir.
Hier encore il en aurait ragé de déception. Là… Bah, il trouverait bien l’occasion de faire un saut chez Nate demain ou un autre jour. Chassant son petit abattement, il rit :
Nous voici donc presque seuls en amoureux, ma belle. As-tu dîné ? Je peux commander un truc ou réchauffer un plat congelé, si tu veux… Cuisiner ? Non ! J’ai pas envie ce soir. Tiens, en parlant cuisine, je suis passé « aux Balkans »… oui, le restau russe. J’y ai très bien déjeuné. J’ai parlé au patron, on a mis au point le menu des noces ! Tiens, lis-ça. Je vais commander des pizzas.
Il la laissa découvrir seule la liste des plats à proposer aux palais des invités. Son coup de fil passé, il revint au salon où Sam tirait une drôle de tête :
Qu’est-ce qui ne va pas ? Quoi, l’entrée ? Huîtres et vodka, c’est chouette, non ? … Ah… Je n’ai pas pensé à ça…
L’énumération des défauts du menu le scia. Reproche suprême : la Miss aurait voulu avoir son mot à dire quant à ces préparatifs. Pour un peu, elle s’emportait.
Pas la peine de me tirer la tête pour ça. Je téléphonerai à Dimitri pour annuler, pas grave. On paiera le dédit.
Bougon, il marcha de long en large devant un rayonnage de livres, en saisit un et s’assit dans un fauteuil à distance notable de Sam qu’il bouda en s’enfonçant dans la lecture. Si la jeune femme s’étonna de son choix livresque, il ne remarqua rien. Content de se plonger dans un roman historique, il ne le fut pas moins quand Sam vint lui arracher le bouquin. Elle voulait un câlin ? Il en avait des tas en réserve à lui donner.
Plusieurs jours s’écoulèrent ainsi. La liste restreinte des invités au mariage civil s’établit. La santé de Gerry s’améliorait, il serait de la partie. Puisque Sam semblait si heureuse d’organiser leurs noces, Justin ne demanda pas mieux que de la laisser se débrouiller… seule. Il se contenta de dire amen à tout ce qu’elle décidait. Souvent distrait à la maison, il la déserta fréquemment. Le jogging devint une passion. Lui qui n’en pratiquait que rarement avant… Il passait quasi tout son temps à s’endurcir physiquement. Sam insista pourtant à le voir participer davantage aux préparatifs car, si en temps normal Justin passait pour quelqu’un de très méticuleux des détails, on aurait pu jurer qu’il se fichait complètement de la prochaine réception. Chemin de table ? Robes des filles ? Fleurs ? Il s’occupa au moins du bouquet de la mariée.
Depuis qu’elle avait parlé avec Nate au téléphone, parfois il arrivait à la jeune femme de le regarder avec insistance, comme si quelque chose clochait chez lui. Agacé, il préférait se taire que de se lancer dans des discussions houleuses. Le pire est qu’Il ne se rendait même pas compte des changements opérés en lui. Son romantisme inné s’était évaporé, il ne prenait plus aucun plaisir à cuisiner, un rien l’énervait. Il avait changé d’eau de toilette, utilisait le rasoir électrique et non plus le rabot ? Et alors ? Sam ne se plaignait pas… trop. Donc, la vie était belle.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Dim 21 Nov - 14:53 | |
| Pour Sam rester au repos représentait un sacrifice énorme. Elle était d’un naturel actif, trop, pour accepter mollement le fait de devoir rester enfermée à la maison, à …ne rien faire. Justin s’était, comme d’habitude, chargé de tout pour lui rendre la vie fastueusement facile. Pas bouger le petit doigt, seulement ouvrir la bouche et exprimer un désir. L’arrivée des enfants l’avait comblée de joie. Elle s’en voulait un peu de chambouler la vie des grandes, juste avant de leur rentrée scolaire mais Justin avait assuré qu’il n’y aurait aucun problème, à leur âge on pouvait rater deux ou trois mois de classes, sans s’en ressentir le moins du monde. Viviane et Flore étaient ravies de pouvoir être avec elle et ne trouvèrent rien à redire sur abandonner, pour un bout de temps, leur petite cour d’admirateurs bermudiens. Les jumeaux grandissaient à vue d’œil, chaque jour plus bavards, inquiets, espiègles, petits complices parfaits qui la comblaient de bonheur. Seule la stricte vigilance de Mrs. Pimms réussissait à freiner ses élans de fol amour maternel, de les prendre dans ses bras et le dévorer de baisers en les entendant rire comme des petits fous ! Les jours passant, les craintes de Sam s’étaient apaisées. Son optimisme naturel avait repris le dessus. Après tout, pensait elle, Andrei était certainement trop occupé avec sa rouquine, leur bébé et sans doute les préparatifs de leur mariage comme pour s’occuper d’elle ou de perdre le temps à faire des calculs approximatifs. Pleine d’entrain, malgré les véhéments conseils de cette chère Lavinia, elle cherchait en quoi occuper son temps, déplorant ne pas avoir de chambre à décorer. Cela aurait été ridicule, puisque à peine le bébé né, ils rentreraient aux Bermudes où était fixée leur résidence. Bien entendu, elle s’en occupait à distance et cassait les pieds de la décoratrice, via Internet. Mrs.Pimms, femme pratique, l’initiait aux joies du tricot, mais Samantha était impatiente et passer des heures à la confection d’un chausson n’était pas son idéal pour passer le temps. La cuisine demeurait son passe temps favori mais cela signifiait être trop de temps debout et elle se faisait, immanquablement, renvoyer squatter le divan.
Ce matin là, Justin était parti de bonne heure, après le petit déjeuner. Il avait un emploi de temps assez chargé pour la journée. Avec un soupir, elle l’avait vu s’en aller en se demandant comment allait se passer la rencontre entre son chéri et ce cher Gerry. Mais celui là n’était pas son seul tracas…en fait, savoir que Justin avait donné rendez vous à son ex pour lui demander de s’occuper un temps des enfants, la mettait mal à l’aise. Elle n’avait pas parlé avec Nate après leur casuelle rencontre, quelques jours auparavant. La proposition alors faite par la rousse ex Davenport la taraudait. Elle, bien entendu, n’avait pas osé en faire part à Justin de cette idée, croyant connaître d’avance quelle serait sa réaction. De toute façon, il semblait aller chaque jour mieux…ou était son imagination qui lui jouait des tours ? La matinée se passa rapidement. À peine si, entre le babil des jumeaux et les rires des grandes, Sam remarqua l’absence de son chéri. Elle voulait initier les filles à l’art de la cuisine et avait passé des heures délicieuses à préparer, avec Viv et Flore, des petites recettes faciles, auxquelles les enfants pouvaient donner un bon coup de main. Flore avait hérité le talent de son père. Viviane, elle, penchait plus pour le plaisir de tout goûter, un peu comme sa mère. Après le repas, sieste obligée. Elle ne rechigna pas, la fatigue se laissait sentir et se reposa volontiers pendant une paire d’heures avant de rejoindre les fillettes pour regarder des films en DVD. À sa demande, Mrs. Pimms amena les jumeaux et resta avec eux, tout en regardant d’un œil distrait les aventures de la petite sirène et tricotant à toute vitesse, le tout sans perdre détail de ce que faisaient les deux petits chenapans. Entre film et film, l’après midi se passa tranquillement. Mrs. Pimms avait accommodé des coussins sous ses jambes et était partie s’occuper des jumeaux. Sam jeta un coup d’œil à sa montre. La troisième fois en moins de dix minutes.
*Qu’est ce qu’il peut tarder !*
Viviane n’avait pas raté son petit manège. Elle s’approcha et l’embrassa bruyamment sur la joue.
Tout va bien, Maman ?
Oui, mon cœur…tout va très bien, je me demandais seulement où peut être passé ton père !
La fillette sourit, sincèrement ravie.
C’est si beau que tu aimes tant Papa.
Je ne vois pas pourquoi ça t’étonne…ton père est merveilleux !
*Merveilleusement distrait, oui…le téléphone, ça sert à quelque chose, non !?*
Il se faisait tard. Sans trop d’appétit, pour une fois, Sam dîna légèrement, en compagnie de Viv et Flore qui se montraient bavardes et enjouées, faisant tout pour la distraire de l’absence de leur père chéri. Retourner dans le diva ne la ravissait pas…mais avait-elle quelque chose de mieux à faire ? Le livre choisi ne parvint pas à éviter que ses pensées s’en aillent en vadrouille. Puis enfin, la clé tourna dans la serrure.
Houhou ! Je suis là !
Coup d’œil à l’heure. Sam soupira, soulagée mais aussi un tantinet agacée. Elle entendit les filles galoper dans l’escalier pour sauter au cou de leur Papa chéri à grand renfort de cris ravis. D’instinct, elle mit un peu d’ordre dans ses mèches folles puis reprenant son bouquin feignit de le trouver très intéressant, non sans tendre l’oreille, questions et réponses lui parvinrent, la faisant sourire.
Maman est là ?
Où veux-tu qu’elle soit ? Elle s’inquiétait…
Adorable Viviane, elle mettait les pendules à l’heure, à sa façon.
Coucou ma puce. Désolé du retard…
Soupir. Elle posa son livre et le considéra, avec un rien de censure.
Tu as vraiment tardé…Je me préoccupais. Des problèmes ? J’espère que pas avec Gerry…
Adorable comme toujours, il donna des explications, comme quoi il avait eu une journée chargée, des décisions à prendre et Dieu sait quoi d’autre, le tout avant de tirer, comme un magicien, un magnifique bouquet de fleurs de derrière son dos.
D’abord, accepte ceci… c’est rien du tout !
Sam eut à peine le temps de humer le bouquet, déjà il le lui reprenait et s’occupait, fébrile, de le mettre dans un vase, sans arrêter de parler.
Je suis d’abord passé chez le notaire et l’avocat. J’ai ensuite rencontré Nate…
Elle ne put pas s’empêcher de soupirer, assez bruyamment.
Ah bon ?
Je devais le faire, ma chérie. J’ai trop peur que tu te fatigues…
C’était mignon tout plein de sa part, mais personnellement, elle aurait préféré n’avoir de dettes, de la classe qu’il soit, avec la rouquine infernale et son ex, à elle.
On pourrait s’arranger, quand même…avec Miss O’Higgings et Mrs. Pimms…et le reste…
Mais il avait son idée bien précise et continua, comme si rien.
Elle prendra les gosses pour te soulager.
Sam ne voulut même pas s’imaginer à quoi avait ressemblé cet entretien, mais si on tenait compte du petit air mitigé, que Justin essayait de dissimuler, elle supposa que cela l’avait affecté plus que voulu. Le plus sûr est que Nate n’ait pas ménagé d’efforts pour lui faire savoir qu’Andrei l’avait demandée en mariage. Nouveau soupir.
Et alors…Ça a été ?
Non, je ne me suis pas amusé, pas du tout.
Ça, elle pouvait très bien le croire.
Je suis ensuite passé à l’hôpital…
Oups ! Une autre paire de manches !
Tu as parlé avec Gerry…qu’a-t’il dit ?
*Le connaissant, il faisait la tête, pour commencer !*
Pas tort de se faire des idées.
Oui, j’ai vu ton père… j’sais pas s’il m’apprécie…
Sam sourit, attendrie.
Mon chéri, il ne te connaît pas, donne lui du temps…Il t’adorera, j’en suis sûre.
Avec une mine de chat satisfait, Justin s’approcha et s’agenouilla, sur le tapis, tout près d’elle.
En tout cas, il était ravi que je lui montre ceci…
Et de lui mettre un écrin devant les yeux. Le cœur de Sam rata un battement avant de repartir à toute vitesse. D’une main tremblante, elle souleva le couvercle et resta muette, en contemplant la superbe bague qui reposait sur le velours sombre.
Il y a longtemps que j’aurais dû te le demander. Pardon d’avoir tardé : Sam, mon amour, veux-tu m’épouser ?
Impossible de dire un mot. Un nœud d’émotion sans pareil lui serrait la gorge, lui jeter les bras au cou et l’embrasser à en perdre haleine, lui sembla une aussi bonne réponse que le dire de vive voix. Quand il passa le fastueux bijou à son annulaire, Sam flottait sur un nuage de bonheur parfait. Lui, faisait des plans.
On fera ça en petit comité le plus vite possible, si ça te va. On mettra tout le tralala que tu veux quand le bébé sera né. D’accord ? … Pour le moment on fête ça, hein ?
Tout ce qu’il voudrait ! Avec une agilité inespérée, Justin se redressa et d’un pas sans hésitation se dirigea vers la salle à manger.
*Mais voyons…c’est quoi, ça ? Il marche…sans boiter…Tiens, il danse maintenant !? Oh, mon Dieu…elle l’a fait ! *
Chéri…ta jambe ? Elle ne…te dérange plus ?
Il joua les surpris et embraya vite fait avec une explication.
Je ne t’ai pas dit ? On doit ce miracle à Alix…
Alix ? La femme de Michael ? Mais…co…comment ?
Ça ne collait pas du tout avec sa petite idée. Que venait faire Mrs. De Brent dans toute cette histoire ? En plus, n’avait elle pas déserté son foyer et était partie Merlin sait où ?
Une de ses potions magiques ! … Je me sens… revivre, Sam ! C’est formidable !
Aucun doute sur cela. Elle poserait des questions plus tard, là, aucune envie de se gâcher ce moment de parfaite félicité.
Des plans, Ils en avaient. Bien sûr, tout était un peu freiné par l’imminente arrivé de Bébé, on devrait prendre les choses avec du calme, ce qui n’empêchait en rien de tout bien faire. Tous deux étaient des perfectionnistes…donc…
Mais le moment n’était pas à penser à la liste d’invités ni au menu…ni à rien d’autre qu’à cette délicieuse fièvre qui s’emparait d’eux. Sam oublia tout, quand son chéri, plein de fougue la souleva dans ses bras et l’emmena à l’étage. Merveilleux délire !
Mais on n’en avait pas fini, avec les surprises.
Ça commença avec le petit déjeuner. Sam se réveilla, comme d’habitude ces derniers temps, affamée. L’idée de glorieux pancakes la faisaient presque saliver en descendant rejoindre la famille.
*Hein ? Ça ne sent pas comme toujours ? Zut…on dirait qu’il y a du cramé, là ! Seigneur…c’est quoi cette catastrophe !?*
En effet, la cuisine ne montrait pas l’ordre étincelant auquel elle tenait tant, bien au contraire, tout semblait un peu sens dessus dessous, il y avait des éclaboussures suspectes et même des traces d’œuf sur le carrelage…
Et puis le café ! Seules les bonnes manières tant rabâchées, évitèrent que Sam recrache la première gorgée de ce breuvage, qu’on pouvait qualifier d’infect, comparé au délicieux noir que préparait habituellement Justin.
Les pancakes étaient à peine mangeables. Les petites tiraient des drôles de têtes et échangeaient des regards stupéfaits avec Sam, qui ne trouvait pas d’explication valable pour ce chaos culinaire et si cela avait été seulement ça…Ce n’était pas seulement les habiletés comme chef coq qui semblaient avoir pâti…la diplomatie en avait pris un sacré coup, aussi.
Papa et maman vont bientôt se marier ! J’espère que vous êtes contentes ! Vous serez de délicieuses demoiselles d’honneur. Il faudra aussi préparer vos valises aujourd’hui. Maman Nate et Andreï vont vous loger quelque temps.
Sam faillit s’étrangler avec un bout de crêpe. C’était quoi cette façon d’annoncer les choses à ses enfants ? Ça ne ressemblait pas du tout au Justin si délicat, si…Justin.
Viviane na tarda rien à réagir, surprise et vexée.
Tu veux rester seul avec maman Sam en nous expédiant chez eux, si je comprends bien ?
Samantha posa ses couverts et prêta oreille attentive.
*Voyons…voyons !*
Il fut rapide à la rectification même si ça ne convainquit pas ses filles.
Non ! C’est pas ça. Vous savez que maman Sam a besoin de repos à cause du bébé…
Définitivement, Viv, n’avait pas la langue dans sa poche, elle devait tenir la virulence du côté maternel. Le pire est que la gamine avait juste raison.
Maman Nate va nous donner un petit frère. Ça l’empêchera pas, elle, de nous garder. D’après ce que je vois, tu nous jettes ! En plus, j’aime pas Andreï !
*Oups et toc…*
Flore ne voulait pas être en reste, aussi elle ajouta son avis, en décrivant à la perfection leur futur immédiat avec le fiancée de leur mère chérie :
Il nous aime pas ! Il râle tout le temps. Il veut jamais jouer avec nous !
Ma chérie…, voulut intervenir Sam mais déjà Justin la devançait, dans un style novateur qui démentait vertement son esprit normalement conciliant.
C’est ainsi et pas autrement ! Quand le bébé sera né, ça changera. Mangez tant que c’est chaud.
Je t’en prie, souffla Sam.
Ben quoi ? Faut dire les choses comme elles sont, non ?
Outrées, les deux fillettes se levèrent et filèrent s’enfermer dans leur chambre.
D’un geste plein d’humeur, Samantha posa sa tasse et le dévisagea. Monsieur se montrait caractériel ? Elle pouvait aussi, au cas où.
Je ne sais pas ce que tu as ce matin…mais…franchement c’est un peu exagérer, là…
Comme si elle parlait au mur. Il l’ignora allègrement et avala son café en faisant une grimace, avant de se lever et lui donner un baiser de rien du tout, en disant :
T’inquiète pas. J’ai encore beaucoup à faire aujourd’hui. Je rentrerai sans doute tard.
Tu n’oublies pas les enfants, chéri ?
Oui, j’espère être là quand les gosses partiront. Bye.
Sans plus. Il s’en alla, comme si l’affaire n’était pas avec lui.
*Mais quelle mouche l’a piqué, celui là ? Il retrouve l’usage de sa jambe et perd ses manières…c’est ridicule…Quelque chose ne tourne pas rond, ici !*
Elle eut toute la journée pour y penser à loisir. Justin ne donna pas la peine de prendre de ses nouvelles, alors que jusque là, il avait été plein de prévenances. Décidément, cet homme à facettes inespérées, déconcertait Sam. Mais le moment n’était pas à penser à cela, il fallait d’abord consoler les petites, qui se faisaient un sang d’encre à l’idée de partir chez leur mère. Se retrouver confinées en compagnie d’Andrei était très loin de les rendre heureuses.
Mais voyons, mes anges…n’y allez pas en pensant au pire…qui sait ? Peut être qu’Andrei vous fera une surprise…
*Ça, c’est sûr…c’est un artiste pour les surprises, celui là !*
Bien sûr, Viviane et Flore savaient assez bien à quoi s’attendre.
Il n’y a que Tony qu’il aime bien !, assura Viv, mitigée.
*Ah bon…ben…euh…c’est déjà ça!*
Maman…c’est vrai que tu le connais bien…lui ?
La belle question de Flore.
Oui, ma chérie, je le connais bien…très bien même. Tu sais, Andrei et moi…
Il était son mari avant !, expliqua Viv, mais Maman a préféré notre Papa parce qu’il est…
Papa !, ajouta Flore, très sérieuse, comme si cela expliquait tout.
Sam soupira.
Oui, c’est bien comme ça…mais maintenant occupons nous plutôt de choisir ce que vous voulez emporter. Flore, ma chérie, tu n’as pas besoin d’embarquer toutes tes poupées…Vivi…je ne pense pas que ce gros manteau va te servir…il fait encore chaud…mais non, voyons, nous rentrerons à la maison avant qu’il ne neige…Je le promets !
On pourra venir te voir ?
Mais bien sûr…je ne vois pas pourquoi vous ne pourriez pas.
Et si Maman Nate ne veut pas ?
*Le plus sûr, d’ailleurs !*
Si ta Maman ne veut pas et bien il faudra lui obéir, ma puce…elle aura ses raisons en plus, elle veut vous avoir pour elle toute seule…Elle vous aime beaucoup !
À la comme on peut, elle finit par convaincre les enfants que ce temps chez leur mère serait comme des vacances, qu’en mettant un peu de leur part, tout irait bien. Du moins, c’est ce qu’elle souhaitait de tout cœur. Peu après, en jouant avec les jumeaux, Sam se demanda que deviendrait elle quand ils ne seraient pas là.
*Faudra chercher quelque chose à faire, ma vieille! *
Au moins, les prochains jours, ils auraient de quoi s’occuper. Leur mariage se ferait en petit comité mais cela ne voulait pas dire que ce serait de l’improvisé.
À l’heure stipulée pour emmener les enfants chez leur mère, Mr. Davenport n’avait pas toujours donné signal de vie. Le cœur serré, Sam n’eut d’autre recours qu’organiser elle-même le départ. Miss O’higgins assura qu’elle n’aurait aucun mal à s’arranger avec les jumeaux. Les fillettes boudaient ferme.
On voulait que Papa nous y emmène…Il pourrait casser un peu la figure à Andrei pour qu’il sache à quoi s’en tenir, déclara Flore, qui était d’humeur batailleuse.
Personne ne va casser la figure à personne, ma chérie…
*En plus, je ne voudrais pas voir ça…oh, non !*
Soyez gentilles et sages…Oui, vous pouvez me téléphoner quand vous voudrez. Oui, mes anges, si ça ne va pas…j’irai moi-même vous chercher.
Elle les embrassa en faisant des efforts pour ne pas pleurer, ce qui ne lui réussit pas trop au moment de prendre congé des jumeaux…Pas à dire, depuis un temps, elle avait la larme facile ! Quand la voiture se perdit au tournant, Mrs. Pimms, toujours fidèle au poste dut la consoler de son mieux.
Allons…allons ! Ils vont chez leur mère, tout ira bien !
Même si elle avait des sévères doutes à ce respect.
Morose, Sam alla s’installer dans le divan. Regarder la TV ne lui disait rien, lire, non plus. Bouder un peu était presque obligatoire, elle s’y prit en toute joie de cœur.
Hé, ho ! Papa est là !
*Pas trop tôt !*
Seulement deux heures de retard. Elle l’entendit aller à son bureau puis revenir la trouver au séjour. Sam prit son livre et s’acharna à sembler fascinée par la lecture.
Bonsoir mon amour. Où sont les filles ? Pas déjà couchées quand même ? Il n’est pas si tard que ça !
Là, elle n’y tint plus. Posant son livre, sans dissimuler son agacement elle dévisagea son futur mari.
Pas si tard que ça ?..Imagine toi, que c’est plutôt trop tard. Les enfants devaient être chez Nate à 17 heures…tu ne t’en souviens plus ? Et bien…ils sont chez Nate, comme tu as toi-même convenu. Je les y ai envoyés avec O’Higgings…
Il eut la bonne grâce de sembler consterné.
Ah… Je… Je suis navré. J’aurais souhaité au moins leur dire au revoir.
Aurait fallu y penser avant mais vraisemblablement, tu étais trop occupé pour ça !
Il ne fit même pas attention à son ton sarcastique et se trouva l’esprit de rigoler. Sam fronça les sourcils.
*Mais qu’est ce qu’il a ?...Il devrait quand même être déçu…mais non… !*
Absolument pas…bien au contraire, il semblait ravi.
Nous voici donc presque seuls en amoureux, ma belle.
On dirait, oui…
As-tu dîné ?
Je t’attendais…comme d’habitude.
La suite la stupéfia.
Je peux commander un truc ou réchauffer un plat congelé, si tu veux.
*Commander un truc ? Plat congelé ?...Il est tombé sur la tête ou quoi ?*
Mais, mon chéri…j’avais pensé que…ce serait sympa si on faisait un peu la cuisine…
Normalement, il adorait cette idée mais là…
Cuisiner ? Non ! J’ai pas envie ce soir. Tiens, en parlant cuisine, je suis passé « aux Balkans ».
Là, elle fronça un peu le nez.
Ah !...C’est bien ce restaurant soi disant russe avec nom bulgare…enfin…
Et l’autre de continuer, comme si rien.
Oui, le resto russe. J’y ai très bien déjeuné. J’ai parlé au patron, on a mis au point le menu des noces ! Tiens, lis-ça. Je vais commander des pizzas.
Ça allait de mieux en mieux. Commander des pizzas ? Elle aurait juré que Justin Davenport ignorait que cela existait…le service de livraison de pizzas à domicile !
J’en veux avec des anchois !, claironna t’elle, et beaucoup de fromage !!!! Hum !
Elle fulminait toute seule. Faute de mieux, elle jeta un coup d’œil à la liste qu’il lui avait fourrée dans les mains.
*Il est dingue de chez dingue, celui là…D’où sort il des idées pareilles !?*
« Caviar sur blinis à l'aneth en tradition, ukha d'esturgeon et de saumon parfumé à l'anguille fumée; déclinaison de harengs et de betterave rouge à l'aigre-doux , chou farci à l'espadon, esturgeon et caviar, côtelettes pojarski truffées, sarrasin aux petits légumes d'hiver; pour les desserts une Vattruchka à l'écrasé de fruits rouges ainsi qu'un Grand Opéra praliné-chocolat. »
L’alternative proposée faillit la faire rire…pour ne pas écumer de rage.
« bortsch accompagné de trois pirojkis, d'une anguille fumée aux oeufs de saumon, d'un koulibiac de saumon, coulis de homard et st-jacques grillée, d'un marcassin des golutsy à la kacha et champignons… »
Et encore…
« Choux farcis aux langoustines et volailles, caviar Osciètre, un pavé d'esturgeon poêlé pommes maccaires aux asperges vertes et jus truffé au Tokay, une poule faisane à la broche avec des betteraves cuites au goût fumé, des chèvres frais demi-sec et Pavlova aux fruits exotiques. »
Et pourquoi pas huîtres et Vodka pour l’entrée !?!?, se sulfura t’elle, sitôt son chéri de retour.
Qu’est-ce qui ne va pas ? Quoi, l’entrée ? Huîtres et vodka, c’est chouette, non ?
Chouette !`Chouette !? Tu penses inviter qui !? La colonie russe en exil ? C’est du pur soviet, pas que j’ai quelque chose contre les russes…mais pour si jamais tu ne t’en souviens plus…mon ex mari l’est à moitie ! Tu ne crois pas qu’il pourrait penser que la nostalgie me tue…tant et si bien que je mange russe à mon mariage !?
Ah… Je n’ai pas pensé à ça…
Et bien, on dirait qu’il y a plein de trucs auxquels tu ne penses pas…Des choux farcis !? Du bortsch ?...De ma vie, on ne servira une poule faisane à la broche, s’il vous plaît avec des BETTERVES CUITES…au goût fumé, à une table de mariage…ni nulle part ailleurs…je déteste les betteraves…en plus, ce n’est pas élégant ! La seule chose que je peux retenir est le caviar sur blinis…et encore !
Elle sentait la moutarde lui monter dangereusement au nez mais s’obligea à se calmer un peu, ce qui ne fut pas du plus réussi.
Pas la peine de me tirer la tête pour ça. Je téléphonerai à Dimitri pour annuler, pas grave. On paiera le dédit.
Sam haussa les épaules. Il boudait. Tant pis, elle aussi. Il choisit un livre et alla s’asseoir dans un fauteuil, loin d’elle. Grand bien lui en fasse. La sonnette retentit au bout d’un moment, Jenny, la petite soubrette alla ouvrir puis se présenta au séjour, l’air un peu confus.
Madame…les pizzas sont là !
Justin ne bougea pas d’un poil…perdu dans son roman…
*UN roman ? Et depuis quand il lit des romans historiques…définitivement, cet homme a un problème*
Elle se leva et alla recevoir la fameuse commande. Le fumet était alléchant et Sam adorait la pizza, autant en profiter.
Apportez nous du Coca Cola, Jeny…Des assiettes ? Mais non, voyons…pas besoin !
Elle déposa les cartons sur la table du séjour. Alluma la TV et se dirigea vers Monsieur qui lisait toujours. Sans manières, elle lui prit le livre des mains.
Et non…je ne veux pas un câlin…je veux manger ma pizza. C’est servi !
Du jamais vu chez Davenport. Pizza en carton, Coca Cola avec plein de glaçons. Avec les doigts, s’il vous plait et en regardant la TV.
On fait comme ça, chez moi, en Amérique…sais pas ce qu’ils font, les russes !
La pizza était succulente et finit par faire oublier à Sam ses déconvenues avec les menus russes. Elle s’appliqua donc à faire que Justin oublie aussi sa saute d’humeur.
Les jours passant, la jeune femme ne put que remarquer des choses qui la troublèrent beaucoup. Justin avait changé. Au tout début, c’était assez imperceptible pour un œil non exercé mais le sien, il était exercé, pas à dire. Du jour au lendemain, Justin devint fan du jogging, comme s’il s’entraînait pour courir le marathon. `Lui, qui était si regardant au détail…devenait distrait ou avait perdu tout intérêt, ce qui était substantiellement préoccupant. Il fallut déployer des trésor de charme…et patience, pour établir une simple liste d’invités.
Bien sûr que Gerry sera des nôtres ! Quelle question…Anastasia aussi, je ne vais pas inviter mon père et pas sa femme, voyons. Que devient Michael ? Je sais que tu veux qu’il soit là ?...Ah bon ! Il a disparu !?...et tu me le dis si…tranquillement !? Personne n’a idée d’où le trouver ? Mais Justin…voyons…c’est ton meilleur ami…
Il n’y pouvait rien. De Brent était assez dégourdi pour se débrouiller tout seul. Point barre.
*Oups…ça devient grave, là !*
Bon…passons…Lavinia sera là… Non, je ne pense pas que ton ex femme voudra se joindre à nous ? Tu veux pas qu’Andrei soit ton témoin, tant que tu y es !?...Mais Justin…qu’est ce qu’il se passe avec toi ?...Non, chéri…je te trouve…euh…un peu bizarre, c’est tout…Mais non, voyons, je suis heureuse…
Oui. Elle l’était mais rien ne lui ôtait de la tête que quelque chose clochait ferme, la. Se désintéressant de tout, il la laissa s’occuper de tous les préparatifs, s’accommodant royalement à donner un avis distrait et encore, fallait il insister pour qu’il y arrive.
Cette après midi, trois jours avant le mariage, Sam n’y tint plus. Justin, comme d’habitude, n’était pas à la maison. Elle sauta sur l’occasion. Un instant plus tard, elle avait une Nate ravie au bout du fil. On échangea les politesses de rigueur, questions sur les enfants.Tout baignait. Andrei était allé au cirque avec les filles. Incroyable.
Ah bon…qui l’aurait cru. Ils s’entendent bien ? Mais c’est merveilleux, ça ! Oui, Viv et Flore n’étaient pas si convaincues que ça…Andrei a changé ?...Bien que tu le dises…parce que là…Justin aussi. Drôlement. Oui…je me doutais bien que c’était toi…Non, il a insisté que c’était Alix…je ne sais pas quelle potion…En quoi ?...En tout !...
Et de raconter tous les changements observés. De son côté, Nate la mit au courant des bouleversements survenus chez Andrei.
Euh…sais pas mais je commence à croire que…quelque chose de bizarre s’est passé lors de ta cérémonie de guérison…c’est comme…Seigneur…si on y pense bien…si Andrei chante sous la douche et Justin devient accro du sport…Nate…je crois que…les personnalités de nos…maris…ou presque ont…fusionné… je ne sais pas si c’est possible…mais je ne fais que me remettre aux évidences…
Ce fut une longue conversation qui les mena à des conclusions très révélatrices…et quelque peu angoissantes. Qui était Justin au juste ? Pas que le résultat lui déplut…mais plus elle l’observait et plus elle trouvait en lui des attitudes propres à …son ex. Or, d’après ce que lui avait dit Nate…il en allait de même avec Andrei…Viviane et Flore corroborèrent joyeusement cette idée. Elles ADORAIENT leur futur beau-père…
C’est le monde à l’envers…
Tout se déroulait comme prévu. La cérémonie, très intime, fut émouvante, malgré tout. Gerry semblait heureux avec ce nouveau gendre. Cela suffisait pour Sam. La réception eut lieu dans un restaurant, pas russe du tout et on ne servit pas de caviar !
On en était à un nouveau tour de toasts portés à la santé des mariés quand Sam sut que, contre toute prévision, le moment était arrivé. Ne voulant affoler personne, elle fit à son amie Lavinia signe de s’approcher.
Lav…ça y est !
Pour la discrétion, on pouvait compter sur elle.
Mon Dieu…le BÉBÉ !!!
La belle pagaille. Justin en perdait les moyens. Gerry eut des palpitations, la Princesse craignit le pire. Tout le monde donnait son avis. Le gérant du restaurant songea, rationnellement, à appeler les secours.
Je ne veux pas accoucher ici !, plaidait Sam.
Il s’en fallut de peu. L’ambulance n’eut même pas le temps d’arriver à la clinique choisie. Sam, très élégamment et sans majeur souci, mit au monde une adorable fillette à la frimousse fripée. Lavinia pleurait à chaudes larmes. Justin, qu’on n’avait pas laissé monter dans l’ambulance eut la surprise de sa vie quand, arrivés à bon port, Lav, toujours en larmes, se jeta à son cou et le gratifia d’une bise bruyante.
Félicitations…Madelyne est là…oui, grand bêta…ta fille est née en chemin.
Un instant à seules avec son petit trésor serré contre son cœur, Sam pleura de gratitude, de bonheur…de remords.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Jeu 25 Nov - 12:22 | |
| Pouvait-on changer aussi radicalement de comportement en quelques jours ? Il fallait croire que oui. D’abord Andreï se surprit lui-même à entonner des arias sous la douche. D’aussi loin qu’il se souvienne, cela ne lui était jamais arrivé. Pas qu’il n’aimât pas chanter mais… D’ailleurs Nate elle-même paraissait autant sidérée qu’amusée en l’entendant. Les suites ne furent pas tristes non plus quoique forçant son propre étonnement. Aimait-il les enfants de Nate ? À franchement parler… non ! Il était prêt à supporter son futur fils mais de là à s’encombrer de 4 mioches en sus… la marge est large. Le petit Anthony lui plaisait, il ne pouvait le nier. Celui-là avait un caractère enjoué, l’esprit vif. Andreï adorait le faire rigoler. Philip était plus taciturne, quant aux filles, c’étaient des pestes, selon lui. Alors pourquoi se sentait-il si émoustillé à l’idée d’avoir à s’occuper de cette nichée inattendue ? Quand elle débarqua en compagnie de leur nounou, directement, il attrapa Tony, et le souleva haut dans les airs. Ravi, le gamin rigola. Pour ne pas demeurer en reste, il flatta la joue du jumeau puis se baissa pour embrasser les fillettes qui, aussitôt se réfugièrent dans les jupes de la nurse. Celle-ci le contempla avec un sourcil en accent circonflexe, se gardant de commentaires. Lui, il rigola :
Allez, les filles ! Je ne vais pour vous manger : vous êtes bien trop maigrichonnes ! Et si on allait ranger vos affaires ?
Il fourra les garçonnets dans les bras de Nate, prit les valises et monta à l’étage.
Pour les lits, vous faites comme d’habitude ? Viv à gauche, Flore à droite ?
Les gamines s’entreregardèrent semblant se demander comment ce type savait ce détail. Comme s’il avait fait ça toute sa vie, d’un coup de baguette, Andreï expédia les vêtements en bon ordre se placer dans la penderie.
Vous voulez voir la chambre de votre nouveau petit frère ?
Les fillettes allaient de surprise en surprise. Curieuses, bien sûr, elles acceptèrent. Sanders leur ouvrit la porte et jaugea l’intérieur, mitigé :
J’aime pas trop la déco. Votre maman n’a pas l’air de savoir ce qu’elle veut…
C’est toujours papa qui règle ça, affirma Viviane sur un ton revanchard. Il sait tout faire, lui !
Eh bien cette fois, on s’y collera ensemble, qu’en dites-vous ?
Était-ce bien lui qui venait de débiter ça ? Andreï tiqua, secoua la tête puis pensa à autre chose :
Vous avez pris votre goûter ?...Oui ? Ah… Qu’est-ce qui vous plairait de manger ce soir ?
Bof… dit Flore en haussant les épaules. Maman Nate commandera par téléphone. On a fait plusieurs fois la cuisine avec maman Sam, c’est toujours bon…
Il avait pâli, malgré lui.
Sam… Samantha va bien ?
On adore ton ex-femme qui nous le rend bien ! Elle et papa s’aiment beaucoup, ils vont se marier bientôt. On sera demoiselles d’honneur.
La petite vipère avait tapé juste, ça lui fit très mal. Il chassa sa peine et reprit un ton enjoué :
Si elle est heureuse et qu’elle va bien, c’est ce qui compte. On descend ? Aura un gage le dernier arrivé en bas !
Terrifiées à l’idée de ce que pourrait être le gage en question venant de croquemitaine, les gamines obtempérèrent au quart de tour. Il aurait pu tricher en transplanant mais leur laissa l’avantage de la course. Leur soulagement était palpable. Faussement marri, il demanda :
Qu’est-ce que ces demoiselles vont me faire faire en pénitence ?
Le conciliabule des fillettes le fit marrer. Elles semblaient douter de sa bonne foi, cherchant un piège quelconque à travers ses propos.
On peut vraiment, vraiment, te demander de faire ce que l’on veut ?
Du moment que ce n’est pas dangereux, oui ! Croix de bois croix de fer, si je mens je vais en enfer !
Viv et Flore hésitaient encore.
A… Alors, fit Flore en réfléchissant… fais… fais la poule !
Ouiiiiiiii ! rigola sa sœur. Une grosse poule qui court après ses poussins.
Et Andreï de se mettre à gonfler le torse, agiter les coudes à l’avenant en émettant des caquètements très éloquents tout en trottinant dans le couloir.
Les gamines hurlèrent de rire au point que, alertées par le raffut, Nate et Mrs O’Grady pointèrent un nez ahuri à la porte. Le spectacle devait valoir des gallions, les jumeaux applaudirent. Nate paraissait prête à s’étouffer tandis que Philip réclamait :
Encore !
Après une autre démonstration, s’essuyant les yeux dégoulinant de larmes, Sanders hilare rassura Nate :
Non, suis pas fou ! On ne m’a pas jeté de sort non plus. C’est une blague entre les filles et moi.
Même si Nate tombait des nues, en tout cas, la glace était bel et bien brisée.
Les jours se succédèrent en toute quiétude. Il ne fallait pas s’attendre pour autant à ce que Sanders se transforme en pitre permanent. Les filles, au moins, ne le regardaient plus avec appréhension quand il haussait le ton pour rectifier leurs bêtises. Comme tout gosse qui se respecte, elles tentèrent de le pousser à la limite de ses patiences, histoire de vérifier l’étendue de leurs pouvoirs. Elles en furent pour leurs frais : toujours Andreï se montra équitable et franc. Il savait trancher et punir s’il le devait. Elles voulaient courir dans le parc ? Il les accompagnait volontiers. Elles inventaient un nouveau jeu ? Il y participait en riant.
Ce qui choqua tout le monde, lui le premier, fut quand il commença à lire des recettes de cuisine et qu’il mit la main à la pâte sans rechigner, avec succès qui plus est. Les compliments sur ses pancakes le réjouirent mais… ? Ce n’était absolument pas... normal. Lui faire des petits plats ? Lui rigoler d’un rien ? Jouer avec des gosses ? Se mettre à décorer une chambre de bébé ? Apporter des fleurs à Nate, lui susurrer des mots doux ? Ne plus regarder d’autres femmes ? Il y avait maldonne, là !
Plusieurs remarques le concernant, murmurées entre les grandes, lui mirent la puce à l’oreille un beau jour. Pourquoi bavait-il de bonheur en berçant les jumeaux en pleine sieste dans le jardin ? Bien à l’abri du vent, il les avait installés au mieux et bayait aux corneilles lorsqu’il perçut des échanges sibyllins :
Il n’est plus du tout comme avant ou c’est une idée ?
Non, tu as raison. Plus je le vois, plus il me fait penser à…
Papa, oui ! Sauf que papa, lui… Est… bizarre. Il n’est venu qu’une fois… Il est parti si vite... comme si… on… nous…
Pleure pas Flo ! Papa est papa ! Il nous aime toujours mais… Il a changé… Je sais pas mais on dirait Andreï… avant !
C’est un coup de maman ! ragea Flore. Elle a… Elle a pris ce qu’il y avait de bon chez papa pour le mettre dans Andreï et a mis ce qui lui plaisait pas d’Andreï chez papa !
T’es dingue ! C’est pas possible, ça ! Sont sorciers mais il y a des limites !
De son coin écarté, Andreï n’en revenait pas. Et si… Il se souvint de cette séance de magie où Nate avait rendu à nouveau valide son ex. Quelque chose s’était produit, l’avait touché ; depuis… il avait changé.
*Je suis MOI ! B****L*
Force fut de reconnaître que non lorsque Philip se mit à pleurnicher et lui à le consoler. Ça ne cadrait pas du tout avec son égo, alors là : pas du tout. Pourtant personne ne s’en plaignait.
La confirmation qu’il n’était plus tout à fait lui, il la reçut de manière… douloureuse. Nouvelle habitude prise à la surprise générale : tous les jours, Andreï rendait visite à sa mère. Très heureuse, la Princesse ne lui en voulut évidemment pas. La santé de Gerry allait bon train, il était enfin sorti de l’hôpital. Lors d’une de ces visites, Sanders avait émis le souhait de ramener ses dobermans en Angleterre. C’était encore une page de sa vie avec Sam qui se tournait. La maison du Cap serait vendue… Ils n’y retourneraient jamais. Anastasia avait un peu tiqué car deux chiens de cette taille avec une nichée de jeunes enfants, il faudrait faire gaffe aux accidents. Andreï assura qu’il n’y en aurait aucun. Zeus et Vulcain ne feraient pas de mal à une mouche sauf s’il en donnait l’ordre… Par précaution néanmoins, les animaux resteraient au manoir Sanders. Quand il se présenta chez les Forrester, sa mère l’accueillit avec sa joie coutumière, lui signalant l’arrivée des toutous la veille en soirée. Ravi de cette nouvelle, Andreï s’était précipité au chenil. La clé tourna. Dans un coin, les fauves se tapirent en grognant.
Salut mes beaux ! Qu’est-ce qui se passe ? On ne fait pas la fête à papa ?
Il n’y gagna que des aboiements furieux.
Hey ! Tout doux ! C’est l’avion qui vous a perturbés ? Zeus, approche mon garçon !
Il fit un pas en avant, les chiens bondirent… mais pas de joie. La seule façon de se débarrasser d’un doberman qui vous saute à la gorge est… de l’étrangler. Dépassé, Andreï se défendit à peine, tentant d’écarter Vulcain de son cou tandis que Zeus lui déchirait le mollet. Sans l’intervention magique d’Anastasia, Andreï aurait connu un douloureux trépas. Deux stupéfix arrêtèrent la boucherie à temps. Marqué, Sanders le fut profondément. Sa mère le rafistola mais la blessure interne était profonde : ses propres chiens ne l’avaient pas reconnu…
Il tut ses doutes à Nate mais entrevit la vérité. Souvent le soir, quand tous dormaient, solitaire, il arpentait le salon.
*Si je suis devenu comme lui… est-il comme moi ?*
La singularité de l’aventure ne lui déplaisait pas trop. Dans le fond, il devait admettre que c’est même assez plaisant. Lui, le taciturne, découvrait les plaisirs de la société, la convivialité… N’empêche que d’insidieuses questions rodaient.
*Mais Nate a quitté Justin… pour moi… Me quitterait-elle encore à présent que je lui ressemble tant ? Sam m’a plaquée pour Tintin… Si je me pointais maintenant avec son caractère à lui, ne tomberait-elle pas à nouveau amoureuse de… lui ? Enfin de moi ?*
Tentation… Désirs obscurs…
Le Justin qui sommeillait en Andreï se refusa à tenter l’expérience. Mais il est des circonstances qui, parfois, forcent un destin.
Sam et Justin se marièrent ce jour-là. Dire que c’était la joie pour lui serait faux. Dans son double rôle, Andreï fit de son mieux. Avec une pseudo sérénité, il aida à la toilette des enfants qui ne pouvaient rater cet événement. La nounou les prit sous son aile, comptant les ramener dans la soirée. Avec Nate, il passa le temps aussi agréablement que possible. Mettre au point leur propre mariage n’était-il pas une bonne idée ? Sans gosses dans les pattes, la chose s’avérait aisée :
Ma mère aurait voulu récidiver le précédent tralala. Je ne sais pas comment ce fut pour toi avec Justin mais moi j’ai très mal vécu ces noces grandioses*et leurs suites*. Si tu es d’accord, on fera ça ainsi…
Et de lui déballer ses cogitations. Tout y était, depuis la liste des invités au plan de table, fleurs et menu compris. Nate était enchantée de son sens du détail.
*Qu’est-ce que tu dirais si je t’avouais que je le dois à… l’autre ?*
Il avait envie de connaître son point de vue mais préférait se taire encore là-dessus. Ils discutaient gentiment sur l’endroit idéal pour fêter ça quand Nate pâlit en portant les mains sur son ventre rebondi :
Une contraction ? Comment ça, une contraction ? Euh… je connais rien aux bébés, tu as déjà eu ça avec les autres ?
Elle d’avouer que la naissance des jumeaux avait été un peu houleuse.
Ils étaient deux ! Là, il n’y en a qu’un. C’est pas normal. On va à l’hôpital ! Ne proteste pas !
Transplaner ne lui sembla pas une bonne idée avec sa future femme dans cet état. Il choisit la route. Nate se défendit en riant. Il exagérait, il n’y avait pas de quoi s’alarmer. Pour lui, l’affaire était sérieuse. La valise de la miss était prête depuis un moment au cas où. Si l’on voulait compter, le bébé aurait un mois d’avance… Mauvaise chose. Aucun énervement pourtant. Andreï conduisit avec son assurance habituelle dans la circulation dense. Nate eut une autre contraction en route mais restait sereine, donc lui aussi. A l’hôpital, on prévint la gynécologue de Miss Sommerby tandis qu’un interne s’occupait de la patiente.
Attente… Interminable selon Andreï à qui on avait fermé au nez la salle d’examens. Pour tuer le temps, quoi de mieux que de s’intéresser aux bruits de couloirs ? Ce qu’il entendit, lui fit dresser l’oreille :
Eh bien, celle-là était pressée ! Pour un peu, elle arrivait en plein mariage de ses parents !
Paraît que le mari a fait une syncope en plein restaurant dans son affolement.
Le nom de l’établissement provoqua l’émoi d’Andreï. Serait-il possible que… ? Il aurait souhaité en savoir plus mais, enfin, on lui donnait des nouvelles : fausse alerte !
Nous allons garder Miss Sommerby en observation quelques jours par sécurité. Vous pouvez aller la voir… un peu.
Bien sûr qu’il entra ! Elle se moqua de sa tête sans se douter(ou oui ?) qu’autre chose le tracassait.
Tu avais raison ! Le docteur dit que tout va bien. Il va te falloir plus de repos si tu veux mon avis… Avec les gosses ? Je m’arrangerai, bien sûr ! Ne t’inquiète pas, on s’entend très bien maintenant… Oui, je pars déjà. Le toubib a dit que je pouvais te voir juste un peu. Je passerai demain tôt. Tu veux que je t’apporte quelque chose de particulier ?
Ok, il lui fournirait de la lecture. Un long baiser, des recommandations, il fila. Fureter un peu, s’informer, ne fut pas compliqué. Le personnel de la clinique se montra très diligent. Un numéro de chambre s’énonça. Ému, il s’y pointa. Pas de signal d‘interdiction d’entrer, Andreï osa pousser le panneau. Elles étaient là ! Mère et fille… touchant tableau. Sam releva des yeux embués en entendant la porte s’ouvrir. Son expression changea. D’attendrie, elle lui parut… déçue ? Effrayée ? Il avança :
Salut ma douce… Je… ne crois pas que je veuille m’imposer… C’est par hasard que j’ai su… Nate nous a fait une fausse alerte… Oui, elle est là, l’autre couloir, ça va bien… Je… Je te félicite. Je peux la voir ? Comment vas-tu l’appeler ?
Pourquoi tirait-elle cette tête de biche aux abois ? Elle était adorable ainsi, si belle, si démunie. Néanmoins, elle ne lui refusa pas de découvrir le nouveau-né. Elle expliqua brièvement sa venue au monde. Il sourit, attendri devant la frimousse encore rougeaude et plissée.
Madelyne… J’adore. C’est le nom de ta mère, n’est-ce pas ? Elle te ressemblera… je suis fier de toi.
Voilà que Sam pleurait maintenant. Dépression post-natale ? Désorienté, Andreï ne sut trop quoi faire. Il lui caressa la joue, se mordit les lèvres en refluant des mots imprononçables et s’écarta :
Je vous laisse. Je suppose qu’on va te la prendre… Les prématurés sont fragiles, elle devra rester en couveuse quelque temps, je suppose. Tu la retrouveras vite… Repose-toi bien.
Une peine immense l’habitait en quittant la chambre de son amour. Perdu dans des pensées contradictoires, il donna tête première dans la carcasse d’un Davenport pas content. Il parut outré de le trouver là mais, très vite s’inquiéta pour Nate :
… J’ai quand même le droit de voir Sam !... Non, je l’espionne pas, Quelle idée ! C’est parce que Nate… Elle va bien, le bébé aussi. Elle doit rester quelques jours en observation. Ça nous donnera l’occasion de nous croiser. Au fait, ta fille est superbe, félicitations.
L’idiot voulait passer voir Nate… Difficile de refuser…
Vas-y quand tu veux.
Le nouveau papa voulut entrer chez sa femme mais de nouveaux arrivants se présentaient : un Gerald Forrester émotionné accompagné de son épouse.
*A ce train, toute la noce va débarquer !*
Son côté Justin se fit conciliant. Andreï freina les grands-parents :
Laissez-les seuls un moment. On va leur retirer Madelyne avant peu.
Il eut de nouveau droit à des questions sur les raisons de sa présence à la clinique, pile quand Sam s’y trouvait. Blablabla…
*Marre de répéter. Vais m’enregistrer…* Et les enfants ? Ils vont venir aussi ?... Ah, la nounou les a ramenés chez nous. Je vais aller l’aider. Nate a surtout besoin de repos, merci.
Tiraillé entre ses devoirs, il les abandonna et transplana depuis un coin discret. Les fleuristes voisins furent encore dévalisés ? Bah ! Ce n’est pas tous les jours que les femmes de sa vie se trouvaient en clinique en même temps.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Dim 5 Déc - 16:17 | |
| Jour après jour, Nate se convainquait que, définitivement, quelque chose s’était bel et bien passé lors du rituel de guérison appliqué à son ex. Pas qu’elle aille s’en plaindre…bien au contraire. Cette version améliorée d’Andrei lui convenait à merveille. Les enfants, en tout cas, étaient ravis avec cet homme adorable qui les faisait rire, les emmenait se promener, veillait sur eux avec le zèle d’une mère exemplaire même si parfois, fallait bien, savait se montrer strict mais juste. Elle aussi jouissait de ce changement inespéré. Andrei se montrait si doux, si prévenant…si amoureux ! Il la surprenait en lui apportant des fleurs, des petits cadeaux délicieux, lui murmurant des mots doux qu’elle n’aurait jamais cru entendre de sa bouche, prenant soin de tout avec un incroyable sens du détail qu’elle aurait juré…il n’avait jamais eu.
Le top de la surprise fut ce matin là, quand en descendant pour le petit déjeuner, elle avait trouvé son chéri en train de préparer des pancakes alors que l’arôme inégalable d’un café délicieux embaumait la cuisine….et non seulement les pancakes étaient superbes, les œufs brouillés étaient un délice, les toasts à point, la sélection des confitures, épatante…
Soupir ravi.
*Je suis déjà folle de lui…si ça continue comme ça…ce sera la perfection absolue !*
Et si cela s’était arrêté là…mais non… Andrei s’était trouvé des qualités de chef coq et réussissait de plus en plus d’admirables petits plats. Finies les commandes au traiteur, il tenait à s’occuper des repas de la famille. Nate n’en revenait pas.
Mon chéri…si tu continues à nous gâter de la sorte…je vais ressembler à une baleine…et le bébé n’aura rien à voir avec cela!
Il l’avait embrassée, ravi et continué à tourner adroitement sa sauce béarnaise.
Une autre nouvelle habitude, à ajouter à la déjà longue liste, fut celle de devenir un fils exemplaire. Il ne se passait pas un jour que ce cher homme ne rende pas visite à sa mère. Nate était sûre que la Princesse en était ravie. Il avait émis quelques jours auparavant le souhait de revoir ses chiens, une paire de doberman, restés en Afrique du Sud. Nate n’avait rien en contre, elle-même adorait les chiens…et en devenait un, à l’occasion étant donné son état d’animagus. Bien entendu, il n’était pas question de faire arriver les deux toutous dans un milieu inconnu et plein d’enfants. Il resta donc décidé que Zeus et Vulcain séjournent d’abord au domaine Sanders.
Pauvre chéri. Lui, n’avait rien dit de sa drôle de mésaventure mais sa mère se chargea de mettre Nate au courant. Les doberman d’Andrei semblaient ne pas avoir reconnu leur maître et avaient failli le tuer.
*Oh, mon Dieu…ça devient grave ! Ils ont flairé la différence…faudrait que j’aille leur dire deux mots, à ceux là !*
Mais dans son état il était mieux s’abstenir de se transformer, la mise à point entre chiens attendrait.
Logiquement, Andrei , n’étant pas né de la dernière pluie, avait clairement perçu les changements survenus. Nate devinait que cela le tracassait et qu’il devait se poser infinité de questions pour lesquelles elle n’avait aucune réponse…et puis, à quoi bon essayer de changer quelque chose : il était parfait ainsi. Suivant une analyse logique des faits, elle ne doutait plus…de la façon qu’il soit, part de l’esprit de Justin se trouvait à présent en Andrei, le plus normal était supposer qu’il en était de même chez Davenport. La confirmation arriva avec l’appel de Samantha.
Devenues complices malgré elles, les deux femmes en vinrent aux confidences.
Oui, Andrei a changé…pas à dire…et Justin ?
Justin aussi. Drôlement.
Nate avait soupiré.
Quelque chose s’est passée ce jour là…je ne sais pas quoi exactement. J’étais décidée à lui rendre la santé…je lui devais au moins ça !
La réponse de Sam l’avait surprise.
Oui…je me doutais bien que c’était toi…Non, il a insisté que c’était Alix…je ne sais pas quelle potion…
Alix…qu’est ce qu’elle viendrait faire là…enfin, il saura de quoi il parle. Il a des drôles d’idées parfois…et en quoi a-t-il changé ?
En quoi ?...En tout !...
Et de faire une récapitulation des changements observés.
Ben oui…Ça donne pas mal à quoi penser…Andrei est devenu l’homme le plus…délicat de la terre. Il adore les enfants…les gâte, s’entend bien avec les filles…et du coup…visite sa mère tous les jours…et…tu ne vas pas me croire…il fait la cuisine…Quoi ? Justin n’en colle pas une ?...Quoi ? Il crame les pancakes !?...Il fait du sport ?...Franchement, tu me scies, là…
Nate…je crois que…les personnalités de nos…maris…ou presque ont…fusionné… je ne sais pas si c’est possible…mais je ne fais que me remettre aux évidences…
Nouveau soupir, encore plus profond.
Et bien…tout indique à croire que c’est exactement ce qui est arrivé. Non…non…pas du tout, je ne m’en plains pas…Je pense que c’est plutôt…merveilleux…et toi ?...T’en plains tu ? Non ?...Je m’en doutais…après tout…ça les transforme presque en…des hommes parfaits. Ne faisons pas de mystère, Sam…on les a aimés tous les deux…maintenant…par un hasard étrange…c’est comme si on les avait tous deux en une seule personne…Je sais…ça sonne presque indécent…mais au point où on est…
Indécence ou pas, elles semblaient d’accord sur le point…on n’allait pas chercher à changer ça…pas pour le moment, au moins...
Je sais que vous vous mariez dans peu de jours…Viviane et Flore ne parlent que de ça…Mais bien sûr qu’elles vont être là…et les jumeaux aussi…Sam…je sais qu’on n’est pas les meilleures amies du monde…mais je suis heureuse pour vous…tu es la femme que Justin aime et tu l’aimes autant…soyez heureux !
En raccrochant, Nate s’était sentie étrangement soulagée et un peu surprise aussi…elle commençait à penser à Sam avec grande sympathie.
Oui…c’était le monde à l’envers...mais qui s’en préoccupait !
Viviane et Flore étaient excitées comme des puces depuis le matin. C’était le jour du mariage de leur père et de peu les deux demoiselles auraient voulu être prêtes et pomponnées avant le petit déjeuner. Andrei , plein de tact et bon sens se chargea de gérer la situation et peu après même de mettre à point la suite des événements. Sous la savante férule de Miss O’Higgings tout se passa dans le calme. Nate n’eut à peu près rien à dire, à peine si accommoder les délicieuses couronnes de fleurs, choisies par Sam, sur la tête des petites. Elles étaient si mignonnes dans leurs robes fleuries, ce qui la fit penser à son propre futur mariage…il va de soi que ses filles seraient les demoiselles d’honneur, là aussi…le moment venu, jusque là ils n’avaient pas touché le thème et Nate, même si elle y pensait tout le temps, n’avait pas voulu brusquer les choses. Ce serait quand …ce serait ! Et encore là, Andrei la surprit bellement.
Sans les enfants, le calme s’instaurait à la maison. Elle pouvait se reposer en toute paix, ce dont elle avait besoin de plus en plus souvent. Andrei vint la rejoindre dans le divan et, sans préavis, se lança dans l’énoncé des préparatifs qu’il entrevoyait pour… leur mariage.
Ma mère aurait voulu récidiver le précédent tralala. Je ne sais pas comment ce fut pour toi avec Justin mais moi j’ai très mal vécu ces noces grandioses.
Elle soupira, encore un peu incrédule.
Euh…pour tralala on peut dire qu’on en a eu, aussi. Ma mère a tenu à…enfin…
Aucun besoin de se souvenir de ces noces là…du merveilleux décor, de sa merveilleuse robe…de la sensation unique de flotter dans un rêve en avançant vers l’autel fleuri, du bras de son père débordant d’orgueil…vers un Justin rayonnant de bonheur…
Tu as raison…aucun besoin de faire grandiose…
De toutes façons, de son côté, il n’y avait personne à qui en faire part…Reniée par sa famille, elle ne pouvait même pas aspirer à leur communiquer la nouvelle…Cela lui fit plus de mal que prévu et faillit même la faire pleurer mais elle ravala vaillamment ses larmes, de toutes façons Andrei ne lui en laissa pas le loisir, avec un sens du détail surprenant, il lui faisait déjà part de ses plans…Il avait tout prévu, rien ne manquait…liste d’invités, plan de table, décoration et même le menu en passant par la musique.
Si tu es d’accord, on fera ça ainsi.
Nate releva la tête et lui coula un long regard très expressif avant de l’embrasser, mutine.
Mais, bien sûr que je suis d’accord…comment pourrais je ne pas l’être…c’est…parfait !
Toutefois, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que…de plus en plus, son Andrei commençait à ressembler à son ex…
Cette pensée troublante l’occupait quand la contraction la surprit, lui arrachant un petit cri.
Oh non…pas encore…c’est trop tôt !!!
Comme on pouvait s’y attendre, Andrei s’alarma.
Une contraction ? Comment ça, une contraction ? Euh… je connais rien aux bébés, tu as déjà eu ça avec les autres ?
Elle respira profondément essayant de reprendre le contrôle de la situation.
Avec les jumeaux…ils sont arrivés en avance, eux aussi…
Nate ne voulait pas s’en souvenir, de cet accouchement…après tout, elle avait failli y passer. Monsieur Bon Sens parla.
Ils étaient deux ! Là, il n’y en a qu’un. C’est pas normal.
Andrei...ce n’était qu’une petite contraction de rien du tout…ça arrive, tu sais…
On va à l’hôpital ! Ne proteste pas !
Rien à faire. En moins de temps qu’il ne faut pour dire ouf, elle se vit embarquée en voiture. Il semblait, malgré tout très serein, très maître de la situation…
*Si...Justin, du coup !*
Cette pensée dérangeante l’occupa…jusqu’à la suivant contraction, mais ils arrivaient déjà à l’hôpital. On l’emmena à toute vitesse à la salle d’examens sans laisser qu’Andrei l’accompagne, alors qu’elle avait tant besoin de le savoir à ses côtés. Un interne guindé la prit en charge.
Alors, ma petite dame…votre premier ?
Vous voulez rire, rouspéta Nate, c’est mon cinquième…Je veux voir mon…mari !
Il attend sagement dehors. Depuis quand avez-vous des contractions ?
J’en ai eu que deux…Pas de quoi en faire un plat…je veux rentrer chez moi !
On attendra l’avis de votre gynécologue.
Il fallut se plier à la routine stricte. Le gynécologue ne tarda pas trop. Après un examen approfondi, pas question de la laisser retourner chez elle comme si rien. Nate aurait pu en pleurer. Tempêter ne servit de rien, elle resterait recluse à l’hôpital pendant quelques jours. On la transporta dans une chambre privée et enfin, Andrei reçut la permission d’entrer la voir. Le voir si consterné la fit rire mais saura t’on jamais pourquoi, mais elle pressentit que ce n’était pas seulement cette urgence qui le tracassait…Il aurait eu trop de temps pour penser à son ex se mariant ce jour même…Logiquement, elle n’en pipa mot, à ce sujet.
Tu vois…ce n’était rien de grave.
Tu avais raison ! Le docteur dit que tout va bien. Il va te falloir plus de repos si tu veux mon avis…
Je peux aussi bien me reposer à la maison…en plus, il y a les enfants et…
Avec les gosses ? Je m’arrangerai, bien sûr ! Ne t’inquiète pas, on s’entend très bien maintenant…
Pas de doute sur cela. Andrei était devenu presque un père exemplaire…tout comme l’avait toujours été Justin. Penser à cela l’agaça et elle chassa l’idée mais déjà il se préparait à partir.
Mais…pourquoi si vite ? Ça ne fait même pas dix minutes…
Le toubib a dit que je pouvais te voir juste un peu. Je passerai demain tôt. Tu veux que je t’apporte quelque chose de particulier ?
Elle soupira, boudeuse.
Je me demande bien que faire en étant clouée au lit…apporte moi de quoi lire…Andrei…, elle le retint en prenant sa main, je…t’aime…
Si on en croyait au baiser dont il l’octroya, lui aussi. Nate l’espéra, du fond de son cœur…qu’il n’aime qu’elle et parvienne à écarter de ses pensées un autre visage…un autre amour mais ça, elle le savait, tenait de l’impossible.
Andrei parti, elle resta là, à réfléchir, à se poser mille questions, à sentir une vague de douloureuse mélancolie l’envahir…Tout était si différent…si compliqué à la fois que simple…et…
La porte s’ouvrant livra passage à la dernière personne au monde qu’elle se serait attendue à voir là.
Justin ! Mais que…Oh, mon Dieu ne me dis pas que…Sam a accouché !
Le jour de ses noces, si ce n’était pas voir le sens de l’opportunité, ça ! Justin avait l’air ravi…et mitigé.
Que diables lui arrivait il ? Pourquoi la regardait il de cette façon ?
Tu es…sans doute assez chamboulé…Ah bon ? Le bébé est arrivé dans l’ambulance ? Mon pauvre…et tu as raté ça…Ah…Madelyne…quel joli nom…ce n’est pas celui que tu aurais choisi…ah…c’est le prénom de sa mère…ça se comprend… Ne me dis pas que tu vas bouder pour ça !?
Bouder n’était pas le mot juste, vexé aurait mieux convenu. Cela ne lui ressemblait pas au Justin qu’elle connaissait se montrer ainsi…si caractériel…elle l’aurait compris venant de…Andrei…
*Oh,diables !...*
Il parla à peine de sa fille, elle était…petite, rouge, fripée et devrait rester en couveuse quelques jours.
C’est normal…si elle est arrivée en avance…cela ne devrait pas te surprendre…après tout…c’est aussi ton cinquième enfant…Non…je vais bien…fausse alarme…
Elle se passa la main sur son gros ventre en souriant, émue.
Mais ça ne tardera pas trop…il est pressé de venir au monde mon petit prince…
La suite la prit absolument de court. Sans préavis, voilà que Justin s’emparait de sa main et la portait à ses lèvres. Cela aurait pu passer pour un geste révérencieux…s’il n’avait pas été teinté de...passion ? et accompagné d’aveux inattendus…quand sa bouche se posa, intime, au creux de son poignet, Nate suffoqua à peine un hoquet surpris, quasi outragé.
Mais…qu’est ce qu’il…te prend… ! Justin…ce n’est ni le moment ni l’endroit…Justin…arrête ce délire…
Mais voilà qu’au lieu de s’arrêter, il lui relevait le menton et l’embrassait…Nate se rebiffa et s’écartant, lui envoya une gifle magistrale.
Tu es devenu complètement dingue, Justin Davenport !!! À quoi vient ce cirque ?...Tu viens de te marier avec ta Samantha adorée…ta fille vient de naître…et tu…et tu…Je suis ton EX…
Il s’en fichait comme d’une guigne…pas de tarte qui vaille, un autre baiser renversant cloua le bec de la rouquine qui se sentit défaillir…Ce n’était pas Justin…pas le Justin de toujours, homme délicat par-dessus tout…elle aurait pu s’attendre ce comportement de la part d’Andrei …
*Oups…c’est plus grave que prévu…*
Ça…suffit…arrête de te comporter comme un…rustre égaré…
Elle le repoussa juste à temps. La porte s’ouvrait et deux infirmières, les bras chargés de fleurs entraient, déposant les somptueux bouquets un peu partout, dans la chambre, en lui coulant des regards et sourires entendus.
Pas à dire, on vous gâte, Madame…que de belles fleurs !!! Et toutes envoyées par votre mari !
Elles semblaient se demander que faisait Justin là, avec cet air d’amoureux éperdu…alors qu’il n’était pas le mari en question….mais enfin, ce n’était pas leur problème.
Fiche le camp…là, de suite…Je ne veux pas être désagréable, Justin…Ta façon d’agir est…impardonnable…Je suis la femme d’Andrei…et toi le mari de Sam…ce n’est pas ça dont tu rêvais !?...Ah !!??...Quoi ?...tu…m’aimes ?!? Tu…es devenu fou…sors ! SORS !!!
C’était quoi, ce sourire ravageant de charme ?...
OUSTE !!!
Un dernier aveu troublant, clin d’œil…Nate se demanda si elle n’avait pas rêvé !
Dernière édition par Nate Sommerby le Ven 31 Déc - 11:11, édité 1 fois |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mer 8 Déc - 11:07 | |
| Les préparatifs du mariage ne l’avaient pas intéressé. Justin avait vaqué à ses nouvelles passions en toute quiétude laissant Sam s’arranger comme elle le désirait. Quoiqu’il soit content de se défiler si facilement de ses « obligations », Justin se posait de plus en plus souvent des questions au vu de sa situation. Des choses clochaient mais il n’arrivait pas à mettre le doigt sur quoi au juste. Il se sentait… étrange. Pourquoi, lors de son jogging, éprouvait-il la sensation d’être observé ? N’aurait-il pas la conscience tranquille ? Autant qu’il sache sa conduite avait toujours été exemplaire. Peu de gens devaient lui en vouloir, alors pourquoi cette soudaine paranoïa ? Il n’y avait pas que ça, hélas. Un matin, Davenport piqua une crise en ouvrant sa garde-robe. Les vêtements – une majorité de costumes haut standing- furent décriés pour la plupart ; chemises et chaussures à l’avenant. Rien ne lui convenait. Pas qu’il eût envie de tons criards ou de modèles sport mais ces ensembles très « homme du monde » le débectaient soudain. Il en expédia les trois-quarts à l’armée du salut et passa chez le tailleur. Depuis des années, Justin ne s’habillait plus que chez Henry Poole qui connaissait la moindre de ses mensurations. Les employés du célèbre tailleur de Savile Row connurent la déception de leur vie en voyant Justin passer devant leur établissement sans s’y arrêter. Pire, il entra chez un concurrent direct ! Le gérant, mis au courant, se demanderait longtemps en quoi sa maison avait pu déplaire à un tel client. Certes Davenport n’allait pas chez un fripier banal mais quand on est un client si raffiné, se rendre chez Hardy Amies après Poole était comme changer de confession ! L’affaire fit un peu de bruit dans la profession. D’autant que, par le hasard des commérages, on sut vite que le concurrent choisi n’était autre que… le principal fournisseur de la famille Orloff.
Ce qui agaçait surtout Justin n’était pas tant de changer ses coutumes mais d’être à présent apte dans l’exécution de certaines tâches et complètement nul dans d’autres. Ainsi, il dut « admettre » que la cuisine ne représentait qu’un dérivatif barbant auquel il s’adonnait comme… un pied. Aussi abandonna-t-il très vite ce passe-temps. Par contre, aller au stand de tir y faire de merveilleux cartons l’emplissait d’une joie jamais égalée. Voilà un sport amusant ! Et aussi très… porteur. Lire l’admiration de ses prouesses dans les yeux des minettes lui apportait de franches satisfaction. Il reluqua beaucoup, flirta souvent mais se retint de sauter le pas.
La révélation de sa mutation ne fit pas dans ces moments de faire-valoir, ni quand il se mit à acheter des œuvres littéraires bizarres à l’allée des embrumes. Non ! Cela se passa le jour du fameux mariage. Sam resplendissait dans sa robe haute couture ne dissimulant rien de ses formes très rebondies, les filles étaient de petites princesses et les gamins des pages sages. Emu au moment des serments, il se sentait satisfait d’épouser Sa Sam. Gerry semblait satisfait, Anastasia beaucoup moins… (soupir) Le menu révisé lui convint sans l’emballer. Pour qui connaissait Davenport, son sens du détail et ses prévenances envers les invités, son attitude put paraître très… distante. Il ne tirait pas la tête, souriait à la demande mais restait très réservé. Peut-être regrettait-il l’absence de son grand copain ? Les toasts se succédaient avec vœux aux nouveaux mariés. En douce Justin picolait, l’esprit ailleurs. Puis, contre toute attente :
Mon Dieu…le BÉBÉ !!!
Lavinia, l’amie et docteur de Sam, aurait pu la jouer plus discrète. Contrarié, énervé, Justin accourut auprès de sa femme :
Tu es sûre ? Mais… qu’est-ce que l’on fait ?
Abermale le bouscula :
Eh bien, mon garçon, te voilà bien empoté d’un coup ! C’est ton cinquième enfant quand même ! Tu devrais savoir ces choses-là !
Ben oui… en principe Davenport aurait dû se montrer beaucoup plus maître de la situation. Heureusement, des gens avaient la tête sur les épaules : on appela l’ambulance. Justin ne lâcha pas la main de Sam, lui murmurant tout ce qui lui passait par la tête en réconfort…
Souffle… détends-toi… ça va aller… Du calme…
On aurait juré qu’il se parlait plus à lui-même qu’à sa femme. Les secours embarquèrent aussitôt la future mère flanquée de Lavinia. Pas de place pour lui ! En cet instant, fugace, un sentiment de haine féroce envahit Justin dont la place était si bellement évincée. Obligé de s’y résoudre, le marié n’en râlait pas moins. Il enfila une autre flûte de champagne et s’éclipsa de la ronde, se souciant à peine de ce que deviendraient les invités. Un Transplanage un peu chaotique, mais sans désartibulation pour autant, plus tard, il erra un moment dans l’hôpital avant qu’une Lavinia en pleurs lui tombe dessus, lui plaquant un bisou sur la joue :
Félicitations…Madelyne est là…
Madelyne ? C’est qui ? Euh… ma fille ? Déjà ?
Oui, grand bêta…ta fille est née en chemin.
Oui, c’étaient des choses qui arrivaient selon le toubib. Même une primipare pouvait accoucher aussi vite que si un waddi Wasi avait été lancé.
Au moins, ça nous épargne des heures de souffrances.
Sa remarque fit tiquer l’amie de Sam :
Vous… vous allez bien, Justin ?
Oui, tout à fait, pourquoi ? Où sont-elles ?
La chambre de la nouvelle maman lui fut indiquée. Lavinia se chargeait de prévenir les autres. Le Justin Davenport d’avant aurait couru comme un fou dans les couloirs en criant à tous sa joie et sa fierté d’être à nouveau papa. Il aurait raflé toutes les fleurs du fleuriste et aurai organisé une tournée générale de champagne. Celui-ci avança tranquillement jusqu’à la maternité... Il allait entrer quand la porte s’ouvrit. Son sang ne fit qu’un tour en voyant Andreï émerger de la chambre de Sam :
Qu’est-ce que tu fous déjà là, Sanders ? T’as rien à faire ici, barre-toi !
J’ai quand même le droit de voir Sam !
Et de quel droit ? Celui de son ex ? T’as posé un mouchard ou quoi ?
Non, je l’espionne pas, Quelle idée ! C’est parce que Nate…
Justin pâlit :
Nate ? Qu’y a-t-il avec Nate ? Elle est ici ? Un souci, le bébé ?
Son ancien rival le rassura et le félicita : un comble.
J’irai la voir dès que je… *merde ! Gerry !*
Allait-on le laisser voir Sam à la fin ? Comme s’il s’agissait d’un ami, Sanders avec beaucoup plus de tact qu’il n’en avait jamais eu de sa vie, s’interposa afin que Davenport puisse rester seul en famille quelques instants :
Ma chérie ! s’exclama-t-il. Ça va ?... On se souviendra de nos noces. Tu ne pouvais pas me faire un plus beau cadeau ! Je peux ?
Il déposa un baiser rapide sur les lèvres de la jeune mère et lui enleva le poupon des bras, commentant sa découverte du nourrisson avec une sorte de joie mitigée :
Qu’elle est mignonne, c’est toi en miniature, une vraie poupée ! Un peu rouge et fripée, m’enfin… ... Quoi, je la tiens mal ? Je euh…
Bon sang, elle avait raison. A croire qu’il n’avait jamais de sa vie tenu un nourrisson. De plus ça s’embrouillait dans sa tête, il tangua dangereusement. Sans le geste salvateur de Sam, Dieu sait où aurait atterri le bébé. Désorienté, gauche, il s’excusa et se fit engueuler proprement :
… Mais non j’ai pas bu… enfin un peu mais pas au point de…
L’entrée fracassante des nouveaux grands-parents lui sauva un peu la mise. Il se sentait vraiment mal et s’assit lourdement dans un fauteuil laissant Gerry et Anastasia entourer mère et enfant. Blablabla, si on lui parla, il ne s’en aperçut pas. Le plus probable était qu’on l’oubliait dans son coin. D’où venait donc le marteau piqueur qui résonnait dans sa tête ?
Suis pas trop bien, je sors un peu.
Dans le couloir, ça n’alla pas mieux. Il passa aux toilettes se jeter de l’eau au visage tandis que des pensées étranges s’infiltraient :
*Vais aller voir Nate. Elle m’a toujours fait de l’effet, cette rouquine.*
Il ne lui fallut pas longtemps pour savoir où son ex-femme se reposait. Sans frapper, il poussa la porte. Son apparition ne déclencha pas la joie :
Justin ! Mais que…Oh, mon Dieu ne me dis pas que…Sam a accouché !
En effet ! Une adorable fillette… (petit soupir) *Moins belle que les nôtres… idiot, elle est superbe ! N’empêche que…*
Le pincement des regrets le chatouilla bizarrement. Le côté Andreï reprit le dessus et son œil déshabilla Nate de façon ostensible, s’attardant sur l’abdomen en couveuse. D’un ton morne, il lui raconta l’accouchement express de sa femme. Si express qu’il n’avait pas pu y assister.
Nate y alla de ses commentaires sur le prénom du bébé, il haussa les épaules :
Je n’aime pas trop ce Madelyne… je sais que la mère de Sam s’appelait ainsi… j’aurais préféré autre chose de plus… ou de moins…
Ne me dis pas que tu vas bouder pour ça !?
Qui parle de bouder ? Elle aurait pu m’avertir avant. De toute façon c’est moi qui vais aller déclarer le bébé, alors je lui donnerai le nom que je veux. J’espère qu’elle sera jolie, ce qui n’est pas trop le cas pour l’instant... Et toi ? Qu’est-ce qui se passe. Déjà des contractions ?
Je vais bien…fausse alarme…
Le Justin en lui fut crucifié en voyant la tendresse infinie avec laquelle Nate caressa son ventre. La petite phrase qui accompagna ce geste lui sembla un affreux coup de poignard :
Mais ça ne tardera pas trop…il est pressé de venir au monde mon petit prince…
Alors c’était ça ? Elle était fière de porter un digne descendant des Orloff ?
*Qui sait, elle a peut-être toujours voulu ça : être princesse ! Ouais mon pote, elle est assez vénale pour ça. C’est ça qui te manquait : un titre de noblesse ! En cherchant bien, ma généalogie n’a pas à rougir et comporte pas mal de contes voire un duc… Mais pas de prince…*
Davenport n’avait jamais pensé de cette manière. Qu’est-ce qui lui prenait de se sentir si… pervers ? Ce qui se passa ensuite ne lui correspondait pas non plus. Prendre la main de Nate était banal en soi mais embrasser sensuellement le creux du poignet… Peu importait que la belle se rebiffe, il poursuivit. Insidieuse, la voix qui n’était pas la sienne l’obligea :
*Embrasse-la, elle est à toi, l’a toujours été…*
Plus ténue une autre rouspétait :
*Arrête ça tout de suite ! C’est Sam que tu aimes, idiot !*
Une baffe ? Et alors ? Il mit encore plus de conviction à resserrer son étreinte. Elle répondait ! Une joie sans nom l’investit même si Nate l’injuriait. Il aurait volontiers poursuivi ces échanges si des infirmières n’avaient pas débarqué, inondant la chambre de bouquets de fleurs. Nate le ficha dehors en lui rappelant ses « devoirs »
… Je suis la femme d’Andrei…et toi le mari de Sam…ce n’est pas ça dont tu rêvais !?.
C’est toi qui m’y as forcé. Je t’aimerai toujours Nate.
OUSTE !
La porte refermée, le marteau-piqueur revint en vigueur, lui massacrant crâne et cœur. Martyrisé, Justin fila dans les toilettes les plus proches et s’y vida secoué de nausées. Il y resta un bon moment, pâle et tremblant, incapable de comprendre ce qui venait de se passer, ce qu’il n’aurait jamais fait en étant… normal.
Sam devait l’attendre. C’était elle que son cœur réclamait. Il n’avait aucun besoin d’une rousse évaporée qui l’avait si cruellement trahi. Les idées plus ou moins à l’endroit, il osa sortir de son trou. Timide, il se pointa dans la chambre où sa femme se reposait, seule. Il s’approcha et se pencha pour lui embrasser le front. Elle était si belle ainsi abandonnée sur son oreiller. Si belle… vulnérable…
*Si elle n’était pas intervenue dans ta vie, Nate serait encore à tes côtés… Je me fous de Nate… Ce serait si facile de t’en débarrasser… J’aime Sam, fous-moi la paix… Tu retournes l’oreiller, tu appuies…*
Après tout… Une amorce de geste puis… un regard plongea dans le sien. Si pur, innocent, il craqua. Sam aide-moi !
Transformé en fontaine, il débita un hachis d’aveux nerveux entrecoupés de sanglots :
Je sais plus où… je suis… là… j’ai voulu… j’ai failli… aide-moi Sam !
Perdue, elle lui caressa les cheveux, prête à pleurer aussi. Il n’entendit rien de ce qu’elle pouvait raconter, il regardait… les fleurs. Plein de bouquets ornaient la chambre de SA femme.
*IL essaye encore, il essayera toujours de me la prendre ! *
D’un rire dément, il se redressa :
Fais pas attention, c’est le stress. Je t’aime Sam. J’arrangerai ça. A demain.
Sa sortie ressemblait à une fuite ? Et alors ? Au dehors, il transplana. Seul le chat Alonso l’accueillit mais battit vite en retraite devant l’inconnu qui débarquait. Justin entra dans son bureau, ouvrit son coffre. L’étui du pistolet se posa sur la table, des livres de magie noire aussi.
A nous deux Andreï !
Un sourire mauvais aux lèvres, Davenport commença sa lecture. Lentement un plan se bâtit.
Les jours suivant, Justin cacha très bien son jeu. Sanders n’était-il pas un agent très habile en dissimulation ? Celui tapi en lui le conseilla beaucoup dans ses actes. Pour beaucoup, Davenport avait repris le contrôle. Il n’alla pas voir Nate une seule fois, consacrant son temps à Sam. La petite Madelyne rose et mignonne semblait le ravir. La famille heureuse quitta bientôt l’hôpital. Retour glorieux s’il en est : rien ne manquait. En pur Davenport Justin avait veillé à tout : banderoles de bienvenue à Madelyne-Rose, fleurs à profusion pour Sam ainsi que cadeaux somptueux destinés à tous. Le terme de Nate étant proche, les Davenport récupérèrent leur marmaille. Les filles tiraient un peu la tête et ne parlaient que… d’Andreï. Taisant les ressentiments que de tels éloges provoquaient en lui, Justin fourbissait ses armes. Où, quand, comment ? Il n’en savait encore rien mais le feu de la haine couvait, sournois.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mar 14 Déc - 23:10 | |
| Tout s‘était passé si vite ! Sam n’avait presque pas eu le temps de réaliser ce qui se passait. Les contractions n’avaient certes pas été la joie mais ce n’était pas aussi affreux qu’on le lui avait dépeint. Que Justin ne soit pas avec elle l’accabla plus que les couleurs de l’enfantement. Lavinia, par contre, fut là tout le temps à lui donner des ordres pertinents et murmurer des mots apaisants. Et puis, le bébé était là…
Jamais Samantha n’avait imaginé un sentiment d’aussi parfaite allégresse que celui ressenti quand une Lavinia, émue jusqu’aux larmes, avait déposé sa fille entre ses bras.
Bienvenue, mon amour…ma Madelyne.
Elle avait presque peur de la toucher, cette petite chose si merveilleusement fragile, toute rouge et fripée, avec une délicatesse infinie, elle frôla sa joue de son doigt puis déposa un baiser sur son front.
Elle est parfaite, assura Lavinia, orgueilleuse, et Madelyne est un prénom adorable…
Comme Maman, souffla Sam, tout comme elle, qui serait si contente…
Où qu’elle soit, elle l’est !, dit le Dr. Dexter, attendrie, Sam...le bébé est arrivé un peu avant terme, il faudra peut-être le mettre quelques jours en couveuse…
Mais…on va me la prendre !?, se désola t’elle, à point de pleurer.
Oui, ma belle, mais ce ne sera pas pour longtemps, ma filleule a l’air de se porter comme un charme mais ce sera au pédiatre de décider…et toi, on dirait que tu viens de faire la fête…et pas d’accoucher !...Seigneur, faut dire que cette demoiselle a le sens de l’opportunité mais ça ne m’étonne pas…avec tout ce stress, c’était prévisible.
Lav…j’ai peur !
Son amie lui caressa doucement les cheveux et déposa un baiser sur sa tête.
Tout ira bien, ma chérie…tout ira bien…
Mais elle n’en était pas si sûre que ça. Si jamais…mais non ! Mieux valait ne pas y penser !
Arrivées à l’hôpital, après un examen rapide, Sam fut conduite tout droit à sa chambre, en serrant toujours Madelyne contre son cœur.
Vous êtes la plus jolie maman que j’ai vu, dit l’infirmière, vous êtes sûre que c’est vous qui avez accouché ?
Elles rirent de bon cœur quand Samantha assura que non seulement elle avait accouché mais s’était mariée quelques heures auparavant.
Et bien, joli cadeau de noces pour l’heureux papa !
Affreux pincement au cœur. Sam se força à sourire. Heureusement que cette pie bavarde ne s’attarda pas trop. Restée à seules avec son enfant, la nouvelle Ms. Davenport prit son temps pour découvrir ce bout de sa chair qu’elle adorait déjà irrémissiblement.
Mon ange…mon petit ange…Tu vas être la petite fille la plus adorée du monde…
Elle était là à se prélasser en la contemplation de son petit miracle à elle quand la porte s’ouvrit doucement.
Voilà Papa !, susurra t’elle sur le front du bébé avant de lever la tête, souriante.
Mais son sourire se figea instantanément en découvrant celui qui venait d’entrer. Son cœur démarra, en panique, la bouche sèche à peine si elle put articuler son nom.
Andrei !!
Instinctivement, Sam serra le bébé contre elle, un nœud de terrible angoisse à la gorge. Mas il souriait, paisible…ému ?
Salut ma douce… Je… ne crois pas que je veuille m’imposer… C’est par hasard que j’ai su… Nate nous a fait une fausse alerte…
Ah…je vois…elle va bien ?, c’était le moindre à demander, elle est…internée aussi ?
Il avait changé. Sam le connaissait trop bien pour s’y méprendre. Son expression s’était adoucie, son regard n’avait plus cet éclat d’arrogance contrôlée, pas le moindre soupçon d’ironie ou sarcasme dans sa voix, il semblait tout simplement posé, mais cherchant à maîtriser une profonde émotion.
Oui, elle est là, l’autre couloir, ça va bien… Je… Je te félicite. Je peux la voir ? Comment vas-tu l’appeler ?
Elle prit une profonde inspiration puis expira, essayant de calmer l’affolement qui menaçait de la gagner.
Ma…Madelyne…, écartant un peu le pan de couverture rose, elle lui laissa découvrir la frimousse fripée de celle, qu’il ne saurait, autant qu’elle pourrait l’éviter, être sa fille. La tendresse qu’elle devina dans ses yeux gris, la secoua, pas moins que ses paroles.
Madelyne… J’adore. C’est le nom de ta mère, n’est-ce pas ? Elle te ressemblera… je suis fier de toi.
*Fier de moi !?...Mon pauvre Andrei…je t’ai abandonné, trahi, menti…et te mens encore…*
Au moins, elle n’aurait pas menti en disant à Madelyne que…Papa était là ! Cela lui broya le cœur, sans pouvoir l’éviter, elle éclata en sanglots. Encore là, il fut d’une douceur sans nom, lui flattant la joue. Sam fit un effort pour se reprendre et renifla.
Excuse moi. Je…je suis…assez secouée…tout a été si…elle est née dans l’ambulance. Je…suis…encore….confuse…
Il comprenait, se montrant la délicatesse même.
Je vous laisse. Je suppose qu’on va te la prendre… Les prématurés sont fragiles, elle devra rester en couveuse quelque temps, je suppose. Tu la retrouveras vite… Repose-toi bien.
Merci…Bonne chance…avec Nate et le bébé !
Il sortit, sans un mot de plus et Sam devina qu’il était triste et cela lui fit plus de mal que voulu. Elle n’eut pas beaucoup de temps pour s’appesantir sur ce chamboulement de sentiments, la porte s’ouvrait de nouveau, cette fois sur Justin.
Ma chérie ! Ça va ?... On se souviendra de nos noces. Tu ne pouvais pas me faire un plus beau cadeau ! Je peux ?
Un baiser de rien du tout qui faillit ressembler à coup de bec avant de lui rafler le bébé des bras pour la regarder à souhait…quoique sans véritable enthousiasme.
Qu’elle est mignonne, c’est toi en miniature, une vraie poupée ! Un peu rouge et fripée, m’enfin…
*De peu et il soupire de dépit !*
Sam ne le quittait pas des yeux. Pour un homme qui avait déjà quatre enfants, il avait l’air de ne pas savoir comment s’y prendre, avec un nouveau né.
Justin…tiens la bien…sa tête !
Il semblait plutôt confus, un peu perdu et aussi…agacé ?
Quoi, je la tiens mal ? Je, euh…
Et le voilà qui tanguait, à point de lâcher l’enfant, Sam bondit et récupéra son petit trésor.
Mais…qu’est ce tu as ? Tu es…tout chose ! Je comprends l’émoi mais ce n’est pas une raison d’agir comme si tu n’avait vu un bébé de ta vie…Tu as bu, Justin ?...Justin !!!
Il donnait l’impression d’être absolument paumé. Elle s’était décidément attendue à toute autre chose de sa part en un moment si spécial.
C’est…Tu…n’as même pas l’air content…, murmura t’elle mais s’il l’entendit, fit comme si rien, occupé à démentir son accusation d’ivresse notoire.
Mais non j’ai pas bu… enfin un peu mais pas au point de…
Pas le temps de s’étendre en explications, la porte s’ouvrait de nouveau, cette fois c’étaient Gerry et Anastasia.
Ma petite fille !!! Comment vas-tu ? Comment…Oh, mon Dieu…ma petite fille ?
Gerry…bien sûr que ta petite fille, que ferais je avec le bébé de la voisine…Hi, grand-père…je suis Madelyne !
Les yeux embués de larmes, Gerald Forrester déposa un baiser sur le front de sa fille puis se pencha vers le bébé.
Elle est pareille à toi…tu étais tout aussi moche !, il la prit, avec mille précautions, alors, ma princesse…Bienvenue !...Regarde, Ana, n’est elle pas parfaite ? N’est ce pas le petit bout de chose le plus merveilleux du monde ?
La Princesse Orloff sourit attendrie et flatta la joue de l’enfant.
Oui, elle est…parfaite. Pas étonnant avec une maman si belle…je suis si heureuse pour toi, mon enfant…pour vous !
Regard mitigé vers Justin, qui affalé dans un fauteuil semblait absent et mal à l’aise.
Chéri…tu te sens bien ?, s’angoissa Sam.
Suis pas trop bien, je sors un peu.
Et de filer comme s’il avait vu le Diable.
Il…est tout secoué…Rien ne s’est passé comme on l’avait planifié, dit elle, voulant excuser l’étrange attitude de son mari mais pas plus tranquille pour autant.
Quelques minutes plus tard, une infirmière vint quérir la petite Madelyne et l’emmena, assurant à la jeune maman qu’une nuit de repos ne lui ferait qu’un grand bien et qu’elle pourrait voir sa fille le lendemain. Sam aurait pleuré…en fait, c’est ce qu’elle fit sur l’épaule consolatrice de son père alors qu’Anastasia murmurait des paroles réconfortantes.
La scène se vit interrompue par deux autres aides soignantes qui arrivaient les bras chargés de fleurs. Le cœur de Samantha bondit de bonheur mais cela ne dura qu’un instant, jusqu’à e que son père adoré ne lui tende la carte qui accompagnait ce déploiement floral. Ce n’était pas Justin qui avait envoyé tout cela mais…Andrei.
Sa belle-mère lui conseilla de se reposer et dormir et se reposer tant qu’elle pourrait le faire.
Avec un bébé, la vie change drastiquement, ma chérie…Tu as besoin de te reprendre, nous reviendrons demain.
Gerry exultait, il était le grand-père le plus fier du monde en ce moment, il embrassa sa fille vingt fois avant de se résoudre à prendre congé, entraîné par sa femme.
Instants de solitude. Samantha eut le temps de faire le point…ou du moins essayer de le faire. La situation devenait ambiguë, troublante. Si elle avait perçu d’emblée les changements opérés en Andrei, cela va de soi que ceux survenus chez Justin avaient déjà été passés au crible, sauf que là, elle ne pouvait être dupe de l’avance dramatique du bouleversement. Si Sanders apparaissait posé et très maître de la situation c’était bien parce que chez lui semblaient avoir élu domicile les meilleures qualités de Davenport alors que ce dernier semblait avoir hérité pas exactement les plus honorables de son rival.
L’arrivée inopinée d’un Justin étrangement bouleversé coupa court ses cogitations.
Tu te sens mieux, mon chéri !?
Baiser sur le front. Air accablé.
Sam aurait voulu deviner ce qui passait dans sa tête mais en cet instant, elle avait la sensation de se trouver face à un inconnu qui la regardait de façon bizarre, comme s’il s’apprêtait à prendre une décision. Un long frisson la parcourut. Celui là n’était pas le regard d’un homme heureux ni amoureux…Ses yeux, en cet instant précis, étrécis sous la réflexion douloureuse, exprimaient un ressentiment intense frayant la haine.
*Il me déteste…ce Justin là me déteste. *
Elle eut peur. Une peur folle en pressentant l’irrémédiable dans le geste qu’il esquissa mais maintint son regard, sans ciller, alors que son cœur cognait désespérément, à en faire mal. Que lut-il dans ses yeux ? L’amour infini, abandonné, rendu…
Et puis, en l’espace d’une seconde tout changea, se décomposant en un désespoir sans nom, Justin éclata en sanglots.
Sam aide-moi ! Je sais plus où… je suis… là… j’ai voulu… j’ai failli… aide-moi Sam !
La tuer. C’était la lueur de meurtre, celle qu’elle avait reconnu au fond de es yeux habituellement si doux, si aimants. Quelles idées folles cavalaient dans son esprit troublé ? L’attirant vers elle, Sam caressa doucement ses cheveux en murmurant des mots apaisants. De rien ne servirait un discours, ni des explications…Il n’était pas en état de comprendre quoique ce soit. Le calme revenait, peu à peu, quand elle le sentit se tendre de nouveau…Il venait de réaliser que la chambre était pleine de fleurs…Fleurs, qu’évidemment il n’avait pas songé à envoyer.
Ce n’est rien…juste un geste gentil de la part d’Andrei…
Bien sûr il aurait pu se contenter d’envoyer un bouquet discret et non pas de transformer sa chambre en exposition florale.
Si elle avait supposé qu’il s’était calmé, Sam fut absolument prise de court par son rire de fou. Mais qu’est ce qui lui prenait, maintenant ?
Justin…mon amour…
Fais pas attention, c’est le stress. Je t’aime Sam. J’arrangerai ça. À demain.
Arranger…quoi ?, voulut elle savoir mais sans lui donner le temps à plus de questions ni donner aucune réponse, il l’embrassait rapidement et quittait la chambre comme une exhalation.
Restée à nouveau seule, Sam se perdait en suppositions, plus terribles unes que d’autres. Il fallait à tout prix qu’elle rencontre Nate. Elles devaient parler, savoir comment s’y prendre pour affronter cette équivoque avant que cela ne finisse en tragédie. Pour une femme qui avait accouché quelques heures auparavant, Samantha se sentait très en forme. Sans le penser deux fois, elle écarta les draps et allait se lever quand Lavinia Dexter fit une entrée fracassante.
Oh la, ma belle…où penses tu aller ? Pas faire une balade quand même !
Lav…Dieu merci que tu es là…aide moi…Je dois aller voir Nate Sommerby…
Hein ? Et c’est qui celle là ?
L’ex de Justin et la future d’Andrei…
Soupir en roulant des yeux.
Tu es folle…et peut on savoir à quoi vient l’urgence ?
Le moment ne se prêtait pas aux confidences mais force fut de mettre Lavinia au courant des faits. Sans omettre détail, Samantha raconta à sa meilleure amie, l’étrange histoire de ces esprits transmutés.
Seigneur…si c’est pas compliqué, tout ça…C’est une histoire de dingues…M’est avis que vous êtes tous bons pour l’asile, là.
Tout ce que tu voudras, Lav…passe moi plutôt ma robe de chambre et aide moi à arriver chez Nate…Elle est dans l’autre couloir, Andrei me l’a dit.
Ah…parce qu’il est venu aussi !?
Oui...en tout premier. Il…a été charmant et a envoyé toutes ces fleurs…Justin a des envies de meurtre.
Allons voir cette Nate avant que le sang ne rougisse l’arène !
Nate semblait s’ennuyer ferme dans sa chambre tout aussi pleine de fleurs que la sienne. Elle se surprit beaucoup en la voyant apparaître là, escortée de la grande perche brune qu’était Lavinia. Présentations faites assurant l’intégrale loyauté du Dr. Dexter, Sam se lança, sans préambules.
Justin va mal…très mal. Il…est en pleine confusion…Ah bon...il est venu te voir…Quoi ? Des propos…oui, je m’imagine lesquels…Tu aurais dû taper plus dur… Pas que je veuille minimiser le désagrément mais je crains pire…oui, encore pire ! Justin est en train de devenir fou…les pires penchants d’Andrei, toute sa roublardise et perversité…Excuse moi, Nate…on sait toutes les deux comment est Andrei…on ne va pas se bâtir un roman…Je disais donc que ce qu’il y a de plus mauvais chez ton chéri…est retombé sur le mien…et si le tien est à présent un père merveilleux et fait la cuisine comme Paul Bocuse…le mien est, sans doute, en train de concocter un meurtre en se prenant pour James Bond, version améliorée. Nate l’écouta attentivement. Lavinia, fascinée, ne pipa mot mais ne rata rien.
Pas dans ton état, Nate…Impossible. Rituel est rituel et nous savons que cela entraîne des risques…et jamais de tout jamais je ne veux qu’il vous arrive quelque chose, à toi ou au bébé…Nous attendrons, j’essayerai de le calmer mais si tout est comme je pressens…il voudra endormir tout doute…Non, je ne pense pas qu’il s’en prendra à moi ou à…Madelyne…
*Justin sait que Madelyne n’est pas son enfant mais celle d’Andrei…Mon Dieu non…pas ça !*
Sam…tu te sens bien…tu es toute pâle !!!
Ça va…Je vais bien…un peu de fatigue seulement…Oui, je retourne me coucher…Prends soin de toi, Nate…Bonne chance !...On reste en contact…Bien sûr…je n’y manquerai pas…espérons que ce ne soit pas nécessaire.
Lav ne voulut rien savoir de courir les couloirs et transplana direct dans sa chambre.
Tu es folle…et s’il y avait eu quelqu’un ?
Et les Oubliettes quoi, du pipeau ?...Tu sais, Sam…je pense que tu auras besoin d’un toubib à domicile…et en plus, ça tombe bien…ma belle mère est en visite chez nous…Tu connais mon mari, il devient insupportable quand sa mère est là…Je lui dirai que tu as besoin de moi, un point c’est tout !
Tu es merveilleuse, Lav…mais que dirons nous à Justin ?
Tatata…laisse ça de mon compte. J’inventerai n’importe quoi de si crédible qu’on finira par y croire nous même. Maintenant, ma jolie, un dîner très léger et puis dodo !!!
Moins d’une semaine plus tard, pendant laquelle Justin se montra délicieusement attentionné et soigneux du détail, comme à ses meilleurs moments, tant et si bien que Sam vint à se demander si elle ne s’était pas laissée entraîner par une certaine paranoïa, mère et enfant furent autorisées à quitter l’hôpital.
Le retour à la maison fut toute une fête. Tout était d’une perfection raffinée. Tout à fait Justin. Rien ne manquait. Des banderoles de bienvenue pour Madelyne-Rose…
*Rose ? D’où il sort ça…m’a pas demandé…mais enfin !*
…aux fleurs en choix exquis et bien entendu, les cadeaux somptueux. Sam n’en revenait pas en recevant la magnifique parure signée Bulgari. Même Lavinia eut droit à un magnifique bracelet de chez Cartier. Justin retrouvait son extravagante générosité de jadis et sa belle humeur mais…toujours ce mais, insidieux, tracassant…
Les enfants étaient de retour. Maintenant c’était le tour de Nate de prendre les choses en tout calme en attendant le moment. Sam était ravie de les avoir de nouveau à la maison. Viviane et Flore se déclarèrent ravies avec leur petite sœur, tant et si bien qu’on devait leur rappeler gentiment que ce n’était pas une poupée qu’on pouvait sortir de son berceau pour jouer avec. Anthony et Philip ne portèrent aucun intérêt marqué pour le nouveau membre de la famille. Le seul hic, à tout ce bonheur familial était la tendance des deux filles de Justin à parler à tort et à travers…d’Andrei, encensant à qui voulait les entendre, les maintes vertus découvertes chez leur futur beau père. À les écouter, personne n’aurait cru que peu de temps auparavant il leur inspirait une terreur maladive…à présent, il était, de peu, l’homme le plus parfait que la Terre ait jamais porté.
Il y a que Papa qui soit mieux !, assura Viviane, diplomatique, mais Andrei…
Et c’était reparti pour une ronde…Andrei qui faisait si bien la cuisine, qui racontait des histoires si drôles, qui les emmenait au cirque et au parc, qui leur avait offert ceci, cela…et on n’en finissait pas. Sam observait alors son mari. Il semblait très bien le prendre mais elle ne pouvait pas être dupe de certaines moues, gestes agacés ou regards féroces, rapidement enrayés suivis de quelque commentaire sympathique qui sonnait, parfois, affreusement faux…
Elle se découvrit à surveiller, du coin de l’œil, la moindre de ses réactions, à disséquer ses paroles, interpréter chaque fait, chaque geste. Il cachait bien son jeu mais Sam avait l’œil exercé et était excellent juge de caractères.
Ce matin là, profitant que son mari était sorti jouer au golf, lubie des derniers temps. Sam alla au bureau du maître de céans. À sa grande surprise, elle trouva la porte fermée à double tour. Qu’à cela ne tienne, dégainant sa baguette, la jeune femme lança un Alohomora qui resta aussi ineffectif que les autres sortilèges appliqués. Que gardait il là dedans qui méritait tant de secret ? S’introduire par la fenêtre connut un échec semblable.
Retournant auprès de Lavinia qui berçait la petite Madelyne, elle lui fit part de ses soupçons.
Évidemment, il ne veut pas que je sache ce qu’il fait là dedans…mais ce ne doit être rien de bon. Pourquoi justement là, Michael doit être Dieu sait où…je suis sûr qu’il saurait, lui…
Tu le crois vraiment capable de mijoter quelque horreur ?
Profond soupir.
Oui. Il a une cible…la seule qui compte : Andrei.
Mais ton ex est plus roublard qu’un serpent à sonnettes…il ne se laissera pas pincer si facilement.
Andrei, dans son état normal, non…mais je crains que la nouvelle version de lui ne soit une proie facile…Je dois l’avertir !
Et lui dire, quoi ?...Que ton mari veut le zigouiller parce que ses filles parlent à longueur de journée de lui ?...Franchement, faudra faire quelque chose avec ces gamines…
Je leur ai déjà demandé de ne plus parler d’Andrei face à leur père…mais ce ne sont que des enfants…Le mal est fait, de toute façon…Déjà que mon Justin ne l’aimait pas particulièrement…
Nouveau soupir. Sus au téléphone, pour se dérober à l’instant.
Et maintenant, quoi ?, voulut savoir Lavinia qui l’avait suivie.
Il peut voir quel numéro sur le relevé…
Tu deviens parano, ma parole !
Mieux vaut prévenir.
Génial…alors, Miss Paranoïa ?
Je vais lui envoyer un message, aussi simple que ça !
Et d’invoquer l’isatis.
Va trouver Andrei et dis lui d’être sur ses gardes ou sinon qu’il demande à Nate de quoi je parle !
Le renard des neiges enfumé, Sam se laissa choir dans un fauteuil.
Et maintenant…attendons ! |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 17 Déc - 16:44 | |
| Au début, il n’y avait pas pris garde. La figure qu’il contemplait dans le miroir était celle de tous les jours. Quelque chose se passait pourtant, Andreï en était certain. Il en venait à s’inspecter de longs moments à la salle de bains à la recherche, dans ses traits, d’une trace du changement en opération. Il savait être différent du Sanders d’avant ! Peut-être ses yeux gris s’étaient-ils… adoucis ? Son expression ordinaire ne devenait-elle pas plus… souriante ?
*Eh m***E ! Suis en train de devenir Tintin !*
Était-ce si mal que ça ? Cette question ne cessait de le turlupiner depuis qu’il s’était rendu compte de son… évolution. En faisant le bilan ses nuits d’insomnies, Andreï devait admettre avoir gagné sur bien des plans. D’abord sa mère était enchantée de voir son fils se comporter enfin… en fils. Respectueux, il l’avait toujours été mais il lui avait manqué cet élan d’affection, ce besoin de s’assurer de son bien-être qu’il éprouvait à présent. Point de vue relationnel, c’est dingue ce qu’un sourire, un peu d’entrain vous ouvrait comme portes ! D’aussi loin qu’il se souvienne, Sanders n’avait pas autant parlé de sa vie à… un tas de gens même inconnus. Avant… on l’évitait, à présent, on souhaitait sa présence, requerrait son avis, riait de ses plaisanteries. Plaisanter ? Lui ? Qui aurait cru ça ? Devenir cuistot était amusant aussi. Il suffisait de voir les mines gourmandes des gosses de Nate quand il montait une charlotte au chocolat ! Les enfants… Dans ce domaine aussi, il se surprenait. Patient, joueur, gentil censeur, il n’en revenait pas lui-même de tant de prévenances. Et que dire de Nate ? Lui, le brutal, le taiseux, se découvrait des facultés inédites de douceur, tendresse, attentions… Nate ne se plaignait pas, que du contraire ! Personne ne se plaignait sauf... lui. Il avait détesté, haï Justin, désiré sa mort jusqu’aux tréfonds de son être. Devenir comme lui le rendait malade.
N’étant pas stupide, Andreï sut tirer parti de sa nouvelle personnalité. Son plus cuisant regret – outre le fait que Sam semble encore attachée à son pantin – était la désaffection totale de ses chiens. Quoiqu’il tente envers eux, Zeus et Vulcain demeuraient rebelles à toute approche. Peut-on souffrir du détournement d’affection d’animaux ? Eh bien oui ! C’est con mais c’est ainsi. Andreï regrettait vraiment la complicité avec ses dobermans même si tous semblaient le préférer dans son nouveau caractère. Désirait-il pour autant revenir en arrière ? Bonne question ! C’était à la fois un oui et un non, un peut-être.
En tout cas il avait eu la trouille de voir Nate accoucher prématurément. Que Sam ait donné le jour à sa Madelyne l’avait profondément ému. Il avait tant espéré qu’elle lui donne un enfant, leur enfant ! Que d’efforts vains, d’espoirs déçus ! Sa part Justin évita les reproches au moment où il contempla le poupon. Ce n’était pourtant pas l’envie qui manquait à Andreï de faire éclater son ressentiment profond. Mais le Davenport en lui veillait à adoucir les angles…
Rentré chez eux, assuré que Nate irait bien, il avait soulagé la nounou en s’occupant bravement de quatre anges de la maison puis s’était octroyé un long bain chaud en rêvant à ce qu’aurait pu être sa vie si Sam était restée à ses côtés. Il se vit en train de cajoler Madelyne, la voir grandir, rire… Lui, il pleura, misérable sans la main secourable de… sa femme.
*Elle ne t’aimera plus jamais comme elle t’a aimé ! Faut te faire une raison. Tu as à présent une fiancée qui t’adore et que tu aimes quoique tu t’en défendes. Tu vas avoir un fils d’elle, tu dois te consacrer à elle, à eux. Mais avec Sam c’était plus... spécial…*
Des épisodes de leur vie commune revinrent en force. Leur rencontre sur le Queen Mary alors que Nate venait de lui être enlevée par un Tintin presque cocu et très fâché. Il l’avait séduite et plantée là… Elle était disponible, lui aussi… Puis il y avait eu ce contrat sur la tête de Miss Forrester. Là, la vie d’Andreï avait basculé, il avait tout misé – vie, carrière, avenir – pour sauver la peau de Sam. La faire entrer à la ferme, l’obliger à tuer un homme… avait été une erreur. Cette vie ne convenait – en apparence – pas à la miss. Depuis Andreï avait ses idées là-dessus… passons. Il se revit transformé en tapette notoire juste pour sortir Sam d’un contrat bidon, et éclata de rire à ce souvenir inénarrable. Jean-Louis Lemercier… Il avait gagné une nuit en compagnie de Sam pour la soustraire aux assiduités d’un pervers. Il récolta des gnons mais elle l’avait soigné de si belle façon. Fiançailles, séparation, retrouvailles, mariage… la fausse-couche… Nouveaux pleurs. Que s’était-il passé ? Qu’avait-il loupé avec elle ? Sam… son amour… sa vie… Nate… son amour… son avenir… Là était le souci qui avait tout fait foirer. Il existait une attraction jamais démentie entre eux. Alchimie ? Atomes crochus ? Autre ? Le fait demeurait que si Nate était proche, Andreï disjonctait. Le résultat était là : il vivait avec elle et… Sam avait épousé Justin.
Le lendemain, Andreï visita Nate. Enchantée de ses fleurs, elle lui parut néanmoins… embarrassée. Aucune réponse directe à ses questions, la belle enrobée ne livra pas ses secrets. Avec joie, il put la ramener chez eux. Fêtes des mômes au retour de leur mère, à l’annonce de la venue d’une petite sœur. Elles iraient la voir en clinique mais… pas lui. Pourquoi retourner le couteau dans la plaie. Devenait-il raisonnable ?
Afin de soulager Nate à l’approche du terme, les petits Davenport rejoignirent le giron paternel. Le cœur gros, Andreï les avait conduits chez eux et n’était pas entré, la nounou prenant le relai.
La paix régnait.
Attentif et délicat auprès de Nate, il se tracassait du petit moral de sa femme. C’était à cause de lui qu’elle était devenue paria aux yeux de sa famille. Il savait qu’elle en souffrait même sans l’avouer. Aussi lui prépara-t-il SA surprise.
Seul, il fabriqua un portoloin et alla affronter la tribu Sommerby en Nouvelle-Zélande. Si on le sortit par la porte, il rentra par la fenêtre. Aucun des sortilèges répulsifs mis en place par la grand-tante de Nate ne parvint à l’empêcher d’accomplir la mission qu’il s’était donnée. Son obstination lui valut d’être au moins écouté. Beau tableau que de voir Andreï défier l’hostilité du clan soudé. Debout, face aux mines fermées des Sommerby, il les toisa.
Le père se dressa :
Rentrez chez votre dévergondée ! Nous ne voulons plus rien à voir avec elle ! Elle est morte pour nous.
L’un après l’autre, les membres de sa famille exprimèrent leur profond dégoût pour cette femme qui avait brisé un ménage parfait pour s’envoyer en l’air avec un voyou.
Andreï les laissa vider leur fiel sans dire un mot. La dernière du clan qui l’ouvrit fut l’aïeule. De ses petits yeux vifs, elle n’avait cessé de l’épier. Cherchait-elle chez lui les détails qui avaient poussé Natasha à quitter Justin ? Faisait-elle des comparaisons ? Sans le quitter des yeux, elle dit :
En tout cas vous ne manquez pas de culot d’oser venir nous déranger.
Au moins un point en sa faveur ! Andreï embraya :
Excusez mon intrusion. Je suis juste venu vous annoncer que j’épouse Nate demain. Elle n’en sait encore rien et pense que le mariage se fera après l’accouchement.
Elle attend un enfant ? De qui ? s’écria la mère d’un ton où perçait l’intérêt.
Cela fait bientôt neuf mois qu’elle porte notre fils, oui ! N’espérez pas que l’on vous félicite ! grogna une des sœurs de Nate.
Andreï sourit, imperturbable :
Nate m’ayant beaucoup parlé de vous, je m’attendais à votre réaction. Elle ignore ma démarche auprès de vous. J’aimerais beaucoup que vous reconsidériez votre humeur à son égard. Elle n’est pas fautive, c’est moi le coupable.
Peut-être bien que vous lui avez tourné la tête, mais ça change quoi ? se hérissa Arthur Sommerby. Vous ne l’avez pas forcée que je sache ! Elle vous a suivi de son plein gré en abandonnant ses propres enfants et un époux exemplaire ! Rien de ce que vous direz ne changera ce fait !
Elle a beaucoup souffert d’être longtemps privée de ses enfants. Les choses se sont arrangées récemment…
Justin est revenu sur ses décisions ? Nous les approuvions pourtant ! tiqua la mère.
Justin s’est marié la semaine passée et est devenu papa une cinquième fois dans la foulée.
Il nous a parlé de sa femme… Là aussi nous avons approuvé son excellent choix. Il sera plus heureux avec Sam qu’avec notre écervelée de fille.
Les petits Davenport étaient ravis de vivre quelque temps avec nous. Maintenant que Nate est proche de son terme, ils sont repartis chez leur père et… Nate n’a pas beaucoup le moral.
Elle aurait dû y réfléchir à deux fois ! claqua une des sœurs.
Vous ne pensez pas ce que vous dites, riposta Andreï. Nate est une bonne mère. Son seul tort est d’être tombée amoureuse… de moi ! Je croyais que vous appréciez son naturel, sa liberté d’esprit. Trait de caractère hérité de vous, je crois, madame !
Une lueur d’amusement éclairait ses yeux gris. Ceux de l’aïeule pétillaient aussi.
Voilà, vous savez tout. Je vous laisse choisir entre renier une fille aimante ou enterrer la hache de guerre. La condamnerez-vous à rester sans un seul membre de sa famille auprès d’elle le jour de ses noces ? Libre à vous ! Ce sera demain, 18 heures chez nous. Sur ce bien le bonjour, ravi de vous avoir connu.
Un salut général, Sanders transplana dehors où il activa un autre portoloin.
Le soir suivant, Nate rigola devant l’insistance d’Andreï à la parer telle une princesse. Il s’était montré cachotier toute la journée, lui interdisant l’entrée du salon et de la salle à manger.
Je t’assure que tu ne regretteras pas cette soirée, mon amour.
Quand l’officier d’état civil arriva flanqué d’un greffier, la tête de Nate valut le détour. On s’installa au bureau, et attendit. Bientôt Anastasia et son mari se pointèrent. La princesse Orloff était un peu énervée, sans doute déçue aussi que son fils se marie presque à la sauvette. Anxieux, Andreï regarda fréquemment sa montre. Dépité, il finit par hausser les épaules et donner le feu vert à la cérémonie. L’officier ouvrit son registre ; on sonna. Andreï vola jusqu’à la porte d’entrée. Deux minutes plus tard il introduisit les nouveaux arrivants : Mr Sommerby et Granny Patches.
Quelle émotion ! Le bonheur de Nate fut tout un poème entre rires et larmes. A Andreï, elle offrit le baiser le plus fougueux que l’on puisse se permettre de donner en public. Main dans la main, ils assistèrent aux déclarations civiles et signèrent le registre. Félicitations des uns des autres, petites larmes, Andreï embrassa sa femme :
Maintenant, Mrs Sanders, veuillez suivre votre époux !
Dans le salon superbement décoré attendaient les quatre petits Davenport veillés par leur nurse. La surprise était complète !
J’ai demandé à Sam et Justin de venir aussi, histoire de sceller la fin des hostilités… Sam a prétendu que Justin n’allait pas bien.
Il tut avoir reçu le bel isatis patronus de son ex qui tenait à l’avertir des mauvaises intentions de Davenport à son égard. Geste attentionné dont il se moquait un peu. Que pouvait faire Justin contre lui ?
*Moi je l’aurais descendu sans sourcilier, lui n’aura jamais ce cran… sauf qu’il est assez comme moi… avant…*
Le moment n’était pas à la réflexion. Soucieux des détails, Andreï avait engagé un traiteur réputé. Tout fut parfait. Aucun bémol n’entacha la liesse de cette soirée spéciale. Nate, radieuse, s’isola un moment avec sa famille. Ce qu’ils se racontèrent ne le regardait pas. Lui s’occupa des autres invités :
Comment vont Sam et Madelyne ?
Une idée ou sa mère se troubla ? Gerry se montra prolixe en détails sur le plus beau joyau de la terre mais fit tiquer son ex-gendre en parlant de son nouveau :
Dommage que Davenport ne soit pas plus à la hauteur ! J’en reviens pas de ce qu’il lui fait !
Viv et Flore en rajoutèrent, un malaise s’empara d’Andreï. Justin ne changeait jamais les couches ? Il ne se levait pas quand Madelyne pleurait ? Sam était fatiguée… ?
*Irai lui dire deux mots, à celui-là !*
Après le découpage du gâteau nuptial, Les Sanders séniors se retirèrent, les petits Davenport aussi. Déférent, Andreï convia son nouveau beau-père et l’aïeule à rester au moins pour la nuit. Il les installa dans les chambres d’amis. La grand-tante le retint au moment de partir :
Merci Andreï de nous avoir permis de revoir Nate. Elle rayonne et c’est à vous qu’elle le doit.
Je ne veux que son bonheur…
Elle nous a aussi parlé d’un fait étrange… Vous sentez-vous bien, mon garçon ?
Parfaitement bien, rassurez-vous. Je dirais même que je n’ai jamais été aussi bien depuis… ma naissance ! Bonne nuit… Granny.
Il souriait en retrouvant Nate déjà au lit.
Pas trop fatiguée, ma belle ? Tu ne m’en veux pas trop pour les surprises, j’espère.
Non, elle ne lui en voulait pas, se plaignant juste d’avoir failli accoucher de bonheur. Nuit calme. L’état de Nate ne permettant plus de sportives galipettes, les nouveaux époux se contentèrent de se réchauffer mutuellement. Depuis combien de temps dormait-il quand cela arriva ? Il rêvait être en bateau sur une mer d’azur. Deux adorables jeunes femmes en monokini lui conféraient beaucoup d’attentions. Embrasser l’une en caressant l’autre puis changer de partenaire était très… satisfaisant. Nate et Sam ne se jalousaient pas. Il se sentait tel un pacha dans son harem. Pourtant le doux rêve s’arrêta brutalement quand il vit les filles brandir des couteaux sous son nez. Avec des mines sadiques, elles commencèrent à le piquer mieux qu’une saucisse au grill. Il hurla ! Se débattant comme un diable, il tenta de les repousser mais les entailles se multipliaient.
ARRÊTEZ ! AU SECOURS !
Son cri, bien réel, réveilla Nate qui dut s’effrayer du spectacle donné par un Andreï tordu de douleur dans ses draps. Gifles et secousses le ramenèrent à la raison. Souffle court, en sueur, il avoua :
Fameux cauchemar ! Merci de m’en avoir sorti. Ça doit être la digestion… Pardon de t’avoir fait peur… oui, oui, ça va ! Je descends prendre un verre d’eau et un truc pour l’estomac ! Je vais rester en bas pour que tu puisses dormir à ton aise… ça va, je t’assure.
Il n’en menait pas large mais tout semblait en ordre quand il s’installa sur le divan, son Alka avalé. Néanmoins, il ne ferma pas l’œil cette nuit-là. Chaque tentative vit recommencer les coups de couteau. Assez vaseux, vers 6 heures du matin, il se leva préparer les déjeuners. Nate avait une drôle de tête aussi en descendant. Force fut de l’emmener dare dare à l’hôpital. Cette fois était la bonne. Le petit Jarek Vladimir Arthur Sanders vit le jour sans problème sous les yeux émerveillés de son père. Le champagne coula dans la chambre de l’accouchée qui se remettait à la vitesse grand V. Pouvait-il y avoir papa plus fier et heureux de l’être, sûrement pas ! Andreï, quoique claqué, souriait à tout venant. Arthur Sommerby et Granny Patches s’émurent devant la frimousse rougeaude du nouveau-né et embrassèrent la ronde. Moins cependant que la princesse Orloff accourue au premier coup de fil.
Mon Dieu ce qu’elle ressemble à… euh… C’est ton portrait craché, Andreï chéri… sauf qu’il sera roux, ce bonhomme !
On préviendrait les petits Davenport qu’un frère était né. En attendant, le nouveau père se serait bien tapé une sieste. Puisque mère et enfants allaient bien, que les visiteurs étaient partis, Andreï rentra avec l’intention d’écraser une paire d’heures… Raté ! Dès que le sommeil vint, le cauchemar récidiva. Il hurla comme un putois écorché car c’était bien ce qu’entreprenaient les « délicieuses » créatures : l’écorcher vif. Il retourna à la clinique avec une mine épouvantable qui alarma sa femme :
Ça va ! J’ai encore eu ce cauchemar. Pas grave… C’est ma conscience qui travaille !
Il rit. Bourré de caféine, il tint jusqu’au soir. Le lit était tentant. S’y allonger lui ferait du bien. La douche l’avait remis d’aplomb, il se sentait paré à une bonne nuit de repos.
*Tu vas payer !*
Réveillé en sursaut, Andreï chercha la source sonore menaçante. Lumière allumée, il eut beau fouiller les coins, il ne trouva rien. Le sommeil tarda. Quand il le reprit, la douleur le déchira. Il tremblait des pieds à la tête en souvenir des instants affreux qu’il venait de vivre. Titubant, il gagna la salle de bains, s’y rincer le visage. L’eau se teinta de rouge.
*Hein ?*
Le miroir confirma que plusieurs coupures lui balafraient le visage. Mieux, des entailles peu profondes, mais douloureuses, zébraient torse, bras, jambes !
*NDD, il a osé !*
Plus l’ombre d’un doute : Davenport se vengeait ! Il ne dirait rien à Nate ! Pas la peine de l’ennuyer avec ça. Il est des choses que l’on règle entre hommes. C’était sans compter sur la mauvaise foi que Justin avait héritée… de lui.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Lun 10 Jan - 11:31 | |
| Nate était là, à repasser les faits de cette journée singulière. Pas tous pour la réjouir. Surtout l’intempestive apparition de son ex mari et sa douteuse façon d’agir.
*Justin est définitivement atteint de folie pernicieuse !*
Dans sa chambre, transformée pour les effets en exposition florale, la future Mrs. Sanders se livrait donc à des profondes réflexions quand, sans préavis, la porte s’ouvrit, livrant passage à la dernière personne au monde qu’elle se serait attendue à voir : Samantha Forrester, épouse Davenport depuis quelques heures. Pas besoin de grandes explications, rien qu’à voir l’expression arborée par la blonde femme de Justin, on devinait aisément qu’elle était passablement angoissée.
Seigneur…si c’est pas une surprise, ça !...Quel bon vent t’amène, Sam ? Tu n’es tout de même pas venue faire une visite de courtoisie, non ?
Elle s’en voulut presque de se montrer si pointue mais sa visiteuse ne lui en tint pas rigueur, au lieu de cela, elle lui présenta la femme qui l’accompagnait. Une telle Lavinia Dexter, amie, confidente et docteur, comme quoi, l’américaine démontrait son esprit pratique…tout en un ! Sans aller plus loin avec les politesses, Samantha se lança, un tantinet hagarde.
Justin va mal…très mal. Il…est en pleine confusion…
Nate soupira.
De ça, j’en sais aussi quelque chose…Il est venu tantôt !
Cela sembla surprendre un peu l’épouse et fraîche mère.
Ah bon...il est venu te voir…
Oui, et je te donne raison en tout…il déraille pour de bon et m’a tenu des propos…enfin, tu peux t’imaginer lesquels. Dire que c’était l’homme le plus sensé du monde…j’ai dû le frapper et le renvoyer à cris avant qu’Andrei ne débarque et le trouve ici…Voulais pas avoir un duel au pied de mon lit !
L’autre soupira à fendre l’âme mais ne perdit pas la tête, la chose était grave.
Pas que je veuille minimiser le désagrément mais je crains pire…oui, encore pire ! Justin est en train de devenir fou…les pires penchants d’Andrei, toute sa roublardise et perversité…
Allons…exagérons pas…Andrei est peut être…
Sam ne lui laissa pas le loisir de le défendre.
Excuse moi, Nate…on sait toutes les deux comment est Andrei…on ne va pas se bâtir un roman…
Soupir de part et part. L’amie présente ne pipait mot, toute oreille à cet échange si…peu banal.
Je disais donc que ce qu’il y a de plus mauvais chez ton chéri…est retombé sur le mien…
Elle avait prévu que certains changements soient présents mais pas de cette envergure, cela devenait effrayant.
Cela a atteint Justin de plein fouet…Andrei, comme tu dis a changé mais de façon si agréable que personne ne va s’en plaindre. La seule façon de remettre tout en ordre est…de contrecarrer cette …transmutation. Comment ? Ben, la seule façon que je pense soit valable….serait un rituel. Pas un rituel bien simple, cela va de soi…Tout ce qui a à voir avec les esprits est compliqué et demande beaucoup de science.
Cela, tout sorcier moyennement doué le savait. Sam et son amie n’étaient pas l’exception.
Je ne sais pas exactement ce qu’il faut faire mais en rentrant à la maison demain, je consulterai mes grimoires…Il doit bien avoir quelque chose qu’on puisse faire dans le plus bref délai avant qu’il ne se passe un malheur…Au fait, que t’a fait penser, si soudain, que Justin était devenu fou ?
L’aveu de Samantha la scia. Elle était presque sûre que Justin, le doux et merveilleux Justin, avait eu envie de la tuer, en l’étouffant avec l’oreiller.
*À part les changements de personnalité, il doit bien avoir quelque chose de très grave pour qu’il ait l’idée d’agir ainsi…il l’adore, sa blonde…mais s’il est un peu Andrei…que peut il avoir pour…Non ! Quand même pas…ou oui ?*
Samantha ne voulut rien entendre de se livrer au rituel, quel qu’il soit, tant qu’elle ne soit en parfaite forme. Cette prévenance émut Nate mais les derniers mots de la blonde ravivèrent ses élucubrations.
…Non, je ne pense pas qu’il s’en prendra à moi ou à…Madelyne…
*Donc…il y a bien quelque chose…*
Et quelque chose de grave, vu la pâleur qui investissait Mrs. Davenport. Elle assura que ce n’était que de la fatigue, ce qui était plus que compréhensible et prit congé en lui souhaitant de la chance.
Prends soin de toi aussi, Sam…appelle moi en cas de besoin…Oui, espérons que ce ne sera pas le cas !
Restée à nouveau seule, Nate ne savait plus où en donner de la tête. Tous les scénarii possibles passèrent dans son esprit, du plus bénin au plus atroce.
Le lendemain, après une longue nuit désertée de sommeil mais riche en idées, elle fut ravie de voir Andrei se pointer.
Enfin !, elle lui tendit les bras et soupira d’aise avec son tendre baiser, j’en ai marre d’être ici…Ramène moi à la maison !...Au fait, merci de toutes ces fleurs…je me suis sentie dans un jardin…non, le parfum m’a pas gênée…Oui…euh…Justin est bien passé un petit moment dire bonjour…Non…rien de spécial…il a parlé de…sa fille !
S’il avait su ce qui l’avait taraudée toute la nuit… mais pas question de lui en souffler mot, surtout de la façon dont s’était déroulée la visite de son ex ni encore de l’inopinée apparition de Samantha.
Retour à la maison. Le bel accueil de ses enfants tout juste pour le lendemain les voir regagner le foyer paternel vu que dans son état et se sentant comme un cachalot échoué à la plage, il était impossible de s’occuper d’eux.
Paix et silence. En d’autres circonstances, idyllique, là, Nate de justesse si elle ne frayait pas la déprime. Hormones en folie, elle avait la larme facile et la nostalgie à fleur de peau. Sa famille lui manquait, elle n’y pouvait rien mais se gardait bien d’en piper mot, ne voulant surtout pas qu’Andrei aille se sentir coupable de quoi que ce soit. Tout allait si merveilleusement bien jusque là, pas question de gâcher cette merveilleuse harmonie. Après tout, les siens l’avaient reniée, rayée de leurs vies, bannie à jamais…
Depuis la veille, Andrei se montrait très mystérieux. Allées, venues, coups de téléphone. Courtes absences, pas une explication. Nate le laissait faire, sachant que s’il avait quelque chose en tête, rien ne pourrait le faire dévier du chemin tracé. Sa future belle-mère lui avait rendu deux ou fois visite, tissant peu à peu un lien, si non de véritable affection, si de sympathie. Elles s’entendaient, sans s’aimer mais Anastasia la tenait pour artifice des changements survenus chez son fils adoré. Si la Princesse avait su !
Ce jour là, Mr. Sanders disparut encore, sans rien dire mais son sourire espiègle en prenant congé d’elle, lui avait mit la puce à l’oreille. Il concoctait quelque petite surprise, c’était certain. Nate le laissa s’en aller sans poser de questions. Anastasia passa la voir en apportant, comme toujours, des petits cadeaux pour son petit fils. Nate avait ri en ouvrant les multiples paquets.
À ce train là, ce bébé devra le rester au moins dix ans pour pouvoir porter tout ça…Pour les prochains ?...Euh…Anastasia…celui-ci est mon cinquième enfant…je ne pense pas en voir cinq autres…
Elles avaient ri de bon cœur. Ni Nate ni la Princesse ne parvenaient à s’imaginer Andrei en papa gâteau, entouré d’une dizaine de gosses.
À son retour, Monsieur continua avec ses cachotteries et le lendemain, lui interdit formellement l’accès au salon ou à la salle à manger. Début de soirée, le voilà qui insistait bellement pour qu’elle porte la magnifique robe de soirée livré la veille et la parait ni plus ni moins qu’avec des bijoux de famille.
Bon Dieu, Andrei…ta mère ne va sûrement pas aimer que je porte ça…
Il l’avait fait taire d’un baiser puis agrafé la fantastique parure de diamants émeraudes qui selon lui, seyait parfaitement à son teint et à l’éclat de ses yeux.
Je t’assure que tu ne regretteras pas cette soirée, mon amour.
Peu après, elle ne put que lui donner raison…jamais elle n’oublierait ce moment. Il avait tout préparé pour leur mariage. Leur enfant naîtrait dans la totale légitimité.
*Pas de bâtards, chez les Orloff !*
Mais, malgré cette pensée si peu généreuse à l’égard de son chéri, Nate savait que tout cela n’avait rien à voir avec ceci ou cela. L’éclat de ces yeux gris ne parlait que d’une seule chose en cet instant : d’amour et pour elle, rien d’autre ne comptait. Son rêve s’était réalisé.
*On attend encore quelqu’un ?*
Andrei semblait tantôt impatient tantôt déçu mais sembla enfin se résigner et demandait à l’officier du civil de procéder quand on sonna à la porte. Comme si on l’avait piqué avec une aiguille, Andrei bondit et vola ouvrir la porte.
*Mais…il ne peut pas laisser qu’un domestique s’en oc…*
Le reste de sa pensée se dilua dans la plus incroyable des apparitions, au seuil du bureau se tenaient son père et Granny Patches, Nate ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais ne put émettre mot, les yeux noyés de folle émotion. Laissant l’officier avec son registre ouvert, elle s’envola…enfin, bougea le plus vite que son état lui permettait, donner la bienvenue aux nouveaux arrivants et gratifier son chéri du baiser le plus époustouflant permis par la bienséance.
Merci…merci…tu es merveilleux !!!
On laissa les épanchements pour plus tard et la cérémonie débuta. Cela manquait de la pompe solennelle qui avait accompagné son premier mariage et sans doute aussi celui d’Andrei, mais ces instants, si civils, furent chargés de profonde émotion. Au moment de signer le registre, Nate avait les larmes aux yeux et le cœur battant de bonheur fou. Elle était la femme légitime de l’homme, qui comme aucun, avait su si bien bouleverser sa vie. Un baiser merveilleux s’en suivit. Après ce fut le tour des invités. Arthur Sommerby était plus ému qu’il n’aurait voulu le laisser paraître. Sa Nate, son enfant chérie. Oubliant tout, il la serra dans ses bras. Ils pleuraient tous les deux. Pas besoin de paroles. Granny Patches fut tout aussi effusive. Nate pleurait toujours. Anastasia céda à l’émotivité générale et versa aussi sa larme opportune, son mari fut certainement le plus calme de tous, la situation résultait, tout de même, un peu ambiguë pour lui.
Maintenant, Mrs Sanders, veuillez suivre votre époux !
Encore une surprise ? Je ne sais pas si je vais tenir !, rit Nate, resplendissante, en suivant son mari vers le salon. Décoré avec un goût exquis, il offrait le tableau parfait pour cette célébration si spéciale et aussi d’écrin pour les trésors les plus chéris de son cœur : ses enfants. Rien ne manquait. C’était la perfection totale.
J’ai demandé à Sam et Justin de venir aussi, histoire de sceller la fin des hostilités… Sam a prétendu que Justin n’allait pas bien.
*Pas bien ?…si ça a empiré depuis l’autre jour…ce doit être alarmant, là !*
Elle embrassa son mari.
C’est mieux ainsi, mon chéri…Je t’adore…tu fais de moi la femme la plus heureuse au monde.
Le repas fut magnifique. Pas un détail n’avait échappé à Andrei. L’humeur générale était au bonheur mais une fois porté le dernier toast, Nate n’y tient plus et prenant son père et Granny Patches, chacun d’un bras, les entraîna vers le petit séjour intime. Ils avaient trop à se dire.
Vous ne pouvez pas vous imaginer comment…combien heureuse je suis de vous avoir avec moi en ce moment. Je…Je suis désolée d’avoir…fait tout…de cette façon…
Papa Sommerby souffla, un peu énervé au souvenir des nombreuses fautes de sa fille.
Oui, on ne peut pas dire que tu t’y sois prise de la meilleure des façons, c’est un fait. Cela a été un coup dur à encaisser.
Mais, ton mari a tenu à nous faire une visite et pas à dire, ce jeune homme n’a pas mâché ses mots.
Andrei est allé…en Nouvelle Zélande ?
Où d’autre pouvait il aller pour nous y trouver tous, mon petit !?, s’enquit Granny Patches, avec un petit rire malicieux, il n’a pas froid aux yeux, ton Andrei.
Nate sentit que son cœur éclatait de fierté et d’amour.
On peut dire ça de lui…à part qu’il est merveilleux !
Soupir paternel.
Suffit de voir comme tu resplendis, ma fille…Euh…on a su, du même coup que Justin a…épousé sa nouvelle compagne et a été papa…Je…me demande qu’a bien pu se passer entre vous, pour que cela finisse de la sorte, j’ai toujours pensé que vous étiez parfaitement heureux…
C’est le moment que choisit l’héritier Sanders pour remuer brusquement ce qui tira une petite grimace à Nate. Arthur s’alarma.
Tout va bien, mon ange ?
Là, elle éclata carrément en sanglots en se jetant dans les bras de son père. Il l’avait toujours appelée ainsi et depuis des mois, qui lui avaient semblé une éternité, elle avait cru ne jamais plus l’entendre.
Oui…Oui, renifla t’elle, tout va bien…Tu me manquais tant, Papa…
Granny Patches soupira en épongeant une larme. Entre Nate et son père, il y avait toujours eu une relation très spéciale, beaucoup plus étroite qu’avec sa mère. Arthur avait souffert comme un damné en reniant de sa fille préférée.
Maintenant, tout va bien, dit-elle, sentencieuse, on n’en parle plus… Oublions ces moments si durs et fêtons le bonheur de cette adorable têtue ! Ta mère et tes sœurs t’envoient leurs souhaits.
Cela voulait tout dire. Nate ne posa plus de questions. À quoi bon ?
Harmonie familiale retrouvée, les Sommerby et Mrs. Sanders rejoignirent les autres. La réunion ne s’allongea pas trop question de ne pas fatiguer la jeune mariée et future mère. Andrei insista bellement pour que son beau-père et Granny soient, au moins pour cette nuit, leurs invités, ce qu’ils finirent par agréer de bon cœur.
Nate laissa son mari conduire les invités à leurs chambres et gagna sa chambre. Son seul désir, prendre une douche, se rafraîchir et se mettre au lit. Quand Andrei la rejoignit, elle reposait, ravie, appuyée contre ses oreillers.
Pas trop fatiguée, ma belle ? Tu ne m’en veux pas trop pour les surprises, j’espère.
Elle lui passa les bras autour du cou et l’embrassa.
T’en vouloir ? Tu es fou…je t’aime un peu plus que ce matin, si possible…mais à dire vrai, j’ai cru que j’allais accoucher de tant de bonheur…et ton fils n’a pas arrêté de remuer…sens le…
Elle prit sa main et la guida sur son ventre énorme.
Je crois qu’il est impatient de venir…Andrei…dis moi que je ne rêve pas ? C’est bien vrai tout ce qui se passe ?
Elle ne rêvait pas. Le baiser dont il l’octroya était bien réel tout comme son étreinte rassurante alors qu’elle cherchait une position confortable pour dormir.
Son rêve délicieux et paisible fut interrompu, abruptement par un hurlement de terreur. Affolée, Nate passa du sommeil profond à l’état d’alerte maximale.
ARRÊTEZ ! AU SECOURS !
Mais qu’avait il à hurler de la sorte !? Le plus évident était que son mari chéri était proie d’un horrible cauchemar….très réaliste, si on tenait compte qu’il se tordait pratiquement de douleur.
Andrei…Andrei…Réveille toi ! Andrei, ce n’est qu’un rêve…
Rien n’y faisait, elle le secoua, tapota ses joues puis finit par lui envoyer carrément une paire de gifles pour le faire revenir à lui. Il émergea, baigné de sueur, haletant, perdu.
Mon amour…tout va bien…tout va bien !, elle caressa doucement son visage, ses cheveux, l’embrassa tendrement sur le front, ce n’était qu’un rêve…
Réagissant lentement il avoua avoir fait un fameux cauchemar en supposant que c’était sans doute la faute à la digestion.
Pardon de t’avoir fait peur…
Elle sourit, attendrie.
Un peu, oui…à vrai dire…tu es sûr que ça va bien maintenant !?...Rendors toi plutôt…
Oui, oui, ça va ! Je descends prendre un verre d’eau et un truc pour l’estomac ! Je vais rester en bas pour que tu puisses dormir à ton aise… ça va, je t’assure.
Elle n’avait aucune envie de le voir déserter le lit mais il insista de la laisser dormir tranquillement. Nate tarda assez à retrouver le sommeil. Combien de temps se passa t’il entre cet instant et la première contraction ? Elle sut, sans aucun doute cette fois, que le moment était bel et bien venu. Ce n’était pas son premier enfant. Pas besoin d’en faire un foin. Elle se leva, s’habilla et descendit
Andrei…Ça y est !
Quatre heures plus tard, elle tenait dans ses bras son fils Jarek. Andrei avait été avec elle tout le temps et semblait un peu hébété encore, en contemplant son fils.
Champagne et félicitations. Papa Sommerby et Granny Patches étaient tout émoustillés de leur opportune chance. Papa, ému aux larmes quand son beau fils lui annonça les renoms que porterait le petit…Jarek Vladimir Arthur…La Princesse, chère femme, eut l’heur de faire un commentaire que seule Nate saisit au vol :
Mon Dieu ce qu’il ressemble à… euh… C’est ton portrait craché, Andreï chéri… sauf qu’il sera roux, ce bonhomme !
*Hein ? Qu’est ce qu’elle a voulu dire !? *
Au bout d’un moment, elle avait complètement oublié cela.
Mr. Sanders était rentré à la maison pour s’y reposer un peu mais sa tête en revenant ne valait rien, il semblait plus fatigué qu’en s’en allant. Son explication : le même cauchemar de la veille était revenu le hanter.
Pas grave… C’est ma conscience qui travaille !
Il en avait ri, elle aussi. Après tout, des raisons pour être nerveux ne lui avaient pas manqué, ces derniers temps. Mais le lendemain, son air d’insomniaque tourmenté ne lui dit rien de meilleur…et le jour d’après, cela n’avait en rien amélioré. Au troisième jour, Andrei les ramena à la maison, elle et son petit Jarek. Il avait empli chaque pièce de fleurs. La chambré de l’enfant était un rêve parfait, la nurse engagée correspondait en tout détail à la fantaisie de toute jeune mère. Elle ne devait que se reposer et être heureuse. Difficile autrement dans ces conditions merveilleuses.
Mais…toujours un mais…
Il ne se passait pas une nuit sans qu’Andrei ne se réveille en hurlant comme un possédé. Il insistait que ce n’était que cela…des cauchemars, mais quand il déserta leur chambre pour aller squatter le divan de son bureau parce qu’il ne voulait pas la réveiller, Nate commença à se faire sérieusement de la bile. Jarek était inquiet. Sûrement un petit colique de rien du tout, si commun aux petits enfants. Nate s’était levée et rejoint Miss Bantry à la nursery.
Je m’occupe de lui, Jemina…retournez vous coucher…Non, ne vous faites aucun souci, je vais bien…
La nurse se retira. Elle berça le petit jusqu’á ce qu’il se calme et s’endorme paisiblement, le remettant dans son berceau, Nate songea aller dormir elle aussi mais changeant d’avis, descendit silencieusement l’escalier. La porte du bureau était fermée. Andrei devait dormir. Tout doucement, elle fit tourner le loquet et ouvrit. Non. Il ne dormait pas, au lieu de cela, faisait les cent pas, usant le tapis.
Andrei…
Il s’arrêta. Déjà à la lumière tenue de la lampe, il avait un air qui ne disait rien qui vaille. Nate s’approcha et se glissant dans ses bras, posa la tête contre son épaule.
Dis moi…Dis moi ce qui se passe, mon amour…Encore ce cauchemar ?...Toujours le même ?...Raconte le moi, ça aiderait peut être…
Mais il ne voulut pas dire un mot à ce sujet. Faudrait tirer ses propres conclusions.
Comme tu voudras, mais c’est pas de cette façon que nous pourrons arranger quelque chose !
Elle s’écarta pour le regarder et caresser doucement sa joue râpeuse.
Je t’aime, Andrei…à l’étage dort notre fils…nous avons, tous deux besoin de toi…laisse moi t’aider…à deux, nous viendrons à bout de quoi que ce soit…s’il te plaît, mon chéri…dis moi ce qui est en train de se passer !
Il était réticent à parler ce qui finit par l’alarmer encore plus.
Cela ne peut pas être si affreux que ça…ou oui ?...Bon sang, Andrei Sanders, arrête de tourner autour du pot et parle d’une bonne fois pour toutes…et…Diables ! C’est quoi ça ?...Andrei ta chemise…elle est tachée de sang…parce que c’est bien du sang, ça…
Sans faire attention à ses faibles protestes, elle l’entraîna plus près de la lumière et examina de près la tache suspecte avant de déboutonner la chemise de gestes décidés. Un cri mourut sur ses lèvres. Le torse de son mari apparaissait zébré de coupures fraîches, pas profondes mais coupures enfin.
Andrei…que…que signifie ceci ?
La chemise fut ôtée sans plus. Le mal s’étendait à son dos, à ses bras et sans peine, Nate devina qu’au reste du corps. C’était pire que ce qu’elle avait supposé. Il ne disait rien, penaud presque, il subit un examen en toute règle. Avec un profond soupir où perçait l’angoisse, sa femme releva la tête et braqua son regard dans le sien.
Je ne veux pas m’imaginer que tu pratiques l’auto flagellation ou encore que tu te plais à mutiler ton corps donc il ne me reste qu’une théorie…quelqu’un d’autre se complaît à te tailler en pièces ! Parle !
L’Andrei de jadis l’aurait sans doute envoyée se faire voir ailleurs en termes sans douceur. Cet Andrei là, baissa la tête, contrit et débita une histoire d’horreur et torture qui durait déjà assez longtemps. Pas de nuit de repos depuis, chaque fois qu’il s’endormait cela recommençait. Cela expliquait parfaitement son état d’abattement, la perte de poids qui devenait évidente, ses nerfs tendus…
Et, tu pensais te taire longtemps ? À quoi pensais-tu, mon amour ?...Ah, trouver une solution ?...Ben oui, c’est une bonne idée. Je suppose, que comme moi, tu as une petite idée sur ce qui arrive, non ?
Bien sûr qu’il en avait une.
M’en doute…et parie que c’est la même que moi…Voodoo ! Mon chéri, ceci est très grave et il faut y mettre une fin…il faut arrêter Justin…parce que tu ne te doutes pas un instant que c’est lui qui est en train de se livrer à ce jeu macabre…Je savais qu’il n’allait pas bien…mais pas que cela avait atteint un degré pareil.
Andrei suivit le décours de ses idées avec intérêt et ne protesta pas quand elle l’entraîna à sa suite à leur chambre. Une fois là, elle soigna chaque petite plaie visible puis le fit s’allonger.
Cette nuit tu vas dormir, mon chéri…
Il voulut savoir comment elle parviendrait à faire cela et Nate se contenta de l’embrasser tendrement.
Ma magie peut faire beaucoup de choses, tu le sais bien…mais je ne suis qu’une sorcière blanche, mon pouvoir peut contrecarrer la magie noire qui t’attaque mais pas l’annuler…pour ça, il faudra faire plus…beaucoup plus mais ce sera déjà pour demain…Maintenant, ferme les yeux et ne dis rien !
Elle le parcourut lentement de sa baguette puis de ses mains en récitant des incantations anciennes, créant autour de lui une aura protectrice. Quelques minutes plus tard, Andrei dormait profondément, comme il ne l’avait certainement pas fait depuis Merlin sait combien de temps.
*J’en connais un qui doit râler ferme, en ce moment !*
Elle le veilla pour le reste de la nuit, attentive à chaque geste ou soupir, décidée à maintenir, à n’importe quel prix l’écran de protection.
Au matin, elle envoya son doberman argenté avec un message pour Samantha Davenport, lui donnant rendez vous hors d’yeux et ouïes indiscrets. Elles se retrouvèrent un peu plus tard, dans un parc, chacune poussant le landau avec son bébé. Deux jeunes mères qui promènent leurs enfants.
Désolée de t’avoir convoquée si cavalièrement, Sam mais là, la chose a atteint un point ou cela devient intenable. Comment est le comportement de Justin, ces derniers temps ?...Ah bon ? Il est tranquille et a même un petit air satisfait ?...Et pour cause, qu’il est satisfait, le bougre…Il joue avec de la magie noire, Sam…il fait du voodoo sur Andrei…
L’autre sembla épouvantée avec ses aveux mais, impossible autrement, prête à collaborer pour mettre fin à tant d’horreur. Selon Samantha, Mr. Davenport se portait comme un charme, son comportement laissait parfois à désirer, surtout comme père…il ne faisait rien. Ne s’intéressant pas trop pour ses enfants et encore moins pour la petite Madelyne à laquelle il n’avait pas changé une lange ni donné un biberon. Il était absent le plus clair de la journée et la nuit, abandonnait indéfectiblement son lit pour aller s’enfermer dans son bureau d’où il ne ressortait qu’au petit jour.
Son bureau, hein ? Intéressant de savoir ce qu’il y mijote….Ah, tu as essayé d’y entrer ? Impossible, je me doute bien…Justin aime faire ses petits mystères, son bureau a toujours été…son antre. Bon, il va falloir qu’on y arrive, à forcer l’entrée.
Sam avoua avoir tout essayé, en vain. Nate la rassura, elle possédait certains talents pas trop orthodoxes dont elle ne parlait pas volontiers.
Pas de souci, je n’ai jamais dévalisé la Banque d’Angleterre !...Dès que tu seras sûre qu’il n’est pas dans les alentours pour un bon moment, appelle moi…Le plus vite sera le mieux, Andrei ne va pas tenir le coup trop longtemps…
Madelyne gazouillait. Nate se pencha pour la regarder.
Quel petit bout de chou adorable…si blonde…Jarek est plutôt rouquin…tare Sommerby…
*Blonde et roux…comme Phil et Tony…si semblables et si différents…Oh, mon Dieu…c’est donc ça !*
En se redressant, son regard rencontra celui de Sam, mitigé, angoissé. D’un geste plein de conciliation, elle la serra très brièvement dans ses bras.
Tu n’as rien à craindre, Sam…tes raisons t’appartiennent. Ma bouche est scellée. Faudra éviter qu’Andrei les voit ensemble…c’est tout !
L’après midi même, l’isatis de Mrs. Davenport l’avertit que le chemin était libre. Laissant son trésor sous la bonne garde de Miss Jemina Bantry, Nate transplana chez son ex-mari. Lavinia Dexter était revenue prêter main forte.
Bon on est pas les anges de Charlie mais ça devrait suffire, mesdames !
Talents conjugués à l’appui, quelques sorts d’hermétisme furent brisés. Elles s’introduisaient dans l’antre sacro saint.
S’il n’a pas changé ses manies, le coffre fort devrait se trouver…là !, Nate signala le magnifique bar aménagé, Justin est très moldu à ses heures !
Cachette trouvée, restait encore à forcer les sécurités du fameux coffre, qui n’étaient pas des moindres. Se mordant le bout de la langue, la rouquine s’adonna à la tache sous l’œil vigilant de ses complices qui, armées de leurs baguettes étaient prêtes à parer n’importe quelle contingence. Quelques clics et pas mal de nerfs à fleur de peau plus tard, Nate fit jouer la manette et le lourd panneau s’ouvrit, livrant ses secrets…posée sur quelques documents et liasses de billets, se trouvait une effigie, assez grossière d’Andrei.
*Bingo !*
Mais leur joie fut de très courte durée…Un grondement dément les fit se retourner tout de go. Justin, décomposé de rage, se tenait sur le seuil.
*Et m***e !*
Baguette brandie, il semblait prêt à les pulvériser sur place mais hésita une fraction de seconde, se demandant sans doute par qui commencer. Nate, elle, n’hésita pas.
STUPEFIX !!!
Justin s’abattit comme un poteau.
Vous avez entendu le truc de la cave sombre…c’est le moment de l’employer ! |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Jeu 13 Jan - 23:47 | |
| Vengeance ! Quel doux nom, finalement. Sans le vouloir, le ressentir lucidement, le refouler, ce sentiment le possédait quasi complètement. Côté extérieur, Justin était certain de blouser son monde. Personne ne nierait qu’il n’était pas « exactement » comme… avant mais ses subterfuges fonctionnaient. Attentif et prévenant vis-à-vis de Sam, ouvert à SES enfants, il n’y pouvait rien mais n’encadrait pas Madelyne. Seul un aveugle aurait ignoré certains traits caractéristiques des Orloff. Même chez une si jeune personne, cette nouvelle Miss Davenport… n’en serait jamais une. Ce bébé n’y était pour rien. Il n’avait pas désiré être là. Sam l’avait-elle voulu ? Sanders oui, selon toute probabilité. Qu’importe ! Andreï paierait ses multiples forfaits.
Se plonger dans la magie noire n’était pas évident pour quelqu’un d’aussi droit que Justin Davenport. Sans la mutation qui s’opérait sournoisement en lui, jamais il ne serait arrivé à un résultat quelconque. Sous divers prétextes, l’ex-Auror déserta souvent le foyer familial. Jogging, golf, balade hippique, tout était bon pour s’éloigner de chez lui. Certes, il était redevenu un sportif accompli depuis que ses forces étaient « miraculeusement » réapparues. N’empêche qu’il ne se rendait pas toujours là où il était censé aller... L’Allée des Embrumes était devenue son point de chute privilégié. Là, il faisait des achats… spéciaux, et des… rencontres. Si on l’avait reconnu dans ses virées suspectes, on aurait été assez surpris des nouvelles fréquentations de Mr Davenport. Hommes encapuchonnés, femmes douteuses… de quoi donner à penser au retournement de veste. Justin s’en fichait. Il poursuivait un but précis, et comptait bien l’atteindre coûte que coûte. De contact en contact, aidé par ses lectures nocturnes, il progressa rapidement.
Bien sûr, Sam le regardait parfois bizarrement. La pauvre devait se demander où était passé l’homme dont elle était tombée amoureuse un soir de pari à… la « Folie ». Sa belle, sa splendide folie partie en fumées à cause de… Si, si, si… ` Inutile d’avoir des regrets. D’ailleurs dans l’état actuel des choses, Justin n’en avait qu’un : ne pas avoir réglé le compte de Sanders plus tôt. Il devait réparer ce manquement.
Celui qu’il devait rencontrer cet après-midi-là avait multiplié les mesures de protections. À l’entrée du local prévu siégeaient deux sbires à la mine patibulaire qui dépouillèrent le visiteur de sa baguette avant de le laisser pénétrer plus loin. L’homme en robe sombre était assis à une table basse sur laquelle brillaient faiblement plusieurs bougies. A ses mains, Justin sut avoir affaire à un sorcier étranger. L’accent africain qui s’éleva le lui confirma :
Tu as voulu rencontrer Ismir Rassoun, il est là. Qui es-tu, quels sont tes vœux ?
Mon nom importe peu. Je paie… cher pour apprendre à ensorceler quelqu’un à distance, sans traces.
Tu veux l’amour… ou la haine ?
Je veux la mort !
Un rire feutré s’échappa dessous le capuchon qui couvrait la tête de l’individu. Quand il la releva face à son « invité », Justin ne sut réprimer un sursaut de surprise. Les yeux qui le fixaient ne le voyaient pas. Un voile opaque couvrait les iris : Ismir était aveugle.
Oui, je suis aveugle, néanmoins je vois très bien en toi. Une haine profonde t’habite. Pourtant… ( ses sourcils gris se froncèrent) tu n’es pas d’un naturel rancunier…
Tout le monde change un jour ou l’autre. Je n’ai pas à me justifier. M’aiderez-vous oui ou non ?
Pourquoi être si pressé ? J’aime savoir à qui j’ai affaire. Ismir Rassoun ne délivre pas ses enseignements à n’importe qui, n’importe comment. Donne-moi ta main.
La paume moite de Justin fut emprisonnée par celle sèche aux doigts noueux de son interlocuteur.
Je vois des tourments… des conflits… Une part de toi veut la mort de celui qui t’a privé d’une… femme. L’autre part refuse cette décision en raison du… cadeau d’une autre femme. Tu n'es plus toi, le sais-tu ?
Par quelle magie ce gars saisissait-il si bien les problèmes de Davenport ? Pas à dire, il avait frappé à la bonne porte.
J’en suis conscient et je m’en moque. J’exige réparation pour tout le mal que ce type m’a causé et me cause encore. Lui mort, je pourrai peut-être vivre en paix sans avoir à me demander ce qu’il va inventer pour reprendre son… cadeau.
Et aussi récupérer ta première femme, non ?
La colère investit Justin. Il cria presque :
NON ! Elle a jeté aux orties notre union. Elle s’est fichue de ma poire de maîtresse façon. Si elle souffre de la perte de cet homme, ce sera… tant mieux !
Belles motivations, rigola l’autre. Je te sens déterminé. Avec ou sans mon aide, tu ne te détourneras pas de ton but. Autant que ce soit moi qui te guide… Tu seras satisfait. Connais-tu le vaudou ?
Ben… Comme tout le monde… C’est un genre de sorcellerie qui se base sur l’esprit…
L’esprit… Les esprits… le passage entre les deux mondes. Nos rites et croyances dépassent de loin ce que le commun des mortels imagine surtout quand s’y ajoute la magie noire… Il faudra te procurer quelque chose appartenant à ta victime : cheveu, ongle ou une photographie.
J’aurai ça facilement.
Une liste d’ingrédients et des conseils se débitèrent avec des précisions de rituel et formules. Un gros sac de gallions changea de mains :
En y mettant du tien, les résultats ne se feront pas attendre. Si tu as besoin d’autre chose, reviens.
Joyeux, Justin se procura les divers ustensiles requis. Obtenir un cheveu d’Andreï l’obligea à une visite éclair chez Nate sans que personne ne s’en doute. Tous les soirs, il répéta le rituel après avoir confectionné la « poupée » à l’effigie de Sanders. Il était assez énervé en tranchant la gorge d’un vaillant poulet au-dessus de la représentation humaine. Les formules fusèrent haut et clair alors que le sang frais se répandait sur la cire modelée. Brûler une épingle rituelle, la faire glisser sur la poupée, lui procura une jouissance rarement ressentie. Il planait. Un coup direct à la poitrine était tentant mais il voulait faire durer le plaisir du supplice. Si tout fonctionnait comme prévu, bientôt Andreï n’oserait plus fermer l’œil sous peine d’être savamment torturé. Mieux, par ses lectures, Davenport apprit à glisser son esprit dans celui de sa victime. Il put alors, nuit après nuit, infecter Sanders et se repaître des souffrances imposées. Son manque personnel de sommeil, il le compensa par des stimulant ou en s’octroyant des siestes à l’abri de l’habitacle de sa voiture. Ainsi Sam ne remarqua pas sa fatigue, et endormie magiquement la nuit, elle ignora tout ce qui se passait dans le bureau de son mari. Connaissant maintenant Sanders sur le bout des doigts, il tablait sur ce caractère taiseux afin de poursuivre son œuvre en sécurité.
*Jamais il ne s’en plaindra !*
C’était sans compter sur Nate… Cette nuit-là, pour la nième fois, Justin avait lacéré l’effigie de Sanders, lisant dans son esprit sa terreur et ses angoisses. Puis, brutalement, son influence cessa. Quoiqu’il tentât, il lui fut impossible de reprendre le contact.
*NDD, c’est Nate ! Cette s****e le couvre de sa protection !*
Dépité, furieux, il cessa le rituel, rangea l’ensemble dans son coffre, et alla rejoindre Sam qui dormait profondément. Un instant il fut tenté de la réveiller pour s’imposer à elle, histoire de se défouler. Le peu de Justin qui restait en lui refusa cette pratique barbare. Il se retourna sur le côté, et ne tarda pas à ronfler.
Grognon au matin, il conduisit les filles à l’école, laissant les jumeaux à la garde de la nounou, Sam allant promener la dernière-née au parc. Il ne rentra chez lui que pour y manger un bout et lire son courrier, sans se soucier de l’œil scrutateur de Sam posé sur lui. Une courte sieste plus tard, il déserta à nouveau les lieux pour rejoindre l’allée des Embrumes. Les sbires d’Ismir Rassoun le laissèrent rencontrer le mage qui le reconnut à peine introduit :
J’aime ton eau de toilette, ami. Assieds-toi. Des soucis ?
Ça fonctionnait bien mais, hier, je crois que mon ex a fait un barrage… elle est Néo-Zélandaise…
Se grattant le menton, le mage sembla songeur :
Hum… magie ancienne… difficile à contrer… Je ne vois qu’un moyen mais je doute que tu l’agrées…
Dites toujours !
Un sacrifice… mais pas n’importe lequel… un sacrifice humain !
Justin encaissa mal le coup. Il vacilla légèrement.
Impossible ! Je ne pourrai pas faire ça.
Alors, je ne peux rien pour toi. Adieu.
Davenport se leva et s’enfuit respirer dehors. Les idées à l’envers, il se sentait vraiment mal d’autant que son mauvais côté le harcelait :
*Tu n’aimes pas Madelyne… C’est la fille de celle que j’aime donc je l’aime aussi ! Mais c’est la fille d’Andreï… ça ne change rien ! Il l’ignore. C’est Sam qui souffrira… je ne le veux pas !*
Débattant cruellement avec lui-même, il se retrouva Merlin sait comment devant chez lui. Sitôt le seuil franchi, il nota des anomalies. Tout était anormalement silencieux. Seuls quelques bruits ténus émanaient de…
*Mon bureau ! NDD !*
Baguette brandie, il y fonça. Là, prise en flagrant délit d’effraction se tenaient trois femmes.
Vous n’avez pas le droit ! s’étrangla-t-il de rage.
Qui allait-il frapper en 1er ? Sûrement pas Sam ! Le bois chercha sa cible, son hésitation lui coupa l’effet de surprise, un stupefix fusa.
Un carillon dans la tête, les muscles endoloris, Justin sursauta sous l’enervatum appliqué sans ménagement par son ex. Encore sonné, il se tortilla dans les liens qui l’entravaient :
Qu’est-ce qui vous prend ? Êtes-vous folles ?
L’amie médicomage de Sam ricana :
Je crains que ce ne toi, mon cher ami, qui le sois complètement. Depuis quand pratiques-tu la magie noire ? Ne nous prends pas pour des idiotes, on a saisi ton manège.
Nate semblait avoir du mal de contenir ses humeurs, elle l’abreuva de nombreux qualificatifs bien sentis en raison de ce qu’il faisait subir à Andreï nuit après nuit.
C’est ça, plains-le ! cracha-t-il venimeux. Il n’a pas encore reçu la moitié de ce qu’il mérite ! Mais, bien sûr, on ne peut pas toucher un cheveu du « cher » Andreï. Ce que lui m’a fait endurer n’a pas d’importance, n’est-ce pas ? Ça vous était bien égal qu’il fasse de ma vie un enfer et me fasse crever à petit feu pour, dans un élan de « générosité », me ressusciter à l’état de loque ! Le « bon » Justin devait passer l’éponge ? Eh bien NON ! MARRE D’ÊTRE BON, MARRE D’ÊTRE CON !
L’une après l’autre ses femmes tentèrent de lui expliquer qu’il n’était pas dans son état normal. Que sans doute, lors du rituel destiné à le remettre sur pied, un événement contrariant s’était produit. Il n’en fulmina que de plus belle :
Qu’est-ce qui vous a pris de vous mêler de ça ? Je ne vous ai pas attendu pour agir. Alix voulait m’aider, elle ! Ses potions commençaient à faire de l’effet. C’est donc encore à cause de vous que je suis ainsi… et je vous en remercie !
Un sourire sadique tordit ses traits. Les dames parurent offusquées.
Si ça te plaît d’être ainsi, ça ne plaît pas à Sam je te signale, claqua Lavinia. Que tu le veuilles ou pas, on va s’arranger pour remettre les pendules à l’heure. Maintenant, dors et fous-nous la paix !
Une baguette s’agita, Justin ferma les yeux. Nate, Sam et le docteur le laissèrent au pays des rêves afin de discuter de son cas, en bas. A peine seul, Davenport souleva les paupières.
*Vive le protego informulé !*
Probablement était-ce à son épouse qu’il devait d’être installé sur son lit et non au fond de la cave. Au moins lui épargnait-elle une position inconfortable en lui offrant une possibilité d’évasion. Sa situation n’était cependant pas très glorieuse. Ficelé tel un saucisson, sans rien de tranchant à disposition… qu’entreprendre d’autre que la reptation ? En tortillant épaules et bassin, Justin parvint au bord du matelas. D’un coup de reins, il s’assit puis bascula les jambes hors du lit. Atteindre la salle de bains lui demanderait des bonds à répétition dont le son éveillerait les soupçons. Son regard refléta la ruse. Si ces dames le croyaient dépouillé de tout, elles se trompaient lourdement. Se mettant debout, Davenport entreprit une lente progression vers le radiateur. Par chance, on lui avait attaché les mains sur le ventre. Il lui suffit de s’agenouiller près du coffre enfermant l’appareil de chauffage et de chipoter le panneau latéral qui pivota. Quelques gesticulations plus tard, les doigts de Justin se refermèrent sur une des multiples baguettes planquées en douce dans la maison. Devenu paranoïaque par la force des choses, Justin avait pris ses précautions à l’abri de tous. De la cave au grenier, chaque pièce recelait une cache secrète. Ollivander en avait tiré une tête quand l’ex-Auror lui avait acheté plus d’une dizaine d’instruments, pratiquement tous identiques. Maintenant qu’il était armé, Davenport se libéra de ses liens en un bref mouvement. Il devait faire vite. Ces dames risquaient de vouloir jeter un coup d’œil à leur prisonnier. Quels plans mijotaient-elles ? Il n’en avait rien à cirer, il ne serait plus là pour les écouter. Malheureusement la baguette de la chambre ne convenait pas trop aux sorts d’attaque. Pressé par le temps, il récupéra discrètement son révolver dans son bureau, puis transplana chez Nate.
Allongé sur le divan du salon, Sanders piquait un gentil roupillon. N’avait-il pas à récupérer beaucoup de sommeil en retard? L’abattre là, tel un chien galeux aurait été facile. Justin voulait qu’il voie la mort en face et qui l’y envoyait. Il clama :
Tu vas payer !
Marrant de voir son ennemi sursauter de terreur. Ses réflexes le firent chercher sa baguette ; un expelliarmus fusa.
… oui, je suis venu achever mon « travail » … Un contrat sur ta tête ? On peut dire ça. Je suis à la fois commanditaire et exécuteur. Marrant, non ? … te laisser te défendre ? Tu rêves Andreï. Tu as foutu ma vie en l’air, tu voulais me voir crever dans les pires souffrances. Je t’aurais bien rendu la pareille mais on ne m’en laisse pas le temps… Qui ? Devine… Oui, ta brave petite femme fait amie amie avec la mienne… N’essaye pas de m’endormir ni de rallonger ton sursis, t’es cuit. Adieu, Sanders, puisses-tu pourrir en enfer.
L’arme cracha son feu. La 1ère balle atteignit Andreï au bras, la seconde lui pulvérisa la rotule, Justin rigola :
Cette fois, c’est la bonne !
Il visa la tête. Ce qui se passa ensuite le prit de court. Nate et Sam, dans toute leur splendeur furibonde, se matérialisèrent entre les opposants.
*Tire, tire !* réclamait la mauvaise voix de sa conscience malade.
Tirer sur elles ? Jamais ! Sa main gauche agita sa baguette pour un repulso violent mais, Lavinia, dans son dos, fit léviter un lourd vase au-dessus de son crâne. Il perdit complètement la notion des événements.
Lorsqu’il se réveilla, il était en short, dans une sorte d’arène sableuse délimitée par des assemblages bizarres de pierres. Près de lui, s’éveillant aussi dans le même appareil, Andreï se relevait l’air ahuri.
Je croyais t’avoir descendu. Va falloir que je remette ça ! Pourquoi t’es peint en bleu ?
Ils s’affrontaient méchamment du regard, se lançant des piques savoureuses, quand un ricanement fusa de l’extérieur du cercle. Un type de petite taille, peinturluré de la tête aux pieds, les toisait.
Il est temps de séparer ce qui a été unis inconsciemment : battez-vous !
Sanders éclata d’un rire mauvais : il refusait. D’autres voix que celle de l’emplumé de service s’ajoutèrent. Sam et Nate, étrangement vêtues aussi, insistèrent tour à tour. Selon ce que comprit Justin, ils étaient en Nouvelle-Zélande, sur un bout de terre sacré réservé à des rituels ancestraux. On les y avait amenés… de force. A eux de « jouer » s’ils voulaient redevenir eux-mêmes. Sanders ne semblait pas vouloir marcher dans la combine. Fallait croire qu’avoir intégré l’esprit de Justin lui plaisait drôlement. Davenport lui, ne savait pas trop. Qu’est-ce que cela signifiait au juste « redevenir lui-même » ?
Tentant de réveiller ses souvenirs antérieurs à la mutation, Sam émit alors un vibrant hommage à son égard.
*Pas à dire, tu devais être un type bien... auquel elle tient !*
Il s’en fichait d’être un type bien… Sauf que Sam avait vachement l’air d’y tenir… Pour ces yeux magnifiques criant d’amour, il se décida. Avec un rugissement de bête sauvage, il unit ses mains et expédia une manchette à foudroyer un bœuf dans la mâchoire de Sanders.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 14 Jan - 23:15 | |
| Rien n‘était comme avant. Rien n’était comme elle l’avait rêvé. Sam tournait en rond, sans trop savoir comment s’y prendre. Pour le moment jouer les douces innocentes lui sembla le mieux à faire. Ne pas éveiller le moindre soupçon tout en surveillant Justin. Or, surveiller un homme devenu si esquif ne s’avérait pas tâche facile. Il était hors de sa portée le plus clair du temps et quand il était là, son comportement était si normal, enfin presque si normal, qu’elle en arrivait à mettre en doute sa naissante paranoïa.
Lavinia était la complice parfaite mais l’impossibilité de trouver encore des excuses valables pour expliquer sa présence chez les Davenport l’avaient obligée à rallier son chez soi, à la lointaine Miami, que pour son bonheur sa belle mère avait enfin déserté. Samantha savait pouvoir compter avec elle pour tout et n’importe quand, suffirait d’envoyer un message et Lavinia accourrait !
Les jours passant, Sam ne pouvait pas ignorer un détail blessant. Justin continuait d’être un bon père avec SES enfants. Viviane, Flore, Tony et Phil avaient droit à toute son attention et affection mais il en allait tout autrement avec Madelyne. C’était comme si le bébé le répugnait. Il ne la prenait jamais dans ses bras, n’avait jamais proposé son aide pour la changer ou la nourrir et jamais de tout jamais ne s’était levé la nuit si la petite pleurait. Sam l’avait surpris, plusieurs fois, debout près du berceau, en train de contempler l’enfant et l’éclat de son regard n’avait eu, alors, rien de doux, au contraire, on pouvait y lire un profond ressentiment. Il n’aimait pas Madelyne et ne faisait aucun effort pour y parvenir.
Il restait si peu du Justin dont elle était tombée follement amoureuse. Il continuait de se montrer amoureux et empressé avec elle mais parfois elle sentait que le cœur n’y était pas et cela faisait si mal. Devenu secret, silencieux et absent, Justin se transformait rapidement en un autre homme. Il arrivait à Sam de se demander, en faisant l’amour avec lui, si elle n’était pas en train de tromper son vrai mari avec cet inconnu qui usurpait son apparence. Mais elle l’aimait, malgré tout, au dessus de tout et était prête à lutter pour retrouver son Justin à elle, cet homme merveilleux, au cœur généreux et l’âme pure.
Son message à Andrei, l’avertissant du danger encouru était resté sans réponse immédiate mais elle espérait que son ex le tiendrait en compte. Par contre, Sanders eut l’idée de l’appeler pour les inviter, elle et Justin, à son mariage avec Nate. Il voulait enterrer la hache de guerre et vivre tous en paix. Preuve que les changements survenus chez Andrei étaient très positifs jamais auparavant l’homme qu’il avait été n’aurait cherché une conciliation quelconque.
*Elle en a de la chance, Nate…Voilà Andrei transformé en l’homme parfait !*
Bien entendu, il n’avait pas été question de se présenter à ce mariage avec un Justin qui ne rêvait certainement que d’avoir une bonne occasion pour un éclatant règlement de comptes. Les enfants, eux n’y manquèrent pas et á leur retour, les filles tout émoustillées n’avaient pas manqué de faire l’éloge de cette soirée d’exception.
Maman ressemblait à une princesse et Andrei était si beau !, soupira Viviane, et puis…devinez qui est arrivé ? Grand père !!! Grand père et Granny Patches…Maman pleurait…elle était si contente…
*Wow ! Il en a fait des choses, Andrei !*
Comme qui ne veut rien dire, Justin lui avait raconté, perversement satisfait que la famille de son ex l’avait envoyée au diable sans appel ni désir de la revoir jamais. Sam avait beau ne pas porter la rouquine dans son cœur, savoir cela l’avait chagrinée, s’imaginant pour un instant que Gerry agisse de la sorte, cela l’aurait tuée.
Le soir du mariage de Nate, Justin était allé s’enfermer dans son bureau. Sam n’avait rien dit, mais seule dans le grand lit solitaire, avait pleuré toutes les larmes de son corps.
*Tout est de ma faute…si j’étais restée avec Andrei, malgré tout, rien de cela ne serait en train de se passer…*
Mais erreur ou pas, cela appartenait au passé et c’est su, le passé ne revient pas pour qu’on puisse amender ses torts. Il fallait faire face à ce que déparait le présent même si Sam pressentait que ce n’était ni serait engageant.
Le fait de ne plus pouvoir allaiter Madelyne affligea la jeune mère mais dans l’état de nerfs où elle vivait depuis un certain temps, que son lait se tarisse n’avait rien d’étonnant. N’empêche que nourrir sa fille au biberon, libéra un peu Sam. Elle ne devait pas être constamment là. Miss O’Higgings prenait joyeusement le relais lui permettant ainsi des petites sorties, ce qui ne lui faisait aucun mal. Elle adorait être chez elle, avec les enfants, s’occuper d’eux, faire la cuisine, aider les grandes avec leurs devoir mais parfois ressentait l’impératif besoin de prendre un peu de recul et se ressourcer en faisant des balades solitaires au parc ou simplement baguenauder par là, se mêlant à la foule, faisant parfois des incursions au Chemin de Traverser, qu’elle trouvait fascinant. C’est justement pendant une de ces flâneries en monde sorcier, qu’une après midi, Sam aperçut son mari. Vêtu d’une longue cape noire, capuchon rabattu sur le visage, il était évident que l’ex-auror Davenport voulait à tout prix passer inaperçu. Il y réussissait très bien avec les autres mais pas avec Sam qui l’aurait reconnu n’importe où et n’importe comment. Qu’il se trouve là n’avait, en soi, rien d’étrange ou surprenant, c’était un sorcier et celui là, son monde, sauf qu’en quittant la maison après le déjeuner, il avait assuré aller jouer au golf, or, d’autant qu’elle sut, il n’y avait pas de terrain de golf chez les sorciers ! Oubliant les boursouflets qu’elle avait l’intention d’acquérir à l’animalerie magique, Sam opta pour suivre discrètement son mari. La filature ne la mena pas bien loin mais la laissa interloquée : Justin venait de pénétrer à l’Allée des Embrumes. Elle n’osa pas aller plus loin et le vit se perdre dans les méandres sombres de cet endroit mal famé.
*Seigneur…que vient il faire là ?...Pas rencontrer des potes pour boire un coup !*
Abasourdie elle était retournée sur le Chemin et essayé de se distraire des idées accablantes en choisissant deux adorables boursouflets pour Viviane et Flore. De nouveau chez elle, Sam dût reconnaître que la situation échappait de tout contrôle et cela à des vitesses effarantes. Elle avait peur de ce qui pouvait arriver mais surtout…peur de Justin.
L’attitude de Davenport, chez lui, demeurait tout à fait invariable. Surmontant ses craintes, Sam essayait de sembler désinvolte. Enjôleuse, elle lui proposa de sortir, un soir.
Allons au théâtre…dîner. Voir un peu de monde. Tu sais, depuis que Maddie prend le biberon, c’est plus facile…Avec Miss O’Higgings et Mrs. Pimms, les enfants sont parés…alors, qu’en dis tu, mon chéri ?
Mais chéri n’avait rien voulu entendre. Au lieu de cela, Sam se sentit étrangement fatiguée de bonne heure et sitôt le dîner fini avait dû aller se coucher car elle s’écroulait de sommeil. Sa dernière pensée consciente avant de sombrer dans un lourd sommeil sans rêves fut que son mari avait utilisé un sortilège léthargique contre elle et était presque sûre que ce n’était pas la première fois.
Au petit déjeuner, Justin était presque de mauvaise humeur. Sans explications. Il prenait son bain quand soudain l’apparition d’un doberman argenté face à elle, faillit faire hurler Sam. C’était le patronus de Nate Sanders. Elle lui donnait rendez vous au parc, un peu plus tard dans la matinée.
Avant de partir, avec les filles, qu’il emmenait à l’école Justin voulut savoir en quoi elle occuperait sa journée.
Je vais emmener Madelyne au parc…
Il donna l’impression de s’en ficher et s’en alla après un baiser distrait. Sam en aurait pleuré.
Nate s’y trouvait déjà quand elle arriva. Fidèle à sa nature, la rouquine ne tourna pas autour du pot.
Désolée de t’avoir convoquée si cavalièrement, Sam mais là, la chose a atteint un point ou cela devient intenable.
Elle n’en avait pas le moindre doute.
Comment est le comportement de Justin, ces derniers temps ?
Profond soupir.
Que dire ? Il semble très tranquille et satisfait mais je sais que quelque chose cloche…affreusement.
Mrs. Sanders eut un geste plein d’humeur.
Ah bon ? Et pour cause, qu’il est satisfait, le bougre…Il joue avec de la magie noire, Sam…il fait du vaudou sur Andrei…
Oh, mon Dieu…c’est encore pire que je ne l’aurais prévu mais…ça ne m’étonne plus trop. Je l’ai vu, l’autre jour entrer dans l’Allée des Embrumes, on sait bien ce qui se passe là bas…pas besoin d’être un génie pour deviner que Justin fait des rencontres très édifiantes…Il me fait peur, Nate. Tout calme qu’il semble, il n’est plus le même…et…il n’aime pas Madelyne. Il ne s’est jamais occupé d’elle…ne l’a jamais tenue dans ses bras…et puis, il est rarement à la maison…et quand il y est…enfin…Je crois qu’il m’induit à un sommeil profond pour que je ne l’ennuie pas …mais ça ne lui réussit pas à tous les coups…Il passe la nuit dans son bureau…et vient se coucher juste avant que je ne me réveille.
Nate écoutait, attentive, interprétant dûment les faits exposés.
Son bureau, hein ? Intéressant de savoir ce qu’il y mijote….
Depuis le temps que j’ai essayé d’y entrer. Il a bouclé ça avec des sorts que je n’arrive pas à circonvenir.
Ah, tu as essayé d’y entrer ? Impossible, je me doute bien…Justin aime faire ses petits mystères, son bureau a toujours été…son antre. Bon, il va falloir qu’on y arrive, à forcer l’entrée.
C’était quand même un peu gênant de livrer ses problèmes à une femme qui connaissait son mari à fond mais le moment se prêtait mal à ces considérations.
Je me demande bien comment…Lavinia et moi on a tout essayé. Ah bon ? Tu as des talents particuliers…Intéressant, ça ! T’en fais pas, c’est mon côté agent du Trésor qui parle là…
Sourire un peu pour détendre l’instant. Le regard de Nate pétilla.
Pas de souci, je n’ai jamais dévalisé la Banque d’Angleterre !
Elles rirent de bon cœur. Étonnante relation, la leur. Ennemies jurées peu de temps auparavant après s’être fait, mutuellement, le pire des affronts…après tout on ne chipe pas le mari à une autre femme en supposant devenir son amie. En fait, elles s’étaient chipé le mari l’une à l’autre et pour ridicule que cela puisse paraître, étaient en passe de devenir no seulement amies mais aussi complices ! La vie a des drôles de façons de surprendre !
Même si…suis plus en service !
Nouveau rire avant de se mettre d’accord pour une nouvelle rencontre, dans le plus bref délai, selon Nate, Andrei ne tiendrait pas trop avec le traitement de faveur que lui infligeait Justin. Dans son landau, le petit Sanders dormait à poings fermés. Quel adorable poupon. Dans le sien, Madelyne avait ouvert les yeux et faisait sentir sa présence. Nate se pencha pour la regarder, son commentaire n’eut rien de tendancieux mais suffit pour la faire voir les choses d’un autre angle, en relevant la tête, elle regarda Sam d’une autre façon. Sa perspicacité avait vu clair. Sam sentit sa bouche se dessécher au temps que la panique la gagnait. Sans mots, Nate la serra dans ses bras, comme à une sœur. Rassurante.
Tu n’as rien à craindre, Sam…tes raisons t’appartiennent. Ma bouche est scellée. Faudra éviter qu’Andrei les voit ensemble…c’est tout !
Merci, Nate.
Voilà, à présent, à part leur problème, elles partageaient aussi un lourd secret.
De retour à la maison, Sam essaya de reprendre sa routine en arborant son air le plus calme. Justin rentra à midi pour le déjeuner, révisa son courrier, parla peu, ne fit pas attention à elle et après une sieste qu’il ne proposa pas de partager, repartit sans dire où il allait. La voiture avait à peine disparu au détour de l’allée que Sam envoyait deux messages. L’un à Nate pour l’informer qu’elles avaient le chemin libre. L’autre à Lavinia pour l’avertir que l’action serait pour ce jour là. Le Dr. Dexter devait être sur le qui vive et prête à intervenir à point, elle fut la première à se présenter.
Alors…on entre en action !? Qui ? Toi et moi ?
Non. Nate viendra aussi.
Vous êtes devenues copines par la force des choses, à ce que je vois, rigola Lavinia.
Ben oui…tu sais, elle n’est pas mauvaise…elle est tombée amoureuse d’Andrei…tout comme moi de Justin…je suppose qu’on est quittes !
Seigneur…tu deviens si civilisée depuis que tu es en Angleterre…ce doit être l’air ou le poids des siècles !
Elles riaient encore quand Nate se pointa avec un air de conspiratrice très réussi.
Bon on est pas les anges de Charlie mais ça devrait suffire, mesdames !
Allons y !
J’adore vos intrigues !
Pas de sortilège qui tienne avec ces trois femmes décidées à tout. Certainement, Mrs. Sanders avait des talents dignes d’être tenus en compte. L’âme d’un Arsène Lupin la rousse ! Cachette dénichée en un clin d’œil, coffre ouvert sans grand problème. L’évidence était là. Sam frissonna violemment en découvrant l’effigie de cire d’Andrei mais n’eut guère le temps de s’appesantir sur ses sentiments contradictoires. Le grand coupable venait de faire une apparition inattendue et comme on pouvait s’y attendre, était livide de fureur.
Vous n’avez pas le droit !
Il était prêt à les foudroyer sur place mais hésita une fraction de seconde. Se demandant sûrement laquelle des trois devait il abattre en premier. Sam ne se trouva pas le courage de lui envoyer un sort mais Nate ne perdit pas le temps en contemplations. Elle stupéfixa Justin qui tomba comme une masse.
Vous avez entendu le truc de la cave sombre…c’est le moment de l’employer !
Oubliant son désir incessant de justice, Sam vola auprès de son mari.
Mon pauvre chéri…Tout va aller bien. Nous allons t’aider !
Allez, Sam…ne sois pas si sentimentale, je sais que tu l’adores mais ce qu’il mérite en ce moment est une bonne correction…c’est par où, la cave !?
Non ! Pas la cave…Ce n’est pas sa faute, il n’est plus lui-même, plaida t’elle en caressante tendrement la tête de son stupefixé bien aimé.
Tu veux pas le mettre au lit et le chouchouter tant que tu y es !?, gronda Lavinia qui n’avait pas le cœur si tendre.
Pas le chouchouter…mais quand même la cave…c’est froid !
Nate secoua la tête et Lav émit un de ses commentaires pratiques. Cédant à la demande de Sam, on transporta le « méchant » Justin à sa chambre et on le saucissonna gentiment sur son lit avant de lui envoyer un Enervatum rageur. La réaction du prisonnier ne se fit pas attendre.
Qu’est-ce qui vous prend ? Êtes-vous folles ?
Sam soupira. Lav lui largua son avis, sans contemplations.
Je crains que ce ne toi, mon cher ami, qui le sois complètement. Depuis quand pratiques-tu la magie noire ? Ne nous prends pas pour des idiotes, on a saisi ton manège.
Nate ,elle, fulminait et n’alla pas par quatre chemins pour lui dire ce qu’elle avait sur le cœur, le réduisant à peu moins que monstre ignoble et autres épithètes bien sentis. La rouquine ne lui pardonnait pas ce qu’il faisait subir à son mari.
L’autre eut l’esprit de se défendre. Selon lui, c’était son juste droit de prendre revanche après ce qu’Andrei lui avait fait subir.
Ça vous était bien égal qu’il fasse de ma vie un enfer et me fasse crever à petit feu pour, dans un élan de « générosité », me ressusciter à l’état de loque ! Le « bon » Justin devait passer l’éponge ? Eh bien NON ! MARRE D’ÊTRE BON, MARRE D’ÊTRE CON !
Le cœur serré, Sam ne pouvait que lui donner un peu raison. Le comportement d’Andrei vis-à-vis de Justin avait été d’une cruauté raffinée, personne ne pouvait nier que son intention avait bel et bien été se défaire de son rival, pour se venger de l’avoir privé…d’elle.
Mon chéri…ton raisonnement est peut être assez juste, dit elle, doucement, mais ce n’est pas ta façon d’agir…tu as toujours été si droit…si juste. Ce qui est arrivé lors du rituel qui t’a rendu l’usage de ta jambe…a provoqué cette…mutation de ton esprit…Ce n’est pas toi qui agis…
Sam a raison !, grommela Lavinia, un brin plus conciliante, tu n’es pas un méchant homme, Justin…On ne veut que t’aider à devenir celui que tout le monde aime…
Nate ajouta du sien mais bien sûr Monsieur ne voulait rien entendre et le pire est qu’il semblait fort satisfait d’être devenu un monstre d’iniquité.
C’est donc encore à cause de vous que je suis ainsi… et je vous en remercie !
Le tout ponctué d’un sourire pervers, frayant le sadisme. Le Dr. Dexter oublia ses bonnes manières et si Sam ne l’en avait pas empêchée lui aurait sans doute tapé dessus mais se limita à gronder.
Si ça te plaît d’être ainsi, ça ne plaît pas à Sam je te signale. Que tu le veuilles ou pas, on va s’arranger pour remettre les pendules à l’heure. Maintenant, dors et fous-nous la paix !
Un petit sort bien placé et Justin partit direction le pays des rêves. Le trio gagna le rez de chaussée. Sam se laissa tomber dans un fauteuil, au bord des larmes. Nate faisait les cent pas, comme fauve en cage. Lavinia, femme pratique servit à boire et leur fourra à chacune un verre dans la main.
Et bien…qu’est ce qui suit ?
Sam avala une gorgée de son Pur Feu et se leva à son tour.
Il y a un rituel qui doit être mené par qui s’y connaît à fond…j’avoue que tout cela me dépasse. Nate a sans doute une idée plus précise.
Elle l’avait. Impossible songer à s’en occuper, du rituel. Celui-ci devrait être effectué dans un lieu sacré et présidé par un sorcier « supérieur ». Pour cela, il faudrait emmener Justin et Andrei sur place…ce qui signifiait, ni plus ni moins, qu’on devrait se déplacer en Nouvelle Zélande !
Bon, emmener ton mari ne devrait pas poser de gros problèmes…dans son état, il ne va pas protester …mais je ne confierais pas autant en la collaboration de l’autre…
Il faudra le convaincre !, dit Sam, en se demandant comment diables s’y prendre, après tout, si on croyait aux dires de son actuelle femme, Mr. Sanders était parfaitement satisfait avec son sort tout autant que tous ceux qui avaient croisé dernièrement son chemin.
Leur plan méritait d’être peaufiné. Un message fut envoyé par Nate avertissant sa grand-tante de leur arrivée imminente avec les deux candidats au rituel de remise au point. Sam téléphona à son père et lui fit part de ses plans immédiats.
Je suis sûre que nous reviendrons très vite, Gerry et que tout sera rentré dans l’ordre…mais…qui sait ? Il se peut aussi qu’on tarde un peu, je ne veux pas que tu te fasses de la bile. Oui, Madelyne reste ici…oh…tu aimerais que je l’amène chez vous ? Ana n’aura pas d’inconvénient ?...Très bien alors, elle restera avec vous alors…avec Miss O’Higgings, bien sûr…je t’aime, Gerry. Pas de souci, Lavinia est avec moi !
Tout comme si elle était escortée par le corps de Marines !
Et ce fut justement elle qui un moment plus tard, allant vérifier le sommeil du prisonnier, découvrit que celui-ci s’était…enfumé. La voix d’alarme fut donnée mettant ces dames en fol émoi. Il ne fallait pas être devineresses pour savoir où Justin était allé.
Il est allé tuer Andrei !!!
Aux dires de Nate, son mari était chez eux. Ni deux ni trois, elles y transplanèrent en parfait ensemble. Le spectacle découvert les scia. Justin avait tiré sur son ennemi juré, qui gisait à terre le bras en sang, une jambe brisée. Nate et Sam s’interposèrent à l’instant où Justin aveuglé de haine se disposait à l’achever d’un dernier coup de feu à la tête.
Justin…je t’en supplie…
Au fond de son cœur Sam savait qu’il ne tirerait ni sur elle ni sur Nate mais il agitait déjà sa baguette prêt à les écarter par le moyen qui soit. C’était sans compter avec l’opportune intervention de Lavinia qui fit qu’un lourd vase se fracasse sur le crâne de ce cher homme.
Sam s’occupa de soigner l’énorme bosse, une fois qu’elle l’eut bien ligoté.
Terminus pour toi, mon chéri !
Nate et Lavinia s’occupèrent de remettre Andrei sur pied. Le pauvre n’en revenait pas d’avoir été une cible si innocente mais ne voulait rien entendre de prendre part à un rituel quelconque et encore moins pour rendre Justin à la normalité. Il était très satisfait, lui, avec les choses telles qu’elles étaient.
Toi non plus, tu n’es pas dans ton état normal, Andrei…tu le sais…oui, pour toi tout a bien tourné…pour lui, non. Écoute moi, Andrei…je ne vais pas te supplier que tu donnes un coup de main…tu vas le donner même si tu ne veux pas !!! Cette folie a assez duré !
Sam perdait le calme. Elle était décidée à retrouver le Justin qu’elle aimait et ce ne serait pas l’entêtement égoïste de son ex qui mettrait en échec le plan si bien élaboré. Avant que quiconque ne songe à intervenir, elle avait envoyé à Andrei un sortilège somnifère très hargneux et réussi. Nate et tout de même son mot à dire.
Désolée, Nate…c’était la seule façon d’agir.
Terre sacrée. Tout était prêt pour le rituel. Elle et Nate avaient revêtu les vêtements accords au cérémoniel de rigueur. Lavinia, qui était de toujours de la partie semblait prendre le tout avec grande humeur. Sam se pliait à tout, sans rechigner mais quand on vint poser un étrange tatouage sur son menton, elle se rebiffa un peu. Assez étrange être vêtue de façon si exotique et colorée, avec cette jupe faites de fines lanières végétales superposée sur une robe longue, noire ornée de motifs de couleurs vives. Pieds nus, plumes et coquillages aux chevilles. Front ceint d’un bandeau coloré lui aussi piqué de plumes de couleurs voyantes. On lui expliqua que les tatouages étaient absolument nécessaires, qu’ils avaient une haute signification pour l’invocation des esprits. Nate lui assura qu’ils disparaîtraient opportunément. Elle se laissa faire. Son menton subit le traitement, ainsi que son bras et épaule droits. Le reste viendrait tout seul, lui dit on. Les esprits parleraient par sa bouche, elle ne ferait que transmettre leur message. La seule chose qu’elle devrait faire est libérer son âme de rancœur et être prête à accueillir le don de la présence divine.
Pour une fille de Miami, un peu difficile à assumer comme si rien mais pour l’amour de Justin, elle marcherait sur des braises ardentes, au besoin.
L’arène où aurait lieu la rencontre était délimitée par un cercle de pierres sacrées et plusieurs statues massives au rictus peu engageant. Le combat devrait se dérouler sans quitter cette enceinte sacrée. Nate avait cru bon lui expliquer à grands traits ce qui allait se passer. Les deux « possédés » devraient s’affronter en combat à main nues jusqu’à ce que les divinités invoquées jugent que le moment était venu. Seules elles pouvaient interrompre l’affrontement. Il fallait se remettre entièrement à la sagesse millénaire des dieux anciens…ceux du ciel, la terre, l’air et la mer…
Sur la commande du directeur de cérémonies, un petit homme vêtu de plumes et fourrures, coiffé d’une étrange toque emplumée aussi et couvert de tatouages, on amena les combattants. En d’autres circonstances, Sam aurait pouffé de rire en voyant leur tenue. Vêtus uniquement de pagne et jupe à lanières ceinte à la taille par une large bande de toile aux motifs bariolés, Justin et Andrei étaient peints des pieds à la tête, l’un de rouge, l’autre de bleu. Ils étaient encore inconscients mais il suffit au grand prêtre d’un geste pour qu’ils s’ébrouent et se lèvent, de méchante humeur, tous deux.
Il est temps de séparer ce qui a été unis inconsciemment : battez-vous !
D’entrée, Andrei joua les têtus. Clameur générale. Sam et Nate unirent leurs voix, insistant sur le besoin de ce combat pour que l’équilibre revienne. Sanders ne voulait rien entendre. Justin, lui semblait se demander à quoi diables rimait la farce. Les divinités de services jugèrent opportun lui éclairer la lanterne, par la voix de Sam.
Tu as toujours été un homme digne et noble. Jamais mal n’est venu de ta main si ce n’est par besoin de justice. Ton amitié est un bien précieux pour ceux qui la possèdent, ton amour, incomparable bienfait pour qui le mérite. Tu as toujours été prêt à secourir le pauvre et le démuni, ta générosité ne connaît pas de limite. Équitable et bon, même tes ennemis ne peuvent se plaindre d’une injustice. Écarte la néfaste influence, délivre ton âme de ce poids, redeviens ce que tu as toujours été. Oublie à jamais cette ombre qui a terni ton existence…Redeviens le mari, l’amant, le père, l’ami que tous languissent. Ceux qui t’aiment t’implorent, redeviens ce que tu as toujours été…
Justin ne semblait pas du tout décidé à prendre la voie de la raison. Si les esprits anciens avaient fini leur discours, il n’en allait pas de même avec Sam.
Je t’aime, Justin…je t’en supplie, revins à moi, à nos enfants…à notre vie !!! Tu me manques tellement !
Pendant un instant, même à la distance qui les séparait, leurs regards se rencontrèrent. Il prit sa décision. Il attaqua furieusement. Comme on pouvait espérer, Andrei ne comptait pas se laisser massacrer sans opposer de résistance. Ils se valaient l’un l’autre. Sanders rompu aux arts de la guerre et combats de toute classe. Justin , sportif accompli, ex auror et en pleine forme, vu qu’il avait passé ces derniers temps à s’entraîner comme s’il pensait participer aux Olympiades.
Ce fut un combat dans toutes les règles de l’art. C’étaient deux fauves déchaînés qui s’affrontaient là, incléments, sauvages, primitifs comme cette nature superbe qui les entourait. L’assistance retenait son haleine, personne n’esquissait le moindre geste. Jusqu’au moment où le petit prêtre emplumé commença à réciter des longues incantations que tous les présentes reprirent en chœur alors que des tambours battaient la mesure, rythmiques, exacts, lancinants…comme les battements d’un cœur humain…
Ils semblaient fourbus de fatigue mais ni l’un ni l’autre ne démordait, C’est alors que se produisit un étrange phénomène, une brume épaisse surgie de nulle part enveloppa les deux combattants avant de se dissoudre aussi inopinément qu’apparue…et ils avaient disparu.
Sam faillit céder à la panique mais se força à demeurer là, sans dire un mot, attendant la suite…parce que selon elle, il devait bien avoir une. Les tambours battaient toujours leur cadence entêtante, augmentant le rythme, le volume…la mélodie inlassable se mouvait comme les vagues d’une mer démontée…Le silence fut aussi abrupt qu’immense…
Justin apparut à un extrême de l’arène. L’air assez perdu, comme qui se demande ce qu’il fait dans un endroit où il ne se souvient pas d’être venu. Il resta un instant là et se gratta activement la nuque avec une moue ennuyée…la même qu’il faisait toujours quand l’explication cherchée ne venait pas à point. Sam se détacha de l’assistance muette et avança vers lui. Il la considéra en fronçant les sourcils puis sourit en lui demandant si elle compatit aller à une fête polynésienne.
Oui, c’est exactement ce que je vais faire…avec toi…j’adore ton costume !
Force fut de se regarder un peu. Son rire éclata joyeusement et en ouvrant les bras, l’accueillit, sans s’arrêter de rire. Une fois l’hilarité calmée, il voulut savoir où elle avait laissé leur Madelyne et les enfants...
Leur Madelyne…
Sam essuya une larme de gratitude. Justin était de retour.
Non loin de là, Andrei pestait en bonne et due forme de se trouver attifé de la sorte. Tout allait bien. |
| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mar 18 Jan - 21:23 | |
| Mentir ? Les vieilles habitudes ne disparaissent pas facilement. Même si son côté Justin freinait beaucoup cette tendance, Andreï restait un dissimulateur. Aussi tut-il le plus longtemps possible ce qui était en train de lui arriver. Passer des nuits en bas en fuyant le sommeil ne l’enchantait pas mais il n’avait pas encore trouvé le moyen de faire cesser les agissements sournois de Davenport. Il passait le plus clair de son temps à la recherche d’un sort efficace contre le vaudou mais n’y parvenait pas comme si sa partie sombre avait disparu et que la nouvelle facette de Sanders refusait d’adhérer à ces pratiques. Il venait à nouveau d’être en proie aux affres de ses cauchemars et taillades. Café et amphétamines l’aidaient à lutter contre le sommeil. Tournant tel un ours en cage, il sursauta quand la porte s’ouvrit sur Nate. Fortement contrarié d’être surpris en flagrant délit d’insomnie, il ne l’accueillit pas de gaieté de cœur. Il ne la repoussa cependant pas quand elle investit ses bras :
Dis moi…Dis moi ce qui se passe, mon amour…Encore ce cauchemar ?...Toujours le même ?...Raconte le moi, ça aiderait peut être…
T’en fais pas pour ça. Ça passera.
Déçue de cette fin de non recevoir, elle insista bellement, lui proposant son aide.
M’en sortirai tout seul, la meilleure des choses à faire est de retourner sagement dans ton lit, et…
Malheureusement pour lui, Nate était observatrice.
C’est quoi ça ?...Andrei ta chemise…elle est tachée de sang…parce que c’est bien du sang, ça…
Pas grave, je te dis. Laisse-moi tranquille !
S’il pensait s’en tirer à bon compte, c’était raté. Il eut beau protester, elle déboutonna sa chemise et lui tourna autour en s’effarant de chaque entaille trouvée :
Je ne veux pas m’imaginer que tu pratiques l’auto flagellation ou encore que tu te plais à mutiler ton corps donc il ne me reste qu’une théorie…quelqu’un d’autre se complaît à te tailler en pièces ! Parle !
Son esprit taiseux cadrait mal avec des aveux. Quoique mal à l’aise, il céda :
Que veux-tu que je te dise ? Je ne sais pas ce qui se passe. Dès que je commence à somnoler, je rêve que toi et Sam vous me poignardez. Une voix s’interpose me disant que je vais payer… ça a commencé alors que tu étais à l’hôpital, la 1ère fois…
Sa douce épouse y alla de ses conclusions, lui reprochant de ne s’être pas confié, d’avoir voulu s’en tirer seul. Pas besoin de lui faire un dessin, elle comprenait très bien qui devait être à l’origine de ces maux. Trop faible pour résister à cette femme décidée, il la laissa l’entraîner à l’étage où elle fit appel à sa magie « particulière » afin d’empêcher une autre attaque nocturne sournoise.
Dormir ! Dormir comme une souche sans qu’aucun rêve ne le dérange. Cela en faisait des nuits à rattraper ! Au matin, quand il émergea enfin, Nate revenait d’avoir été promener le petit Jarek. Quel gosse adorable, celui-là ! Jamais Andreï n’avait cru pouvoir fondre pour une frimousse innocente, pourtant… Nate lui sembla pensive et nerveuse malgré sa balade au parc. Il désira en connaître les raisons mais ne les dévoila pas. A cent lieues d’imaginer qu’elle avait été rencontrer Sam, il leur confectionna un délicieux déjeuner. Une sieste s’imposait. En journée, jamais il ne subissait d’attaques, donc… autant en profiter.
Il rêvassait doucement quand une voix par trop connue résonna :
Tu vas payer !
Livide, il sursauta cherchant d’instinct sa baguette :
Expelliarmus.
Désarmé, désorienté, il ne put que se redresser lentement face à son ennemi de toujours. Justin, les traits déformés de sadisme le toisait avec en main une arme plus redoutable qu’une baguette : un révolver. Gagner du temps paru à Andreï la seule solution :
Tu as décidé d’en finir ? J’espère que l’on te paie bien pour ça ?
Oui, je suis venu achever mon « travail » … Un contrat sur ta tête ? On peut dire ça. Je suis à la fois commanditaire et exécuteur. Marrant, non ?
Ça dépendait du point de vue…
Laisse-moi au moins me défendre, que l’on fasse ça à la loyale !
Tu rêves Andreï. Tu as foutu ma vie en l’air, tu voulais me voir crever dans les pires souffrances. Je t’aurais bien rendu la pareille mais on ne m’en laisse pas le temps.
Ah bon ? Quelqu’un s’y oppose ? La cavalerie va débarquer ? Nate ? Sam ?
Qui ? Devine… Oui, ta brave petite femme fait amie amie avec la mienne… N’essaye pas de m’endormir ni de rallonger ton sursis, t’es cuit. Adieu, Sanders, puisses-tu pourrir en enfer.
Avant d’avoir pu esquisser le moindre geste de défense, l’arme aboya coup sur coup. La déchirure atroce de son bras puis de son genou mit Andreï au sol. Le salaud ne lui laisserait au répit, aucune chance.
Cette fois, c’est la bonne !
Le condamné à mort ne baissa pas les yeux. Davenport ajustait son tir à la tête.
*Bah… J’aurai bien vécu !*
Finir ainsi n’avait pas été dans ses intentions, il aurait souhaité mourir plus… glorieusement. On ne choisi pas l’instant… Comme dans un brouillard, il entrevit deux silhouettes en bouclier. Il tenta de les mettre en garde, Sam bravait Davenport :
Justin…je t’en supplie…
Nate y alla aussi de son mot mais ce fut le troisième larron posté dans le dos de Justin qui eut le dernier mot avec le fracas d’un vase sur le crâne de l’exécuteur.
Merci, Mesdames ! murmura-t-il avant de valser dans les vapes.
Lorsqu’il émergea, toute trace de blessure était effacée.
Wow, superbe travail ! C’est chou de vous être occupées de moi. Qu’en est-il de l’affreux jojo ? … Sonné et ficelé ? Parfait. Il faut que l’on se débarrasse de lui, maintenant.
La solution radicale envisagée n’agréa pas du tout Sam. Elle tenait toujours à son tintin… Les dames lui expliquèrent leur plan.
Quoi ? Un rituel pour redevenir… comme avant ? Ah, non. Désolé mais je me sens parfaitement bien, moi !
Houla, Mrs Davenport s’énerva :
Écoute moi, Andrei…je ne vais pas te supplier que tu donnes un coup de main…tu vas le donner même si tu ne veux pas !!! Cette folie a assez duré !
Il commença à rigoler en se demandant quel moyen elle emploierait pour le forcer à faire quelque chose dont il ne voulait pas. La solution, il la reçut en pleine poire avec un sortilège qui l’expédia dans le cirage complet.
Que lui avait-on fait ? La tête douloureuse, Andreï reprit ses esprits face à un Justin grognon et… tout rouge qui l’apostrophait méchamment :
Je croyais t’avoir descendu. Va falloir que je remette ça ! Pourquoi t’es peint en bleu ?
Ah ? Oui, Si Davenport était écarlate, lui était d’un très beau bleu. Mais pourquoi les avait-on vêtus de cette espèce de pagne ridicule. Au moins dans l’assistance extérieure au cercle, les dames avaient fière allure dans leur jupe longue et leur garniture de plumes et coquillages ! Un petit gars peinturluré également ne fit pas de mystère quant à ce qu’il attendait d’eux : qu’ils se battent !
Pas question, déclara Andreï, boudeur. Vous n’arriverez pas à m’y forcer. Enfin… Nate ! Empêche ce cirque. C’est ridicule.
Mais sa tendre moitié ne bougea pas. Par veine, Justin ne semblait pas non plus disposé à entrer dans le jeu imposé. Il fallut que Sam, d’une voix bizarre ouvre son clapet, ventant les mérites de l’homme qu’elle aimait.
*Et moi j’ai droit à rien ?*
Vexé, il bouda dans son coin jusqu’à ce que Davenport, piqué de dieu sait quelle mouche, lui fonce dessus et l’expédie au tapis.
*Wow, il y va pas de main morte, le salaud !*
D’abord Andreï refusa l’engagement. Il para plus de coups qu’il n’en distribua. Néanmoins, quand l’un d’eux, particulièrement vicieux l’atteignit, il vit… rouge. Toute la haine éprouvée pour Justin revint en force. Réduire son adversaire en purée devint son objectif. Puisque tous les coups étaient permis, il ne gêna plus. Rompu aux arts martiaux, il s’en donna à cœur joie. Pivot sur la jambe droite, le pied gauche s’écrasa sur la mâchoire de Justin. S’enchaînèrent d’autres coups de pied et du tranchant des mains. Contre son attente, Davenport résista mieux que prévu. Pire, il encaissait en rendant chaque assaut. A ce train, ils seraient tous les deux transformés en pâtée pour chien sans que l’un ne supplante l’autre. Concentré sur sa lutte, Andreï ne percevait même pas le rythme de tambours ni les visages spectateurs. Il venait se saisir Justin dans un méchant étranglement arrière quand il eut l’impression d’être dans le pire des smogs londoniens. Qu’importe ! Il avait une bonne prise et ne lâcha pas. Ce fut une sorte de décharge électrique qui l’y força. Propulsé en arrière, il atterrit lourdement sur le dos, constatant avec une satisfaction perverse que Davenport soufflait comme un phoque en se tenant la gorge. Les alentours avaient à peine changé. Le cercle n’existait plus, les assistants disparus. Une voix issue de nulle part résonna :
Êtes-vous fiers de vous ?
Pas encore, brava Andreï. Je ne le serai que quand je foulerai son cadavre.
Remis, Justin émit à peu près un discours similaire qui n’eut pas l’heur de plaire à « l’esprit »
Vous ne sortirez pas avant d’éteindre vos conflits.
Ça risque de prendre du temps ! ricana Sanders prêt à reprendre l’engagement.
Tel que vous le considérez, le temps ici ne signifie rien. Que l’un de vous meure, l’autre mourra aussitôt. Nous vous souhaitons bon courage !
Un rire sardonique accompagna cette tirade, laissant les opposants assez circonspects. Ils n’eurent pas l’occasion de s’interroger davantage. Des sifflements alarmants les entourèrent. Intrigués, ils tentèrent d’en déterminer l’origine. Une pâleur identique les investit en découvrant que de chaque bout de rocher émergeaient… des reptiles.
C’est une illusion ! affirma Andreï. Il n’y a pas de serpents en Nouvelle-Zélande !
Justin se ficha de sa remarque et se chercha une arme ainsi qu’une issue. Plusieurs bouts de bois fourchus traînaient, autant faire comme Davenport et s’en saisir. Illusion ou pas, les reptiles rampaient vite vers eux avec une attitude très… agressive. Pas question de risquer sa peau ! Ils foncèrent vers le seul promontoire proche. Les perches en action, il leur fallut en user afin de dégager le terrain jusqu’à atteindre l’élévation.
On dirait que ça rigole pas, ici !
Vu la lueur brillant dans le regard de Davenport, Andreï ne douta pas des sentiments qui l’animaient :
Hey ! Tu vas pas me fiche en bas, hein ? T’as entendu comme moi : si je crève, tu y passes aussi !
Combien de temps restèrent-ils sur leur perchoir est une bonne question. Dans le ciel bleu, immuable, dardait l’astre du jour.
Sais pas toi, mais je commencer à la sauter. On se fait une fricassée de serpents ? J’en ai déjà mangé en Amazonie, c’est pas si mauvais !... Ouais, sans feu c’est gênant…
A défaut de mieux, ils s’assirent sur les rochers et attendirent sans piper mot. Piquer un roupillon tenta Andreï. Pas de poupée vaudou à redouter… autant y aller. Une secousse à l’épaule l’en empêcha :
Tu peux pas me foutre la paix ? Déjà que tu m’as empêché de dormir des nuits durant, as voulu me saigner comme un porc, qu’est-ce qui te faut de plus ? … ah, tu m’en veux toujours pour Nate ? Je ne m’excuserai pas, tu m’as bien piqué Sam ! … Quoi ? Tu rigoles ? ELLE NE M’AIME PLUS, PATATE ! C’est pas à moi que s’adressait son beau discours, je te signale ! Et si on en est là, c’est parce que Nate voulait à tout prix racheter… une part des torts qu’on t’a causés. T’es content : t’en as deux qui se font de la bile pour toi Mr perfect. Comment ça à double sens ?... Ouais, peut-être bien que c’est partagé, mais j’aime Nate, connard ! … En tout cas, j’en ai déjà marre de moisir ici. Tiens, regarde en bas… je vois plus les bestioles. On descend ?
Qui n’essaye rien n’a rien. Tout en grommelant, Justin le suivit. Leur perche bien en main au cas où, ils inspectèrent les recoins. Pas d’hostilité en vue : déjà ça. Où aller était une bonne question. Ils se disputèrent à nouveau car l’un voulait aller à gauche, l’autre à droite. Ils finirent par tirer à la courte paille, Justin gagna. Longuement, Andreï suivit en silence puis commença à râler :
On aurait dû aller de l’autre côté. On est pieds nus, je te signale. Ces cailloux font un mal de chien !
Même si n’en pensait pas moins, Justin n’était pas disposé à le reconnaître. Le lieu où ils évoluaient à présent était loin d’être plaisant : un champ de rochers brunâtres et aiguisés. Pas de végétation en vue, rien qu’un désert aride. La chaleur était intense, écrasante.
Ce fichu soleil ne se couchera donc jamais ? … Hein ? T’as pas envie de passer la nuit avec moi ? Comme si moi j’en avais envie ! Même pas en rêve ! Je préfère les bras de ton ex…
Houps, il aurait mieux fait de la boucler. Avec un regard haineux, Justin leva son bâton, prêt à le lui expédier dans l’abdomen. Au soulagement d’Andreï, le geste n’aboutit pas. Haussant les épaules, Davenport continua sa route sans se retourner. Au bout d’un moment, leur langue devint aussi sèche qu’un morceau d’étoupe.
*Sans eau on est foutu. C’est ça le plan des esprits ? Nous faire crever de soif ?*
Brusquement, Justin pila net, aux aguets. Qu’avait-il donc entendu pour que ses traits se détendent ainsi. Prêtant l’oreille, Andreï ne tarda pas à piger :
Une cascade ! Il y a de la flotte quelque part !
Ce fut la ruée. Courant sur les rochers, insouciants de malmener leurs plantes de pied, les deux compagnons obligés gravirent un monticule derrière lequel ils découvrirent un décor splendide. En contrebas, nichée entre des parois abruptes s’ouvrait une véritable oasis, un nid de verdure centré sur un petit lac alimenté par une belle chute d’eau. Des gamins à la Noël n’auraient pas été plus heureux en découvrant ce cadeau du ciel. En riant, ils cavalèrent de plus belle dans une descente périlleuse vers les eaux prometteuses. Les parois étaient traîtres… Justin perdit soudain l’équilibre et valsa en avant. Horrifié, Andreï le vit bouler sur lui-même à toute allure. La pente raide l’attirait inexorablement vers l’abîme. S’il avait disposé de sa baguette magique, Andreï aurait utilisé un sort de freinage. Là… Au risque de subir un sort identique, il sprinta du mieux qu’il put, bondissant tel un chamois de haute montagne. Il crut Justin perdu quand celui-ci bascula dans le vide. Quelques secondes plus tard, il atteignit le rebord fatal.
*Suis pas mort… Ou on nous ment, ou il n’est pas mort non plus !*
Se penchant prudemment au-dessus du vide, il poussa un soupir de soulagement en contemplant un Davenport suspendu à un arbuste. L’ancien Andreï se serait repu d’un tel spectacle et aurait sagement attendu que la branche cède. Sans hésiter, cet Andreï s’allongea à plat ventre et lui tendit… sa perche.
Attrape, Justin. Attrape NDD !
Réflexe de survie ? Reddition? Davenport finit pas obéir et décramponner son support précaire pour un autre qui ne l’était pas moins. Un instant, leurs regards se croisèrent.
*Normal qu’il doute… je pourrais le lâcher… Il est lourd, l’animal !*
Mais Sanders tint bon. S’aidant lui-même de ses mains, tracté par celles d’Andreï, Justin finit par émerger. Essoufflés par l’effort, les compères récupérèrent un peu. Un grognement s’émit :
Merci ? Tu me remercies ? Pas de quoi : on est dans la même galère. Va pas t’imaginer des choses.
La descente reprit, plus prudente cette fois. De l’eau à profusion ! Quel régal. D’un même élan, ils se jetèrent dans le lac et s’y ébrouèrent, joyeux, tout en s’abreuvant à satiété. Sensation bizarre que de se trouver là à barboter en riant avec celui qui, peu avant, vous aurait descendu sans sourcilier. Le bain était délicieux après toutes ces épreuves. Ils en arrivèrent à se taquiner comme des gosses en folie en s’aspergeant mutuellement de gerbes énergiques. L’aspiration soudaine vers le fond prit Sanders de court. Il but la tasse et remonta. Non, ce n’était pas une blague de Justin puisque, à faible distance, il avait l’air aussi surpris que lui. A nouveau, les jambes d’Andreï furent tirées vers le bas, il plongea plus bas.
*Des Strangulots ?*
Il ignorait ce qui le retenait ainsi mais pas moyen de s’en dépêtrer. Ses jambes étaient prises dans un étau dont la force le faisait inexorablement couler. Déjà il manquait d’air. Devait-il finir ainsi ? Il avait si souvent frôlé la mort… la dernière en date c’était de la main de Justin. La main de Justin ? Était-ce bien ce qu’il voyait ? Il s’y accrocha désespérément. Justin ne cherchait pas à l’enfoncer mais bien à le sortir de là. L’arrachement aux algues traitresses les ramena en surface. Vigoureux, Davenport le tracta jusqu’à la berge, où ils s’écroulèrent hors d’haleine.
Ben mon vieux ! Un donné pour un rendu, souffla Andreï qui se redressa sur un coude. Serions-nous quitte ?
Quand Davenport rigolait, impossible de résister. Andreï partit du même rire qui se termina en grandes claques dans le dos dans une accolade si impensable peu avant…
*Mais qu’est-ce que je fous-là ?*
Désorienté, Andreï s’ébroua dans une sorte d’arène sableuse bordée de cailloux disposés de façon étrange.
Qui a osé m’attifer de ce truc ?
Lui en pagne ? Non mais de qui se moquait-on ? Nate accourut vers lui, rassurante alors que le rire de Justin résonnait.
Oui, je vais bien, en voilà une idée ! Mais dis-moi, qu’est-ce qu’on fout là, et pourquoi t’es habillée comme ça ? … Non, je ne me souviens pas. Il s’est passé quelque chose depuis… notre mariage?
Mince, il avait zappé la naissance de leur fils ? Ils étaient en Nouvelle-Zélande et avaient participé à une cérémonie de « réconciliation » ?
Je devrai te croire sur parole… mais c’est parfait.
Non loin, Davenport les héla, l’air heureux.
Viens, puisqu’ils sont là, allons les rejoindre.
Entraînant Nate par la main, il approcha du couple très soudé.
Salut vous deux, ça va ? On a l’air fin ainsi, hein mon vieux ? Si le costume local sied très bien à nos femmes, j’avoue que… ça gratte ce truc. On est obligé de garder ça ou on peut se changer ?
Ils pouvaient. Leurs vêtements, entassés dans une case à proximité, n’attendaient qu’eux. Les Davenport y passèrent en premier. Andreï blagua :
Ne vous avisez pas de traîner, nous aussi on a des projets !
Le rhabillage ne prit que quelques minutes pendant lesquelles, Andreï embrassa fougueusement son épouse.
J’espère que l’on ne doit pas trop s’attarder ici… Passer chez tes parents ? ( grimace) s’il le faut…
La réception chez les Sommerby se passa de façon sympathique. Personne ne fit allusion au différend qui avait opposé ces invités. Parfois Sam et Nate échangèrent des regards intrigués surtout quand leurs maris se mirent à discuter tels des amis de toujours… Les miracles existaient-ils ?
Si la mémoire d’Andreï possédait des lacunes, l’essentiel y était : il restait sorcier. N’ayant pour seule hâte que de rentrer chez eux, il activa un portoloin après des au revoir chaleureux envers tous avec promesse d’échanges de visite avec les Davenport. Redécouvrir son fils mit Sanders d’excellente humeur, mais jouer avec Nate encore plus. Longtemps, sur l’oreiller, ils discutèrent en totale complicité. Il lui fit par de divers projets :
On devrait peut-être s’offrir des vacances… Oui, je sais… Jarek est encore très petit mais rien ne nous empêche de choisir un endroit calme, au soleil de préférence. Justin m’a vanté les Bermudes… Ce serait chouette d’y aller aussi… Comment ça, j’ai la bougeotte ? Je l’ai toujours eue, non ? Oui je t’adore, j’adore notre fils mais… j’adore aussi changer d’horizons puis… cette maison est un peu petite, je trouve. Je me souviens de la « Folie » de Justin : quelle splendeur ! Aïe ! Pourquoi tu me pinces ? Ah… c’est vrai, tu n’aimais pas cette maison, pardon. On n’est pas obligé d’avoir si grand. J’aimerais au moins une piscine, une salle de gym et un enclos pour les chevaux.
Nate devait en avoir marre de ses projets immobiliers futurs, elle s’intéressait plus à l’avenir proche.
Demain ? Je passerai voir ma mère, bien sûr. Puis, j’ai promis à Justin de tirer quelques cartons au stand avec lui. On fera peut-être un golf aussi. Tu veux en être ? …Sam ? Euh… Sais pas si elle viendra. Avec cinq enfants à la maison ce sera difficile, je pense. On devra absolument le inviter tous pour un week-end, un de ces quatre… Quand je te dis que la maison est trop petite !
Au matin, Nate l’entendit pester dans la cuisine en s’y présentant pour déjeuner. La pâte des pancakes faisait des grumeaux affreux, le beurre brûlait, Andreï pestait :
C’est dingue, ça ! Je suis sûr que je savais les faire ! T’en fais pas, c’est pas un drame… je demanderai conseil à Justin.
Nate semblait mitigée. Qu’est-ce qui clochait ? Sans trop y penser, il roula jusque chez lui. Anastasia Orloff Forrester l’accueillit avec une joie partagée :
Tu as raté Sam de peu, s’avança-t-elle doucement après s’être échangé des nouvelles de leur santé. Elle nous avait confié Madelyne, oui… Un bien beau bébé. Tu aurais dû nous laisser Jarek…
On a plus de nounous qu’il ne lui en faut, maman. Mais tu pourras le gâter aussi, si l’envie t’en dit. Ce serait marrant de voir ce bébés ensemble, il y a si peu de différence d’âge entre eux !
Si sa mère tiqua, il ne le remarqua pas. Gerry le salua courtoisement, mais une certaine retenue freinait toujours leurs rapports. La conversation tombant à plat, Andreï décida l’aller visiter ses chiens. Même si ceux-ci lui étaient devenus hostiles, Sanders les affectionnait et ne ratait jamais d’aller les voir… de loin. Sa mère le mit en garde, comme à chaque fois, et le suivit en douce.
Salut Zeus, Salut Vulcain ! Vous allez bien ?
Tiens ? Au lieu des aboiements furieux babines retroussées, les dobermans frétillèrent de leur moignon de queue. Était-ce possible ? Les doigts hésitèrent sur le loquet mais la tentation était trop forte : Andreï pénétra dans l’enclos des fauves. Zeus l’attaqua en premier, le renversant d’un coup de pattes puissant sur les épaules. L’autre mâle suivit et Andreï se retrouva pris dans une mêlée endiablée. Anastasia hurla, son fils rigola. Léché de partout, il pleurait presque de bonheur.
*Dans le fond, la « réconciliation » a du bon !*
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mer 19 Jan - 21:57 | |
| Le rire de Justin! Cela valait tout l’or du monde et pour Sam signifiait la fin du cauchemar. Serrée en chaleureuse étreinte, elle laissa aller sa tête sur l’épaule de son mari, en fermant les yeux avec un soupir de soulagement, une larme lui échappa…pleurer de bonheur, c’est merveilleux. Il ne tarda pas à le remarquer.
Et quoi ? Ben, oui…je pleure…Pourquoi ?...Je suis très heureuse, grand sot…pour quoi d’autre ?
Elle riait aussi en l’embrassant cent fois. Et il ne s’en plaignit pas le moins du monde.
Les enfants seront si contents !...Madelyne est avec Papa, il a tellement insisté. Comment te sens tu, mon chéri ?
Il se sentait parfaitement. En forme. Content. Satisfait…et très amical avec Andrei ! Ce qui ne manque pas de la surprendre, autant qu’à Nate. Les Sanders les rejoignirent.
Salut vous deux, ça va ? On a l’air fin ainsi, hein mon vieux ? Si le costume local sied très bien à nos femmes, j’avoue que… ça gratte ce truc. On est obligé de garder ça ou on peut se changer ?
Pas la moindre trace de suspicion. Les rivaux de peu auparavant semblaient parfaitement ravis de la vie.
*Pourvu que ça dure !*
Oui, on peut se changer…nos affaires sont là bas !, assura Sam en désignant une case toute proche, une seconde plus tard, Justin l’y entraînait alors qu’Andrei blaguait.
Ne vous avisez pas de traîner, nous aussi on a des projets !
Il en a, des idées !, rit Sam.
Mais il y a des idées qui en donnent, d’autres. Justin se montra très entreprenant à l’heure de l’aider à enlever ses habits de cérémoniel maori. Elle n’allait pas s’en plaindre. Ses baisers la faisaient toujours frissonner de bonheur.
Sois sérieux, Justin…Je t’adore mais ne pense pas que le moment soit à ça…pas ici en tout cas…pas avec eux…à deux pas !
Il se moqua de son bon sens et continua de l’embrasser à lui en faire tourner la tête mais elle finit par le convaincre de se montrer raisonnable. La proposition faite par Nate la prit de court, elle ne s’y était pas du tout attendue.
Aller chez…tes parents ?...Euh, oui…je comprends qu’étant dans le coin…Ah, c’est pas loin ?…On ne voudrait pas déranger…plutôt rentrer à la maison…
Rien n’y fit, la rouquine insista. Il suffit d’un coup d’œil pour savoir que l’idée ne plaisait pas plus à Andrei. Son mari, par contre n’éleva pas de veto, il s’était toujours bien entendu avec la famille de son ex !
Les Sommerby se montrèrent charmants mais Sam ne fut pas dupe. On la passait au crible, mine de rien. Après tout, elle était la nouvelle femme dans la vie de celui qu’ils avaient longtemps considéré comme le mari parfait pour leur fille. Non seulement ça, elle était aussi la belle-mère de leurs petits enfants…et on sait bien la méchante réputation qu’ont les femmes qui se chargent des enfants d’un autre lit que le leur, imméritée, la plupart des fois mais qu’y peut on avec les idées préconçues !? Bien sûr, Sam n’avait pas l’allure d’une marâtre et Justin semblait le plus heureux des hommes mais les petits commentaires fielleux ne manquèrent pas à l’appel, de la part de Mrs. Sommerby et des gentilles sœurettes de la rouquine.
Pendant le repas, tout le monde dut s’avouer assez surpris de la bonne entente qui régnait entre Davenport et Sanders. À les voir deviser si gentiment on aurait pu croire qu’ils avaient toujours été les meilleurs amis du monde. Son regard croisa souvent celui de Nate, dubitatif, interrogateur…mais puisque tout allait si bien, ce n’étaient pas elles qui allaient s’en plaindre.
Personne ne songea à les retenir une fois le repas fini. On prit joyeusement congé, avec la promesse de se revoir bientôt, échangée avec les Sanders. Portoloin activé. Retour à la maison.
Viviane et Flore leur firent la fête et les jumeaux mirent aussi du sien. Ça faisait un bien fou, avoir de retour le Justin de toujours, merveilleux père, mari heureux qui pour le bonheur total de tous proposa s’occuper du dîner de ce soir et quand Flore, en toute innocence invoqua les talents culinaires d’Andrei, il rigola de bon cœur en assurant être capable de démontrer que ses talents, à lui, surpassaient largement ceux de Sanders.
Bon, je te laisse un moment avec les enfants…et vais chercher Madelyne chez Papa. Je ne…Quoi ? Tu veux venir avec moi ?...Mais bien sûr que oui…Allons y !
Gerry fut assez surpris de voir son beau fils et son accueil sembla un peu mitigé. Sam lui avait assuré que tout allait bien mais lui, il devait voir pour y croire. Il ne fut pas déçu. À peine arrivés, Justin insista pour aller cueillir son petit ange et emboîta le pas à ces dames pour aller à la nursery. Madelyne était éveillée et gazouilla en reconnaissant sa mère mais ce fut lui qui se pencha sur le berceau et la prit dans ses bras avec d’infinies précautions.
C’est une enfant merveilleuse !, assura Anastasia ajoutant d’un petit ton malicieux, mais elle ne vous ressemble pas du tout Justin !
Sam tressaillit. Les paroles de sa belle mère lui étaient adressées de façon détournée mais Justin se contenta de rire, ravi, en disant que Madelyne était le portrait de sa maman et cela en déposant un baiser sur la petite tête blonde. Anastasia Orloff sourit de biais. Sam sut avoir commis une lourde erreur en lui confiant sa fille. Une folle appréhension la saisit au cœur et ne fit que croître quand la princesse la retint un instant alors que Justin quittait la chambre avec le bébé.
Pourquoi, Samantha ?
Ne me posez pas de questions, Ana…Un jour peut être, je pourrai vous donner une explication…mais je vous en supplie…
Ne rien dire à Andrei ? Non…même si je pense que c’est une erreur, je ne dirai rien. Tôt ou tard, il s’en rendra compte tout seul…à moins que tu ne penses t’enfuir à l’autre bout du monde pour la lui cacher.
Ana…Je ne…n’aurais pas voulu que…
Peu importe ce que tu as voulu, Samantha…si Andrei le sait, je ne peux qu’envisager une suite très désagréable et je pourrai le comprendre…il désirait tant un enfant de toi…mon pauvre enfant.
Il a Jarek à présent…et Nate. Ils sont heureux et rassurez vous, Ana…Andrei n’a jamais été un pauvre enfant !
Sans ajouter un mot de plus, elle sortit au pas de course, rejoindre son mari et son père qui s’extasiaient sur tous les tons de la perfection de la petite fille.
Rentrons, chéri…Les enfants attendent leur sœur avec impatience. À bientôt, Gerry !
C’était une fuite personne ne s’en douta. Justin ne voulait rien savoir de lâcher le bébé, lui cédant les honneurs du volant.
Non !...Conduis toi…je…je suis trop énervée pour le faire…Je t’en prie !...Rentrons, je te raconterai…après !
Elle devait avoir l’air au désespoir car il n’insista pas ni posa de questions. De retour à la maison, il épata Miss O’Higgings et Mrs McPherson en s’occupant de Madelyne avec la science experte d’un père irréprochable.
Sam finit d’aider les petites avec leurs devoirs et alla rejoindre Justin à la cuisine. Il lui semblait que cela faisait des siècles qu’ils ne partageaient pas la joie de concocter des bons petits plats. Il l’avait devancée au travail. Elle resta un instant à le regarder sans rien dire, comme si le voir émincer des oignons la comblait d’un bonheur ineffable puis s’approchant, se coula dans ses bras pour l’embrasser.
Je t’aime…*tu me manquais tellement !*
Talents unis, le dîner fut une réussite culinaire. Enfin seuls, une fois les enfants au lit, il la surprit avec une ambiance romantique, avec lumière tamisée, musique douce et champagne à point. Cela faisait très longtemps qu’ils ne dansaient pas ensemble. C’était comme si d’un coup de baguette magique toutes les amertumes des derniers temps restaient effacées. Le souvenir d’une soirée déjà lointaine lui revint. Ils dansaient alors que leurs soufflés Grand Marnier cuisaient au four. Il la séduisait ce soir aussi bien qu’il l’avait fait alors…sauf que cette fois, il ne se sauverait pas… sous aucun prétexte !
Magie du moment. Parfaite concordance d’idées. Amour intense se renouvelant. Révélant une fois de plus le fou besoin qu’avait l’un de l’autre. Nuit de passion sans égal, nuit de retrouvailles.
Justin faisait des pancakes et Sam le café.
Tu sais, mon chéri…il est temps de penser à rentrer chez nous…Où ? Aux Bermudes, bien sûr !...Je sais que tu aimes être ici…mais dans peu de temps il commencera à faire froid et moche…et puis, ça me manque, le soleil…la mer…
Il ne fut pas dupe de ses intentions détournées et encore moins du motif qui l’y poussait.
Ok…oui, c’est ça aussi et tu te doutes bien que je n’ai guère envie d’un affrontement de ce calibre avec Andrei !...Écoute, Nate le sait et Anastasia aussi…À ton avis, combien de temps mettrait un type aussi malin que lui à s’en rendre compte !?
Elle essayait de garder le calme mais deux ou trois notes aiguës dans sa voix étaient à point de la trahir. Justin se montra tout aussi doux et rassurant qu’on peut l’être. À son docte avis, les femmes avaient un sixième sens dont les hommes manquaient et voyaient des choses qu’eux étaient incapables de discerner. Que deux bébés se ressemblent ? Quel problème ! Tous les bébés se ressemblent plus ou moins à cet âge ! Madelyne était aussi blonde qu’Anthony qui ressemblait tout de même à Philip qui était roux…lui assurant qu’en y regardant bien, ces trois là se ressemblaient entre eux et puis il trouvait que leur petite dernière avait un indiscutable air Forrester.
Tout ce que tu voudras…mais j’aime notre maison là bas…
Elle insista tant et si bien qu’il finit par avouer avoir lui aussi envie de retrouver leur chez soi et surtout le voisinage de son ami de toute la vie. Sam se mordit la lèvre. Encore une nouvelle que Justin avait zappée lors de son trip dans le côté obscur.
Chéri…il y a quelque chose que tu dois savoir…c’est Michael…Il a disparu ! Non…Non ! Personne ne l’a enlevé ni rien de semblable…Il est tout simplement parti…mais on ne sait pas où !
Il resta d’une pièce, consterné. Sam n’avait plus de détails que ceux glanés au hasard d’un appel téléphonique quand elle avait voulu mettre De Brent au courant des déboires de Justin ainsi que de la naissance de Madelyne.
Sa mère m’a dit…qu’il n’était plus le même depuis la disparition d’Alix…On se borne à supposer qu’il est allé la chercher…mais je suis sûre qu’il saura se débrouiller…toi même dis qu’il le fait toujours !
La nouvelle l’affecta et deux pancakes atterrirent à la poubelle. Sam prit le relais le laissant face à une tasse de café. Viviane et Flore se pointèrent pour le petit déjeuner et elle monta s’occuper des plus petits. Plus tard, Justin sortit en disant qu’il allait retrouver Andrei au stand de tir puis pour jouer au golf.
*Finiront par devenir les meilleurs amis du monde à ce train là !*
Tu veux que je t’accompagne ?...Pourquoi pas ? Miss O’Higgings est merveilleuse avec Maddie et Mrs. McPherson s’arrange parfaitement avec Tony et Phil. Emmène les petites à l’école et reviens me chercher, je serai prête !
Si sa présence surprit Andrei, sa précision au tir épata son mari. Se défouler en faisant des cartons parfaits rasséréna un peu son esprit. Être une mère parfaite et ménagère accomplie lui procurait beaucoup de satisfactions mais de temps à autre entendre des chaleureux compliments qui n’avaient rien à voir avec son talent culinaire, chauffait le cœur.
Nate se joignit à eux pour le parcours de golf. Entre deux tirs, elles pouvaient bavarder à leur aise tandis que les deux hommes rivalisaient sur le green.
Je pense que nous allons bientôt rentrer aux Bermudes.
Ce que lui raconta Mrs. Sanders faillit la démoraliser.
Quoi ?...Andrei caresse le projet de s’y établir aussi !?...Oui, je reconnais que le coin est attirant…mais le monde est si vaste…
*Si je migre aux Antipodes, tout le monde commence à adorer les kangourous !!!*
Nate ne raffolait pas trop avec l’idée mais Sam savait sciemment que ce que Sanders déciderait serait parole sacrée pour sa femme.
Elle avait perdu l’entrain et la concentration. Sa balle atterrit dans le piège de sable. Le reste de son jeu manqua d’éclat. Ils déjeunèrent ensemble au club mais après le repas Sam voulut rentrer pour s’occuper des enfants et surtout…pour penser au prochain pas à faire.
Après le dîner, ce soir là, Sam servit un cognac à son chéri et s’asseyant face à lui, décréta sans ambages.
Il n’y a aucun problème pour que Vivi et Flore reprennent leurs cours à l’école à Hamilton. Je sais qu’elles seront ravies de retrouver leurs amis…surtout les petits De Brent.
Tant de décision sembla prendre Justin un peu de court, pas plus que ce qui s’en suivit.
Te souviens tu de Raphaël Leroux ? Non…je ne le pense pas…Tu ne le connais pas…ou peut-être as-tu entendu parler de lui. Un des meilleurs chefs du monde. Il m’a donné un grand coup de pouce jadis, avec « No Sense ». Et bien…il a suivi mon parcours au Cap… vu le fameux concours et va savoir comment su où je me trouvais…
Justin avait posé sa coupe sur la table et suivait attentivement son petit exposé. Elle se passa la main dans les cheveux, d’un geste un peu énervé.
Il…m’a proposé de travailler de nouveau avec lui. Oui…bien sûr que cela a à voir avec la cuisine avec quoi d’autre, sinon ?...mais pas seulement ça…tu sais, en plus d’être un chef coq fabuleux, Raphaël est aussi un homme d’affaires brillant…Oui, il est français ! Qu’est ce que ça peut bien faire ?...Enfin, qu’il soit français ou chinois ne change rien. ..Bref, pour revenir à ce que je disais…Il a un projet superbe. Quelque chose de très exclusif. Un endroit, comme il dit avec son épouvantable accent, si irrésistible … qu’on viendrait de partout pour le plaisir d’une expérience unique. Mais bien sûr… je lui ai dit que je comptais retourner aux Bermudes et…il a trouvé l’idée fascinante. Il veut que je me charge du projet…à Hamilton.
Justin reprit sa coupe et la vida.
Ne fais pas cette tête…ce ne sera pas la fin du monde… Mais bien sûr que je ne vais pas oublier nos enfants ni les laisser tout le temps en main des nounous…Ni t’abandonner à longueur de journée…Dis que oui, Justin !...Non…j’ai pas perdu mon temps ! C’est un reproche ?
Peut être pas de vive voix mais pas besoin d’être un génie pour deviner que l’idée ne le rendait pas fou de joie. Elle soupira et changeant de place, se lova tout contre lui.
Mais…je lui ai dit que j’étais mariée avec l’homme de mes rêves…et avais cinq enfants dont un bébé….alors, il s’est montré très compréhensif…a doublé son offre et m’a proposé d’être associée…et je ne devrai que superviser…mais la meilleure nouvelle de toutes…François …tu te souviens de lui, non ?...Oui, le même…Il sera le chef principal…Je suis si contente…n’est pas merveilleux ?
Elle baissa le nez, contrite.
Je sais...c'est un peu précipité...mais...
On dit par là que ce que femme veut…
Hamilton les accueillit avec soleil éclatant, température douce et senteurs de mer…
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Mer 26 Jan - 10:45 | |
| Que s’était-il passé ici ? Franchement, Justin n’en savait rien. En tout cas, Sam était rudement mignonne dans sa robe exotique, et même s’il se sentait ridicule dans son curieux pagne, il prit le parti d’en rire. D’autant que, non loin, Andreï était attifé exactement comme lui. Chose très agréable, sa femme chérie le couvait de baisers en… pleurant.
Allons, ma chérie. Pourquoi ces larmes ? Et dis-moi, où sont passés nos rejetons ? Maddie va bien ?
Ah ? Mrs Davenport débordait de joie, selon elle. Renseigné sur le sort de sa marmaille, Justin fit signe aux Sanders d’approcher. Tout comme Andreï, il désirait se changer au plus vite. Dommage que Nate et son mari soient juste à côté… Justin aurait volontiers profité des bonnes dispositions de son épouse à son endroit. Chaque chose en son temps… Un petit intermède chez les Sommerby s’imposait. Il n’y vit pas d’inconvénients, étant même heureux que ses ex-beaux-parents connaissent enfin celle qui partagerait le reste de ses jours et serait la seconde mère de leurs petits-enfants.
Retour joyeux à la maison anglaise. Pour une raison qui lui échappait encore, Justin avait l’impression de ne pas avoir vu ses enfants depuis des lustres. Une fête s’imposait ! Il décida de préparer un repas digne de ce nom, à la plus grande joie de tous. Pourtant, quand Sam se rhabilla pour aller chercher la dernière-née, il délégua ses fonctions de chef-coq afin de l’accompagner chez les Sanders-Orloff.
Tu ne comptes pas y aller sans moi quand même ! Puis ça fait longtemps que j’ai vu Gerry… Faudra que tu m’expliques des trucs… J’ai des trous idiots !
Chemin faisant, Sam lui narra brièvement les derniers jours écoulés. Cela cadrait un peu mal avec ce dont il se souvenait, et il lui sembla que son épouse passait volontairement des choses sous silence. S’il s’étonna de ces cachotteries, il ne s’en formalisa pas. Rien ne pouvait entacher sa belle humeur. Son nouveau beau-père l’accueillit avec une réserve qui surprit Justin. Certes, ils ne s’étaient guère fréquentés depuis l’accouchement de Sam mais lui conservait en mémoire des rapports amicaux entre eux. Se tromperait-il ? Anastasia, elle, ne se gêna pas pour lui lancer une pique qu’il feignit d’ignorer lorsqu’il souleva Madelyne dans ses bras :
C’est une enfant merveilleuse, mais elle ne vous ressemble pas du tout Justin !
Autant le prendre en boutade :
Encore heureux ! Avoir une Sam en miniature est le plus beau des cadeaux ! La pauvre serait fine avec mon nez en héritage !
Il laissa les deux femmes à l’étage. Se doutant quel serait leur sujet de conversation, il préférait nettement ne pas s’en mêler et faire des risettes au poupon. Que Sam désire assez abruptement s’en aller surprit à nouveau son mari. Elle était tellement nerveuse qu’elle insista pour qu’il les conduise plutôt que de s’occuper du bébé à l’arrière. Sa promesse d’explications tomba à plat avec la réinstallation de Madelyne à l’étage et les préparatifs du dîner. Il ne lui en voulut pas, trop pris dans la chaleur des fours et celle des bras de Sam qui semblait avant tout lui prouver son attachement. Tant qu’à faire, autant le prouver aussi...
Ça fait des siècles que nous n’avons pas dansé ensemble ! Viens, mon amour !
Dans une ambiance parfaite, ils célébrèrent follement la passion qui les unissait.
A croire que rien n’avait changé, au matin Justin reprit ses habitudes. Levé le premier, il s’attela à la préparation du déjeuner. Sam ne tarda pas à le rejoindre et mit le café en route. Il ne s’attendait pas à ses déclarations avancées en douceur :
Tu sais, mon chéri…il est temps de penser à rentrer chez nous.
Hein ? Mais on est chez nous ! Où veux-tu donc aller ?
Aux Bermudes, bien sûr !...Je sais que tu aimes être ici…mais dans peu de temps il commencera à faire froid et moche…et puis, ça me manque, le soleil…la mer…
Il rigola, un poil moqueur :
Tu ne feras jamais une bonne menteuse Sam. Pas avec moi en tout cas. Avoue plutôt que tu as la trouille à cause de Madelyne.
Ok…oui, c’est ça aussi et tu te doutes bien que je n’ai guère envie d’un affrontement de ce calibre avec Andrei !...Écoute, Nate le sait et Anastasia aussi…À ton avis, combien de temps mettrait un type aussi malin que lui à s’en rendre compte !?
Euh… Dix ans ? Vingt ? Autant que je sache Andreï n’a jamais eu beaucoup l’occasion de voir de près des bébés qui, avouons-le se ressemblent quasi tous à cet âge-là. Ne te bile pas avec ça. Regarde les jumeaux et Maddie, pour moi, à part que la petite est indiscutablement une fille, TA fille, on ne pourrait jurer qu’ils ne sont pas frères et sœur.
Tout ce que tu voudras…mais j’aime notre maison là bas…
Ça c’était une grande première. Enthousiaste, la jeune femme lui en donna une description si flamboyante qu’il finit par admettre ses raisons. L’endroit était vraiment superbe, le climat génial – hors tempête – et puis, facteur non négligeable, son meilleur ami habitait le coin.
Ce sera super de revoir Michael et toute sa clique ! Je me demande où il en est avec Alix. Tu le sais, toi ?
La nouvelle le prit de court, voire l’affola :
Hein ? Disparu ? Mais quand, comment, pourquoi ?
Sa mère m’a dit…qu’il n’était plus le même depuis la disparition d’Alix…On se borne à supposer qu’il est allé la chercher…mais je suis sûre qu’il saura se débrouiller…toi même dis qu’il le fait toujours !
M***e ! J’avais promis un truc à Alix ! J’ai… j’ai oublié quoi. Mais je suis sûr qu’il l’a trouvée son Alix. Et si c’est pas le cas… je l’aiderai.
Là-dessus, distrait, il avait raté ses crêpes qui finirent à la poubelle. La journée s’écoula joyeusement. Sam ne vit aucun inconvénient à l’accompagner au stand de tir où Sanders l’attendait. Sa maîtrise des armes à feu aurait pu sidérer Justin s’il n’avait pas été au courant de ce qu’elle pensait secret. Lui-même se sentit très satisfait de ses performances personnelles quoique, se voir accueilli comme un habitué du stand le frappa.
*Bizarre, ces trous !*
Trou pour trou, autant y mettre des balles de golf ! La lutte fut acharnée entre Andreï et lui. Pendant que les filles jouaient – Nate les ayant rejoints – les compères devisèrent sans retenue. Quand Justin annonça que, très bientôt, Sam et lui retourneraient aux Bermudes, entendre Sanders manifester son désir de connaître ce coin l’enchanta :
C’est une excellente idée ! Michael y habite aussi avec sa tribu. Ça fera un team d’enfer !
En se promettant de reparler ce ces projets, les complices se séparèrent peu après un déjeuner bon enfant au club. Justin trouvait très marrant d’avoir peut-être Nate et Andreï près d’eux à Hamilton. Cela serait une bonne solution pour la garde partagée des petits Davenport. Les grandes ne verraient pas leur scolarité moldue perturbée par ces déplacements hebdomadaires et lui pourrait jouir de la compagnie de Sanders. Avec De Brent en sus, cela promettait bien des plaisirs. Que Sam se montre assez câline en soirée ne le dérangea pas le moins du monde. Il adorait quand elle s’occupait « gentiment » de lui sauf que là… il flairait une approche en douce sur un sujet qui n’avait rien à voir avec de futures galipettes.
*Qu’est-ce qu’elle mijote encore ?*
Revenir sur les Bermudes était normal. Un biais facile en somme. Puis, sans crier gare, voilà que son épouse lui parlait d’un type vaguement connu, untel Leroux, qui l’avait aidée avec son resto au Cap et qui, au vu du concours culinaire remporté à deux, s’intéressait de nouveau à elle. L’un dans l’autre, s’il pigeait correctement ce qu’elle lui racontait, ce Français ne trouvait rien de mieux à lui demander, à elle, d’installer un restaurant d’exception… aux Bermudes !
Enervé soudain, Justin vida son cognac d’un trait :
Mais tu es folle ou quoi ? Qu’est-ce que l’on va devenir les gosses et moi ?
Mais bien sûr que je ne vais pas oublier nos enfants ni les laisser tout le temps en main des nounous…Ni t’abandonner à longueur de journée…Dis que oui, Justin !
Il s’était refermé telle une huître et ne cacha pas sa rancœur :
T’y vas pas de main morte, toi ! A croire que tu as déjà tout prévu, tout combiné. On ne peut pas dire que tu perdes ton temps !
Oh, elle plaida bien sa cause en insistant sur le fait qu’elle serait associée avec Leroux, que ce dernier se rendait compte des sacrifices familiaux engendrés par une telle situation et doublerait son salaire en conséquence, que – cerise sur le gâteau - ce serait le « cher » François ancien chef du No Sense qui serait le chef principal. Bref, amenée comme ça, l’affaire était conclue. Lui n’avait qu’à dire amen avec pour récompense, en tout et pour tout, un air contrit et un bisou sur le nez. Il respira un grand coup, alluma un cigare qu’il téta nerveusement :
Tu me demandais si c’était un reproche ? Eh bien oui, c’en est un ! Je te signale que tu viens de nous gâcher une belle soirée avec tes projets « grandioses » ! … laisse-moi parler, j’ai pas fini. Les Bermudes va et passe, je suis d’accord : on y retourne. Mais ouvrir un restaurant ! Franchement où as-tu la tête ? … ouais, je sais, je suis un papa gâteau qui saura se débrouiller avec les marmots. Si De Brent s’en tire avec sept, cinq c’est de la rigolade ! Là n’est pas la question, Sam. Ce qui me vexe c’est que tu n’aies même pas eu la déférence de me parler de Leroux dès qu’il t’a contactée… Quoi ? J’étais pas capable de t’entendre ? Je ne sais pas de quoi tu causes. Autant que je sache, je n’ai jamais été sourd ! … Pire que ça ? Faudra que tu m’éclaires là-dessus … Non, pas maintenant, je veux d’abord que toi tu m’écoutes. Est-on un couple oui ou non ?
La question déstabilisa Sam qui ne s’attendait pas à ça, ni à une telle réaction de son Justin.
Bon, puisque tu l’admets comment expliques-tu que tu m’écartes aussi cavalièrement d’un projet pareil ? Ton Leroux est peut-être un homme d’affaire hors pair, et toi une expert comptable imbattable… Sans me vanter, je suis les deux, merde ! J’estime avoir mon mot à dire dans cette aventure…
Oups, Mrs Davenport paraissait à la fois contrite et… énervée.
… Comment ça je ressemble à Andreï ? Si lui aussi voulait t’empêcher de faire des bêtises, alors oui. Si lui aussi voulait participer avec toi dans cette folie, alors oui !... Oui, t’as bien entendu, j’ai dit participer. Quand on est un couple, on partage tout : bons et mauvais moments. Il n’est pas question, tu m’entends, pas question de t’embarquer seule là-dedans. C’est, euh… à prendre ou à laisser. Ou je participe… ou…
Il ne savait fichtre rien de la menace à mettre à exécution en cas de refus de sa belle, mais il n’eut pas beaucoup l’occasion de se poser la question. Sam lui sauta au cou en le traitant de divers noms d’oiseaux, du plus moche au plus mignon. Au moins si elle pensait avoir remporté la partie… lui aussi croyait de même.
Le voyage fut très agréable. Tout en regrettant le confort incomparable de son jet privé, Davenport reconnut qu’avoir une armée de charmantes hôtesses à disposition valait la peine de se déplacer parfois « normalement ». Souvent, le sourcil arqué de Sam le fit marrer quand il ne se priva pas de badiner avec l’une ou l’autre demoiselle du bord. Où était le mal ? N’était-il pas un père respectable nanti d’une nichée exemplaire ? But-il un peu trop au cours du vol ? Possible. Les boissons étaient illimitées, autant en profiter, non ? Et puis ça déstresse, c’est connu. Quoiqu’il en soit, la famille au complet reprit ses quartiers dans la magnifique villa surplombant la mer d’azur. Dès le lendemain, tandis que Sam établissait les premiers contacts réels avec les promoteurs immobiliers d’Hamilton, lui fila chez les De Brent. Mrs Mc Pherson, le colonel Paxton, la délicieuse Aby Hataway, la sévère Ella May et Bikita assumaient l’intendance et la garde des quatre enfants « abandonnés » par leurs parents. Tanit et les jumeaux avaient disparu en même temps que leur mère dont on était toujours sans nouvelles. Les gosses firent la fête au tonton enfin de retour. Savoir qu’il ramenait un bébé enchanta la majorité. Sarah, selon son habitude, tira la tête :
Les bébés, y en a marre ! S’il s’en pointe encore un de plus dans cette bicoque, je fous le camp !
*C’est fou ce que l’on te regrettera* pensa Justin peu aimablement.
Il se fit promettre de recevoir leur appel en cas de pépins chez le De Brent et assura déclencher les grandes manœuvres en cas le non réapparition prochaine. Bikita le raccompagnant sur la porte après plusieurs heures à faire le pitre avec les petits lui souffla :
Monsieur Justin pas trop s’en faire. Bikita sait. Mon maître de temps a besoin pour convaincre maîtresse Alix.
Et comment sais-tu ça, Bikita ? Tu le surveilles ? Non… Laisse-moi deviner… C’est Lormar qui cafte, hein ? Vous vous entendez bien non ?
Ce n’est pas tous les jours que l’on voit un elfe domestique rougir. Justin en riait encore en se rendant à son rendez-vous en bord de mer. Il devait y rejoindre Sam pour déjeuner et l’attendit à la terrasse du restaurant prévu en sirotant une vodka-citron. C’est fou le nombre de nanas qui vous sourient quand vous êtes un beau gars seul à une table… Dieu nous a donné des yeux pour voir, non ? Davenport ne se priva pas de reluquer les croupes attirantes qui défilèrent à proximité. Un clin d’œil ici, un sourire ravageur là… Sam arriva. Lasse, elle jeta son sac sur un siège, s’asseyant sur un autre.
Mauvaise pioche ? Tu bois quelque chose ?
Elle sourit en passant commande au garçon appelé puis lui confia le résultat de ses démarches du jour. Apparemment, le « cher » Leroux avait engagé des pourparlers avec deux agences concurrentes. C’était de bonne guerre. Plus les parties se battent pour empocher le marché, plus les retombées peuvent être fructueuses pour celui qui regarde le match. Ainsi, Sam était pour l’heure l’agent de liaison. Investie du droit de décision final, à elle de trancher au meilleur intérêt. Or là, elle hésitait car les immeubles proposés rivalisaient bellement en avantages et inconvénients. Patient, Davenport écouta avec attention les arguments énoncés :
… Je vois le coin, chouette endroit… Ah ! Il faut refaire toute la déco et mettre les installations aux normes… ça va coûter un max !...L’autre est moins bien situé, c’est vrai… tout est au top ?… Ben… puisque c’est Leroux qui paie… autant choisir le premier, et basta !
Elle insista pour qu’ils visitent ensemble la future implantation. Pas de souci, Justin était de belle humeur. Ils déjeunèrent gaiment, non sans passer un coup de fil chez eux au cas où il y aurait un souci. Avec les Mrs Pimms et O’Higgins flanquées des deux elfes Branhir et Gwenin à bord, tout baignait.
Implanté à un carrefour passant, l’édifice ne payait pas de mine extérieure, il est vrai. Dedans, les possibilités étaient vastes. Intimes ou plus conviviaux, divers espaces étaient exploitables. Une terrasse s’ouvrait sur l’arrière d’un jardinet en pagaille, un étage convenait aux réunions groupées. La cuisine à elle seule valait le détour. Satisfait, le couple signa l’acte dans l’après-midi.
Le soir, Justin sortit le grand jeu. Dîner aux chandelles, champagne, fleurs, musique douce : rien ne manquait. Quoique fatiguée Sam ne fut pas tout à fait dupe que son Justin avait une idée derrière la tête. Quand elle lui posa la question alors qu’ils dégustaient le homard, il rit :
Moi ? Je te cache des choses ? Voyons, mon amour, que puis-je avoir pour autre dessein que celui de vouloir te détendre après une journée pareille ?
Il lui raconta sa visite chez De Brent histoire de noyer le poisson. Cela marcha… à moitié. Les projets du restaurant furent bientôt remis sur le tapis. Demain ils engageraient les divers corps de métiers nécessaires à la rénovation du bâtiment, si tout allait bien – la magie aidant au besoin – ils seraient parés à assumer les fêtes de fin d’année. Au dessert, Justin avança ses pions :
Tu sais, j’ai beaucoup réfléchi… à l’avenir, notre avenir. Je conçois parfaitement que d’être une « gentille » femme au foyer ne suffise pas à ton bonheur… C’est d’ailleurs pour ça que j’ai accepté de te laisser t’embarquer dans ce projet avec Leroux. Mais… oui, il y a un mais : il y en a toujours un (rire) Je sais que tu adores cuisiner, passion que nous partageons et qui nous a si bien rapprochés, du reste. Nous allons probablement beaucoup nous amuser à donner un coup de pouce à François avec ses menus et nos « petits » talents cumulés. Néanmoins, je t’imagine mal « coincée » à demeure à tes fourneaux… Bien sûr avec les gosses, on aura de quoi s’occuper… une semaine sur deux, le reste… Tu es une femme d’action, Sam ! J’ai vu et admiré ta façon de tirer au stand l’autre fois… on n’apprend pas ça aux agents du Trésor, si je ne m’abuse !
Là, Sam commençait à se demander où son mari voulait en venir. Suspectait-elle qu’il ait découvert ses petits secrets ? Il lui en donna confirmation :
Je sais tout, Sam ! Depuis la ferme jusqu’au recrutement dans les unités spéciales. Ne nie pas que tu aimes ça… Qui de nous deux est le plus gradé n’a pas d’intérêt. ( sa tête valait de l’or) Oui, m’dame ! J’en suis aussi… Pas à la retraite, non mais dormant… comme toi ! Maintenant que la famille s’est agrandie, va falloir leur dire non. Il n’est pas question d’aller risquer notre peau aux quatre coins du monde. Alors j’ai pensé à un autre truc… plus cool !
Se levant, il alla sortir chemise d’un tiroir et la lui soumit. Un acte de propriété et des photos d’un bâtiment simple mais très fonctionnel pour des bureaux se dévoilèrent.
Tu vois ma chérie, il n’y a pas que toi qui fasse des choses dans le dos de l’autre. Que penses-tu d’une belle enseigne annonçant « Davenport et Forrester : détectives. » ?
Prenant le même ton suppliant qu’elle avait employé pour le faire craquer au sujet du resto, il minauda :
Dis que oui…
Leur rire résonna longtemps dans la maison.
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| | | | Sujet: Re: Regrets ? Ven 28 Jan - 14:27 | |
| Combien dura le rituel ? Nate n’aurait su le dire. Temps et espace perdaient beaucoup de leur sens dans un moment pareil. Les voix, le battement des tambours…et puis ce silence surnaturel avant de le voir. Étranger à ce qui l’entourait, Andrei s’occupait à…râler.
Qui a osé m’attifer de ce truc ?
Ça lui ressemblait bien de rouspéter de la sorte. Nate rompit les rangs et courut vers lui. Sam avait fait de même, dans l’autre sens où se trouvait Justin qui rigolait.
*L’un râle, l’autre rigole…somme toute tout semble rentré dans l’ordre !*
Mon chéri…je suis si contente de te revoir. Ça va ? Tu te sens bien ?
Il lui décocha un de ces regards, mi courroucés mi surpris, si charmants.
Oui, je vais bien, en voilà une idée ! Mais dis-moi, qu’est-ce qu’on fout là, et pourquoi t’es habillée comme ça ? …
Nate sourit, ravie sans trop oser lui sauter au cou. Sait on jamais quels changements pouvaient avoir eu lieu.
Tant mieux alors…euh, ben…on est là parce…les choses ne tournaient pas rond et il fallait remettre le tout à sa place. Cela s’appelle cérémonie de réconciliation des esprits…et si je suis habillée comme ça et bien, c’est parce que le rituel l’exige ainsi. Tu…ne te souviens de rien ?
Vu la tête qu’il tirait faudrait supposer que non. Il le confirma.
Non, je ne me souviens pas. Il s’est passé quelque chose depuis… notre mariage?
Elle opina vigoureusement du chef. Le comble pareil trou de mémoire !
Oh oui !...Ton fils Jarek est né…pour si jamais tu n’aies pas remarqué que je ne suis plus enceinte...et nous sommes en Nouvelle Zélande. Pourquoi ?...euh…les esprits anciens n’aiment pas s’éloigner des terres sacrées…On n’allait pas réussir le même effet au golf de Hampstead quand même !
Il prit un air dubitatif mais finit par esquisser un demi-sourire.
Je devrai te croire sur parole… mais c’est parfait.
Nate soupira. Bien sûr que c’était parfait ! Justin qui semblait être redevenu le plus heureux des hommes les appelait, à sa grande surprise, Andrei agréa l’idée de rejoindre le couple Davenport, la prenant de la main, il l’entraîna à sa suite. Pas à dire, il était…content de se trouver avec Justin ?
*Même s’il tient sa Sam collée à lui comme si elle songeait à s’enfuir…à croire que tout a marché au-delà de nos espoirs les plus fous !*
Plus que ça, il se comportait comme si Justin et lui étaient des copains de longue date. Petits commentaires sympas, leur cédant la place pour se changer en premier…
*Ça fait monde à l’envers…mais qui se plaint ?*
Pas elle, en tout cas. Pas après ces baisers fougueux ni ce regard plein de promesses !
J’espère que l’on ne doit pas trop s’attarder ici.
Sourire mutin.
Pas trop…mais puisqu’on y est, j’aimerais bien passer un moment voir ma famille.
Cette idée ne le fit pas sauter de joie. Sa grimace fut très expressive mais il finit par agréer avec un « S’il le faut » résigné.
Merci, mon amour…on ne restera que le strictement nécessaire.
Les Davenport étaient aussi de la partie. Situation assez spéciale. La voilà qui se pointait à Sommerby House avec son nouveau mari, accompagnée de son ex avec son actuelle épouse. De quoi secouer rudement les ciments stricts de la morale de ces conservateurs endurcis. Mais tout se passa très bien, dans une ambiance détendue et bon enfant alors qu’Andrei et Justin, les meilleurs amis du monde, faisaient des projets pour jouer au golf, sortir en groupe, etc. Samantha semblait aussi surprise qu’elle. Par signes, elles accordèrent en parler plus tard.
Impossible retenir Andrei plus de temps. Il avait hâte de rentrer. Un portoloin arrangea rapidement cela. Le voir découvrir son fils, puisque c’était pour lui toute une première vu qu’il avait…oublié, émut beaucoup Nate. Soit l’Andrei de toujours était de retour mais, le cœur battant d’un émoi incrédule, elle devina que si bien c’était bien lui qui était là…il y avait tout de même quelques subtiles variations. L’Andrei de jadis n’aurait jamais eu cette expression extatique en contemplant un bébé, tout sien qu’il put être, ni lui aurait parlé de ce ton bébête, si particulier aux pères baveux d’orgueil et émotion, comme Justin, par exemple !
*Mince…serait ce possible ???*
Il était heureux, pur et simplement, ce qui faisait qu’elle sente s’élever au septième ciel du bonheur parfait, d’autant plus qu’en déposant enfin son héritier dans son berceau, il laissa clairement établi que si retrouver son fils le ravissait, la retrouver elle…l’enchantait. La suite fut digne d’Andrei dans sa meilleure forme, tout feu et flamme il fit preuve de dévorante passion mais aussi d’inégalable tendresse. Si possible, Nate ne l’en aima que plus !
Son esprit apaisé flottant encore sur un nuage de soyeuse plénitude, Nate resta lovée dans ses bras alors qu’il lançait quelques idées en l’air, comme si rien.
On devrait peut-être s’offrir des vacances.
Andrei pensant aux vacances comme n’importe qui ? C’était du nouveau, ça.
Hum ! Ma foi…oui, ce serait pas mal…mais pour si jamais tu n’y penses pas, Jarek a à peine un peu plus d’un mois…
Mais voyons, Monsieur avait réponse à tout.
Oui, je sais… Jarek est encore très petit mais rien ne nous empêche de choisir un endroit calme, au soleil de préférence. Justin m’a vanté les Bermudes.
*Bermudes !?!...De Brent…Je passe !*
Rien à faire. L’idée avait déjà fait des racines.
Ce serait chouette d’y aller aussi.
*Ils avaient quoi en tête, les dieux anciens !?*
Hum…Et ce besoin soudain de bougeotte ?, voulut elle savoir en pensant déjà à ce que pourrait donner vivre dans un voisinage pareil.
L’autre se défendit, rieur. Évidemment, l’idée l’enthousiasmait.
Comment ça, j’ai la bougeotte ? Je l’ai toujours eue, non ? Oui je t’adore, j’adore notre fils mais… j’adore aussi changer d’horizons puis…
Puis il changea de thème mais ce n’est pas cela qui la rassura. Du coup, Monsieur voyait la vie en grand, la maison, qui était pourtant très grande lui semblait…petite. Il gardait un souvenir ineffable de La Folie, la même qu’il avait transformée en ruines fumantes. Au moins eut il la grâce de se souvenir qu’elle n’aimait pas trop cette bâtisse démesurée…Sans doute qu’elle le pince aida un peu à rafraîchir ses souvenirs.
On n’est pas obligé d’avoir si grand. J’aimerais au moins une piscine, une salle de gym et un enclos pour les chevaux.
Oui…un cinéma privé, un héliport, un embarcadère pour le petit bateau qui fera jeu avec ton Versailles…Grrrr…Arrête de divaguer et raconte plutôt ce que tu penses faire demain.
Il allait visiter sa mère. Normal…enfin, depuis qu’il était devenu un fils modèle. Tirer des cartons avec Justin ?...Jouer au golf avec Justin ?
*J’ai divorcé de Justin…et là je vais l’avoir jusque dans la soupe…*
Euh…sympa, le programme…puis je me joindre à vous ? Samantha viendra aussi, n’est ce pas ?
Il fallait définitivement qu’elles parlent.
Sam ? Euh… Sais pas si elle viendra. Avec cinq enfants à la maison ce sera difficile, je pense. On devra absolument les inviter tous pour un week-end, un de ces quatre… Quand je te dis que la maison est trop petite !
Nate s’en serait arraché les cheveux mais opta par sourire comme si tout cela la ravissait au plus haut point…On en reparlerait après !
Le lendemain, rien n’avait changé…pas empiré non plus, mais ce n’était pas exactement ce à quoi elle s’était attendue après cette remise des pendules à l’heure. Voilà que le pragmatique homme d’action, le sexy et ténébreux séducteur désabusé et froid…pestait parce que la pâte des pancakes faisait des grumeaux !
C’est dingue, ça ! Je suis sûr que je savais les faire ! T’en fais pas, c’est pas un drame… je demanderai conseil à Justin.
Elle se força à sourire.
Mais je m’en fais pas, mon amour…pas du tout ! Mangeons des tartines…ça me va très bien !
Au moins en faire ne demandait aucune science. Café et jus d’orange savaient comme toujours. La journée était sauvée !
Nate se joignit au trio sur le terrain de golf. Il suffit de les voir prendre position pour savoir que ces trois là n’étaient pas d’occasionnels joueurs du dimanche…comme elle. Faisant fi de son peu de professionnalisme en tant que golfeuse, elle s’y prit avec enthousiasme et bonne humeur tout en profitant de l’occasion pour bavarder avec Sam. Entre deux tirs parfaits, la blonde lui fit part de ses plans.
Je pense que nous allons bientôt rentrer aux Bermudes.
Nate soupira.
Normal, non ? C’est chez vous…Imagine toi qu’Andrei semble lui aussi très tenté de changer d’horizons…et suite à cette merveilleuse nouvelle entente entre nos chéris…les Bermudes l’attirent beaucoup !
L’autre pâlit, rata son tir et sembla démoralisée.
Quoi ?...Andrei caresse le projet de s’y établir aussi !?...
La rouquine acquiesça tout en balançant distraitement son club.
Ben oui. Justin lui a chanté les merveilles du coin et l’autre en est ravi avec l’idée.
Pas du tout Samantha qui avait l’air d’avoir envie de taper sur quelqu’un mais se contenta de grommeler :
Oui, je reconnais que le coin est attirant…mais le monde est si vaste…
Autant lui donner raison, pour si jamais.
Ben oui…tu n’as pas tort. Je ne suis pas encore trop convaincue avec les résultats de la fameuse « réconciliation »…mais on verra bien ce que ça finit par donner…
Le jeu de Sam était gâché. Le sien n’améliora pas pour autant mais ces messieurs avaient l’air si pris dans leurs projets que c’est à peine s’ils le remarquèrent. Au déjeuner, qu’ils prirent ensemble, en parfaite harmonie, au club, Nate prit son temps pour détailler l’assistance. Andrei était détendu, bavard, plein d’humour (qui l’aurait cru !), la « réconciliation avec ses toutous chéris avait sans doute beaucoup à voir et cette nouvelle « amitié » avec Davenport semblait beaucoup le réjouir. Justin, lui, était à nouveau le même homme charmant de toujours, avec sa belle humeur, son rire contagieux, le regard pétillant de joie de vivre. Sam demeurait silencieuse, souriant occasionnellement, distraite, comme si quelque souci pesait sur ses épaules. Nate se doutait bien de la nature des ses soucis mais bien entendu, n’aborda pas le thème.
La vie poursuivit son cours, avec les quelques variations survenues. Il fallait bien se faire à l’idée que les Davenport étaient à présent des amis très proches avec lesquels on se voyait souvent, que ce soit pour jouer au golf, pour dîner ensemble, pour sortir en boîte…Le reste du monde n’y comprenait rien. Personne n’ayant perdu la mémoire, tous se souvenaient que pas trop longtemps auparavant les choses étaient tout autrement entre ces quatre et se demandaient par quel miraculeux hasard ils partageaient à l’heure une entente si civilisée. Comme on pouvait s’y attendre, on émit des idées hautes en couleurs sur cette tournure inattendue et il eut qui assura, avec un bon rire grivois que c’était sans doute l’élégante façon de mener un savoureux ménage à quatre.
Nate n’opposa plus aucun commentaire à l’idée de migrer sous d’autres cieux, elle commençait à en avoir sévèrement marre, cette étroitesse de critère. Cela faisait un mois que les Davenport avaient regagné leur très douillet chez soi bermudien quand un soir, après le dîner, Andrei, joyeux comme un gosse à Noël annonça avoir trouvé l’endroit idéal où s’établir…aux Bermudes, bien sur ! Elle opta pour se laisser surprendre.
Pas trop joyeux les souvenirs qu’elle gardait de son court séjour à Hamilton mais là, tout allait être différent, il fallait y croire. Si pour tout autre un déménagement de ce calibre entraîne quelques problèmes, on va supposer que pour eux cela n’en posa aucun. La magie appliquée en savante dose, tout fut prête en moins de temps qu’il ne fallut pour le dire et c’est ainsi qu’une claire après midi, fin Octobre, alors que l’automne teignait d’or et roux la nature et que l’ai devenait vif, Nate , du bras de son mari qui portait orgueilleusement leur fils, prit congé de l’Angleterre avec la ferme décision de ne plus y remettre les pieds avant un bon bout de temps.
Le voyage fut délicieux. Jarek était un bébé exemplaire qui dormit sagement la plupart du temps, laissant à ses parents le plaisir de jouir des bontés de la 1ère classe, où les hôtesses se surpassant en attentions ne laissèrent un instant de s’occuper d’eux…Logiquement, le charme d’enfer de son mari avait beaucoup à voir avec ce déploiement féminin.
Surtout, ne te gêne pas…Jalouse ? Non. Pourquoi ?...Je suis en train de beaucoup m’amuser, au contraire…
Il voulut bien savoir ce qui l’amusait tant. En riant, enjôleuse, elle l’embrassa.
C’est perfidement délicieux voir comme ces demoiselles verdissent d’envie…Tu es peut être le diable, mon amour, mais je veux croire que tu es mon diable, à moi…
Elle adora l’éclat de ses yeux gris et sa façon de lui prouver sa totale allégeance.
Hamilton. Couleur. Soleil. Mer calme. Brise suave et embaumée. Comme prévu, tout était prêt pour les recevoir dans leur nouvelle demeure. Quand la voiture sortit du détour de l’allée d’accès, Nate n’étouffa pas une exclamation de surprise.
Franchement…tu avais dit grand…mais ça…Tu as perdu la tête, Andrei Sanders !
Pierre claire, sobre dans sa magnifique élégance, nichée dans un parc d’allure soigneusement sylvestre, flanquée d’arbres centenaires, la demeure s’érigeait accueillante…merveilleusement semblable à Sommerby House, à l’autre bout du monde. Les yeux noyés de larmes d’amour, de gratitude, de tout ce qui agitait son cœur, elle jeta les bras au cou de son mari.
Tu es merveilleux !
La surprise n’en finissait pas là. À peine franchi le seuil, des voix joyeuses retentirent suivies d’une galopade effrénée. Viviane et Flore…Philip et Anthony…
Enfin vous êtes là !!!
Détail…Viviane sauta au cou d’Andrei d’abord avant d’aller embrasser sa mère. Imitée par Flore et Tony. Philip eut la déférence de s’accrocher aux jupes de sa mère, sans doute parce qu’il en avait marre d’attendre son tour pour faire la fête à son autre papa. Nate ne leur tint pas en rigueur, elle était trop heureuse.
Comme on pouvait s’y attendre, les Davenport n’habitaient pas bien loin et se présentèrent un peu plus tard pour leur souhaiter la bienvenue et emmener les enfants, question de les laisser s’installer en toute paix.
La vie n’était elle pas merveilleuse? Au fait, la pâte des pancakes ne faisait plus de grumeaux... |
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