Assise sur le bord de son lit, Héra observait l'agitation qui se déroulait devant elle depuis plusieurs dizaines de minutes.
Ce matin-là, elle avait accompagné ses enfants à King's Cross pour ne pas manquer le Poudlard Express. Les vacances de Noël touchaient à leur fin, et ces moments avec ses enfants étaient précieux pour elle. Comme d'habitude, Athena l'avait saluée froidement, tandis que son fils lui avait promis de lui écrire une fois arrivé. Elle avait tendrement caressé sa joue avant de lui donner un baiser sur le front, même s'il était bien plus grand qu'elle, et cela même avec ses talons de dix centimètres ! Le jeune homme lui avait souri avant de disparaître dans le compartiment.
Elle s'était ensuite rendue dans un café, attirée par l'agitation. En prenant un journal, le visage de Bellatrix l'avait frappée. Un titre accrocheur surplombait le visage de cette femme d'un certain âge : "Plusieurs mangemorts se sont échappés d'Azkaban la nuit dernière." Son cœur s'était alors emballé malgré elle. Elle avait continué à lire les lignes de la une jusqu'à ce que le nom qui lui était familier apparaisse. Son mari était de retour à la maison.
Rowan était rentré chez eux.
Elle avait reposé le journal et déposé quelques mornilles avant de quitter le café et de se rendre à son bureau.
"Madame ?" avait demandé sa secrétaire, surprise.
"Il est de retour, Elise", avait répondu Héra.
La jeune femme avait froncé les sourcils avant de comprendre. Se levant précipitamment, elle avait couru à travers les couloirs pour se rendre dans les stocks secrets de l'empire. Dix minutes plus tard, Héra effectuait quelques essayages dans son propre bureau, devant un miroir qui la reflétait sous toutes ses coutures.
C'est finalement avec une chemise rouge sang et une jupe dévoilant ses jolies jambes, la broche des Mulciber sur sa poitrine, qu'elle avait choisi de s'habiller. Le collier qu'elle portait depuis quelque temps avait été remis dans le coffre-fort.
"Et les dessous de la dernière collection ?" avait pressé la trentenaire.
La secrétaire lui avait tendu l'objet de ses désirs. Héra avait alors retiré le tout derrière un paravent et enfilé sa nouvelle création : du vert, un ensemble dévoilant ses formes encore correctes malgré son âge avancé. Satisfaite, Héra avait remis sa tenue et s'était couverte d'un manteau en hermine.
"Je serai absente quelques jours. Vous avez mes instructions", avait-elle dit à Elise.
Elise avait hoché la tête avant de laisser sa patronne disparaître.
Héra était alors apparue devant la porte du manoir. Prenant une grande respiration, elle s'était introduite chez elle, déposant son manteau sur l'elfe de maison.
"Monsieur est ici ?", avait-elle demandé.
"Monsieur est avec sa mère, madame. Il est en train de prendre un bain", avait répondu l'elfe.
Héra avait poussé un long soupir. Bien sûr, Winona avait pris les devants.
"Apporte-moi un verre de whisky", avait-elle ordonné.
Peu après, la trentenaire était montée dans la chambre matrimoniale, entrant sans frapper.
"Ah, te voilà ! Où étais-tu passé ?", avait demandé la belle-mère en scrutant sa belle-fille d'un regard de rapace. "Et c'est quoi cette tenue de trainée ? Tu n'as pas honte ?"
"Où est Rowan ?", s'était contentée de répondre Héra.
"Il est encore dans la salle de bain. Je m'en occupe. Tu peux disposer."
Mais sans attendre, la trentenaire était entrée dans la salle de bain, croisant le regard de son époux.
L'eau tiède lui semblait pourtant brûlante. Elle dégoulinait sur son dos courbé et laissait la marque écarlate de son passage sur sa peau claire, mouchetée de tâches de rousseur au niveau de la nuque et du haut des épaules. Il frissonnait dans son bain, son corps fatigué et meurtri n'avait plus l'habitude de la chaleur et de la tendresse. Il ferma les yeux quand l'eau coula en cascade sur son crâne, sur son visage et le bout de son nez, plaquant ses cheveux sales sur son front. Un parfum lui chatouilla le nez. Le shampooing avait l'odeur de la lavande. L'odeur de la maison. Il osa un sourire fatigué. Etait-il rentré ? Non, non. Impossible. Il était enfermé. Alors c'était un rêve. Le premier depuis très longtemps. Le dernier, il l'espérait. Il en avait assez. Winona glissa ses doigts fins dans les boucles rousses de son petit garçon et lui massa le cuir chevelu avec insistance. Ni l'un ni l'autre ne disait mot. Le premier n'en avait pas la force, la seconde se refusait au sentimentalisme. Le temps que le produit agisse, elle reprit la toilette de son fils et lui frotta le dos avec application. Il leva docilement le bras lorsqu'elle lui demanda, puis l'autre. Elle lui débarbouilla les joues, le cou, le torse. Le reste, il se débrouillerait seul. L'eau avait prit une sale couleur marronâtre, le gant de toilette chassait la crasse incrustée depuis... Combien déjà ? Ah, oui. Quatorze ans.
Il ne le réalisait pas. Si au début il avait compté les jours en s'écorchant les doigts sur les murs froids de sa geôle, il avait rapidement abandonné, autant à cause de la douleur, que des possibles infections. Les jours passaient sans qu'il ne puisse mesurer les heures. Il ne faisait jamais beau au-dessus de la forteresse d'Azkaban. L'orage grondait continuellement et jamais la lumière du soleil ne perçait les nuages pour l'aider à compter, ni pour éclairer ses journées. Le va-et-vient de ses gardiens n'ayant rien de régulier, il se perdit dans le temps et se noya dans le désespoir à chacun de leur baiser. Très vite, il s'enferma au fond de lui-même. Une forteresse au cœur de la forteresse.
Un jour, la marque à son avant-bras s'était réveillée et elle ne s'était plus calmé depuis. Elle lui faisait mal. Une douleur lancinante qui lui rappelait pourquoi il était là. Il n'en éprouvait aucun regret, simplement de la colère. Une telle fin était injuste. Il s'était lacéré le bras jusqu'au sang. Pour chasser la marque, pour faire taire la douleur. En vain.
Un autre jour, sans qu'il sache combien de temps s'était écoulé entre les deux, les murs tombèrent. Il entendit le rire hystérique de Bellatrix, la voix de ses anciens compagnons d'armes. L'un d'entre eux criait l'impossible. Ils étaient libres.
Libres.
Rowan avait toujours été un homme impulsif, agissant par instinct et pulsion. Cela n'avait pas changé après tout ce temps enfermé. Il n'avait pas pensé aux conséquences, à la raison qui lui soufflait ô combien son idée était sotte et prévisible. Et, peut-être était-elle trop prévisible, justement. Personne de censé ne ferait quelque chose d'aussi bête. Alors qui penserait le retrouver là ?
Comme un enfant terrifié, Rowan était retourné chez lui.
Il était tombé face à sa mère, sa tendre mère et avait fait quelque chose qu'il n'avait pas fait depuis ses onze ans : il l'avait prit dans ses bras. Il n'avait plus la force de l'étreindre, mais il s'était agripper à ses vêtements et avait caché son visage dans son cou. Tant pis pour l'honneur, tant pis pour sa dignité ! Rowan avait fondu en larmes.
Tu n'aurais pas dû rentrer... l'avait-elle réprimandé, sans parvenir à masquer les tremblements de sa voix. Jamais il n'avait vu Winona Mulciber pleurer.
Rowan cligna des yeux. Quand il revint à lui, il constata qu'il était à nouveau seul. On l'avait assis sur un tabouret et enveloppé dans un peignoir. Il caressa le tissu du bout des doigts, sa douceur avait un petit quelque chose d'irréel. Rêvait-il ? La moiteur et la chaleur de la pièce embrumait son esprit. La buée perlait sur les carreaux de la salle de bain et floutait son reflet dans le miroir. Tant mieux, il ne voulait pas se voir. Le fier Rowan avait perdu toute sa superbe.
Des talons claquant sur le sol lui firent relever la tête. Cela aurait pu être sa mère, mais il connaissait sa façon de marcher. Ce n'était pas elle. C'était un ange envoyé par le ciel. Un ange couvert d'écarlate, plus ravissante encore que dans ses souvenirs. La fatigue lui jouait peut-être des tours, mais il était ravi que ses rêveries prennent une telle apparence. Son visage s'illumina en la reconnaissant. Son regard, surtout, retrouva un bref instant sa lueur d'antan. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, un banal tu n'as pas changé, mais aucun son ne franchit sa gorge. Ses lèvres sèches remuèrent à peine, un Héra, inaudible. A la place, se fut la voix de la matriarche qui s'éleva.
« Fichez-lui la paix, Héra, siffla Winona de sa voix autoritaire, mais ferme. Vous voyez bien qu'il a besoin de repos. »
Forçant le passage, la doyenne du manoir s'avança vers son fils pour resserrer les pans de son peignoir et cacher sa maigreur à la vue d'Hera. Il semblait déjà bien assez fatigué, sa belle-fille n'avait pas besoin d'en voir plus pour l'instant. Elle réarrangea le col autour du cou de Rowan et glissa avec affection une mèche de cheveux encore humide derrière son oreille.
« Je t'ai fait préparer quelques vêtements. » Elle lui parlait comme si elle s'occupait d'une personne sénile en fin de vie. Rowan aurait dû trouver cela outrageant, mais n'avait ni la force ni l'envie de protester. Il s'agrippa à sa mère, sans pour autant quitter sa femme des yeux. Winona passa le bras de son fils autour de ses épaules et l'aida à se remettre sur pied. Chose faite, elle glissa un regard condescendant à l'ignoble épouse. « Si vous voulez avoir un tant soit peu d'utilité, allez lui chercher quelque chose à manger. »
Une épouse correcte aurait préparé le dîner pour son mari fatigué, au lieu de se noyer dans l'alcool, tel était le fond de sa pensée. Mais Winona avait assez de jugeotte pour ne pas chercher le conflit devant son fils. Elle l'entraina, pas après pas, en direction de sa chambre. Passant près de son épouse, Rowan leva le bras. Du bout des doigts, il caressa la joue de celle qui lui avait tant de fois égayé ses journées. Il esquissa l'ombre d'un sourire, puis Winona le força à quitter la pièce, l'arrachant à ses douces rêveries.
Dernière édition par Rowan A. Mulciber le Mer 28 Fév - 12:29, édité 1 fois
Héra M. Mulciber
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Sujet: Re: FB A bad love Dim 25 Fév - 22:11
FB A bad love
Quatorze ans. Quatorze ans qu’elle avait supporté cette vieille mégère. Quatorze ans qu’elle avait senti sa baguette lui démanger, mais que le bonheur de Rowan serait détruit si elle s’exécutait. Quatorze ans qu’elle avait regardé Winona manipulé sa fille pour la retourner contre elle. Quatorze ans qu’elle avait entendu la Mulciber insulter son fils de bâtard, persuadée qu’il n’était pas l’héritier. Quatorze ans qu’elle l’avait supporté dans ses gémissements, ses plaintes, tandis qu’elle se battait bec et ongles pour sortir l’homme pour qui son coeur battait plus que de raison. Quatorze ans qu’elle ll’insultait, la regardait de haut. Quatorze longues années…
Face au regard de son époux pourtant, elle oublia ce détail. Dans son peignoir, son visage s’illumina à sa vue. Elle entendit son prénom traversé ses lèvres et s’apprêtait à venir s’agenouiller devant lui pour l’enlacer, mais la voix de la marâtre l’en empêcha.
- Excusez-moi de vouloir voir mon époux, siffla-t-elle à son tour.
Héra regarda Winona prendre les devants et s’approcher de celui qu’elle aimait, le traitant comme un enfant. Mordillant sa lèvre inférieure, elle finit par rouler des yeux. Par Merlin, si elle pouvait être un peu moins….agaçante!
Ce fut le moment pour l’elfe de maison de lui ammener son verre de whisky, mais la remarque de la matriarche fila dans les airs. Restant droite comme un piquet, elle ne répliqua pas avant de voir le geste de son amour. Héra lui adressa un regard, avant de lui envoyer un baiser. Puis, elle les suivit, ne s’avouant pas vaincue. Winona avait peut-être dominance sur le fait qu’elle était sa mère, mais l’ancienne Parkinson était la maitresse de maison et celle à qui il avait passé la bague au doigt. Celle qui lui avait fait des enfants. Celle qui l’aimait au péril de sa propre vie. Combien de fois avait-elle tenté de le sauver au péril de son empire? Cela tandis que la veuve pleurait dans sa chambre au manoir où vivait les petits enfants qu’elle avait reniés à leur naissance et sa belle-fille qu’elle haïssait?
- Alastor, appela-t-elle avant que l’elfe n’apparaisse. - Oui, maitresse? - Apporte de quoi manger à Monsieur. Notamment ce que j’ai acheté ce matin à son intention. - Bien maitresse.
L’elfe disparut. Héra installa alors une petite table pour déposer le futur déjeuner et lança un regard de défi à sa belle-mère, tout en s’asseyant sur le bord du lit. Elle reposa alors son regard sur son époux empli de douceur et d’amour. Winona l’habilla alors, avant qu’Alastor ne dépose le repas de Monsieur.
Se levant une fois qu’il fut habillé, Héra prit la main de son époux en déposant le verre sur la table.
- Je pense qu’il est temps que vous alliez prévenir Athena du retour de son père. Elle sera ravie de recevoir un hibou de votre part, ma chère.
Insistante, la belle-mère finit par soupirer et tourner les talons, quittant la chambre des deux époux. Quand la porte se ferma enfin, Héra s’agenouilla devant Rowan, portant ses deux mains à ses lèvres.
Winona eut la décence de laisser à son fils le fond de dignité qu'il lui restait et ne lui fit pas l'humiliation de lui mettre caleçon et pantalon à sa place. De toutes manières, Rowan aurait protesté. Il lui fallut une longue minute pour y parvenir, et encore, mais il le fit seul. La doyenne du clan Mulciber l'observait simplement en silence, partagée entre sa peine et son envie de lui venir en aide. Ses doigts tremblaient, il n'arrivait pas à boutonner son pantalon et abandonna dans un soupir. Tant pis. Comme lorsqu'il était un petit garçon ne sachant ni nouer ses lacets, ni ses cravates, Winona vint à son secours et s'appliqua pour le vêtir. Elle passa une chemise sur ses épaules, prenant gare à ne pas s'attarder sur la maigreur de son garçon, ni sur cette marque noire sur son avant-bras gauche. Le crâne et le serpent, la marque du Seigneur des Ténèbres. Elle avait vu ce symbole sur le bras de son époux, et à présent cette chose maudite collait à la peau de son fils. Tout en chassant ses réflexions, elle noua un à un ses boutons, de bas en haut. Rowan détourna mollement le regard. Tenir debout le fatiguait, mais il voulait faire le fier devant les deux femmes de sa vie. Dès que sa mère eut fini, pourtant, il vint s'asseoir au bord du lit conjugal.
La tension entre les deux femmes était palpable et elles ne cachaient même plus leur haine réciproque. Avant que sa mère ne se détourne et l’abandonne, Rowan attrapa le bout de sa manche et tira dessus pour la retenir un bref instant. Il força sur sa voix rauque, sur ses cordes vocales fatiguées pour lui souffler quelques mots.
« Merci, mère... »
Et cela suffit. Winona Mulciber oublia son infâme belle-fille et lui céda la place. Si elle haïssait Héra, elle aimait son fils. Et elle supposait que, malgré tout, il serait heureux de la revoir, elle aussi. Elle déposa un baiser sur sa tempe et quitta la pièce pour écrire à Athena.
Rowan la suivit du regard et lorsque la silhouette de sa mère disparut à l’angle du couloir, il reporta toute son attention sur la femme qui s’agenouillait devant lui. Un maigre sourire étira ses lèvres, alors qu’il plongeait son regard dans le sien pour s’y noyer. Elle n’avait pas changé, non. Comme elle était belle ! Un instant, il lui en voulut, lui qui n’était plus que l’ombre de lui-même, faible, misérable. Lui qui avait été enfermé. Il savait tout ce qu’elle avait fait pour lui, pour le faire sortir, mais il était forcé de constater que cela avait échoué. Il ne lui restait plus que la rancœur où noyer son désespoir. Les Détraqueurs avait pris tout le reste. Quatorze putain d’années. Son cœur se serra et il laissa Héra faire. A s’incliner devant lui, sans doute cherchait-elle à se faire pardonner.
Il acquiesça les paroles de celle qu’il nommait sa reine.
« Je suis certain que... » Cherchait-il ses mots ? Reprenait-il simplement son souffle ? Un peu des deux. « Que tu t'es bien débrouillée pendant mon absence. »
Oui, non, qu'elle continue de lui dire qu'il lui avait manqué et que sa vie n'était rien sans lui à ses côtés. Il en avait besoin, de se sentir important, choyé et aimé. Il voulait y croire, peu importe si elle mentait ou si elle disait vrai.
Parler lui faisait mal à la gorge, il avait soif. Il se racla la gorge et réprima une grimace. La marque lui faisait mal, elle aussi, mais il n'avait guère envie de passer leurs retrouvailles à parler de Lui. Rowan bougea ses doigts entre ceux de son épouse et libéra l'une de ses mains. En tremblant un peu, les doigts et les ongles abîmés, il caressa à nouveau la joue d'Héra. Son index glissa sur la courbe de sa mâchoire, remontant du menton jusqu'à son oreille derrière laquelle il coinça une mèche de ses cheveux avec une tendresse déconcertante pour ceux connaissant l’impétueux Mulciber.
Il humidifia ses lèvres le temps de trouver quoi dire. Et comment le dire. Les pensées se bousculaient dans son esprit. Contrairement à ce qu'on pourrait le croire, un être vidé de joie et de plaisir avait encore bien des pensées tourbillonnant au fin fond de son être, elle était simplement plus sombre encore que les geôles d’Azkaban. Mais exprimer ce qu'il ressentait, Rowan n'en avait jamais été capable. Alors, il se contenta d'énumérer des faits simples et évidents.
« Je suis épuisé, avoua-t-il dans un léger rire nerveux. Mais je ne veux pas dormir... Pas maintenant. »
Il revint prendre la main d'Héra dans les siennes et exerça une tendre pression sur ses doigts, baissant les yeux sur leurs mains jointes. Une façon maladroite de lui dire que, elle aussi, elle lui avait manqué.
Elle cherchait son regard, son attention. Comme une enfant qu’elle n’était plus depuis longtemps, Héra tentait de capter le regard de son époux. Cela au delà de l’implication de son horrible marrâtre. Il avait tant souffert. Rowan n’était plus que l’ombre de lui-même. Son corps était frêle sous ses vêtements d’un autre temps. Lady Mulciber continuait de boire son whisky lentement, avant que son époux ne la rejoigne sur le lit marital.
Elle finit par s’effondrer à ses genoux, quand Winona disparut de leur champ de vision. La brune embrassa doucement chacun de ses doigts, avant de lever son regard vers lui. Fronçant les sourcils à ses mots, elle hocha négativement la tête.
- Que dis-tu? Certes, j’ai élevé nos enfants, continuer nos affaires et me suis occupé de ta mère, mais j’ai surtout passé mon temps à me faire du soucis pour toi. Les pots de vins ne sont plus aussi appréciés qu’à l’époque de nos parents. Maudits sang-de-bourbe…
Elle vit sa grimace et s’apprêta à lui tendre un verre d’eau, quand elle sentit cette main sur sa joue. Appréciant ce geste qu’elle avait tant attendu, Héra frissona à ses doigts. La trentenaire continua de le détailler tendrement, avant qu’il ne s’exprime et baisser son regard sur leurs doigts. La belle se releva alors pour s’asseoir à ses cotés, pas loin de la table.
- Je pense savoir ce qui te fera du bien.
Elle passa doucement une main dans ses boucles rousses pour les remettre un peu en place, avant de poser sa main sur sa joue plus longuement. Une main chaude et rassurante. Elle lui tendit un verre d’eau pour qu’il s’hydrate un peu. - Je suis là maintenant. Nous sommes à la maison. Toi et moi, Rowie. On va surmonter ça ensemble.
Puis, redeposant le verre qu’il avait terminé, elle déposa tendrement ses lèvres sur son front, avant de s’emparer tendrement de ses lèvres. Ses mains venant réchauffer ses joues au passage. Elle voulait lui créer de nouveaux souvenirs heureux. Des souvenirs qui anéantirait le travail de ces maudites créatures inutiles. A bout de souffle, Héra finit par poser son front contre le sien. Un instant suspendu dans le temps. Puis, elle lui emmena de quoi manger pour qu’il reprenne encore un peu de force.
- Je suis allé exprès t’en chercher. Je sais que tu adore ça…
Restant à ses cotés, l’épouse se fit silencieuse, mais à sa disposition. Il était là. Il était enfin là.
Rowan esquissa un léger sourire en écoutant son épouse le contredire - et lui réciter docilement presque tout ce qu'il voulait entendre, au final. De la manipulation ? Peut-être un peu. Se déprécier pour obtenir des compliments et être rassuré, était-ce un mal ? Les affaires se portaient bien, à en croire Héra, leurs enfants également, et elle s'était inquiété pour lui. Pour lui. Il n'y avait que ça qui comptait vraiment. Et il ne retint que ce détail précis.
Il posa à nouveau sa main sur les doigts fins de son épouse lorsqu'elle lui tendit un verre. Malgré sa fatigue, il était encore assez arrogant pour se savoir capable de tenir un verre d'eau tout seul, mais il avait simplement besoin de contact. L'eau fraiche coulant dans sa gorge lui fit le plus grand bien. Il se sentit revivre.
Rowan acquiesça les paroles de sa compagne d'un léger signe de la tête. Oui, elle était là. Oui, ils étaient à la maison. Malgré leur simplicité, les faits concrets que lui énonçait son épouse étaient tout ce dont il avait besoin pour s'encrer à la réalité. Demain, il faudrait retourner auprès des autres, auprès du Maître, mais pour le moment, Rowan voulait oublier tout ça. Voldemort ne comptait pas. La guerre ne comptait pas. Ni Azkaban, ni le Ministère, ni les Mangemorts ! Rien d'autre si ce n'était l'instant présent, sa liberté et eux.
Il ferma les yeux quand les lèvres d'Héra se posèrent sur son front et qu'elle y laissèrent la marque brûlante d'un baiser. Un doux rêve dont il ne pensait plus avoir le droit. Très vite envolé, mais très vite remplacé par un véritable baiser. Redevenu un adolescent hésitant, Rowan ne savait plus comment s'y prendre. Il avait oublié. Cette chaleur, cette douceur, il les redécouvrait. Il écrasa ses lèvres sur les siennes, s'accrocha à ce baiser et à cette étreinte le plus longtemps possible. Elle lui avait manqué. Sa présence, sa chaleur, tout lui avait manqué. Il l'imita et prit le visage de son épouse entre ses mains. Ses doigts caressèrent l'une de ses joues, emporté par cette passion ressuscitée, et il glissa sa main dans la chevelure brune de son épouse. Il l'embrassa plus que de raison, se retrouva fort dépourvu et essouflé lorsqu'elle se détacha de lui. Front contre front, les deux amants retrouvés profitèrent en silence de l'un et de l'autre. Rowan sentait le souffle chaud de son épouse, il sentait son parfum. Là, contre lui, elle était bel et bien là. Elle était vivante.
Un Mulciber ne pleure pas. Sans les sages conseils de sa mère, Rowan se serait laissé aller aux larmes.
Il ravala sa salive et se redressa à peine le temps que Madame Mulciber s'éloigne et lui apporte de quoi manger un peu. Il posa son regard sur les plats proposés et rien que le délicat fumée de la viande lui chatouilla le nez et le fit saliver. Il s'en rendait compte à présent : il mourrait de faim. Il attrapa une assiette et les couverts et se mit à manger sans demander son reste. Très vite, pourtant, il fut rassasié et le silence qui s'installa entre eux se glissa dans son estomac pour l'oppresser. Il tritura la nourriture dans son assiette, un peu à la manière d'un enfant difficile, sans lever les yeux vers Héra.
« Parle moi de toi, lui ordonna-t-il simplement, d'un ton qui faisait plutôt penser à une maladroite façon de la questionner sur son état à elle qu'à un ordre véritable. « Parle moi du monde, du temps qu'il fait dehors, des finances s'il le faut, de... De... Je ne sais pas. Parle moi. »
Qu'elle lui parle. Et qu'elle fasse taire le silence.
Depuis ma prime enfance je ne suis pas comme les autres; [...] Je n’ai pas su éveiller mon cœur à la même joie; Tout ce que j’ai aimé, je l’ai aimé seul. Edgar A. Poe
Elle pouvait se montrer douce Héra quand elle voulait. Mais rare étaient ceux qui pouvaient voir cette partie d’elle. Plus jeune, c’est à Fabian et à Narcissa qu’elle offrait ce genre de tendresse amoureuse et amicale. Ces dernières années, ses enfants y avaient également droit, même si sa fille la rejetait, manipulée par son horrible grand-mère. Aujourd’hui, c’était Rowan. Son Rowie. Celui qui lui avait été arraché alors que leur relation prenait doucement forme. Ils s’étaient mariés en 1979, cela faisait maintenant dix-sept ans qu’ils étaient liés. Et dire qu’ils n’avaient eu que quelques mois après la mort de Fabian pour vraiment se rapprocher. Il l’avait relevé de cet affront. Il lui avait fait découvrir son potentiel et surtout, il lui avait appris ce qu’était un amour adulte. Et même si elle avait parfois rêvé du jeune Prewett, Rowan restait son époux et celui à qui elle devait une extrême dévotion.
Elle voyait dans ses yeux, dans son sourire que l’éloignement avait été également dur pour lui. Il cherchait son contact et appréciait ses attentions à elle. Mulciber la regardait, la touchait tendrement. Le baiser fut une véritable retour en arrière. Elle le sentait hésitant comme quand ils avaient échangés ce premier vrai baiser il y a de cela des années.
Ce premier baiser au milieu de cadavres, tandis que leurs peaux étaient recouvertes du sang de leurs victimes.
De cet acte, Narcisse était né quelques mois plus tard, Athena à sa suite.
La jeune mère sentit les mains de Rowan sur sa joue, puis dans ses cheveux, raccourcit depuis leur adolescence. Un sourire traversa ses lèvres glossées, tandis qu’elle prolongeait ce baiser de retrouvailles si intense soit-il.
Puis le silence. Contrairement à son époux, une légère larme roula le long des pommettes d’Héra, avant qu’elle ne lui serve à diner. Son amour devait mourir de faim. La preuve: il se jette délibéremment sur son assiette.
Héra attend patiemment à ses cotés, comme une bonne épouse, avant qu’il ne s’arrête. Bizarre…Il adorait ça d’habitude. Cependant, ce fut une demande qui traversa ses lèvres. L’ancienne Parkinson eut un sourire en coin. - Eh bien...
Et elle commença à le mettre à jour sur les sujets importants. Que leurs finances se portaient bien, que leur fils était en voie de réussir ses buses et avait la même énergie que lui dans ses tortures. Qu’Athena était une parfaite combinaison de leurs deux folies. Que le Lord comptait les intégrer dans ses rangs une fois bien formés. Que les Malefoys semblaient étranges….Bref, elle ne tarda pas à répondre aux questions qui pouvaient passer dans l’esprit de son mari.
- D’ailleurs, quand tu seras prêt, je ferai en sorte que nous puissions nous offrir un nouvel amusement, dit elle en caressant doucement sa joue.
Par amusement, elle entendait nouvelles victimes à torturer longuement et afin de remplir cette excitation passée du mangemort qui se trouvait en face de lui.
- En attendant, je pense que je pourrais te donner un autre aperçu de ce que tu as manqué ces dernières années.
Elle ouvrit tranquillement son chemisier pour laisser transparaitre une lingerie à la vue de son époux. Même si ils n’allaient clairement pas concevoir un autre enfant ce soir, le plaisir des yeux est toujours appréciable non?
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