No one taught me how to be happy, nor to be brave. | Draco

Personne ne m'a jamais appris à être heureux, ni même à être courageux. Avant tout chose, je me souviens qu'on m'a appris à être le meilleur. Mais être le meilleur selon quel critères ? Ceux que l'on me dictait, bien sûr. Souvent les gens pensent que n'aître sang-pur, dans une si illustre famille, est un avantage. Je l'ai cru aussi pendant un moment. Pendant un moment seulement. Au fil des années, j'ai pu constater que plus j'essayais d'être le meilleur, plus je me sentais moins que rien. Mes efforts pour devenir populaire se sont révélés catastrophiques et le peu d'amis que j'avais n'étaient pas sincères. On voulait me fréquenter pour mon nom, pour ma fortune, pour ce que je représentait en avantages et en réputation. Il ne m'a pas fallu longtemps pour réaliser qu'être le meilleur signifiait être seul. Moi, je n'avais pas envie d'être seul. Est-ce qu'on m'a demandé ce que je voulais ? Jamais. En revanche, ma famille a toujours eu le don de m'offrir tout ce que j'aurais du vouloir, selon leurs critères une fois encore. Ce serait hypocrite de dire que j'ai été malheureux car je n'ai connu aucune misère, je crois pouvoir même dire que j'ai été gâté. Trop gâté. Et l'argent bien qu'abondant, ne pouvait pas acheter le bonheur. J'en ai tellement voulu à ceux qui possédaient ce que je ne pouvais pas obtenir, malgré tous mes efforts. Potter, Weasley, Granger... ce que j'ai pu les haïr. Ils étaient mes opposés, et contre toute attente, même si je n'osais l'avouer (pas même à moi-même), je les enviais terriblement. Sans argent, sans réputation, sans facilités dans la vie, ces trois-là semblaient pourtant ne jamais manquer de rien. Comment était-ce possible ? Je n'étais pas apte à comprendre. Et rien ne pouvait me mettre plus en colère que l'incompréhension. Je voulais saisir ce qu'ils avaient que je n'avais pas. Ce qui me faisait défaut. Ce qui s'opposait à mon bonheur. Il m'a fallu quelques années et de nombreuses erreurs pour saisir que ce qui s'opposait à moi... n'était rien ni personne d'autre que moi-même. Hélas, il était trop tard. Bien trop tard. Fuyant le combat comme j'avais fuit toute ma vie, j'ai quitté Poudlard sans un regard en arrière, soutenant ma mère, suivi par mon père, tous les trois frissonnant de peur. Qu'allions-nous devenir à présent ?

On efface tout et on recommence. Si seulement c'était si simple. On devrait dire aux enfants que rien ne se passe comme dans les histoires. Il n'y a pas de happy ending. Juste des problèmes différents qui viennent remplacer les anciens. Libéré de l'emprise de ma famille et de Voldemort, je me suis retrouvé emprisonné dans une cage bien plus complexe : mon propre esprit. Comment oublier ce que j'avais fait ? Comment reconstruire une vie ? Je savais ce que je ne voulais pas être, mais n'avais aucune idée de ce que je souhaitais devenir. J'avais cessé d'y songer lorsqu'on m'avait indiqué une place obligatoire dans les rangs des mangemorts. Difficile de se mettre à réfléchir par soi-même pour la première fois à 18 ans, majeur, et héritier de tout un paquet d'emmerdements. D'abord, je me suis demandé ce que je pourrais faire de mes aptitudes, maintenant que je pouvais choisir. J'ai commencé par penser au ministère, bosser dans les affaires étrangères, ce genre de chose... Mais vu mon passif, je savais pertinemment que je ne serais pas accepté comme ça. Et puis j'ai songé à ce que je pourrais faire de bien avec mon don pour les potions et les sortilèges. Force m'a été d'admettre que la médicomagie était toute indiquée. Après tout le mal que j'avais pu causer, ce n'était pas une si mauvaise idée de faire un peu de bien. Les premiers temps, ça a été difficile, car certains patients étaient là à cause de la bataille à Poudlard. Je peinais à les regarder dans les yeux, ces sorciers qui souffraient par ma faute en grande partie. Même si lors de cette bataille les mangemorts étaient entrés par leurs propres moyens, je n'avais pas aidé la résistance. Pire encore, pour faire plaisir à mes parents et par peur sans doute... je m'étais rangé du côté de Voldemort, devant tous. Heureusement, au fil des jours, la plupart des blessés sont partis et je me suis senti plus à l'aise dans mon rôle. Pourtant, je ne peux m'empêcher d'être sombre et nostalgique aujourd'hui, en septembre 1998, alors qu'une nouvelle génération de sorciers s'attroupent sûrement pour entrer dans Poudlard, fraichement reconstruit. Puisse la vie leur être plus simple que pour moi, à eux qui ont la chance de vivre en temps de paix. Je le leur souhaite de tout cœur.