There might have been a time...

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Arthur n'était pas particulièrement fier de lui après ce que Spencer lui avait avoué. Il avait toujours été de ceux qui pensaient que tant que les gens n'étaient pas au courant du mal qu'on leur faisait, ça ne pouvait pas les toucher. Et il avait beau se sentir un peu coupable pour avoir ainsi trompé sa soeur, il en voulait beaucoup plus à Spencer pour le lui avoir dévoilé... Sa culpabilité à lui c'était son problème, mais Ariane n'aurait jamais eut à le savoir, ça ne lui avait rien apporté d'autre que de la souffrance, et ça, ça lui foutait encore les boules. Néanmoins, il avait quand même proposé un deal à Spencer, pourquoi ? Premièrement, il était bourré alors de suite, ça n'aidait pas. Deuxièmement il ne pouvait pas nier que Spencer, malgré ses airs bourrus de bad-ass, l'attirait assez inexorablement. C'était plus fort que lui, Spencer ou pas Spencer, quand il voyait un bel homme, il ne pouvait pas s'empêcher de vouloir se le faire, sans compter qu'ici, il avait quelque chose à prouver au jeune homme... Sa remarque concernant sa 'performance' lui était un peu resté en travers de la gorge.

Il s'était un peu attendu à ce que Spencer l'envoie se faire foutre et au fond, il l'avait espéré. Tout ce qui l'attirait chez le jeune homme, c'était l'autorité dont il usait constamment sur lui, c'était aussi la fierté qu'il avait. S'il s'était prostitué pour éviter les emmerdes avec Arthur, quelque part, ce dernier l'aurait moins respecté, et pour qu'Arthur puisse apprécier un minimum quelqu'un, il fallait qu'on sache gagner son respect. Dans le cas de Spencer, il en était encore loin, mais c'était un premier pas. Enfin, chez Arthur, ce besoin était totalement inconscient et tout ce qu'il retint quand Spencer rejeta son offre, c'était qu'il n'était pas près d'obtenir ce qu'il voulait de lui.

Arthur ne put réprimer un sourire quand Spencer continua. Il avait tellement de cran qu'il amusait réellement Arthur. Il avait menacé de le renvoyer en taule et lui qu'est-ce qu'il faisait ? Il en rajoutait une couche. C'était quand même génial ! Alors qu'au fond, il ne lui en demandait pas tant que ça. Enfin, visiblement Spencer était près à risquer la prison par pure fierté, ou alors juste pour éviter de satisfaire Arthur. Dans le deuxième cas c'était particulièrement insultant, alors le jeune homme décida de préférer la première hypothèse. La suite, en revanche, le fit nettement moins rire. Ça ne le dérangeait pas qu'on tape sur sa famille, lui-même le faisait constamment, mais venant de Spencer, c'était véritablement vexant. Arthur savait que ses parents n'étaient pas les meilleurs du monde mais ils ne l'avaient jamais maltraité et eux, contrairement à Spencer, n'avaient jamais fini en taule. Il se retint de le lui faire remarquer, se rappelant qu'il avait lui-même plaint Cillian de devoir grandir avec ses parents. Jusque là, tout s'était bien passé, en fait, c'était juste l'adolescence qu'ils avaient été incapable de gérer, aussi bien avec Ariane qu'avec Arthur d'ailleurs. Il se contenta de se renfermer légèrement, son visage prenant un air plus dur en réalisant à quel point le désir de Spencer était légitime. Après tout, lui avait été élevé par eux, et on voyait bien le résultat hein ?! Qui voudrait d'une tâche pareille pour fils ? Mais aussi vexé qu'il soit, il se devait d'admettre qu'il ne pouvait souhaiter à personne d'avoir la même vie que lui...

Des excuses ? Il n'en attendait pas, c'était pas lui qu'il avait blessé, c'était Ariane et comme il le disait si bien, elle n'était plus là pour les entendre. La faute à qui d'ailleurs... Il soupira avant de relever les yeux vers Spencer. Ouais, il aurait pu rentrer chez lui et sortir son petit laïus à ses parents pour envoyer Spencer en taule, mais il n'allait pas le faire. Le jeu perdrait nettement de son intérêt sinon, sans compter que ça ne lui rapporterait rien et qu'il ne désespérait pas de faire craquer Spencer. Il mit ses mains dans les poches de son jean d'un air las qui était assez nouveau chez lui avant de déclarer doucement, comme s'il était déçu de la tournure des évènements :

« Tu aurais pu te débarrasser de moi si facilement pourtant.» C'était faux, si Spencer avait craqué maintenant, aucun des deux n'aurait été satisfait et tout le monde y aurait perdu, alors que là, il allait gagner non seulement un sursis, mais aussi le droit de garder sa dignité. Dommage. « Aussi tentant que ce soit de te renvoyer d'où tu viens... Je vais attendre un peu pour te laisser le temps de changer d'avis. Tu n'y gagneras pas ton fils mais au moins, tu n'y perdras pas ta liberté. » Il avait dit ça d'un ton assez grave, sans franchement vouloir se montrer menaçant, c'était plus comme une mise en garde. D'ailleurs après avoir fait à nouveau quelques pas vers la sortie de la ruelle, il se tourna encore vers Spencer et continua sur sa lancée, reprenant un ton provocateur qui lui ressemblait déjà plus : « Mes parents ne te laisseront pas approcher de Cillian en tout cas, et je ne vois pas quel juge leur en retirerait la garde. Dommage pour toi. »

Mine de rien, il avait parlé de ses parents, pas de lui. De toute façon, quand ça lui prenait trop la tête, il avait tendance à s'en foutre complètement. Dans la bataille qui allait s'engager entre Spencer et ses parents, Arthur avait choisit de ne pas choisir, il ne jugeait personne capable de s'occuper de l'enfant. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il avait le pouvoir de tout foutre en l'air pour Spencer, sans se douter qu'il avait la même chance avec ses parents...


En rentrant chez lui ce soir là, il se retrouva à nouveau seul, Cillian était gardé à la maternelle le soir, le temps que sa grand-mère puisse venir le chercher. Arthur claqua la porte d'entrée et alla s'affaler sur son lit sans prendre la peine d'essayer de nettoyer ses blessures de l'après-midi. Il s'endormit et ne se réveilla que quelques heures plus tard, quand tout le monde était rentré à la maison. Visiblement il avait raté le repas, tant pis, il n'avait pas faim de toute façon. L'air endormi et maussade, comme toujours quand il était chez lui seul, il se releva du lit et alla chercher la mallette qui trainait, bien en évidence, sur son bureau. Il en sortit une seringue usagée qu'il nettoya simplement en passant ses doigts dessus et chercha vainement pendant quelques secondes une veine sur son avant-bras qui n'était pas complètement détruite. Après deux minutes, il trouva enfin et enfonça l'aiguille de seringue dans sa peau, soupirant d'un mélange habituel de douleur et d'aise quand il sentit l'aiguille lui traverser la peau et le liquide commencer à couler dans ses veines. Il sentit aussitôt ses pensées commencer à se brouiller mais il était encore assez conscient quand sa mère entra dans sa chambre, une vision quotidienne sous les yeux. Arthur était assis à son bureau, l'air plus éteint que jamais, l'avant-bras criblé de marque de piqure dont une récente qui était encore légèrement rouge. Il releva les yeux vers sa mère mais ce fut à peine s'il la vit, un peu comme elle faisait semblant de ne rien voir depuis le début.

« On sort voir des amis avec ton père. Cillian n'a pas école demain, mais fais quand même en sorte qu'il ne se couche pas trop tard, d'accord ? »

Et elle sortit. Arthur soupira avant d'aller à nouveau s'étaler sur son lit. Il entendit la porte d'entrée se refermer et la voiture démarrer au loin (ses parents étaient moldus) et grogna légèrement. Son cerveau et son esprit étaient à présent totalement déconnectés de la réalité et il du s'y prendre à plusieurs reprises pour se relever du lit sans s'écrouler par terre quand il se fut souvenu de ce qu'il devait faire. Il sortit de sa chambre en titubant et se retrouva dans le salon où Cillian regardait calmement la tv. Arthur avait toujours été sidéré de voir que l'enfant réussissait à être adorable vu l'environnement dans lequel il grandissait. Comme quoi, c'était peut-être juste lui qui était de la 'mauvaise graine'. Ça ne l'étonnait pas finalement, quand il y repensait, que Cillian ait quelqu'un qui veuille veiller sur lui, même si c'était Spencer et que c'était lui son père. Si même Spencer voulait s'assurer que son fils aille bien, alors c'était définitivement que le problème venait de lui puisque ses parents étaient des personnes tout à fait normales...

« Cillian, grand-mère veut tu n'y ailles pas trop tard. » Arthur avait prit l'habitude de faire comprendre à Cillian que celle qui s'occupait de lui était bien sa grand-mère et pas sa mère, contrairement à Philippa. Au départ, il l'avait fait pour contrarier sa mère qui tenait à faire oublier à Cillian qu'il n'avait pas de mère, mais maintenant Arthur ne trouvait pas ça juste envers Ariane et il refusait de laisser sa mère mentir à son petit-fils. Il était jeune, il pouvait s'accommoder à tout. Le jeune garçon hocha la tête gentiment, inconscient de l'état dans lequel se trouvait son oncle et incapable de voir les marques sur ses avant-bras à cause de l'obscurité de la pièce et de sa naïveté d'enfant de cinq ans. En plus de ça, si Arthur faisait tout pour ne pas les cacher à ses parents, avec Cillian, c'était le contraire. C'était un con mais quand même, même lui avait des limites, enfin, en quelque sorte. Il alla s'asseoir à côté du petit garçon et essaya vainement de suivre le dessin animé qui passait. Mais, incapable de garder son esprit concentré sur quelque chose, il finit par abandonner et demanda à Cillian d'aller se coucher avant de perdre lui-même totalement pied. Le petit garçon obéit sagement, remarquant que son oncle avait l'air fatigué et alla se mettre en pyjama avant d'aller dormir. Arthur ébouriffa doucement ses cheveux au passage, semblant remarquer pour la première fois qu'il avait vraiment des airs de sa mère... Il vérifia que la chambre de Cillian était bien éteinte et alla s'affaler dans le canapé après avoir éteint la télévision. Il avait enlevé son t-shirt, près à pousser un roupillon, quand il entendit un bruit de pas dans le salon qui lui donna un coup de fouet et l'obligea à rouvrir les yeux. Il se releva et alluma la lumière en appuyant brutalement sur l'interrupteur le plus proche. Seulement pour découvrir que c'était Spencer qui s'était introduit chez lui. Automatiquement, un petit sourire narquois se dessina sur ses lèvres et il ne put s'empêcher de lâcher tout en se rapprochant : « Je te manquais déjà ? Le marché tient toujours si jamais tu as déjà changé d'avis tu sais... » Il lança un regard malicieux au jeune homme avant de commencer à pouffer bêtement. Comme si son comportement n'était pas assez explicite sur son état, l'état de ses avant-bras, ses yeux rouges et son air fatigué aurait renseigné Spencer bien assez vite. Il finit par arriver juste devant le jeune homme et posa son doigt sur ses lèvres en murmurant un 'chuuuuut' agaçant. « Cillian dort à côté et il a besoin de se reposer. Comme je te l'ai déjà dit tout à l'heure, il tient assez mal l'alcool... » Petit sourire provocateur avant de rajouter, l'air soudainement surpris : « Mais comment t'es entré ici au fait ? ».

Tout, dans ses gestes et sa manière de parler, indiquait à quel point il était défoncé et sachant qu'il était censé veiller sur Cillian, il n'était pas sur que ça lui serve vraiment d'excuses. Mais là, il n'était pas en état de calculer quoique ce soit...

(J'ai craqué en cours XD :fleche: :fleche:)

Arthur avait l’impression d’être de moins en moins présent, comme si son cerveau s’éteignait peu à peu en refusant de se remettre en route, c’était très frustrant comme sensation et à la fois très agréable. Après tout, ce n’était pas ce qu’il cherchait depuis le début ? Un moyen d’arrêter de penser et de se retrouver seul avec lui-même ? C’était peut-être pas très glorieux, ni honorable et encore moins raisonnable vu qu’il devait garder Cillian, mais c’était tellement reposant pour lui de ne plus penser à rien et de juste perdre pied, oublier qu’il vivait et attendre que le temps passe et qu’il se réveille avec une immense gueule de bois, comme tous les matins. C’était devenu sa routine, comme en témoignaient les nombreuses traces de piqure sur ses avant-bras. La plupart des gens disaient que la drogue c’était mal, qu’on devait absolument éviter d’y toucher, tout comme l’alcool qu’on devait consommer avec modération, mais Arthur était de ceux qui pensaient que les limites étaient faites pour être franchies et que l’alcool et la drogue étaient encore les deux meilleurs moyens pour s’évader. Après tout, si quelqu’un voulait se détruire, quelle raison aurait-on eut de l’en empêcher ? Sous prétexte qu’on supportait sa petite vie misérable en fermant sa gueule, ça voulait dire qu’on avait le droit de décider de ce qui était bon pour les autres ? Pas selon Arthur. Quelque part, le fait que ses parents aient choisit de ne jamais comprendre ce qu’il se passait avec lui l’arrangeait, il pouvait continuer en toute liberté. Mais sachant que le véritable but de la manœuvre avait été d’attirer un peu l’attention sur lui… C’était un cercle vicieux, et qui durait depuis plus de cinq ans désormais.

Spencer ne s’était pas énervé et ça ennuyait un peu Arthur. Il s’était dit qu’au moins, quitte à ce que le jeune homme soit là, il pourrait au moins s’amuser à l’asticoter un peu, mais ce qu’il avait lu furtivement dans ses yeux, ce n’était pas de l’énervement, tout au plus de l’agacement. Non ça avait été quelque chose qu’il détestait voir chez les autres, comme de la désapprobation et pire encore, une once de pitié. Il détestait qu’on s’apitoie sur son sort, parce que ce n’étaient jamais les bonnes personnes qui le faisaient et selon lui, la pitié ne servait à rien. Les gens le plaignaient, souvent, mais ne faisaient jamais rien. Qui était-il d’un autre côté pour le leur reprocher, alors que lui-même ne faisait strictement aucun effort. Enfin, il retint une moue boudeuse quand il entendit Spencer lui dire d’arrêter de dire des conneries. Il ne s’était même pas rendu compte qu’il en avait dit une… Il regarda Spencer aller tranquillement s’asseoir sur le canapé et poser ses pieds sur la table basse, pas franchement plus choqué que ça, mais essayant en revanche vainement de comprendre ce qu’il avait voulu dire, mais comme il avait déjà du mal à se souvenir de ce qu’il avait dit la minute précédente, il finit par abandonner et par se tourner vers le canapé pour voir ce que Spencer avait l’intention de faire. S’il comptait squatter ici, c’était mort.

Arthur était peut-être défoncé, mais pas encore assez pour perdre totalement conscience de ce qui se passait autour de lui. Il jeta un coup d’œil vers la chambre de Cillian, se rappelant soudainement que c’était le père du petit garçon qu’il avait en face de lui et que c’était probablement pour ça qu’il était venu. Il ne put s’empêcher d’être à la fois déçu et un peu jaloux. Lui, personne n’était jamais venu pour lui à cette heure-ci. C’était tellement con comme pensée qu’il réussit à s’en rendre compte, même dans cet état là et se contenta de baisser la tête, l’air légèrement contrarié.

« Ouais, ouais, c’est ce qu’on dit… » Il leva les yeux au ciel, l’air parfaitement idiot et totalement stone, quand Spencer lui dit qu’il n’était pas là pour leur petit arrangement. Arthur restait persuadé qu’un jour, Spencer accepterait, autrement il serait quand même nettement déçu. Il aimait bien jouer mais il fallait une fin à tout. Arthur le fixa quand il lui redemanda si ça le dérangeait. Hein ? Quoi ? On lui avait parlé. Il fallut bien cinq secondes au jeune homme pour réaliser qu’on lui parlait, et cinq autres secondes pour comprendre le sens de la question. Quand ce fut fait il se rapprocha du canapé d’un pas vif, titubant néanmoins et évitant avec difficulté la table qui se dressait en travers de son chemin. Il se posta devant Spencer, les bras croisés, comme un enfant qu’on aurait contrarié en lui confisquant un jouet ou en l’empêchant de regarder la télévision.

« Si, figure-toi que ça me dérange. Tu n’as rien à faire ici, va squatter chez quelqu’un d’autre. Je t’ai déjà dit que Cillian était endormi, alors ça sert à rien que tu restes. » C’était juste par esprit de contradiction et par souci d’apparence, parce qu’au fond, que Spencer soit là ou non, il en avait rien à foutre, il n’avait quasiment plus conscience qu’il avait un corps, alors de la présence de quelqu’un d’autre… « Allez barre-toi ! » Commença-t-il avant d’attraper Spencer par les pans de sa veste pour essayer de le forcer à se relever du canapé. Tout ce qu’il y gagna, ce fut de manquer de se ramasser sur la table basse en reculant. Spencer, lui, n’avait pas bougé d’un pouce. Arthur resta planté là, faisant mine de réfléchir pendant quelques secondes, puis haussa les épaules et s’affala à côté de Spencer comme si de rien n’était. A quoi bon lutter ? Il n’était pas assez fort pour le foutre dehors lui-même et il avait trop la flemme de penser à un autre moyen de le virer pour ne pas abandonner maintenant. « Oh et puis merde. » Déclara-t-il tout en posant à son tour ses pieds sur la table basse et en allumant la télévision. C’était à peine s’il entendait les dialogues et il avait l’impression de ne distinguer que de vagues couleurs en guise d’images sur l’écran. Il se leva après deux minutes et, se tournant vers Spencer, demanda brutalement, comme si c’était exactement le genre de choses que les gens disaient dans ce type de situation :

« File-moi ta veste. J’ai froid. » A la réflexion, ça avait peut-être quelque chose à voir avec le fait qu’il soit encore torse nu, mais ça il n’en était pas conscient. Il savait juste qu’il avait froid, que Spencer avait une veste et qu’il voulait la lui prendre. Une fois sur son dos, il se dirigea vers la cuisine, sortit deux verres et une bouteille de whisky déjà bien entamée avant de revenir au salon, titubant toujours et manquant de renverser la bouteille sur la moquette. Il jura en se cognant l’orteil dans le pied dans le table mais arriva sain et sauf jusqu’au canapé. Il se servit un verre et se tourna vers Spencer, un grand sourire provocateur aux lèvres : « Un verre ? » Avant d’ajouter d’un ton, et avec un air, faussement désolé et gêné « Oups, j’avais oublié. » Ouais, ouais, c’est ça. Comme quoi, même défoncé, il avait un don pour essayer de faire chier le monde, enfin, il était quand même plus calme et moins chiant que sobre et reposé. Il attrapa son verre et commença à le siroter doucement, comme s’il n’était pas dans un état assez pathétique comme ça, il fallait qu’il en rajoute. La bonne nouvelle – si c’en était vraiment une – c’était que c’était devenue une petite routine quotidienne et donc qu’il supportait bien mieux les effets de la drogue et de l’alcool qu’un véritable débutant. Enfin, même lui n’était pas sur d’avoir envie de s’en réjouir.

Ce ne fut qu’après une bonne vingtaine de minutes sans ouvrir la bouche qu’Arthur se tourna vers Spencer. Il se demandait pourquoi il était encore ici vu que lui non plus n’avait quasiment rien dit et qu’il n’avait pas encore tenté de l’assommer pour aller kidnapper son fils. Toute autre hypothèse lui passait largement au-dessus de la tête et l’idée qu’il soit là pour vérifier qu’Arthur n’allait pas lui faire du mal ne lui avait même pas effleuré l’esprit. Il remarqua finalement le vif d’or avec lequel Spencer n’arrêtait pas de jouer, il tournait entre ses doigts depuis qu’il était arrivé mais Arthur ne l’avait pas remarqué. Pour n’importe qui ça aurait été anodin, mais Arthur savait que Spencer ne s’amusait pas à se promener avec un vif d’or pour débarquer chez des inconnus sans raison. Il resta perplexe quelques secondes avant de rompre le silence d’un ton anormalement sérieux pour lui : « Il ne connait pas le quidditch tu sais. Il ne sait même pas que la magie existe. » Il soupira, sans se rendre compte que c’était complètement high qu’il visait encore le plus juste dans ses hypothèses. Si c’était pas ironique ça… Étrangement, il était un peu désolé pour Spencer, après tout, ça devait pas être évident pour lui. Une autre chose qu’il faut savoir à propos d’Arthur, c’est que c’est aussi quand il est complètement stone qu’il est le plus capable de faire ce qu’il juge le mieux. C’est dans ces moments là qu’il redevient plus naturel, humain, Arthur à l’état pur, comme si c’était plus facile pour lui d’être lui-même quand il ne réfléchissait pas et quand il n’arrivait quasiment plus à se souvenir de son prénom.

Une nouvelle fois, il fut assaillit d’une espèce de jalousie ridicule. Cillian avait cinq ans et était quasiment orphelin et lui, il l’enviait à cause d’un putain de vif d’or à la con. Parfois, il se demandait lui-même qu’est-ce qui clochait chez lui… Enfin, sans vraiment comprendre comment il en était arrivé là, son cerveau refusant de fonctionner normalement, il prit conscience qu’il y avait quelqu’un dans ce salon qui avait peut-être véritablement envie de prendre soin de Cillian. C’était tellement con à dire quand on savait qui étaient les grands-parents du petit garçon, mais c’était vrai, ce n’était pas parce qu’ils lui offraient un toit et de la nourriture qu’ils prenaient soin de lui et l’aidaient à grandir. Il n’en revenait pas de partir dans un délire total à cause d’un foutu vif d’or, peut-être aussi était-ce l’expression sur le visage de Spencer (qu’il inventait peut-être en plus !), mais il ne pouvait pas s’empêcher de penser que ce n’était pas juste, que tout n’était pas au mieux. Ce fut ce moment là que choisit Cillian pour se lever de son lit. Arthur, même totalement défoncé, l’avait entendu parce que le lit du petit garçon grinçait légèrement et que dans le silence pesant du salon, on l’entendait facilement. D’ailleurs, même Spencer s’était légèrement tourné vers la porte de la chambre. Arthur se releva vivement du canapé, avec une dextérité dont n’importe qui l’aurait cru incapable après l’avoir vu tituber comme un con pour revenir de la cuisine, et tourna à moitié la tête vers Spencer.

« Garde tes fesses sur ce putain de canapé. » Il n’avait pas spécialement voulu en faire une menace, mais il voulait que ce soit clair. C'était comme s'il était incapable de s'exprimer comme une personne normale, sans prendre un ton menaçant, provocateur ou commencer à hurler. Sans un mot de plus, il attrapa sa baguette qui trainait sur la table basse et se dirigea vers la chambre, après l’avoir mise dans la poche de son jean. Non, il n’allait pas le torturer à coup de Doloris, que son père se rassure. Il referma la porte de la chambre derrière lui après avoir allumé légèrement la lumière (l’interrupteur était de ceux qui permettent d’en régler l’intensité). Le petit garçon était en effet réveillé et assis sur son lit, l’air un peu perdu. Arthur lui lança un petit sourire en coin, l’air plus fatigué que jamais. Il ferma discrètement la porte à clé avec sa baguette pour s’assurer que Spencer n’allait pas essayer de forcer la serrure et la remit à sa place d’origine. « Tu as fais un cauchemar ? » Demanda Arthur d’un ton doux qui ne lui ressemblait pas. Cillian lui avait toujours fait de la peine, parce que quand il imaginait son avenir, il n’y voyait que le reflet du sien, du coup, il s’était toujours montré gentil avec lui, enfin dans la mesure du possible, il restait Arthur… « Non, mais je t’ai entendu parler tout à l’heure et je n’ai pas réussi à m’endormir parce que je voulais savoir qui c’était, mais je n’ai pas osé sortir… » Le petit garçon prit un air coupable tellement adorable qu’Arthur ne put s’empêcher de le soulever du lit pour le prendre dans ses bras, inconscient que par un heureux hasard, la veste de Spencer cachait encore ses marques sur le corps. Il ne restait guère qu’une légère cicatrice sur l’abdomen, mais celle-là, Cillian l’avait déjà vu. « Désolé, je pensais que tu dormais… Tu as l’air fatigué. » « Et toi tu as l’air triste. » Arthur ne put s’empêcher de rire en voyant que même à Cillian, ça lui crevait les yeux. Il ne répondit cependant rien et reposa l’enfant sur le lit avant de déposer un baiser sur son front et de caresser doucement ses cheveux d’un geste du pouce. Il se pencha vers lui et lui murmura doucement quelque chose à l’oreille avant de se diriger vers la porte, la rouvrant discrètement et d’en sortir, sans la refermer derrière lui.

Il avait reprit son air naturellement blasé et fatigué après avoir franchit le pas de la porte de la chambre de Cillian et se dirigea à pas rapides vers le canapé, s’affalant de tout son long dessus, sur le dos, puisque Spencer s’était levé entre temps. Il ne savait pas encore s’il allait le regretter, mais à cet instant là, il était sur de ne pas avoir fait le mauvais choix, c’était juste comme un instinct. Il alluma une cigarette tandis qu’il commençait à entendre les pas de Cillian qui sortait de sa chambre pour voir qui était le fameux inconnu qui discutait avec son oncle. La seule précaution qu'Arthur avait prit en murmurant à son neveu de venir s'il le souhaitait, c'était que, dans ce cas, il ne le dise pas à ses grand-parents. Ils n'auraient probablement pas apprécié.

Arthur fixait Spencer sans ciller, s’il croyait l’impressionner avec ses airs de brute, c’était raté. Ça faisait des années qu’Arthur ne craignait plus rien ni personne, il marchait au culot et surtout à la haine et des raclés, il en avait vu d’autres. Son expression ne changea pas d’un pouce quand Spencer déclara qu’il s’en allait, mais au fond, il était un peu soulagé. Il n’avait aucune envie qu’il commence à foutre le bordel ici ou à essayer de se venger sur lui ou Cillian. Sans avoir peur, il n’en avait pas particulièrement envie non plus. Il se recula légèrement de lui pour lui permettre de s’éloigner du mur et de s’en aller alors, puisque c’était ce qu’il avait décidé de faire, mais de toute évidence, lui aussi avait encore des choses à dire. Arthur se contenta alors de croiser ses bras désormais nu sur sa poitrine et écouta Spencer sans vraiment faire attention. Premièrement, ses facultés de concentration recommençaient à se détériorer et en plus de ça, il avait prit l’habitude de ne plus rien entendre ni écouter quand on essayait de lui faire la morale. Après tout, à quoi bon ? Tout ce qu’on lui avait dit, il le savait déjà, fallait pas croire, les rares moments où il n’était ni stone ni bourré, il était capable de comprendre le genre de vie qu’il menait. Mais ce n’était pas parce qu’on le lui reprochait qu’il avait envie d’en changer.

Ouais, c’est bon, il avait bien comprit. C’était tous les deux des cas sociaux maintenant il pouvait dégager ? Arthur savait qu’il n’était pas parfait, mais lui n’avait pas un fils qu’il clamait vouloir voir et protéger, quand il faisait ses conneries lui au moins, il ne faisait pas semblant de ne pas les avoir faites, il restait lui-même, même si ça voulait dire se présenter comme un con constamment. Au moins, il était honnête avec lui-même. Il ne put s’empêcher de rire – jaune – quand Spencer le menaça si jamais il arrivait quoique ce soit à Cillian. C’était l’hôpital qui se moquait de la Charité là, non ?! Même bourré, crevé et défoncé il prenait mieux soin de son neveu que son propre père alors il pouvait bien fermer sa gueule. Il se retint cependant de lui faire remarquer, préférant garder sa haine à l’intérieur pour une fois, pour faire déguerpir Spencer plus vite. Il savait très bien que plus il le chercherait, et plus le jeune homme resterait pour s’énerver à son tour et à ce rythme là, ils seraient foutus d’y passer la nuit, enfin jusqu’à ce que les parents d’Arthur reviennent du moins.

Il ne répondit rien non plus à la dernière réplique de Spencer et se contenta de regarder le vif d’or s’écraser sur le canapé avant de voir le jeune homme transplaner. Arthur soupira, sentant comme un poids s’enlever de son estomac. Sa colère était retombée aussi vite qu’elle était arrivée et il se sentait à présent plus fatigué et coupable que hargneux. Il alla récupérer le vif d’or sur le canapé, le fit tourner dans ses doigts pendant quelques secondes avant de le fourrer au fond de la poche de son jean. Il soupira à nouveau et alla chercher quelque chose à se mettre dans sa chambre, enfilant le premier pull noir qu’il trouva, il se dirigea vers la chambre de Cillian doucement, manquant de se prendre à nouveau la table. Il se mit quelques baffes pour tenter de retrouver un semblant de notion de réalité et ouvrit lentement la porte de la chambre du petit garçon. Il était emmitouflé sous sa couette, aucune partie de son corps ne dépassait mais la petite boule qu’il formait indiquait bien qu’il était là. Arthur eut presque envie de rire en se rappelant que ça, lui aussi il l’avait fait. En fait, c’était pas drôle du tout… Il se pencha et souleva doucement la couverture pour montrer à Cillian que ce n’était que lui. Le petit garçon parut rassuré, c’était bien la première fois qu’Arthur voyait cette expression dans les yeux de quelqu’un quand il arrivait… Au fond, c’était franchement agréable d’inspirer autre chose que de la pitié, de la haine ou du mépris.

Il s’assit sur le lit et souleva Cillian pour venir le poser sur ses genoux. Il joua avec les mèches de ses cheveux, un sourire étrangement doux aux lèvres, comme quand il l’avait en face de lui depuis que Spencer lui avait fait prendre conscience qu’il était l’héritage d’Ariane… « Désolé Cillian, on ne voulait pas crier. » Bon, c’était faux, mais un petit mensonge de convenance à un enfant de temps en temps, ça ne faisait pas de mal, si ? Il déposa un léger baiser sur le front du petit garçon, tandis que ce dernier venait se blottir contre son oncle. Le geste du petit garçon arracha un nouveau sourire à l’oncle en question qui frotta doucement son dos pour le réconforter. Il resta ainsi pendant quelques minutes avant de le rallonger dans son lit et de remettre les couvertures au-dessus de lui. Il s’agenouilla lui-même devant le lit, les bras posés sur le matelas et la tête posée sur les bras, il regardait le petit garçon qui le fixait. « Tu voudrais bien me dire ce que grand-mère t’a dit sur ton père, s’il-te-plait ? » Il avait demandé ça d’un ton calme et posé, comptant sur l’honnêteté d’un enfant pour lui en révéler plus que ce que sa mère n’aurait voulu qu’il sache. Effectivement, Cillian lui expliqua – avec ses mots à lui bien sur – que sa grand-mère lui avait dit que c’était de la faute de Spencer s’il n’avait plus de mère, et là, Arthur ne se sentit pas la force de le contredire. Il savait pourtant que ce n’était pas seulement de sa faute, mais comment expliquer ça à un gamin de cinq ans ? Ce fut quand le petit garçon lui raconta qu’elle lui avait expliqué comment son père avait le pouvoir de le faire bouffer par un dragon qu’Arthur sourit. Alors c’était comme ça qu’elle avait essayé de l’effrayer de son père et de la magie en même temps. Pas mal… Arthur caressa doucement la joue du petit garçon une fois que celui-ci eut finit son histoire. « Je te promet que tu n’as pas de quoi avoir peur… Je te jure que s’il essaye de te faire du mal je lui ferais regretter. Grand-mère t’a dit ça parce qu’elle ne l’aime pas, c’est tout. Mais toi, tu me fais confiance non ? » Il ne put retenir un sourire, accompagné d’un petit rire, pour rassurer Cillian. Bon, c’était pas totalement vrai, encore une fois, mais même si Arthur ne pouvait pas démolir physiquement Spencer, s’il le cherchait et s’attaquait à son fils, il trouverait un autre moyen de le détruire. En plus, il avait toujours sa botte secrète en réserve, juste au cas où…

Il se releva, déposa un nouveau baiser sur le front du jeune garçon avant de lui souhaiter une bonne nuit, ne sachant pas trop s’il l’avait vraiment rassuré ou pas sur son père. Au moins il avait essayé, mais quand il s’agissait de chanter les louanges de quelqu’un qu’il détestait, même pour la bonne cause, Arthur bloquait complètement. Il n’avait pas pu lui dire que son père était l’être le plus formidable du monde, parce que ce n’était pas vrai, mais il savait que si Cillian ne le craignait pas comme il le faisait à cause de sa grand-mère, ils auraient une chance que les choses se passent mieux. Sans savoir comment l’expliquer, Arthur n’aimait pas l’idée de voir que Spencer & Cillian se sentiraient mieux s’ils apprenaient un peu à se connaître et à s’apprivoiser mais de les voir se repousser comme ça. C’était tellement con, comme le fait qu’il se batte avec Spencer pour savoir qui aurait le droit de protéger le petit garçon alors qu’ils étaient probablement tous les deux seulement une source d’ennui pour lui… Il sortit de la chambre, éteignant la lumière avant de refermer doucement la porte et retourna s’affaler sur le canapé, allumant une cigarette, il passa quelques minutes à tripoter le vif d’or, pensif, avant d’entendre la voiture de ses parents qui rentraient. Il rangea alors le vif d’or et alla s’enfermer dans sa chambre avant de s’étaler sur son lit. Il s’endormit quasiment aussitôt, oubliant pendant quelques heures les dilemmes qui le tiraillaient et les choses qu'il savait qu'il savait devoir faire s'il avait encore conscience le lendemain, de ce qui était juste ou non.