but I don't seem to see many bullets coming through (thomas&eliott)

C'était l'une de ces soirées où le jeune homme savait que le temps allait lui sembler long. Vendredi soir, soleil couchant, températures étonnement encore agréables pour un mois de septembre en Angleterre, assez de critères pour que la population décide de mettre le nez dehors et d'aller profiter des bonnes choses de la vie. Et c'était très certainement ce qu'Eliott aurait fait s'il ne travaillait pas ce soir. C'était notamment l'un des inconvénients à être celui de l'autre côté du bar : pas de roule libre en vue et, en prime, gérer ces moldus fêtards et saouls, jusqu'aux petites heures.

Fort heureusement ce soir-là, il n'était pas le seul, deux de ses collègues étaient également en service. Comme si le gérant du bar avait senti que le thermomètre allait faire joujou sur ces derniers jours. De son côté, Eliott avait été en t-shirt toute la journée et se serait bien dévêtu entièrement, à force d'avoir chaud et de courir dans tous les sens pour servir les quatre caprices de sa clientèle. Au goût du jour : la nouvelle Samuel Smith Brewery, bière anglaise revue sous plusieurs sortes pour être certain de satisfaire toutes les papilles. De manière étonnante, la bière ambrée avait plus de succès que la blonde. Alors ce soir, l'objectif était de promouvoir la brune et la blonde pour dépasser l'ambrée. C'était mot pour mot ce que le gérant avait déclaré le matin-même. Le sourire d'Eliott avait été narquois à l'entente de ces dires. On aurait cru pendant un moment qu'il parlait de femmes...

En train de servir à la pompe une énième bière du mois, sans que sa tête ne quitte l'angle initialement prévu au moment de verser sa bière, le regard d'Eliot se releva à l'entente du bruit de la porte d'entrée. Il était inévitable d'entendre un tel son de grincement, suivi d'une clochette pour bien signaler la présence d'un nouveau venu, d'un nouveau portefeuille prêt à se vider de ses livres sterling au fur et à mesure des mousses servies à la chaine. A quelques pas de lui, un homme, d'une corpulence bien dessinée, à peine plus âgé que lui sans doute. Des personnes dans ce genre, Eliott en croisait à la pelle et ne les comptait même pas sur une journée. Mais, pour le coup, il ne put s'empêcher de tiquer en croisant le regard de la personne. Il le connaissait ou, du moins, l'avait déjà vu. Il ne parvenait pas à mettre le doigt dessus. Etait-ce le caissier de la petite supérette moldue du coin de la rue de son appartement ? Ou bien n'était-ce pas plutôt un sorcier ?

A cette pensée, le visage du rouquin s'illumina. Non seulement c'était un sorcier dissimulé dans la masse de moldus, mais il avait également la certitude qu'il était connu dans le domaine de la zythologie. Et de toute évidence, le fait de cogiter à trouver qui était cet homme fit perdre à Eliott le fil de son action. La bière qu'il était en train de servir au fût avait bien eu le temps de mousser et de  déborder. Lâchant un juron étouffé entre ses dents, il repoussa le verre et secoua la main. Même si ce genre de choses lui arrivait fréquemment, il sentit ses joues commencer à se colorer de rougeurs et s'empressa de secouer la tête pour revenir à lui. A l'évidence, il était temps qu'il boive un verre, lui aussi.

La semaine avait été éreintante et s’achevait dans la moiteur. C’était assez rare pour un mois de septembre. La chemise de Thomas lui collait dans le dos, il avait d’ailleurs retroussé ses manches pour se rafraîchir un peu. Il déambulait dans les ruelles de Londres, attaché-case à la main. Les visites dans les pubs s’étaient enchaînées dans un rythme successivement sur cinq jours. Il s’arrêta devant un mur de pierre puis regarda de droite à gauche avant de sortir sa baguette magique discrètement pour taper sur les briques  de la façade. Petit à petit, le Chemin de Traverse s’ouvrit à lui. D’un pas pressée, le sorcier déambula dans la rue pour rejoindre l’artère où se situait sa brasserie McGruder's beer. D’un geste maladroit, il fouilla dans ses poches pour y trouver ses clés et entra dans sa boutique. Il tourna à sa gauche, posa son sac de travail sur le bureau avec soulagement. Enfin un peu de temps pour lui. Thomas monta les escaliers tout en tirant sur son nœud de cravate qu’il laissa tomber sur le sol avant d’y ajouter le reste de ses vêtements.

Ce fut avec plaisir qu’il ressentit l’eau fraîche sur sa peau humide. Il sentit les tensions se relâcher. Il allait enfin pouvoir profiter du week-end. Depuis que Thomas avait lancé son entreprise, il ressentait toujours une certaine pression sur ses épaules. Son avenir financier en dépendait. Pour le moment, tout semble se dérouler comme il l’avait imaginé. Cependant pour croître affaire, il essayait de trouver un nouveau marché du coté des moldus. C’était pour cette raison qu’il avait démarché les pubs de la cité londonienne.

Un peu plus tard en début de soirée, le soleil  avait commencé à décliner et  le sorcier finissait d’enregistrer les derniers contrats dans son registre. Il avait opté pour une tenue plus décontractée et semblait décidé de profiter de sa soirée avec mon entourage amical. Thomas avait rendez-vous dans un bar moldu avec un ancien camarade de Poudlard qui après le conflit avait prit la décision de vivre avec sa conjointe dans la société moldue. Il transplana dans une impasse non loin puis entra dans le bar. Il y avait de l’influence, le brouhaha des personnes qui occupaient les lieux ainsi que la musique en arrière fond frappèrent le jeune homme. Il adorait cette ambiance festive. Il fit quelques pas en esquivant les clients, son regard était braqué sur les boissons annoncées sur le panneau. Il lut rapidement les noms des bières et pensa directement à l’opportunité qu’il aurait de vendre sa propre bière dans cet établissement.

En s’approchant du comptoir, il remarqua le barman qui semblait perturbé d’avoir de la bière sur les mains. Thomas esquissa un sourire amusé puis prit place sur la seule place disponible en attendant son ami. Il zieuta rapidement sur l’homme de l’autre côté du comptoir. Étrangement, ses traits lui disaient quelque chose. Il semblait embarrassé et avoir chaud vu les belles rougeurs sur son visage. Il leva sa main et le héla pour passer commande. Après tout, il était toujours intéressant de tester les bières des concurrents et vendre les mérites de son produit.

- S’il-vous-plaît, une pinte de Samuel Smith Brewery ! Une Ambrée !