wasting my time ✗ Spencer

Quand Arthur était sorti de l’hôpital, il avait encore une fois tout fait pour éviter Spencer. Le jeune sorcier avait dépassé les bornes quand il l’avait quasiment tabassé à mort au bal de l’été, et pourtant Dieu sait qu’il en fallait beaucoup pour qu’Arthur juge qu’une personne avait franchi les limites. Il s’était déjà foutu sur la gueule avec Spencer plus d’une fois, ils s’étaient déjà fait des coups de pute, ils avaient déjà mis la vie de l’autre en danger, et ce, à plusieurs reprises, mais cette fois-ci, c’était différent. Arthur lui avait demandé d’arrêter et Spencer n’en avait pas tenu compte, ce n’était plus une espèce de petit jeu morbide et malsain auquel ils jouaient depuis qu’ils s’étaient retrouvé à la libération de Spencer, non. Cette fois-ci, Arthur ne jouait plus. Soyons clairs, ce n’était pas qu’il tenait tant que ça à la vie, la vérité, c’était qu’il avait encore été déçu de se réveiller à l’hôpital le lendemain du bal, mais il ne pouvait pas laisser passer ça. Il n’avait pas peur d’être en présence de Spencer, ça n’allait pas jusque là, mais il pensait que ce serait mieux pour tout le monde s’ils ne se voyaient plus pendant un moment. Il ne savait pas si Spencer était resté à l’hôpital ou même si c’était lui qui l’y avait déposé, ce qu’il savait, c’était qu’il s’était cassé le plus vite possible après son réveil et qu’il n’avait croisé personne de connu avant d’être dehors. Alors non, il n’avait pas parlé à Spencer depuis la fameuse soirée, ce qui devait bien faire 2 semaines. Et franchement, il ne s’en portait pas plus mal.

La nuit qu’il avait passé à l’hôpital avait provoqué un nouveau déclic en lui, et il avait fini par réaliser que lui et Spencer, ça ne donnerait jamais rien de bien. Ils n’étaient jamais bons ensemble, même quand ils essayaient de faire des efforts, ils finissaient par s’engueuler et par aller trop loin. C’était toujours un pas en avant et trois pas en arrière avec eux, et après une énième nuit passée aux urgences, Arthur commençait à en avoir mal de reculer. Il en avait également assez de se faire mater physiquement dès qu’il ouvrait sa gueule, parce qu’il savait très bien qu’il ne réussirait jamais à la fermer. C’était plus fort que lui, comme un besoin compulsif de faire comprendre à Spencer qu’il existait et qu’il n’allait pas se laisser marcher sur les pieds. Alors Arthur avait décidé d’arrêter un peu les frais pour un moment, sans compter qu’il préférait ne pas avoir à affronter Spencer pour l’instant. La simple idée de se retrouver dans la même pièce que lui lui donnait envie de gerber. Il était retourné au boulot ce soir là – pas le choix, il devait bien gagner sa croûte – et après avoir passé quelques heures à se demander s’il préférait dormir chez lui ce soir ou bien dans la rue, il fut dispensé d’y penser plus sérieusement. Une cliente était entrée dans le bar, elle avait les cheveux blonds platine et une collection de tatouages assez impressionnante. Elle fut également la première et seule cliente de la soirée à ne pas le fixer pendant cinq secondes en remarquant ses blessures au visage. « Je peux t’offrir un verre ? » Arthur éclata de rire, s’arrêtant pourtant bien vite. Il avait encore mal aux côtes et il valait mieux qu’il ne rigole pas trop. « Je suis en train de bosser. » La jeune femme lui lança un sourire amusé et se pencha sur le bar. « Je peux attendre. » Arthur lui lança un sourire en coin. « Je suis fauché, je vais pas dire non. » Jessie éclata de rire avant de s’asseoir au bar. « Parfait. »

Il s’était avéré que la jeune femme était assez… exceptionnelle. Arthur ne savait pas trop comment l’expliquer, elle était impulsive, grande gueule, courageuse, sans-gêne, extravertie, drôle, pessimiste, cynique et sarcastique. Tout ce qu’Arthur aimait. Oh, et elle avait une sacrée descente. La femme parfaite en somme. Parfaite pour lui. Elle fumait comme un pompier, jurait comme un chartrier et, Arthur l’avait découvert après quelques jours, ne disait pas non à un petit trip de temps en temps. Inutile de préciser qu’Arthur n’avait pas tenu bien longtemps avant de craquer, dans tous les sens du terme. Avant une semaine, la jolie Jessie – Arthur n’en revenait pas de l’ironie de la situation, ce n’est vraiment pas la peine de commenter – était dans son lit et lui avait repris ses bonnes vieilles habitudes et avait ressorti le kit avec qui il partageait tant de souvenirs. Pour un peu, il aurait presque oublié que Spencer existait. Seulement voilà, après une semaine de relation passée chez la jeune sorcière, Jessie finit par lui demander s’il était à la rue.

Ce qui les amena donc ce soir là chez Spencer. Ou plutôt chez Arthur. Le jeune homme ne tenait pas tellement à voir Spencer, mais Jessie avait tellement insisté qu’il n’avait pas résisté bien longtemps. Arthur avait tendance à ne plus se reconnaître quand il était avec elle, elle avait quelque chose d’envoûtant, et s’il avait été plus perspicace, il aurait compris qu’il sortait en fait avec l’équivalent féminin de Spencer. Enfin, comme il n’était pas du genre à se poser trop de questions, elle restait pour lui juste une fille magnifique, qui le faisait pas chier et qui réussissait à le divertir et à lui faire oublier les derniers incidents en date. C’était déjà largement mieux que tout ce qu’il aurait jamais pu espérer. « Alors il est là ton abruti de coloc ? » Arthur lança un sourire amusé avant de refermer la porte de l’appartement derrière eux. Il passa son bras autour de la taille de la jeune femme et balança ses clés sur la table basse devant le canapé. « Je sais pas. Si ça pue pas l’alcool dans tout l’appart’ c’est probablement que non. » Il haussa les épaules avant de lancer un sourire en coin à la jeune femme. Arthur s’alluma une cigarette et en tira une bouffée avant de la passer à Jessie. « Je sais pas pourquoi t'as tenu à venir, il va juste te prendre la tête. » Jessie leva les yeux au ciel avant d’expirer la fumée. « Je suis à peu près sûre d’avoir déjà rencontré pire, et puis je suis curieuse de connaître le type qui t’a envoyé à l’hôpital. » « Il est charmant tu vas voir. » Arthur releva les yeux en voyant Spencer finalement débarquer dans le salon. Il lui lança un regard glacial avant de reprendre la cigarette des mains de Jessie.

Arthur se rendit compte au moment où il vit Spencer entrer dans la pièce qu’il avait eu tort de venir ici. Il sentit sa gorge se serrer et ses sourcils se froncer par automatisme. Il n’était pas encore prêt à affronter le jeune sorcier, c’était con à dire, surtout vu qu’il en avait déjà vu d’autres, il s’était déjà fait tabasser par pire que Spencer, mais là c’était différent. Spencer, il le connaissait bien, trop bien même peut-être. Il savait qu’il avait abusé aussi, mais ce que Spencer avait fait… C’était impardonnable aux yeux d’Arthur. La différence entre Spencer et les autres, c’était que son colocataire… Il lui avait toujours un peu fait confiance sans le savoir pour ne jamais dépasser les bornes. Ils faisaient des conneries, tous les deux, mais Arthur avait toujours pensé sans le savoir qu’il existait une sorte d’accord tacite entre eux deux, un accord qui stipulait clairement qu’il ne fallait pas qu’ils s’envoient mutuellement à l’hosto quoi. C’était un minimum quand même, et pourtant Dieu sait qu’Arthur n’était pas du genre à surveiller ses fréquentations. Le jeune homme n’avait jamais été du genre bien rancunier. Riez, riez, pensez ce que vous voulez, c’était vrai. Arthur s’était toujours comporté comme un petit con avec Spencer, mais au fond de lui, ça faisait bien longtemps qu’il lui avait pardonné. S’il se comportait comme ça avec Spencer, ce n’était pas par soif de vengeance ou une autre connerie du genre, non, c’était juste dans sa nature, et c’était juste comme ça que leur relation fonctionnait. Enfin, si on pouvait appeler ça fonctionner.

Il lança un regard noir à Spencer quand celui-ci ouvrit la bouche. Il n’avait même pas cherché à le provoquer, mais il fallait croire que sa simple présence réussissait à mettre Arthur sur les nerfs. « Je te rappelle que c’est aussi chez moi, je ramène encore qui je veux, non ? » Lâcha-t-il d’un ton glacial. C’était parti tout seul. Ce ne fut qu’après avoir répliqué qu’il se rendit compte à quel point il en voulait encore à Spencer. Il avait probablement besoin de se défouler un peu sur le jeune homme, malheureusement pour lui, il avait également du mal à supporter de se trouver dans la même pièce. Il ne savait pas ce qui lui faisait le plus de bien encore, l’éloignement ou les représailles. Arthur détourner le regard, se forçant à regarder partout sauf en direction de Spencer. Il n’avait jamais été du genre à éviter la confrontation – c’était l’euphémisme du siècle – mais il n’avait pas envie de se lancer dans une nouvelle bataille avec Spencer. Il avait vraiment l’impression que leur relation avait changée depuis la fameuse soirée au bal. D’ailleurs, ça avait l’air d’être réciproque, même Spencer n’arrivait pas à le regarder dans les yeux, au fond, ça valait peut-être mieux, Arthur se serait vraiment énervé s’il avait eu l’impression que Spencer n’en avait rien à foutre ou qu’il essayait de le défier. « Charmant, je confirme. » Lâcha la jeune femme en passant sa langue sur ses lèvres. Elle lança un regard amusé à Arthur avant de s’avancer vers Spencer, un air de défi affiché fièrement sur son visage. « Jessie. » Arthur ne put s’empêcher de relever les yeux pour voir la réaction de Spencer. A la moindre réflexion il s’en prenait une en tout cas, Arthur n’était définitivement pas d’humeur à entendre le son de la voix du jeune homme, c’était déjà assez pénible comme ça de savoir qu’ils respiraient le même air.

« Allez viens, on se casse. » Proposa Arthur en tendant sa main à la fameuse Jessie. Elle avait vu l’appartement, voilà, elle était satisfaite, elle avait même rencontré Spencer, la chanceuse, maintenant ils pouvaient se casser, ils n’avaient plus rien à faire ici. « Non, non, j’ai envie de me poser un peu. En plus j’ai à peine eu le temps de faire la connaissance de Spencer. » Lâcha-t-elle d’un ton malicieux avant de se laisser tomber tranquillement sur le canapé, mettant au passage les pieds sur la table. Elle lui lança un clin d’œil et Arthur la soupçonna de vouloir rester parce qu’elle aimait voir la façon dont les deux jeunes sorciers ne pouvaient clairement pas se blairer. Elle était du genre à aimer la tension entre les gens, comme Arthur d’ailleurs, mais il n’avait pas pensé que ça pourrait un jour se retourner contre lui. Il laissa échapper un soupir de mécontentement. S’il allait rester ici, il allait falloir qu’il boive autre chose que de l’eau plate. Il termina sa cigarette et l’écrasa au passage dans le cendrier sur la table basse. Il suivit donc un peu involontairement Spencer dans la cuisine. Il remarqua tout de suite ce que Spencer s’efforçait de lui cacher – c’était devenu comme une seconde nature pour lui – et il laissa échapper un rire sans joie. « Pas la peine d’essayer de me cacher ça voyons Spencer, on se connait assez, non ? Tes penchants alcooliques ne sont plus un secret pour personne. C’est bien de voir que t’as pas perdu la main. » Il leva les yeux au ciel et lança un regard froid au jeune homme avant d’ouvrir le frigo et d’en sortir deux bières. Il sortit ensuite de la cuisine aussi vite qu’il y était entré, pas franchement à l’aise à l’idée d’être coincé là-bas avec Spencer. Il alla s’affaler sur le canapé à son tour et tendit une des deux bières à Jessie.

« Merci beaucoup au passage, je m’amuse comme un petit fou là. » Lança-t-il à Jessie d’un ton sarcastique. La jeune femme lui lança son habituel sourire amusé, lui donnant au passage un gentil coup de coude dans les côtes. « Fais pas la gueule, moi je m’éclate. » Il aurait du s’en douter, il ne savait même pas pourquoi il avait finit par accepter de l’amener ici. Qu’est-ce qui pourrait bien ressortir de positif de cette rencontre, hein ? Rien, c’était clair avant même qu’ils ne mettent les pieds ici. Jessie releva la tête et posa son regard sur Spencer. « Au fait, Arthur ne m’a jamais dit d’où vous vous connaissiez. » Arthur faillit s’étouffer avec sa bière, il allait la laisser à Spencer celle-là de question, il n’était pas spécialement pressé d’y répondre. Et puis, il était certain que le jeune sorcier se débrouillerait très bien pour expliquer le tout à Jessie.

Arthur releva les yeux et les fixa dans ceux de Spencer, le défiant du regard. Il n'aurait pas pensé avoir le courage de soutenir son regard, mais apparemment il avait plus de ressources encore qu'il n'aurait pu le penser, et il avait surtout très hâte de voir comment Spencer allait s'en sortir cette fois-ci. Il n'avait rien expliqué du tout à Jessie, parce que ça n'avait jamais été son genre de se confier et qu'il ne jugeait pas que la jeune femme avait besoin de tout savoir sur lui, de rien savoir sur lui d'ailleurs. Elle connaissait son nom, son âge – à peu près, elle l'avait plus deviné qu'autre chose en fait – et elle connaissait ses habitudes et ses fréquentations, c'était à peu près tout. Il haussa un sourcil, continuant à essayer de défier Spencer. Vas-y, explique lui d'où on se connait, connard. Il leva les yeux au ciel en entendant la réflexion de Spencer. Bah bien sûr, c'est vrai qu'Arthur était tellement du genre à se confier et à tout raconter à la première personne qu'il croisait, Spencer aurait du le savoir ça quand même. Enfin, de toute façon, tout ce qui sortait de la bouche du jeune sorcier était destiné à l'énerver ce soir. Ce soir et pendant un petit moment probablement. Surtout qu'il n'avait pas spécialement l'air d'avoir envie de s'excuser ou de réparer ce qu'il avait fait. Arthur ressentit le besoin intense de se casser, malheureusement pour lui, il y avait Jessie, et il était hors de question qu'il la laisse seule avec Spencer. Il aimait prendre des risques, mais pas de cette nature là. Il ne savait pas s'il avait plus peur que le jeune sorcier la frappe ou ne la mette dans son lit.

Arthur lui lança un regard noir en le voyant revenir de la cuisine. « Toi bois ta bière et ferme ta gueule. » Vu le sourire mauvais qu'il lui avait lancé, il n'était plus sûr de vouloir savoir ce qu'il allait bien pouvoir trouver pour expliquer d'où ils se connaissaient. Il aurait du se rendre compte que Spencer allait tordre la vérité au maximum pour tout lui faire retomber sur le dos. Il leva les yeux au ciel, un sourire vaguement amusé aux lèvres. Quel enfoiré. Une personne qu'on avait en commun. T'as raison abruti. Il s'enfonça encore un peu plus dans le canapé, faisant tout son possible pour ne pas ouvrir sa grande gueule. Il devait garder en tête que moins il en disait, plus vite il serait partie. Seulement voilà, il avait encore des comptes à régler avec Spencer et maintenant qu'il était là, il ressentait le besoin de s'en occuper. Il termina sa bière et reposa la bouteille sur la table basse bruyamment au moment où Spencer expliquait les circonstances de leurs retrouvailles. « Il t'a sauvé? » Demanda Jessie en se tournant vers Arthur, l'air sceptique. Arthur passa doucement sa langue sur ses lèvres, essayant autant que possible de se calmer. « Ça c'est ce qu'il aime se dire pour se sentir moins coupable, je suppose. » Sauver était un bien grand mot, encore une fois, Arthur avait déjà vécu pire et il s'en serait sorti, avec ou sans l'aide de Spencer. Il savait que le jeune sorcier l'avait bel et bien aidé, mais il refusait de l'admettre, pas aujourd'hui, et probablement jamais.

Il ignora royalement la dernière réplique de Spencer, se casser? Il n'en était plus question, dans l'esprit d'Arthur Spencer avait déterré à nouveau la hache de guerre et la façon dont il se comportait quasiment normalement avec lui avait le don de lui hérisser le poil. Il se leva brusquement du canapé, se tournant finalement vers Spencer. C'était à son tour d'afficher un sourire mauvais, le même qu'il avait dès qu'il préparait un coup de pute destiné à Spencer. « Je comprends pas. Pourquoi tu lui dis pas la vérité, hein? » Il s'avança doucement vers Spencer, oubliant momentanément que Jessie existait. Son sourire s'élargit, comme à chaque fois qu'il savait allait réussir à faire sortir Spencer de ses gonds. Comme quoi, il n'avait peut-être pas autant évolué que ça depuis son dernier séjour en date à l'hôpital. « Pourquoi tu lui dis pas que tu te tapais ma soeur, que tu lui as fait un gosse et que t'es responsable de sa mort, hein? » Il se rapprocha encore un peu plus, il sentait ses propres muscles trembler sous l'effet de la rage, il ne pouvait même pas imaginer l'état dans lequel Spencer allait être. « Hein? Pourquoi tu lui racontes pas la fois où tu t'es pointé dans ma chambre alors qu'elle était dans le salon avec mes parents? » Il haussa les épaules, faisant semblant de ne véritablement pas comprendre pourquoi Spencer ne lui avait pas raconté ça à la place. Il finit par se rapprocher tellement qu'il n'était plus qu'à quelques centimètres du jeune homme. Il lui lança un sourire insolent, cette fois-ci, Jessie avait été complètement oubliée, il ne restait plus que Spencer dans la pièce à ses yeux, Spencer et la haine qu'il lui inspirait.

Il passa lentement sa langue sur ses lèvres, les yeux rivés dans les siens, refusant de détourner le regard ou de montrer le moindre signe de peur ou de déférence. Il préférait crever plutôt que de laisser Spencer prendre l'avantage psychologique sur lui, c'était tout ce qu'il avait pour lutter contre le jeune sorcier. Quand il rouvrit la bouche, il ne fit que murmurer, et vu la distance, Jessie ne l'avait probablement même pas entendu. Celle-là, elle était juste pour lui. « Vas-y, qu'est-ce que t'attends pour me frapper? Tu te retiens pas d'habitude, pas vrai? » Il haussa un sourcil, souriant désormais de toutes ses dents. Pour garder son calme et se casser tranquillement, il repasserait hein, mais ça lui avait fait du bien de se lâcher comme ça sur Spencer.

Arthur passa sa langue sur ses lèvres avant de lancer un sourire provocateur au jeune homme. C'était encore tellement facile de le faire sortir de ses gonds, même après tout ce temps, que ça en devenait pathétique. Il savait que Spencer n'avait aucun self-control, il était juste venu pour le lui prouver, une nouvelle fois. Si après ce qui s'était passé il y a quelques semaines après le bal, Spencer n'était pas foutu de ne pas se montrer violent envers lui, c'était que c'était un cas désespéré. Et pourtant, malgré la brutalité du geste, il ne fit rien d'autre, et bientôt Arthur remarqua l'expression inhabituelle de Spencer pour ce genre de situation. Il n'avait même pas l'air tant en colère que ça, mais il se rappela la soirée au bal, là non plus il n'avait pas su voir la colère de Spencer, il avait pensé pouvoir s'en sortir tranquillement. Il ne pouvait pas se fier à ce que le jeune homme décidait de lui montrer ou non, en plus de ça, il venait de l'agripper brutalement, il devait être énervé, non? Arthur essaya d'ignorer la faiblesse de la voix du jeune homme quand celui-ci lui demanda d'arrêter, accorder à Spencer qu'il puisse avoir un moment de faiblesse, c'était prendre des risques selon Arthur, s'il arrêtait de trouver Spencer menaçant c'était là qu'il risquait de s'en prendre plein la gueule. Non, il ne ferait plus jamais l'erreur de sous-estimer la force et la colère de Spencer. « Qu'est-ce que t'attends pour m'en foutre une? » Lâcha-t-il d'un ton provocateur en plongeant son regard dans celui du jeune homme. Il n'était pas sûr de bien savoir s'il avait adopté la bonne stratégie.

Au final, il fut aussi surpris que Spencer d'entendre la voix de Jessie. Il avait totalement oublié qu'elle était là, il avait même oublié qu'elle existait. Il releva les yeux vers Spencer au moment où celui-ci le lâcha miraculeusement. Il continua à ignorer Jessie tandis que celle-ci se rapprochait de lui, il n'était désormais plus capable de lâcher Spencer des yeux. Maintenant qu'il avait lancé la confrontation, il ne comptait pas l'abandonner avant d'avoir obtenu ce qu'il voulait : des excuses. Il savait qu'il pouvait toujours attendre, mais il se devait de lui laisser au moins une chance. « Quoi? Quoi!? Tu voulais pas quoi? » Demanda-t-il, sentant le ton monter à nouveau. Il sentit ses poings se serrer. Spencer était donc incapable de prononcer un seul petit mot, c'était tout ce qu'Arthur avait demandé. Il avait utilisé Ariane et le fameux déjeuner où Spencer était venu dans sa chambre comme moyen de l'amadouer et de l'énerver, mais la vérité, c'était qu'il ne lui en voulait même plus pour ça. Pour l'épisode de Noël il n'était même pas sûr de lui en avoir voulu un jour, pour Ariane en revanche, si, mais il avait mit ça derrière lui depuis longtemps. Il s'en servait juste comme d'une arme contre Spencer, parce que c'était l'une des dernières qu'il lui restait pour pouvoir prendre l'ascendant sur le jeune sorcier. Ce qu'il voulait, c'était que Spencer avoue être allé trop loin le soir du bal, c'était si compliqué que ça à sortir? Apparemment. Arthur fronça les sourcils, ne lâchant toujours pas Spencer des yeux, il attendait quoi pour continuer? Le déluge?

Cette fois-ci, ce fut un rire nerveux qui s'échappa des lèvres d'Arthur. Il avait déjà décidé d'avance qu'il ne lui pardonnerait pas? C'était la meilleure celle-là, Arthur pouvait se montrer très con, certes, mais s'il y avait bien une personne avec qui il n'était pas aussi rancunier qu'il avait le droit de l'être, c'était avec Spencer. Il ne lui avait jamais montré, c'était vrai, mais il avait pensé que le jeune sorcier aurait compris le message. Il ne l'avait certes pas aidé en ramenant tout ça sur le tapis, mais merde, il n'avait pas à se justifier, pas avec Spencer. Il s'en servait juste comme d'une excuse pour ne pas avoir à essayer de se faire pardonner, il s'en fichait qu'Arthur soit décidé à lui pardonner ou non, il était juste trop fier pour s'excuser. « C'est ça, si ça peut t'aider à te sentir mieux... » Lâcha-t-il d'un ton glacial avant de se tourner enfin vers Jessie. Il avait juste besoin de ne pas fixer Spencer pendant quelques secondes, il en avait marre de voir sa tronche. Se mordant la lèvre inférieure, il n'était pas satisfait. Il avait espéré que Spencer soit assez digne pour au moins s'excuser pour la dernière fois, apparemment il l'avait encore surestimé. Et bien, puisque Spencer ne comptait pas lui présenter d'excuses, Arthur allait devoir chercher son pardon de force.

Il se tourna à nouveau vers Spencer et lui mit soudainement une droite en pleine mâchoire. Il sentit ses articulations craquer légèrement et une vive douleur monter dans sa main. Il déplia ses doigts pour essayer de faire passer la douleur, une grimace au visage. Puisque Spencer ne voulait pas essayer de se faire pardonner, Arthur allait faire ce qu'il pouvait pour faire passer son énervement. Il ne pouvait pas continuer à vivre avec ça, et quoi de mieux que d'utiliser les armes de Spencer contre lui. Il n'avait aucune chance de gagner une confrontation physique, mais avec un peu de chance, le jeune sorcier se sentait encore assez coupable pour ne pas se lancer dans un combat avec lui. De toute façon, Jessie intervint avant que l'un des deux sorciers n'ait le temps d'en ajouter. Elle vint se mettre entre Arthur et Spencer, tournant le dos au dernier. « Bon, c'est bon là, je crois que ça suffit. » Elle essayait de se montrer inquiète mais Arthur pouvait voir un petit sourire malicieux se dessiner sur ses lèvres. De toute évidence, elle adorait la scène qui se jouait devant elle et Arthur ne pouvait pas s'empêcher de penser qu'il avait trouvé quelqu'un d'aussi tordu que lui. Ce n'était pas spécialement rassurant tout compte fait. Elle se tourna en tout cas après vers Spencer, et même si Arthur ne pouvait pas le voir, elle lui lança son habituel sourire en coin, celui qu'elle utilisait quand elle voulait obtenir quelque chose. « Ça va? » Lui demanda-t-elle d'une voix un peu trop douce au goût d'Arthur, il ne le méritait pas. Elle avait utilisé la même le jour de leur rencontre, c'était ça qui lui avait plu chez elle en premier.

Arthur, quant à lui, lança un dernier regard à Spencer avant de se diriger à pas rapides vers sa chambre, enfin son ancienne chambre. Comme le jeune homme l'avait si bien dit, il était temps qu'il se tire. Mais il avait d'abord un truc à récupérer qui lui tenait particulièrement à coeur. Bousculant Spencer au passage il ouvrit la porte de sa chambre et la claqua derrière lui. Il fallait croire qu'il n'avait pas encore totalement fini de se défouler. Il dégagea son matelas et vérifia qu'il lui restait bien son petit kit. Ce n'était pas la cachette du siècle, mais il passait tellement de temps allongé dans son lit, que c'était probablement l'une des plus sûres. Il alla s'asseoir par terre dans un coin de la pièce – par pure flemme de remettre le matelas – et sortit une seringue encore inutilisée. Ses gestes étaient tellement précipités et brutaux qu'il faillit la casser avant même d'avoir pu l'utiliser. Il avait besoin de ça pour se calmer et tant pis si Spencer était dans la pièce d'à côté, de toute façon, son avis lui importait peu.

Arthur savait qu’il déconnait à être retombé aussi facilement dans ses vieilles habitudes, mais après être sorti de l’hôpital une énième fois, il n’avait plus eu énormément de motivation pour continuer à se priver. De toute façon, vu comment le sort s’acharnait sur lui, il allait crever avant d’avoir atteint les 25 ans, alors autant en profiter non ? De toute façon, s’il avait arrêté, c’était aussi pour essayer de rendre son quotidien avec Spencer plus vivable. Même s’il ne lui avouerait jamais, il avait pris sa décision grâce au jeune sorcier, mais après ce qui venait d’arriver, il ne voyait plus rien l’empêchant de reprendre. Il avait lutté pendant quelques jours encore, et après il avait rencontré Jessie, Jessie qui faisait quasiment autant de conneries que lui et Jessie qui se droguait aussi, pas le même genre, mais quand même. Alors il avait replongé, et pour l’instant, ce n’était pas une décision qu’il regrettait le moins du monde. Ça n’avait pas encore mis son boulot en danger et ça l’avait grandement aidé à se détendre. Il fallait dire que les seuls moments où il était à peu près conscient tombaient quand il était au boulot, alors son quotidien était de suite devenu plus sympathique, il avait repris le rythme qui lui donnait l’impression de ne pas vivre, et c’était pour le mieux franchement.

Assis dans le coin de la pièce, il entendait Spencer et Jessie parler dans le salon, sans pour autant réussir à comprendre ce qu’ils disaient. C’était pas plus mal, et qu’ils continuent à lui foutre la paix tiens. Il soupira doucement en sentant l’aiguille traverser sa peau. Cette sensation familière lui avait quasiment autant manqué que le reste pendant les derniers mois. Il ferma les yeux et profita juste du sentiment qui l’envahissait peu à peu. Ça faisait tellement longtemps qu’il n’avait pas été défoncé ici, ça lui rappelait trop de souvenirs, surtout des douloureux d’ailleurs. Il enleva doucement l’aiguille de sa veine et la balança à l’autre bout de sa chambre. Laissant échapper un léger soupir d’aisance, les yeux toujours fermés, il laissa retomber sa tête en arrière jusqu’à ce que son crâne rencontre le mur. Il aurait pu rester là pendant des heures, malheureusement pour lui, la vie n’était jamais clémente bien longtemps et quelques minutes plus tard, la porte de la chambre s’ouvrit. Arthur ne chercha même pas à dissimuler le reste de son kit qui trainait par terre à côté de lui. Il replia son coude par réflexe et croisa ses jambes afin de s’asseoir en tailleur. Il rouvrit les yeux et les posa sur Spencer, il se sentait déjà largement plus détendu et ne ressentait plus rien en voyant le jeune homme. Même pas une envie de se lever pour aller le frapper.

La respiration même d’Arthur s’était calmée et il avait du mal à comprendre exactement de quoi parlait Spencer. Une force mystique semblait s’être emparée de son cerveau et il avait encore plus de mal à réfléchir que d’habitude. Comment ça il déconnait ? Qu’est-ce que ça pouvait bien lui foutre de toute façon. Enfin, Arthur fit quelque chose dont il n’aurait jamais pu se croire capable vu la situation : il rigola. « Je sais pas si je te pardonnerais ou pas, tu t’es jamais excusé, je peux pas savoir non plus. » Arthur ne se souvenait pas d’une seule fois où Spencer s’était excusé, bon, il était complètement déchiré, mais même dans cet état il était certain que le jeune sorcier ne lui avait jamais présenté ses excuses. Il leva les yeux au ciel et laissa échapper un long soupir de lassitude. Pourquoi est-ce que Spencer continuait à parler, hein ? Il ne lui avait rien demandé, il était obligé de rester là à le forcer à parler ? Arthur n’avait qu’une envie, rester ici pendant des heures sans que personne ne vienne le faire chier, c’était si compliqué ça ? Apparemment pour Spencer en tout cas, c’était au-dessus de ses moyens. « Oh ça va, je t’ai pas demandé ton avis. Toi tu t’es bien remis à l’alcool, et tu veux que je te rappelle ce qui s’est passé la dernière fois ? » Il avait lâché ça d’un ton sec et glacial, Spencer était très mal placé pour lui rappeler la fois où il était tellement déchiré qu’il avait tué quelqu’un, vu ce que lui-même avait fait la dernière fois qu’il lui-même avait bu. Sauf que là, Arthur était encore bien vivant et bien là pour en témoigner. Enfin, il ne voulait pas repenser à ça, il avait cru comprendre que ça arracherait la gueule à Spencer de s’excuser, alors ce n’était pas la peine de continuer à en parler, il se casserait, ne le reverrait plus jamais et ça mettrait un terme à toute cette histoire.

Cette fois-ci, il ne se contenta pas de ricaner, non, Arthur explosa littéralement de rire en entendant la menace de Spencer. « C’est ça ton arme fatale pour essayer de me dissuader de recommencer ? » Il continua à rire pendant quelques secondes, se penchant en avant pour essayer de se relever. Spencer n’avait pas l’air d’avoir envie de partir, alors autant se lever. Il posa ses paumes à plat sur le sol et poussa sur ses jambes pour se remettre debout. Il tituba pendant quelques secondes une fois sur pied et se raccrocha comme il put au mur pour éviter de retomber en avant. La pièce avait commencé à tourner et il n’avait qu’une envie, aller s’allonger et profiter un peu de l’effet de la substance qu’il s’était injecté. Il se rapprocha doucement de Spencer, rigolant toujours nerveusement et ayant toujours du mal à mettre correctement un pied devant l’autre. « Vas-y, je t’en prie, je peux même lui dire moi-même si tu veux. » Il passa lentement sa langue sur ses lèvres. Comme à chaque fois qu’il était complètement défoncé, il ne pouvait pas s’empêcher de trouver Spencer terriblement attirant. Enfin, cette fois-ci, et c’était bien une première, il y avait quelque chose qui le retenait de franchir le pas. « Tu crois que c’est à cause de qui que j’ai replongé ? » Il lança un sourire amusé au jeune homme. Le pire, c’était qu’il n’essayait même pas spécialement de le provoquer, non son sourire amusé aux lèvres, c’était juste la drogue qui faisait effet. Il avait tendance à être euphorique pendant quelques heures avant de commencer la descente aux enfers. « Même si je dois avouer que la moitié du mérite te revient. » Après tout, s’il ne l’avait pas envoyé comme ça à l’hosto, qui sait ce qui serait arrivé. Il posa sa main sur la joue de Spencer et lui donna une petite tape amicale. « Merci, je me rendais plus compte de ce que je manquais. » Lâcha-t-il finalement avec un nouveau sourire en coin sur les lèvres.

« Maintenant je veux bien que tu retournes à tes bouteilles, ça t’évitera de te mêler de ce qui te regarde pas. » Il s’étira longuement avant de se tourner et de se diriger vers le coin d’où il était venu. Après quelques mètres il abandonna la partie et se mit à quatre pattes par terre pour y arriver sans se ramasser la gueule sur le parquet.

Arthur ne comprenait pas pourquoi on ne pouvait pas simplement le laisser tranquille. C’était trop compliqué à comprendre qu’ils aient besoin d’être un peu seul, non ? Apparemment, ça l’était pour Spencer, car qui d’autre que lui l’aurait forcé à se relever alors qu’il était quasiment revenu dans son petit coin bien tranquille. Il grogna pour protester contre le bras qui le forçait à se relever, et surtout la main qui venait récupérer son kit par terre. Il se débattit comme il put, mais dans l’état où il était, sans compter que Spencer était encore bien plus fort que lui, il n’arriva à rien de bien probant et il finit donc par se laisser gentiment trainer jusqu’au salon. Il ne releva les yeux qu’au moment où Spencer le lâcha finalement et il lança un regard complice à Jessie. Il sourit en la voyant éclater de rire. Elle se balançait d’avant en arrière en éloignant des mèches de devant son visage. Elle applaudit doucement avant d’attraper le kit que Spencer lui tendait, ou plutôt celui qu’il voulait lui foutre dans les mains. « Il est déchiré ? » Demanda-t-elle un peu inutilement en jetant des coups d’œil successifs aux deux jeunes sorciers. Elle repartit à nouveau dans un court éclat de rire avant de passer sa langue sur ses lèvres, visiblement ravie par la tournure qu’avaient pris les évènements. « Vous êtes encore pires ensemble que ce que j’avais pu imaginer. » Il n’y avait pas de doute, la situation avait l’air de la divertir plus que tout au monde, Arthur aurait peut-être du préciser à Spencer que Jessie n’avait pas été entièrement sobre non plus en arrivant ici.

Prendre sur lui ? Arthur tiqua quand Spencer lui balança ça en pleine gueule. Il avait certes tendance à blâmer Spencer pour tout ce qui lui arrivait, mais cette fois-ci, il était convaincu d’avoir raison. Certes, son esprit n’était pas ce qu’il y avait de plus clair en ce moment, mais il se souvenait parfaitement de ce qui l’avait poussé à replonger, outre sa rencontre avec Jessie bien sûr. Enfin, il n’était pas sûr de vouloir partager cette information avec Spencer. « Merci Einstein, heureusement que t’es là. » Lâcha Arthur en entendant le jeune sorcier continuer ses déblatérations. Il était peut-être difficile mais ça ne comptait pas comme de vraies excuses, ce n’était pas parce que Spencer avait prononcé le mot désolé qu’Arthur allait s’empresser de lui pardonner, il avait juste lâché ça avec une banalité, comme si ça allait pouvoir effacer ce qu’il avait fait. Arthur aurait bien aimé ne pas être aussi rancunier pour une fois, parce qu’il se rendait très bien compte que sa haine lui pourrissait la vie, et il était le premier à vouloir s’en débarrasser, seulement voilà, il ne trouvait pas que Spencer faisait le moindre effort. Il pensait sincèrement que la moindre des choses après ce qui s’était passé pour Spencer, c’était de lui faire des excuses sincères, pas de lâcher ça comme s’il n’était pas réellement désolé. Arthur avait pourtant l’impression que Spencer n’était pas malhonnête en disant ça, mais peut-être qu’il n’avait pas envie de lui pardonner parce qu’il n’avait pas l’impression que Spencer comprenne exactement la gravité de ce qu’il avait fait à ses yeux.

« On va pas partir, t’as vu l’état dans lequel il est ? » Déclara Jessie en rigolant de plus belle. Elle s’approcha d’Arthur et déposa un rapide baiser sur ses lèvres, souriant toujours largement. Arthur avait un temps de réaction trop grand pour se rendre véritablement compte de ce qui se passait avant que tout ne soit fini, aussi il ne répondit pas franchement au baiser. Il résista cependant quand la jeune femme essaya de l’entrainer sur le canapé, il attrapa sa main pour l’empêcher de s’éloigner. « Tu peux aller nous chercher quelque chose à boire ? » Demanda-t-il en lui lançant un vague sourire en coin. La jeune femme semblait de trop bonne humeur pour s’en formaliser et s’exécuta sans poser de questions. Pourvu qu’elle choisisse quelque chose de fort, enfin, la connaissant ça n’allait probablement pas poser de problème. En tout cas, les paroles de Spencer avaient au moins eu le don de lui redonner un peu ses moyens, et même si ses idées n’étaient toujours pas spécialement claires dans son esprit, il réussissait à y mettre de l’ordre. Il se tourna vers Spencer, le visage grave pour une fois, soutenant son regard. Il n’était même pas énervé, il était trop déchiré pour véritablement s’énerver, qui plus est, il n’avait pas envie de provoquer une nouvelle bagarre avec Spencer, aussi étonnant que cela puisse paraître. Il en avait simplement marre que le jeune homme le prenne pour un con.

« Quand est-ce que tu vas arrêter de me prendre la tête avec ça, hein ? Qu’est-ce que ça peut bien te foutre que je replonge ou pas ? Fais comme mes parents et arrête de me casser les couilles avec tes conseils et tes reproches. Surtout que t’es très mal placé pour me dire quoique ce soit. » Il désigna d’un coup de tête la cuisine derrière Spencer, où Jessie se trouvait d’ailleurs toujours. Il ne doutait pas qu’elle essayait d’épier leur conversation, mais il espérait avoir gardé un ton assez bas pour qu’elle ne réussisse pas à entendre plus que des murmures indistincts. « Si t’es pas capable de comprendre que t’es pas n’importe qui, et que j'attends un peu plus de toi qu'un simple "ce qui est fait est fait", alors je peux plus rien pour toi. » Lâcha-t-il d’un ton sec dans un soupir, ne tenant toujours pas à être entendu par Jessie. Elle avait déjà assez eu l’occasion de voir à quel point la relation qu’il entretenait avec Spencer pouvait être malsaine et dysfonctionnelle et il n’appréciait pas la façon dont elle semblait s’en réjouir. C’était important pour lui que Spencer comprenne ça, et il ne savait même pas pourquoi. Ça devait être la drogue qui parlait, ou bien la lassitude. Ils s’étaient déjà trop battus pour rien, Arthur se devait de faire comprendre à Spencer ce qui le dérangeait toujours au fond de lui. « Tu sais, je pense pas t’apprendre quoique ce soit en te disant que je ne t’aime pas des masses. » Il accompagna sa réplique d’un sourire sarcastique. C’était probablement l’euphémisme du siècle. « Mais que ça te plaise ou non, t’étais la seule personne en qui j’avais à peu près confiance. » Il avait lâché ça d’une traite, comme si les mots lui brûlaient les lèvres, et même déchiré, l’aveu n’avait pas été facile. Il détestait admettre avoir été faible avec Spencer, mais il avait besoin que le jeune sorcier comprenne pourquoi Arthur lui en voulait autant. Il avait pensé que ça Spencer l'aurait compris après la fois où il lui avait demandé de l'aide, complètement paniqué, et recouvert de sang, mais apparemment, le jeune sorcier avait besoin d'une explication de texte.

« Et moi bêtement j’avais pensé que, aussi con que tu sois, tu saurais t’arrêter à temps. Genre par exemple quand je te disais d’arrêter et que je pissais le sang, ça aurait été pas mal tu vois. » Finit-il toujours à voix basse, mais les dents serrées.

Heureusement pour Arthur qu’il était défoncé, sinon il aurait immédiatement regretté avoir avoué ça à Spencer. Lui avouer qu’il avait un jour eu confiance en lui, c’était lui avouer qu’il avait un jour été une sorte de point faible, et même s’il lui avait déjà prouvé à maintes et maintes reprises, c’était encore différent de le dire, c’était l’admettre qui était le plus douloureux aux yeux d’Arthur. Enfin, il avait au moins espéré qu’en lui expliquant ce qu’il ressentait, Spencer serait capable de réagir un peu plus noblement aussi. Pour une fois que c’était lui qui faisait un effort et qui essayait de se comporter à peu près normalement – notez qu’il avait fallu qu’il se défonce avant – il y avait intérêt à ce que Spencer ne lui rit pas au nez, sinon ça allait finir en bain de sang. Il en avait marre que le jeune sorcier se foute de sa gueule, mais merde quoi, c’était si compliqué que ça d’être honnête l’espace de deux minutes, histoire qu’ils puissent essayer de mettre cette histoire derrière eux. Arthur n’était pas sûr de pouvoir réellement, ce n’était pas le genre de choses qu’on pouvait oublier à jamais, qu’on pouvait juste mettre gentiment dans un coin de son esprit pour ne plus jamais y repenser ou y faire allusion, mais pour une fois, on ne pouvait pas reprocher à Arthur de ne pas essayer.

Arthur regarda Spencer d’un air impatient. Bah quoi, qu’est-ce qu’il attendait ? Première étape, ouvrir la bouche, c’était fait. Maintenant utiliser sa langue et ses lèvres pour former des mots, allez, il en était capable. Enfin, quand Spencer réussit enfin à enclencher l’étape deux, Arthur regretta aussitôt d’avoir souhaité qu’il l’ouvre. Il était sérieusement en train d’essayer de rejeter la culpabilité sur lui ? Il savait qu’il avait eu tort d’essayer de discuter avec Spencer, l’autre abruti n’était apparemment pas capable d’admettre qu’il avait eu tort. Ah, ça, Arthur pouvait comprendre, lui aussi il avait généralement du mal, mais là Spencer dépassait carrément les bornes, et si même Arthur était foutu de s’en apercevoir, le jeune sorcier était grave de ne pas s’en rendre compte. Enfin, le jeune homme se figea totalement quand Spencer reprit la parole. Il ne s’était pas attendu à ce que Spencer remette ça sur le tapis. Il croisa les bras sur sa poitrine et passa sa langue sur ses lèvres en signe d’agacement. Il avait intérêt à avoir une bonne raison pour lui rappeler cet épisode là, parce qu’il y avait une différence entre les deux états dans lesquels ils avaient tous les deux été. Spencer avait bu, Arthur était en manque total et il aurait donné n’importe quoi pour une dose, il y avait une différence et ça, Spencer devait le savoir quand même.

Il ferma les yeux et essaya de ne pas s’énerver quand Spencer se mit à le secouer comme un prunier. Il fut en tout cas forcé de décroiser les bras et les laissa retomber doucement le long de ses flancs. Il était obligé de s’en prendre à lui physiquement, il l’écoutait là, c’était pas la peine d’en rajouter. Il se dégagea de l’étreinte de Spencer en lui lançant un regard noir, il n’aimait pas spécialement qu’on le secoue comme ça, surtout sans raison. « Si t’aimes pas me voir comme ça, j’ai une idée si tu veux. Tu pourrais peut-être essayer de pas me tabasser à mort, pour commencer, hein, qu’est-ce que t’en penses ? Putain, mais c’est pas vrai ça. » Il soupira et regarda le jeune homme s’éloigner, il avait les poings serrés et semblait avoir besoin d’un objet à casser. Au moins il avait arrêté de prendre Arthur pour son punching ball personnel, il y avait du progrès, ah bravo, si Arthur n’avait pas été aussi agacé, il l’aurait même applaudi. Enfin, Spencer restait la seule personne au monde à réussir à énerver Arthur quand il était défoncé, c’était un exploit en soi.

Arthur secoua la tête, désespéré par l’attitude de Spencer. Et après il disait que c’était lui qui était grave, hein ? Il n’était pas celui en train de refuser de faire la moindre concession et à hurler pour qu’on lui apporte à boire. Arthur était en tout cas trop énervé contre Spencer pour lui ordonner de parler un peu mieux à sa copine, il n’était pas d’humeur à jouer les preux chevaliers, il ne l’était de toute façon jamais. « MAIS C’EST PAS VRAI DIS-MOI QUE TU TE FOUS DE MA GUEULE LA ! » Hurla-t-il littéralement en se prenant la tête à deux mains. Il regarda Spencer se laisser tomber contre le canapé et il ressentit une envie soudaine de lui coller un coup de chaussure dans la gueule. Malheureusement pour lui, Jessie choisit ce moment pour revenir dans le salon, une bouteille de whisky à peine entamée dans les mains. Elle lança un sourire à Arthur ainsi qu’un clin d’œil avant de tendre la bouteille à Spencer. « Désolée, j’ai eu un peu de mal à trouver. » Arthur aimait bien Jessie mais là il avait juste envie qu’elle dégage, il était en train d’essayer de régler ses comptes avec son colocataire et il n’avait véritablement pas envie qu’elle s’en mêle, ni même qu’elle leur serve de témoin. Il se tourna vers elle, une expression ferme et dure au visage. « Va attendre dans la chambre, s’il-te-plait. » Il avait ajouté la formule de politesse juste pour éviter qu’elle l’envoie chier, il savait qu’elle avait aussi bon caractère que lui, enfin heureusement pour eux, elle était aussi un peu plus conciliante de temps à autres. Elle grogna mais finit par s’exécuter, levant les yeux au ciel et claquant la porte derrière elle. Elle allait de toute façon essayer d’écouter leur conversation, et vu la tournure que celle-ci prenait, elle n’aurait probablement aucun mal à entendre à travers les cloisons.

Arthur se força à respirer, il n’en pouvait plus d’être constamment sur les nerfs à cause de Spencer. Il avait pourtant cru en lançant cette discussion que le jeune sorcier serait capable d’admettre que peut-être, peut-être, il avait eu tort de s’emporter, et par un grand miracle, qu’il devait des excuses à Arthur. Le jeune homme ne savait même pas pourquoi il avait osé espérer quoique ce soit de la part de Spencer, il devait être bien naïf. Enfin, il était d’avis que c’était la drogue qui avait parlé pour lui. Il s’approcha du canapé et prit la bouteille des mains de Spencer avant d’en prendre trois ou quatre gorgées d’affilée. Il abaissa finalement la bouteille et la rendit à Spencer, qu’il se mette minable si l’envie lui en prenait, ce n’était plus son problème. Le jeune homme était un cas encore plus désespéré que le sien, et Arthur n’était pas d’assez mauvaise foi pour ne pas se rendre compte de la puissance de son affirmation. « Est-ce que ça t’arracherait la gueule de t’excuser pour une fois dans ta vie ? Non sérieusement, je me demande, parce que je ne t’en ai pas demandé plus. T’es tellement fier que t’es pas capable de t’excuser alors que t’as failli me tuer Spencer. Je sais que j’ai abusé, mais tu crois vraiment qu’entre nous deux ce soir là, c’est moi qui ait le plus déconné ? Tu veux quoi, que je m’excuse en premier pour m’être amusé un peu avec toi ? Tu peux crever tiens. » Il dégagea d’un geste du bras tous les papiers qui trainaient sur la table basse en face du canapé, faisant quand même attention à ne pas foutre le cendrier plein par terre. Il s’assit là où il avait fait de la place et se pencha vers Spencer, baissant sa voix pour être sûr que Jessie ne l’entendrait pas. « Puisque tu le prends comme ça… Tu me connais pourtant ! » Commença-t-il en imitant Spencer. « Tu sais très bien que je peux pas résister à un coup pareil, alors au fond, c’est de ta faute, non ? Puisque te connaissant j’aurais du me méfier, t’aurais du faire pareil et te méfier de moi, ou mieux encore tiens. T’aurais du me pardonner, après tout tu me connais, non ! » Il savait qu’il racontait n’importe quoi, même lui n’y croyait pas, mais puisque Spencer n’était pas décidé à faire d’efforts, alors lui non plus n’en ferait pas, c’était aussi simple que ça.

Il posa ses coudes sur ses genoux et enfouit son visage dans ses mains. Il soupira longuement, il en avait marre, il n’en pouvait plus de Spencer, il lui sciait les nerfs à chaque fois qu’ils se croisaient. Il fut pris d’un rire nerveux en repensant à tout ce qu’ils venaient de se dire. « J’en peux plus Spence. » Depuis des années qu’ils se connaissaient, c’était la première fois qu’Arthur raccourcissait son nom. « Tu sais quoi ? En fait c’est peut-être mieux comme ça. Je voulais pas venir, tu voulais pas que je vienne, c’est parfait, on fera comme si j’avais jamais été là et on pourra tous les deux retourner à nos vies. » Ce n’était pas la première fois qu’Arthur se disait qu’ils seraient bien mieux l’un sans l’autre, c’était même une évidence, alors pourquoi était-il toujours aussi dur de se dire que cette fois-ci, ça pourrait être la bonne ? Que peut-être cette fois-ci, c’étaient vraiment des adieux ?

Arthur n’en pouvait plus, il savait qu’il avait eu tort d’arrêter de tenir tête à Spencer, il savait que ce n’était pas comme ça qu’il allait obtenir ce qu’il souhaitait, parce qu’avec le jeune sorcier, il ne fallait jamais rien concéder, jamais rien lâcher, ne jamais reculer même d’un centimètre sinon Spencer en profitait pour vous bouffer tout entier. Arthur était tout bonnement à bout de nerfs, il s’était battu pendant trop longtemps et il n’en pouvait plus de jouer à ce jeu malsain avec Spencer, à qui hurlerait le plus fort et à qui assènerait le coup le plus puissant, il n’en pouvait plus de se battre pour savoir qui serait le dernier encore debout. Il n’arrivait même pas à croire qu’il y ait un jour trouvé du plaisir, mais c’était probablement encore une fois la drogue et l’alcool qui parlaient. Tout lui paraissait compliqué, bien trop compliqué et il avait beau se prendre la tête à deux mains, la situation ne semblait pas vouloir s’arranger. Quand est-ce qu’il avait décidé que de se lancer dans ce genre de conneries avec Spencer était une bonne idée ? Probablement jamais, leur petit jeu était parti tout seul, parce qu’aucun des deux n’acceptait de baisser les yeux, n’acceptait de céder du terrain. Arthur ne pouvait plus continuer, c’était trop pour lui, la dernière soirée avait été trop pour lui et il était temps qu’il essaye de s’éloigner réellement de Spencer. Il ne se faisait pas d’illusions, il savait que l’autre connard allait lui manquer, il ne pouvait pas s’empêcher, c’était plus fort que lui, mais même si c’était dur pour lui de s’éloigner, c’était autrement plus douloureux de rester à ses côtés.

Quoi ? Qu’est-ce qu’il ne comprenait pas ? Arthur n’avait plus envie de faire des efforts, c’était trop tard. Il se contenta de relever les yeux vers Spencer quand celui-ci continua à parler. Il laissa échapper un soupir, se résignant à l’idée qu’il n’en obtiendrait jamais plus de la part du jeune homme. Au fond, il aurait du se réjouir, déjà Spencer regrettait, c’était mieux que rien, c’était plus que ce dont il aurait pu rêver avant de revenir ici, mais voilà, il avait quand même besoin d’un peu plus que ça. Il ne savait pas pourquoi il se montrait aussi difficile, mais il pensait que sa lassitude du moment n’y était pas pour rien. « Je sais… » Commença-t-il avant de se faire attirer vers l’avant. Il eut à peine le temps de réagir que Spencer avait posé ses lèvres sur les siennes. Il était désormais à moitié assis sur la table basse et à moitié à genoux par terre et ses mains étaient venues se poser sur les jambes de Spencer quand il était tombé en avant pour essayer de garder l’équilibre. Son premier réflexe fut de fermer les yeux. Il avait tellement l’habitude du goût des lèvres de Spencer et pourtant, il avait l’impression que c’était à chaque fois différent, peut-être même à chaque fois un peu meilleur. En tout cas le peu de neurones qui continuaient à fonctionner dans son petit cerveau se mirent en pause et il fut incapable de penser à quoi que ce soit avant que Spencer ne s’écarte finalement. Il rouvrit doucement les yeux, encore sous le choc. Qu’est-ce qui venait de se passer ? Il regarda Spencer se relever et tomba complètement à genoux par terre. Il passa sa langue sur ses lèvres – encore une mauvaise habitude qu’il allait falloir qu’il perde – pour gouter encore un peu plus longtemps aux lèvres de Spencer.

Il le suivit, les yeux grands ouverts, tandis que celui-ci allait se réfugier derrière le canapé. Il ne comprenait toujours pas ce qui venait de se passer, mais vu l’expression de Spencer, lui non plus. C’était déjà ça. En tout cas, le geste de Spencer valait encore plus que des excuses aux yeux d’Arthur, il avait abandonné l’idée que le jeune homme réussisse à lui sortir quoique ce soit qui pourrait l’intéresser, mais les gestes parlent souvent plus que les actions et Arthur appréciait réellement l’effort qu’avait fait Spencer. « D’accord… » Murmura-t-il d’un ton docile en relevant les yeux vers Spencer. Il ne savait même pas ce que ça voulait dire, d’accord quoi ? Spencer n’avait pas posé de question. Il essayait juste de se remettre de ses émotions, elles tourbillonnaient dans tout son corps et il avait l’impression d’avoir mis les pieds sur une autre planète. La façon dont l’atmosphère pouvait changer du tout au tout quand il était avec Spencer ne manquait jamais de l’étonner, même après tout ce temps. Il laissa échapper un léger soupir avant de passer à nouveau sa langue sur ses lèvres. Il avait l’impression qu’elles le brûlaient. Le fait que ce soit l’une des premières fois que Spencer cherche un contact physique et non pas Arthur n’y était probablement pas pour rien, et peut-être que c’était pour ça que le jeune homme avait quasiment pardonné Spencer de s’être emporté le soir du bal. Enfin, si Spencer n’était pas du genre à s’excuser oralement, Arthur n’était pas du genre à faire des discours émouvants non plus pour expliquer qu’il pardonnait. Il préféra donc garder sa bouche fermée pour l’instant, encore un peu trop sous le choc.

Enfin, comme à chaque fois que Spencer s’approchait d’un peu trop près de lui – et que ce n’était pas pour lui défoncer la gueule – Arthur était retombé dans le piège. C’était fou comme un seul contact avait le don de l’électriser et il essaya de ne pas penser trop au fait que Spencer soit la seule personne qu’il ait jamais rencontrée à avoir ce pouvoir sur lui. Il ne pouvait plus détacher ses yeux de Spencer, la rapidité avec laquelle il était passé de la colère, au dépit pour ensuite arriver au désir était impressionnante et heureusement qu’Arthur était trop défoncé pour avoir envie d’y réfléchir. Il n’avait qu’une envie c’était de se lever pour aller forcer Spencer à l’embrasser plus longtemps, plus passionnément que ça, l’idée seule réussissait à lui donner des frissons. Seulement voilà, Arthur avait beau être défoncé, légèrement bourré et avoir surtout une envie insatiable de sauter sur Spencer, il y avait toujours cette petite voix au fond de son esprit qui l’empêchait de s’exécuter. Cette petite voix qui s’appelait la fierté et qui lui rappelait gentiment que Spencer n’avait fait que l’embrasser pendant quelques secondes et qu’il ne méritait pas qu’Arthur se rabaisse en lui montrant qu’il avait réussi son coup. Il n’y avait en tout cas aucune mention de sa petite-amie dans la pièce d’à côté de la part de sa conscience. Il avait déjà fait largement pire de toute façon, et s’il aimait bien Jessie, Spencer… C’était quelque chose d’autre, il n’avait pas envie de mettre le doigt dessus mais il n’était pas d’assez mauvaise foi pour ne pas se rendre que s’il avait du mettre l’un des deux dans son lit, il n’aurait pas hésité une seule seconde avant de choisir Spencer.

Ça ne changeait cependant rien au fait qu’il soit trop fier pour mettre ses désirs à exécution. Il baissa les yeux et se releva péniblement. Ses jambes tremblaient encore mais il préférait mettre cette réaction sur le compte de l’alcool et de la drogue plutôt que sur autre chose. « T’es vraiment pas croyable. » Soupira-t-il en faisant semblant d’être agacé. Il fallait bien qu’il ne soit pas satisfait, pour la forme. S’il montrait à Spencer qu’il avait apprécié, pire encore, que ça l’avait excité, il lui laissait toutes les clés en main et ça, malgré tout ce qu’ils venaient de se dire, Arthur n’y tenait pas. Il fallait croire qu’ils avançaient toujours pour finalement mieux reculer. Il attrapa la bouteille de whisky et en but une nouvelle gorgée avant de la reposer derrière lui sur la table basse. Il avait envie d’être énervé envers Spencer, parce qu’il ne supportait pas que le jeune homme ait cet effet là sur lui. Alors quoi, il l’embrassait et Arthur ne pouvait plus lui résister ? Il ne supportait pas que ce soit aussi facile pour Spencer. Une personne normale aurait simplement admis n’avoir aucun contrôle sur la situation et n’aurait pas cherché à blâmer l’autre, après tout, Spencer n’avait rien fait de mal en soi, même Arthur savait qu’il n’avait pas essayé de jouer avec lui. Mais il était frustré, parce qu’il avait envie de se jeter sur Spencer et qu’il s’y refusait. Alors il était partagé entre l’agacement et le désir que Spencer savait toujours aussi facilement faire naitre en lui. Il fallait croire qu’il avait un don. Puisqu’il ne pouvait rien faire pour calmer ses envies pour l’instant, il allait essayer de régler son premier problème.

« Tu essayes de me tuer et deux semaines plus tard tu m’embrasses. » Lâcha-t-il doucement, encore un minimum conscient de la présence de Jessie dans la pièce d’à côté. Il ne tenait pas à ce qu’elle les interrompe, pas maintenant, c’était juste Spencer et lui. Il ne lâchait pas le jeune homme des yeux tandis qu’il se rapprochait de lui. Il n’avait en tout cas rien dit d’un ton énervé, il n’était pas en train d’essayer de le faire sortir de ses gonds. En fait, il ne savait même pas ce qu’il faisait, il laissait son cerveau le guider et vu l’état dans lequel il était ce n’était probablement pas une bonne idée. Malheureusement pour lui, il n’en avait pas d’autres. « Excuse-moi si j’ai un peu de mal à te suivre. » Il haussa les sourcils, se rapprochant de plus en plus. Il laissa échapper un léger rire avant de venir se poster devant Spencer. Il le repoussa doucement jusqu’à ce que ce dernier soit dos au mur, au sens propre comme au sens figuré d’ailleurs. « Tu pourrais peut-être m’expliquer à quoi tu joues, non ? » Arthur n’en avait strictement rien à foutre, il n’avait pas envie d’obtenir des explications de la part de Spencer, ce n’était pas ce qu’il était venu chercher et il le savait très bien. Seulement, il était trop fier pour expliquer sa réelle motivation. Il releva les yeux vers le jeune homme et glissa l’une de ses jambes entre les siennes. « Si c’était ta façon à toi de t’excuser, tu aurais pu faire l’effort de le faire correctement. » Son visage était impassible mais il savait que ses yeux pouvaient facilement le trahir, malheureusement pour lui, ce n’était pas vraiment quelque chose qu’il pouvait contrôler. Il sentit sa gorge de serrer malgré lui en prenant conscience du peu de distance entre Spencer et lui.

Lui qui s’était plaint un peu plus tôt du jeu malsain qu’il jouait avec Spencer, il était déjà de retour dans la partie, et il n’avait fallu qu’une simple marque d’intérêt de la part du sorcier pour le faire aussitôt replonger. Cette addiction qu’il avait pour Spencer, il n’était pas prêt de la faire disparaître, quoiqu’il en dise.

Arthur s’était tellement attendu à ce que Spencer l’envoie tout simplement chier, qu’il fut bien surpris quand le jeune sorcier ne le repoussa même pas. Il soutint son regard quand Spencer le posa sur lui et n’opposa absolument aucune résistance quand il prit son visage entre ses mains pour venir forcer ses lèvres sur les siennes. Il ne lui fallut en tout cas pas énormément de temps pour réagir, il ne s’était pas attendu à ce que ça marche mais comme cette idée avait obsédé ses pensées depuis quelques minutes déjà, il s’était un peu préparé mentalement. Il laissa échapper un léger murmure de satisfaction en voyant que Spencer n’y était pas allé gentiment cette fois-ci, c’était ce qu’il aimait le plus, quand il devait quasiment se battre avec Spencer, comme si même dans ce genre de moments là ils avaient tous les deux besoin d’affirmer leur domination. Il ne pouvait pas se souvenir d’une seule fois où leurs baisers avaient été autre chose que passionnés, mais c’était comme ça qu’il les aimait. Il posa l’une de ses mains sur la nuque de Spencer pour essayer de rapprocher encore un peu plus son visage. Il avait totalement oublié tout ce qui s’était passé avant qu’ils en arrivent là, et il avait encore plus oublié la présence de Jessie dans l’autre pièce, de toute façon, ça n’avait aucune importance. Il eut à peine le temps de respirer que Spencer s’attaquait de nouveau à ses lèvres avec férocité. Ce n’était pas pour lui déplaire, il n’avait pas le temps de réfléchir ni de regretter comme ça, c’était comme à chaque fois, il fallait qu’ils profitent tous les deux de l’instant présent avant qu’il ne leur échappe, avant qu’ils ne réalisent qu’ils s’étaient de nouveau laissé aller l’un avec l’autre.

Arthur n’était plus le moins du monde en état de réfléchir, après la drogue et l’alcool, c’était finalement la sensation d’avoir Spencer à lui qui avait terminé de l’achever et qui empêchaient ses neurones de fonctionner. Il se rapprocha encore un peu plus du jeune homme, comme s’il essayait de l’écraser contre le mur, mais il avait besoin d’encore plus de contact, s’il avait pu se mouler dans les bras de Spencer il l’aurait fait. Il entendit une voix au loin et mit plusieurs secondes avant de comprendre qu’il ne pouvait pas s’agir de celle de Spencer. Ce ne fut que quand le jeune homme s’écarta doucement qu’Arthur comprit véritablement ce qui s’était passé. Jessie. Ça devait venir du prénom, c’était pas possible autrement. Il baissa les yeux quelques secondes, il ne pouvait pas s’empêcher d’hésiter. Il savait qu’il ne se montrait pas raisonnable à ignorer la jeune femme, mais d’un autre côté, raisonnable, il ne l’avait jamais été. Et encore moins quand il avait Spencer collé contre lui comme ça et qu’il n’avait qu’une seule envie, le laisser le toucher comme lui seul savait le faire. Il laissa échapper un soupir en entendant Jessie insister, il savait qu’elle n’avait rien fait de mal mais il ne pouvait pas s’empêcher de se sentir énervé, elle pouvait pas leur foutre la paix non ? Elle aurait du comprendre qu’ils étaient occupés et qu’ils avaient autre chose à foutre que de lui répondre. Bien sûr, c’était sa mauvaise foi qui parlait, mais il était trop frustré de s’être fait interrompre pour faire preuve d’autre chose que de mauvaise foi.

Il releva les yeux vers Spencer quand celui-ci intervint. Lui-même fut incapable de retenir un léger sourire amusé en entendant sa réflexion. Non, il n’était pas tellement vexé, il savait que c’était un peu ce qu’elle était et il n’avait jamais été très fort pour traiter les autres êtres humains dignement. S’il avait été moins défoncé, il aurait pu en vouloir à Spencer pour cette remarque, mais il avait tellement plus envie de rester avec lui qu’avec elle que sur le coup il ne pensa même pas à faire semblant d’être vexé. En ce moment elle ne représentait rien de plus qu’un animal de compagnie pour lui, un cabot qui réclamait sa promenade quotidienne alors que lui était occupé. Il savait que c’était cruel de penser ça, mais il n’était pas assez sobre pour se montrer clément. Tout ce qu’il savait, c’était qu’il voulait Spencer et que Jessie était en train de se mettre sur son passage. Une chance que le jeune homme n’ait pas saisi cette occasion pour filer, il avait une fâcheuse tendance à lui glisser entre les doigts dans ce genre de moment et Arthur était soulagé de voir qu’il ne l’avait pas repoussé. Enfin s’il avait bien compris le message, Spencer avait envie d’aller plus loin autant que lui, ou en tout cas, c’était ce qu’il avait cru comprendre depuis qu’ils étaient collés l’un à l’autre et qu’il pouvait sentir quasiment chaque centimètre carré du corps de Spencer. « Tu pourrais la fermer, juste deux minutes… » Souffla-t-il avant de reprendre rapidement possession de ses lèvres. Il savait qu’il faisait une connerie, mais il avait l’esprit trop embrumé pour pouvoir réfléchir correctement et il était trop submergé par son désir pour avoir envie de répondre à Jessie. Il savait que ce n’était pas malin de l’ignorer, mais il n’était pas en train d’essayer d’être malin, il répondait juste à ses envies les plus primaires.

Il ne pensa même pas à changer de pièce, ils auraient pu aller s’enfermer dans la chambre de Spencer après tout, mais qu’est-ce que ça aurait changé de toute façon ? Jessie aurait encore moins apprécié. Au lieu de ça, Arthur avait carrément passé l’un de ses bras derrière le cou de Spencer, histoire de forcer encore un peu plus le contact de ses lèvres. Il rapprocha son bassin de celui de Spencer d’un mouvement brusque qui envoya un frisson le long de sa colonne vertébrale, et qui lui donna surtout envie d’en avoir plus, toujours plus. Il ne pouvait rien faire avec Spencer sans avoir envie d’aller plus loin, au moindre contact il savait qu’il était perdu. Spencer lui avait souvent reproché ses addictions mais la pire de toutes était clairement celle qu’il avait au jeune homme, et celle-là, bizarrement, Spencer ne semblait jamais la lui avoir reprochée. Il commença à déboutonner rapidement le pantalon du jeune homme à l’aide de sa main libre, il savait qu’il allait le regretter, qu’il aurait mieux fait de ne pas aller trop loin, mais c’était plus fort que lui. Maintenant qu’ils avaient commencé, Arthur était incapable de s’arrêter. Il laissa ses doigts glisser sous le tissu du pantalon de Spencer, ne prenant même pas la peine de le lui enlever, il l’avait déjà vu dans son plus simple appareil plus d’une fois, non, il n’était pas en train d’essayer d’en profiter un maximum, il savait qu’il n’aurait pas le temps, il ne faisait que répondre à un appel primaire, donner, recevoir, et profiter un maximum de la réaction de Spencer quand celui-ci commença à réagir sous ses caresses. Il abandonna les lèvres de Spencer quelques secondes, le temps de respirer, et laissa échapper un murmure satisfait. Il posa son front contre celui du jeune homme, les yeux baissés et le souffle court.

« Je vois que vous avez fait la paix. » Déclara finalement Jessie d’un ton malicieux. Arthur ne l’avait même pas entendu sortir, mais d’un autre côté, il n’avait pas tellement été en état de se concentrer sur les bruits extérieurs. Il continua à reprendre sa respiration, son front collé à celui de Spencer, ne prenant même pas la peine de se tourner vers Jessie. Qu’est-ce qu’il aurait bien pu dire de toute façon, elle n’était pas aveugle et elle était surtout loin d’être conne. Au moins, ça n’avait pas l’air de la déranger des masses. Finalement il se tourna vers la jeune femme, il pouvait sentir la teinte rose que ses joues avaient prises depuis que Spencer l’avait embrassé et ne fut pas spécialement surpris qu’elle ne s’aggrave pas sous le regard de la jeune femme. Il n’avait même pas honte, de toute façon, que ça lui plaise ou non c’était comme ça et Arthur partait du principe que ça ne la regardait pas. Gardant sa main autour de la nuque de Spencer, il récupéra cependant l’autre en voyant Jessie arriver. Il ne savait pas ce qu’elle allait faire mais il n’était pas sûr d’apprécier. Il était en tout cas incapable de prononcer le moindre mot, en plus de ça, il n’en avait aucune envie.

Jessie se plaça derrière Arthur, passa un bras autour de son torse et posa sa tête sur son épaule, un petit sourire amusé aux lèvres. « Par contre si ça te dérange pas, je préfèrerais le garder pour moi. » Lâcha-t-elle avant de venir déposer un baiser dans son cou et de le forcer à reculer avec elle. Il se laissa faire, de toute façon, ce n’était pas comme s’il avait le choix. Il aurait pu l’envoyer chier et finir ce qu’il avait commencé avec Spencer, mais le connaissant, maintenant il s’était passé trop de temps, il avait eu le temps de réfléchir à ce qu’il faisait et il aurait probablement interdit à Arthur de l’approcher à nouveau. Jessie le lâcha finalement et déposa un rapide baiser sur ses lèvres, son sourire toujours amusé au visage. Arthur se laissa encore faire, ce n’était pas comme s’il était en état de réagir non plus. Il détourna le regard pour poser ses yeux sur Spencer, il détestait avoir été interrompu alors qu’ils commençaient tout juste à s’amuser, tout ce qu’il avait gagné c’était qu’il avait réussi à bien se frustrer. Et vu l’état dans lequel était Spencer, c’était pareil de l’autre côté. Il s’écarta doucement de Jessie et attrapa la bouteille. Il ne prit pas la peine d’en boire une gorgée et la donna directement à Spencer, lui, il avait déjà assez bu, mais connaissant Spencer, il avait probablement envie d’un verre vu la situation.

« Alors, qu’est-ce que j’ai raté ? » Arthur laissa échapper un rire sans joie avant d’aller s’affaler, à moitié allongé, sur le canapé. Comme si elle n’avait pas déjà tout écouté à travers la cloison, elle avait du rater le plus intéressant, certes, mais selon Arthur elle en avait déjà largement assez entendu. « T’as rien raté du tout. » Réussit-il finalement à répliquer d’une voix encore trop rauque pour être naturelle. Il se frotta le visage, essayant de se calmer et d’oublier toutes les idées qu’il avait en tête, il n’allait pas pouvoir les réaliser, pas maintenant, alors autant essayer de se changer les idées. Jessie débarqua alors devant lui et s’agenouilla devant le canapé. « J’avais pourtant l’impression que l’ambiance dans la pièce avait changée. » Répondit-elle d’un ton malicieux en haussant un sourcil. Elle jeta un coup d’œil à Spencer, comme si elle avait voulu s’assurer qu’il la voyait bien faire, avant de se pencher pour venir embrasser longuement Arthur. Le jeune homme appréciait généralement les baisers de Jessie, mais après ceux de Spencer, ils lui paraissaient fades. Il n’avait plus qu’une idée en tête, se casser d’ici et vite.

Arthur avait été con de ne pas partir tout de suite, il aurait du prendre Jessie par la main et la trainer de force dehors. C’était sûrement ses nerfs qui avaient parlé quand il avait décidé de s’affaler dans le canapé plutôt, il était légèrement frustré de la tournure qu’avaient pris les évènements et il n’était d’humeur à rien faire, surtout pas à se retrouver tout seul avec Jessie. Il lui fallait juste cinq minutes pour essayer de se remettre, et la voir s’engueuler avec Spencer n’arrangeait rien. Ça faisait cet effet là de voir les gens se disputer pour un rien ? C’était très frustrant, il avait envie d’en prendre un pour taper sur l’autre. Malheureusement il n’y avait que Jessie qu’il était encore capable de soulever, et puis il venait à peine de recommencer à supporter d’être dans la même pièce que Spencer, il n’avait pas envie de foutre déjà ça en l’air en l’énervant à nouveau. Se massant les tempes, il lâcha un long soupir tout en essayant de trouver la motivation nécessaire pour décamper. Il était trop défoncé pour transplaner alors ils allaient devoir marcher et prendre le métro, super. Arthur lança un regard insistant à Jessie pour l’inviter à se taire pour une fois, il n’était pas sûr d’apprécier la façon dont elle avait l’air d’apprécier particulièrement la situation, il s’attendait à ce qu’elle sorte le popcorn d’un instant à l’autre avant de relancer l’un de leur sujet tabou et de les regarder se battre. Il fallait avouer qu’Arthur lui avait involontairement dévoilé assez de squelettes dans leurs placards respectifs tout à l’heure pour qu’elle ait de quoi aiguiller la discussion sur une pente savonneuse pour les dix prochaines années au moins.

Arthur laissa échapper un petit rire quand Spencer lui répondit qu’elle pouvait oublier tout de suite pour la bouteille. « Tu t’attaques à plus fort que toi là ma pauvre. » Lança-t-il doucement en direction de Jessie avant de commencer à lui caresser inconsciemment les cheveux. Elle avait beau l’énerver, elle avait tout de même quelque chose en elle qui l’attirait, peut-être qu’elle lui ressemblait juste trop pour qu’il ne pense pas avoir un lien un peu spécial avec elle. En plus de ça, ça le changeait de se trouver un peu en présence d’une femme, il les avait un peu délaissé depuis quelques mois et ça ne lui faisait pas de mal de se sentir à nouveau le plus fort dans une relation, c’était… Reposant. Malgré son caractère de merde, elle était reposante, oui. Il se mordilla en revanche la lèvre d’un air gêné quand Jessie remit l’incident du bal sur le tapis, il s’en voulait de le lui avoir raconté. Il jeta un coup d’œil à Spencer pour vérifier qu’il ne s’apprêtait pas à lui en coller une. Mais il n’aimait pas que la jeune femme s’en serve pour titiller Spencer, il n’y avait que lui qui avait ce droit, ce qui s’était passé entre Spencer et lui ne regardait qu’eux, et elle n’avait pas à s’en mêler. Enfin, il laissa échapper un soupir quand le jeune sorcier reprit la parole. Ça allait mal finir, et il n’avait plus la force de se battre pour ce soir. C’était lui qui pour une fois abandonnait la partie, et il n’en revenait pas de devoir jouer les arbitres. C’était le monde à l’envers là.

Arthur ferma les yeux et se prit la tête à deux mains en voyant Spencer attraper le bras de Jessie. Il savait qu’il aurait du dire au jeune homme d’arrêter, mais il savait aussi que physiquement il n’avait aucune chance face à Spencer. Il n’était pas prêt de la ramener à nouveau ici, d’ailleurs il n’était même pas sûr de revenir un jour ici, il ne savait plus trop où il en était avec Spencer, ils n’avaient en fait rien réglé du tout. Arthur ne lui en voulait plus autant pour la soirée du bal, mais ce n’était pas comme s’il avait à revenir vivre ici non plus, il pouvait toujours squatter chez Jessie. Une voix au fond de sa tête continuait à lui répéter qu’il ferait mieux de se tenir loin de Spencer pendant un moment, surtout vu comment il se comportait avec Jessie. Il fallait croire qu’il ne changerait jamais. Finalement, quand Spencer lui ordonna lui aussi de se casser il se releva, les sourcils froncés et le visage dur. Il suivit Jessie ainsi que Spencer sur le palier de la porte et il lança un regard noir à Spencer après que celui-ci ait lâché Jessie. « Tu te fous de ma gueule là, j’hallucine. » Il n’avait même pas dit ça d’un ton méchant, juste sec. Il ne savait pas pourquoi il continuait à espérer que le comportement de Spencer puisse s’améliorer, il l’avait souvent cherché c’était vrai, et Jessie n’était pas non plus toute blanche dans l’histoire, elle aurait du savoir qu’essayer de chiper une bouteille d’alcool à un ancien – et le terme était à mettre entre guillemets – poivrot n’était pas l’idée du siècle. Mais ça n’excusait en rien le comportement de Spencer envers Jessie, s’il se mettait à frapper les femmes, il n’était vraiment plus récupérable. « Tu t’arrêtes jamais, hein. » Il avait montré du remord pendant environ dix minutes et dès qu’Arthur lui avait fait comprendre qu’il lui pardonnait, il repartait de plus belle. La prochaine fois, il ne ferait pas la même erreur, il en avait marre que Spencer se serve de ses poings. La prochaine fois ses excuses il pourrait se les mettre au cul tiens.

« On a compris, on se casse. » Il lança un dernier regard glacial à Spencer avant de secouer la tête d’un air désespéré. Il caressa doucement le bras de Jessie à l’endroit où Spencer l’avait serré et déposa un baiser au sommet de son crâne avant de commencer à descendre prudemment les marches vers le bas de l’immeuble. Jessie resta sur le palier encore quelques secondes, le temps de noter son numéro sur un bout de papier et de le glisser doucement dans la paume ouverte de Spencer. « Au cas où il revienne et tombe dans les vapes ici. » Elle lui lança un nouveau clin d’œil avant de suivre Arthur. Le jeune homme ne prit pas la peine de dire au revoir à Spencer, ils se reverraient probablement bien assez tôt, avec la chance qu’il avait. Enfin, il ne chercha pas à lui dire s’il reviendrait ici ou pas, lui-même n’en savait rien.

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