Les prémices d'un club très select | Julia & Daria

Les prémices d'un club très select

@Julia P. Holt

Malgré la pluie qui tombait en épais rideau sur le pays tout entier, Daria n'avait pas envie de rester chez elle aujourd'hui. Armée de son plus grand et plus beau parapluie au motif de tournesol jaune vif, elle s'était rendue dans Londres afin de faire quelques emplettes. Difficile de voir loin devant elle tant l'eau tombait fort, mais c'était un temps qui ne dérangeait pas l'artiste. Elle aimait les temps pluvieux et gris presque autant que les journées ensoleillées. C'était certainement pour ça que l'automne restait sa saison préférée. Dommage, c'était actuellement le printemps. Enfin c'était mieux que rien. Une fois ses achats de fournitures artistiques terminés, c'est tout naturellement que ses grandes bottes étanches la menèrent jusqu'au Chaudron Baveur. L'idée de boire un bon chocolat chaud avec de la crème fouettée et des guimauves faisait gargouiller son ventre. Cela dit, en étant tout à fait honnête avec elle-même, ce n'était pas la seule raison des sensations de papillons en elle. Elle espérait un peu secrètement retomber sur le beau rouquin qu'elle y avait rencontré la dernière fois : Charlie Weasley. Non pas que ce soit vraiment possible car bien que sa famille soit originaire du coin, elle savait que lui vivait en Roumanie et ne venait dans les environs que très rarement.

Comme elle s'y attendait un peu, la déception l'accueillit en poussant la lourde porte de l'auberge. Pas de jolie tête rousse en vue. Le fauteuil dans lequel il s'était assit lors de leur première rencontre, face à l'âtre de la cheminée, était malheureusement vide. Une fois débarrassée de son parapluie et de son long manteau trempé, Daria alla se lover dans ce fauteuil, les jambes remontées contre son buste alors qu'elle avait abandonné ses bottes sur le sol. Ses épaisses chaussettes en laine parfaitement sèches et moelleuses rencontrèrent le cuir de l'assise du fauteuil comme un vieil ami. La sorcière venait si souvent ici qu'elle en connaissait presque tous les habitués et tout le personnel. Personne ne semblait s'offusquer lorsqu'elle prenait ainsi ses aises. Ou en tout cas, personne n'avait osé lui faire la remarque.

Du coin de l'œil, presque machinalement et sans le faire vraiment exprès, Daria surveillait la porte d'entrée. À chaque fois que quelqu'un pénétrait dans le Chaudron Baveur, elle relevait la tête en espérant voir l'imposante carrure du dresseur de dragons apparaitre dans la lumière chaleureuse du bar. Mais elle devait bien accepter l'idée qu'il n'allait pas venir aujourd'hui. Il devait se trouver à des lieues d'ici, sous un agréable soleil roumain, en compagnie de ses créatures à écailles dont il appréciait tant l'existence. Un peu déçue et perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas tout de suite que Julia, la gentille serveuse de l'auberge avec laquelle elle s'entendait bien, s'était approchée. Sûrement pour lui demander si elle voulait boire quelque chose. Elle sursauta en la remarquant si proche d'elle.

« Oh ! Oh pardon Julia, je ne t'ai pas entendue arriver... Comment vas-tu ? Pas trop dur de travailler ici par temps pluvieux ? » Demanda-t-elle avec un sourire amical.

Elle aimait bien cette fille. Daria la trouvait amusante et naturelle, pleine de joie de vivre et franche du collier. Rien n'exaspérait davantage la sorcière que les gens qui n'étaient pas honnêtes qui ne disaient pas clairement ce qu'ils pensaient. Elle savait qu'elle ne courait aucun risque de ce côté-là en fréquentant Julia.

les prémices d'un club très sélect

@daria frost

Un bouquin à la main, Julia est accoudée au comptoir. Si Tom lui dit habituellement que ce genre d'attitude n'est pas professionnelle et qu'elle ferait mieux de se rendre utile autrement, la journée est si calme que cette fois-ci aucun reproche ne vient sonner aux oreilles de la jeune serveuse. Les trombes d'eau qui tombent sur Londres y sont certainement pour quelque chose - elle serait la première à admettre qu'elle aimerait mieux être chez elle enroulée dans un plaid à regarder la pluie tomber en jouant avec Robert. 

Avec un temps pareil, ça ne se bouscule pas à la porte du Chaudron et Julia qui se plaint à qui veut l'entendre des jours où elle doit courir après tout le monde se surprend à regretter l'ambiance effrénée des soirs de matchs (de quidditch, évidemment). 

La porte s'ouvre ; elle lève le nez de sa page pour voir Daria s'installer dans un fauteuil en face de la cheminée. L'artiste a l'air perdue dans ses pensées et confortablement installée ; à vrai dire, c'est une place de roi, celle qu'elle réserve à ses propres amis lorsqu'elle le peut. 

Pas qu'elle soit ravie de la déranger, mais Julia ne finit que sa page - et pas son chapitre - avant d'aller prendre sa commande - note au passage les coups d'œil à l'entrée qui sont lancés avec la régularité d'une horloge fraîchement remontée. 

- Hey !

Daria vient assez souvent pour qu'elle ne s'en fasse pas niveau familiarités et qu'elle puisse même profiter de sa compagnie dans le genre de journée où tout se traîne à une lenteur exaspérante - comme aujourd'hui. 

- Désolée je voulais pas te faire peur ! 

L'artiste donne l'impression d'émerger d'une profonde torpeur - probablement rêverie, la connaissant.

- Oh ça va, c'est tranquille quoi. Le livre qu'elle lisait trône encore sur le comptoir. Oups.

- Tu arrives de dehors ? On a des plaids si t'as besoin, avec la pluie là tu vas choper la mort. Un sourire, et pas que pour le côté commercial. Daria est parfois dans son monde. Tu veux quelque chose pour te réchauffer ? Un chocolat chaud, extra-guimauves à tout hasard ? Lâcherait presque un clin d'oeil pour accompagner la suggestion - avec les compliments du chef.

- Tu attends quelqu'un ? 

Attend pas la permission pour demander, Julia. Ca la regarde absolument pas et Daria vient autant seule qu'accompagnée, puis finalement, ce n'est que par professionnalisme et une pointe de curiosité personnelle qu'elle demande ; l'avait qu'à pas regarder la porte comme si elle allait sauter à tout moment avec tant d'insistance.

Les prémices d'un club très select

@Julia P. Holt

Une fois la surprise passée, Daria ressentit un bonheur tout à fait simple réchauffer son cœur. Bien que les talents sociaux ne soient pas son point fort, l'artiste était toujours heureuse de voir des personnes qui lui étaient chères et dont elle appréciait la compagnie. Julia faisait indéniablement partie de ces dites-personnes. Un sourire rassurant étira ses lèvres et elle secoua la tête légèrement, l'air de dire qu'elle n'avait pas à s'excuser de l'avoir surprise. Si quelqu'un était à blâmer, c'était bien son propre esprit qui n'avait de cesse de gambader dans des pensées désordonnées et des rêveries constantes. Il ne fallait donc pas s'attarder sur ses sursauts qui étaient - bien contre son gré - une habitude quotidienne.

« Tu es adorable. Tu as raison, un chocolat chaud me ferait le plus grand bien. Ne t'ennuies pas avec les plaids, mon parapluie fétiche m'a tenue bien au sec. » Répondit-elle en désignant le parapluie accroché dans l'entrée.

Clairement reconnaissable avec son motif à tournesols et sa poignée jaune, il se détachait des autres de manière évidente. L'accessoire était plus grand que la plupart des parapluies. Il aurait pu servir de petit parasol en été. Nombreux étaient les regards qui se tournaient vers elle lorsque Daria parcourait les rues londoniennes et le chemin de traverse, abritée sous un tel objet. L'anglais moyen préférait sûrement les couleurs neutres, sombres et distinguées. Mais pas elle. Et dans le fond, si plus jeune elle avait très mal vécu d'être pointée du doigt pour ses extravagances, elle trouvait désormais une forme de satisfaction à ne pas être comme tout le monde. L'art de s'en foutre venait avec l'âge, tout comme la sagesse.

La question suivante de Julia eu le don cependant de la faire rougir un peu. S'en foutre, oui... mais pas de tout. Non, techniquement elle n'attendait personne, et elle n'était pas certaine de pouvoir expliquer la situation à la serveuse sans s'emmêler les pinceaux. Néanmoins, puisqu'elle estimait beaucoup son amitié, elle décida d'essayer. Garder le silence en étant prise sur le fait ne pouvait sembler qu'impoli.

« Oui. Enfin non, pas vraiment. Disons que j'espérais tomber sur quelqu'un mais que les probabilités qu'il soit là étaient minces. Je suis donc un peu déçue, mais... C'est la vie. »